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21/06/2016 | FRANCE | N°15NC00349

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 21 juin 2016, 15NC00349


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...et Mme D...B...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés du 13 octobre 2014 par lesquels le préfet du Jura a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1401665-1401666 du 27 janvier 2015, le tribunal administratif de Besançon a joint ces demandes et a annulé les arrêtés attaqués.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et

un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 février et 30 avril 2015, sous le n° 15NC00348, le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...et Mme D...B...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés du 13 octobre 2014 par lesquels le préfet du Jura a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1401665-1401666 du 27 janvier 2015, le tribunal administratif de Besançon a joint ces demandes et a annulé les arrêtés attaqués.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 février et 30 avril 2015, sous le n° 15NC00348, le préfet du Jura demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 27 janvier 2015 ;

2°) de rejeter la demande formée par M. B...devant le tribunal administratif de Besançon.

Il soutient que :

- la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas de valeur réglementaire ; les premiers juges ont commis une erreur de droit en considérant que son arrêté était illégal au motif qu'il n'avait pas examiné la demande de titre de séjour au regard des orientations de ladite circulaire ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. B...ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 avril et 27 mai 2015, M.B..., représenté par MeA..., conclut à ce que la cour :

- rejette la requête ;

- à titre principal, enjoigne au préfet du Jura de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, un récépissé avec droit au travail, dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt ;

- à titre subsidiaire, enjoigne au préfet du Jura de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- mette à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 850 euros, à verser à Me A..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que les moyens soulevés en première instance étaient fondés et conduisent à confirmer l'annulation prononcée par le tribunal administratif de Besançon.

Par un mémoire enregistré le 24 mai 2016, M. B...déclare se désister de ses conclusions.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 25 juin 2015.

II. Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 février et 30 avril 2015, sous le n° 15NC00349, le préfet du Jura demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 27 janvier 2015 ;

2°) de rejeter la demande formée par Mme B...devant le tribunal administratif de Besançon ;

Il fait valoir les mêmes moyens que ceux exposés à l'appui de la requête n° 15NC00348.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 avril et 27 mai 2015, MmeB..., représentée par MeA..., conclut à ce que la cour :

- rejette la requête ;

- à titre principal, enjoigne au préfet du Jura de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, un récépissé avec droit au travail, dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt ;

- à titre subsidiaire, enjoigne au préfet du Jura de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- mette à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 850 euros, à verser à Me A..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que les moyens soulevés en première instance étaient fondés et conduisent à confirmer l'annulation prononcée par le tribunal administratif de Besançon.

Par un mémoire enregistré le 24 mai 2016, Mme B...déclare se désister de ses conclusions.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 25 juin 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la circulaire n° INTK1229185C du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Tréand, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur la jonction :

1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur le désistement :

2. Considérant que, par des mémoires enregistrés le 24 mai 2016, M. et Mme B...déclarent se désister de leurs conclusions ; que ce désistement est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la requête :

3. Considérant que, dans le cas où un texte prévoit l'attribution d'un avantage sans avoir défini l'ensemble des conditions permettant de déterminer à qui l'attribuer parmi ceux qui sont en droit d'y prétendre, l'autorité compétente peut, alors qu'elle ne dispose pas en la matière du pouvoir réglementaire, encadrer l'action de l'administration, dans le but d'en assurer la cohérence, en déterminant, par la voie de lignes directrices, sans édicter aucune condition nouvelle, des critères permettant de mettre en oeuvre le texte en cause, sous réserve de motifs d'intérêt général conduisant à y déroger et de l'appréciation particulière de chaque situation ; que, dans ce cas, la personne en droit de prétendre à l'avantage en cause peut se prévaloir, devant le juge administratif, de telles lignes directrices si elles ont été publiées ; qu'en revanche, il en va autrement dans le cas où l'administration peut légalement accorder une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit ; que s'il est loisible, dans ce dernier cas, à l'autorité compétente de définir des orientations générales pour l'octroi de ce type de mesures, l'intéressé ne saurait se prévaloir de telles orientations à l'appui d'un recours formé devant le juge administratif ;

