Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C...D...ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 ainsi que des pénalités dont ces droits ont été assortis.
Par un jugement n° 1301494 du 8 avril 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 mai 2015, M. et MmeD..., représentés par MeA..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer cette décharge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est affecté d'erreurs et est insuffisamment motivé ;
- les premiers juges ont omis de répondre à des moyens ;
- les droits et pénalités litigieux ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que l'administration fiscale n'a pas contrôlé les sociétés en participation, que la notification d'une seconde proposition de rectification en remplacement de celle du
22 décembre 2011 les a privés de garanties telles que les droits de la défense, et que l'administration fiscale a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- la proposition de rectification du 8 juin 2012 leur a été notifiée alors que le droit de reprise était expiré ;
- le contrat de location conclu entre la SNC Nordy Gest et Mme E...ainsi que celui conclu avec Mme F...revêtent un caractère civil et non commercial ;
- c'est en conséquence à tort que l'administration fiscale a remis en cause l'éligibilité des investissements réalisés par les SEP " DOM SEP 386 " et " DOM SEP 387 ".
Par un mémoire, enregistré le 15 janvier 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre ;
- et les conclusions de Mme Guidi.
1. Considérant que M. et Mme C...D..., associés à hauteur de 12,78 % du capital de la société en participation (SEP) " DOM SEP 386 " et de 17,39 % du capital de la SEP " DOM SEP 387 ", sociétés dont l'objet est la réalisation d'investissements ultramarins éligibles au régime de faveur prévu à l'article 199 undecies B du code général des impôts, ont bénéficié, au titre de l'année 2008, de réductions d'impôt de 34 997 euros à raison d'investissements consistant en l'acquisition par la SEP " DOM SEP 386 " de deux plantations d'ananas et par la SEP " DOM SEP 387 " d'une plantation d'ananas ; qu'à la suite d'un contrôle de leur dossier fiscal, l'administration a remis en cause ces réductions d'impôt ; que M. et Mme D...en ont été informés par une proposition de rectification du
22 décembre 2011 puis par une seconde proposition de rectification du 8 juin 2012 venant se substituer à celle du 22 décembre 2011 ; que M. et Mme D...ont ainsi été assujettis à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2008 assortie d'intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue par l'article 1758 A du code général des impôts ; que M. et Mme D...relèvent appel du jugement du 8 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces droits et pénalités ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient omis de répondre à des moyens n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
3. Considérant, en second lieu, que les erreurs commises, au point 7 du jugement attaqué, sur la nature des plantations louées par la société en nom collectif (SNC) Nordy Gest, gérante des deux SEP " DOM SEP 386 " et " DOM SEP 387 ", les noms de ces deux SEP ainsi que le nom des requérants ne constituent pas des irrégularités substantielles de nature à entraîner l'annulation du jugement attaqué, par ailleurs suffisamment motivé et qui analyse les conclusions des parties, dès lors que les visas et les autres considérants du jugement font état du nom exact de ces sociétés et des requérants ainsi que de la véritable nature des plantations ;
Sur les conclusions aux fins de décharge :
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales : " En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l'administration des impôts et la société elle-même (...) " ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le supplément d'impôt en litige résulte de la remise en cause, dans le cadre d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal des contribuables, du bénéfice de la réduction d'impôt dont se sont prévalus M. et
Mme D...au titre des investissements réalisés sur le fondement de l'article 199 undecies B du code général des impôts par les SEP " DOM SEP 386 " et " DOM SEP 387 " et non du rehaussement des résultats de ces sociétés ; que l'administration n'était ainsi pas tenue de diligenter préalablement un contrôle de ces sociétés avant d'adresser une proposition de rectification à leurs associés ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales doit dès lors être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance qu'une seconde proposition de rectification datée du 8 juin 2012 a été notifiée à M. et Mme D...en remplacement de la précédente proposition de rectification du 22 décembre 2011 ne les a pas privés du droit de se défendre comme ils l'ont d'ailleurs fait en présentant notamment des observations ;
7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ;