4. Considérant, s'agissant de la délivrance des titres de séjour, qu'il appartient au législateur, sous réserve des conventions internationales, de déterminer les conditions dans lesquelles les étrangers sont autorisés à séjourner sur le territoire national ; que, si les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile régissant la délivrance des titres de séjour n'imposent pas au préfet, sauf disposition spéciale contraire, de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas les conditions auxquelles est subordonné le droit d'obtenir ce titre, la faculté pour le préfet de prendre, à titre gracieux et exceptionnel, une mesure favorable à l'intéressé pour régulariser sa situation relève de son pouvoir d'appréciation de l'ensemble des circonstances de l'espèce ; qu'il est loisible au ministre de l'intérieur, chargé de mettre en oeuvre la politique du Gouvernement en matière d'immigration et d'asile, alors même qu'il ne dispose en la matière d'aucune compétence réglementaire, d'énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de prendre des mesures de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation ; que c'est toutefois au préfet qu'il revient, dans l'exercice du pouvoir dont il dispose, d'apprécier dans chaque cas particulier, compte tenu de l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'étranger, l'opportunité de prendre une mesure de régularisation favorable à l'intéressé ;

5. Considérant qu'en dehors des cas où il satisfait aux conditions fixées par la loi, ou par un engagement international, pour la délivrance d'un titre de séjour, un étranger ne saurait se prévaloir d'un droit à l'obtention d'un tel titre ; que s'il peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que la décision du préfet, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

6. Considérant que les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile constituent des orientations générales dont M. et Mme B... ne pouvaient utilement se prévaloir devant le juge de l'excès de pouvoir ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon s'est fondé sur le moyen tiré de ce que le préfet du Jura n'avait pas examiné les demandes de délivrance de titres de séjour formées par M. et Mme B...au regard des orientations de ladite circulaire pour annuler les arrêtés du 13 octobre 2014 par lesquels le préfet du Jura a refusé de délivrer aux intimés un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

8. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme B...devant le tribunal administratif de Besançon ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

10. Considérant, en premier lieu, que M. et Mme B...sont entrés en France le 8 décembre 2009 ; que M.B..., qui souffre d'une hépatite virale de type C, a bénéficié d'une carte de séjour temporaire qui lui a été délivrée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code précité, qui a été régulièrement renouvelée à deux reprises ; que Mme B...bénéficiait au cours de la même période d'une autorisation provisoire de séjour ; qu'à la date où le préfet du Jura a adopté les arrêtés litigieux, les époux B...séjournaient donc en France depuis 4 ans et 10 mois ;

11. Considérant, en second lieu, qu'alors que la première carte de séjour temporaire délivrée à M. B...n'était valable qu'à compter du 10 mai 2011, il a, dès le 27 juin, signé un contrat à durée indéterminée en qualité de commis de cuisine à la Taverne Comtoise située à Morbier ; qu'il y a travaillé de manière continue jusqu'en mai 2014, date à laquelle son titre de séjour ne lui pas été renouvelé ; qu'il dispose d'une promesse d'embauche de son employeur qui, de manière réitérée, réaffirme son souhait de collaborer à nouveau avec son salarié qui lui a donné entière satisfaction ; que, par ailleurs, Mme B...a signé un contrat avec l'association départementale des pupilles de l'enseignement public de la Côte d'Or et a travaillé comme agent de service du 22 décembre 2013 au 30 mars 2014 au centre de montagne " Les Jacobeys " à Prémanon ; qu'ainsi, les intimés démontrent la réalité de leur insertion professionnelle réussie ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment d'une attestation du maire de la commune de Morez dans laquelle les intimés louent un logement, que M. et Mme B...ont entrepris de manière assidue l'apprentissage du français, s'investissent au service des autres dans le cadre d'activités associatives et sont très appréciés de la communauté locale ; qu'ils se sont engagés dans une démarche de procréation médicalement assistée afin de fonder une famille en France ; qu'ainsi, ils démontrent la réalité de leur réelle insertion sociale ;

13. Considérant, enfin, qu'il ressort des termes des arrêtés litigieux que le préfet du Jura a assorti ses refus de délivrance de titres de séjour d'obligations de quitter le territoire français à destination du pays d'origine des intéressés ; que, par suite, les refus de délivrer un titre de séjour à M. et Mme B... conduiront à une rupture de la vie conjugale, M. B...étant de nationalité serbe et de confession musulmane et Mme B...étant de nationalité kosovare et de religion catholique ;

14. Considérant que, dans ces conditions, en refusant à M. et Mme B...la délivrance de cartes de séjour temporaire en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que celles-ci ne se justifieraient pas au regard de motifs exceptionnels, le préfet du Jura a entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'illégalité entachant les décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour prive de base légale les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés par les requérants, que le préfet du Jura n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé ses arrêtés du 13 octobre 2014 ;

D É C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions de M. et MmeB....

Article 2 : Les requêtes du préfet du Jura sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. C...B...et Mme D...B....

Copie en sera adressée au préfet du Jura.

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N° 15NC00348-15NC00349


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00349
Date de la décision : 21/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : BERTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-06-21;15nc00349 ?
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