8. Considérant que l'administration ne peut, en principe fonder le redressement des bases d'imposition d'un contribuable sur des renseignements ou documents qu'elle a obtenus de tiers sans l'avoir informé, avant la mise en recouvrement, de l'origine et de la teneur de ces renseignements ; que cette obligation d'information ne se limite pas aux renseignements et documents obtenus de tiers par l'exercice du droit de communication ; que si cette obligation ne s'étend pas aux éléments nécessairement détenus par les différents services de l'administration fiscale en application de dispositions législatives ou réglementaires, tel n'est pas le cas pour les informations fournies à titre déclaratif à l'administration par des contribuables tiers, dont elle tire les conséquences pour reconstituer la situation du contribuable vérifié ; qu'il suit de là que l'administration est tenue d'informer les contribuables de l'origine et de la teneur des renseignements sur lesquels elle se fonde pour établir un redressement qui sont issus des déclarations de revenus souscrites auprès d'elle par des tiers en application des articles 170 et suivants du code général des impôts ainsi que des pièces justificatives dont ces déclarations doivent, le cas échéant, être assorties ;
9. Considérant qu'il résulte des termes de la proposition de rectification du 8 juin 2012 que l'administration s'est fondée, pour remettre en cause la réduction d'impôt en litige, sur l'état joint aux déclarations fiscales de l'année 2008 établies par les SEP dont M. et
Mme D...étaient associés, conformément aux dispositions de l'article 95 T de
l'annexe II au code général des impôts en vertu desquelles doivent être indiqués à l'administration notamment la nature précise de l'investissement ainsi que le nom, l'adresse et la nature de l'activité de l'établissement dans lequel l'investissement est exploité ; que l'administration a pu, au vu de ces renseignements, constater que les investissements portaient sur des plantations d'ananas qui ont été données en location à des exploitants agricoles ; qu'elle en a déduit que les contrats de location ne revêtaient pas par nature un caractère commercial mais civil et que les investissements en cause n'étaient pas éligibles à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que pour établir l'imposition en litige, l'administration se serait fondée sur des documents ou renseignements obtenus de tiers, autres que les déclarations des SEP, et notamment sur les contrats de location conclus par la SNC Nordy Gest avec respectivement M. et MmeE..., M. B...et Mme F...pour la location des plantations d'ananas ; que M. et Mme D...ne sont en conséquence pas fondés à soutenir que l'administration fiscale devait les informer qu'elle disposait de ces documents conformément aux dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'impôt :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu (...) le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification (...) " ;
11. Considérant que si M. et Mme D...soutiennent que la proposition de rectification du 8 juin 2012 leur a été notifiée au-delà du délai de reprise, le 31 décembre 2011, il résulte cependant de l'instruction qu'ils avaient reçu auparavant une première proposition de rectification en date du 22 décembre 2011 dont la régularité n'est pas contestée et qui a dès lors valablement interrompu la prescription en dépit de la circonstance qu'elle a été ultérieurement remplacée par la proposition de rectification du 8 juin 2012 ;
12. Considérant qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 (...) En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) La réduction d'impôt prévue au présent I s'applique aux investissements productifs mis à la disposition d'une entreprise dans le cadre d'un contrat de location si les conditions mentionnées aux quatorzième à dix-septième alinéas du I de l'article 217 undecies sont remplies (...) " ; qu'aux termes des quatorzième et seizième alinéas du I de l'article 217 undecies du même code, auxquels renvoient les dispositions précitées : " La déduction prévue au premier alinéa s'applique aux investissements productifs mis à la disposition d'une entreprise dans le cadre d'un contrat de location si les conditions suivantes sont réunies : (...) 2° Le contrat de location revêt un caractère commercial (...) " ;
13. Considérant que, si la location de terrains nus ne constitue pas, par nature, un acte de commerce, une telle opération peut toutefois revêtir un caractère commercial lorsqu'il résulte des circonstances particulières de l'affaire que le bailleur a entendu, sous le couvert de la location consentie, participer directement ou indirectement à la gestion ou aux résultats d'une entreprise commerciale exploitée par le preneur ;
14. Considérant qu'en l'absence, constante en l'espèce, de participation aux responsabilités et aux risques des exploitations agricoles de MmeE..., de M. B...et de MmeF..., la location des terres agricoles revêt un caractère civil ; que les revenus qui en résultent ne constituent pas des bénéfices industriels et commerciaux au sens de l'article 34 du code général des impôts ; qu'ainsi, et alors même que la SEP " DOM SEP 386 " et la SEP " DOM SEP 387 ", qui n'ont en tout état de cause pas été contrôlées, auraient déposé des déclarations de résultats dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, les contrats de location en cause ne revêtaient pas de caractère commercial au sens des dispositions précitées du I de l'article 217 undecies du code général des impôts, sans que les requérants puissent utilement faire valoir que la location était, pour le bailleur, un moyen d'accroitre ses débouchés ; qu'une des conditions de l'article 199 undecies B du code général des impôts n'étant pas remplie, M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le service a remis en cause les réductions d'impôt dont ils ont bénéficié ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C...D...et au ministre des finances et des comptes publics.
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N° 15NC01169