Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de Montfaucon-d'Argonne à lui verser la somme de 41 852,87 euros à titre de complément de rémunération.
Par un jugement n° 1300628 du 5 mars 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 27 avril 2015, 1er septembre 2015 et 16 mars 2016, Mme C... B..., représentée par Me A..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 5 mars 2015 ;
2°) à titre principal, de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de Montfaucon-d'Argonne à lui verser la somme de 26 037,38 euros à titre de complément de rémunération ;
3°) à titre subsidiaire, de condamner l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne à la garantir de toutes condamnations prononcées ou à venir à son encontre au profit de la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse et de la mutualité sociale agricole ;
4°) en tant que de besoin, de condamner l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne à lui verser la somme de 26 037,38 euros déjà mise à sa charge au profit de la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse par l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 8 avril 2015 ;
5°) de mettre à la charge de l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la rémunération prévue par son contrat de travail, qui ne couvrait que la préparation des médicaments, ne correspond pas à la réalité des soins infirmiers effectués entre 2006 et 2008 ; cette réalité est matériellement établie, puisque les actes infirmiers ont été rémunérés par les caisses de sécurité sociale et ont été prescrits par ordonnance du médecin référent ; l'insuffisance de sa rémunération pour la période couvrant les années 2006 à 2008 a été reconnue par l'EHPAD qui a régularisé rétroactivement sa situation de juillet 2008 à janvier 2009 ;
- son employeur ne l'a jamais informée des conséquences du changement de statut de la maison de retraite, devenue EHPAD en 2005, sur sa rémunération et la facturation de prestations à la caisse primaire d'assurance maladie ; la convention tripartite signée en 2004 ne lui a jamais été transmise ; l'EHPAD a continué de lui laisser facturer les actes infirmiers à la caisse primaire d'assurance maladie afin de ne pas avoir à en supporter les coûts ; ce n'est qu'en juin 2008 qu'elle a été informée qu'elle ne pouvait plus facturer les prestations à la caisse primaire d'assurance maladie ;
- l'EHPAD, qui disposait de subventions pour engager d'autres personnels de santé, ne l'a pas fait.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 1er juillet 2015 et 13 novembre 2015, l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de Montfaucon-d'Argonne, représenté par la SCP Demange et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- MmeB..., qui ne respectait pas les dispositions de son contrat de travail et n'effectuait pas la totalité de ses heures, ne peut sérieusement prétendre à un complément de rémunération ;
- elle n'apporte pas la preuve de la réalisation des soins infirmiers qu'elle prétend avoir réalisés ;
- elle ne peut demander le remboursement de la somme récupérée par les organismes de sécurité sociale, qui est sans lien avec le travail effectué au sein de l'EHPAD ;
- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par un courrier enregistré le 15 juillet 2015, la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse a informé la cour qu'elle n'entendait pas produire d'observations.
Par un courrier enregistré le 27 août 2015, la mutualité sociale agricole a informé la cour qu'elle n'entendait pas produire d'observations.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la cour était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office, tirés :
- de l'irrecevabilité des conclusions d'appel en garantie présentées à titre subsidiaire, ces conclusions étant nouvelles en appel ;
- de l'irrecevabilité des conclusions tendant à ce que l'EHPAD soit condamné à verser à la requérante la somme correspondant au montant des prestations dont le remboursement lui a été demandé par la caisse primaire d'assurance maladie, ces conclusions étant nouvelles en appel et conduisant à majorer le montant des conclusions indemnitaires présentées en première instance.
Vu :
- les arrêts de la cour d'appel de Nancy du 8 avril 2015 et du 18 novembre 2015 ;
- les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Fuchs,
- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.
1. Considérant que l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de Montfaucon-d'Argonne, établissement public, a conclu le 16 décembre 2005 un contrat avec MmeB..., infirmière diplômée d'Etat, par lequel celle-ci s'engageait à effectuer cinq vacations hebdomadaires au sein de la maison de retraite de Saint-Balderic ; qu'au cours de l'année 2009, lors d'un contrôle de facturation des soins remboursés pour les pensionnaires de l'EHPAD sur la période du 1er juillet 2006 au 30 juin 2008, il a été constaté que l'intéressée facturait ces soins aux organismes de sécurité sociale alors même qu'elle percevait une rémunération de l'EHPAD ; que la caisse primaire d'assurance maladie et la mutualité sociale agricole ont alors demandé à Mme B...de rembourser les sommes qu'elle avait indûment perçues au cours de cette période ; que la requérante a contesté la décision de la caisse primaire d'assurance maladie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Meuse qui a rejeté son recours par un jugement du 8 octobre 2012, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Nancy du 8 avril 2015 ; qu'en revanche, la cour d'appel de Nancy a, dans un arrêt du 18 novembre 2015, confirmé le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de la Meuse du 28 avril 2014 selon lequel l'action intentée par la mutualité sociale agricole à l'encontre de Mme B... était prescrite ; que la requérante relève appel du jugement du 5 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à ce que l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne soit condamné à lui verser, à titre de complément de rémunération, les sommes en cause, qui constitueraient des prestations ne relevant pas de son activité salariée ;
Sur la recevabilité des conclusions subsidiaires de MmeB... :
2. Considérant que les conclusions subsidiaires de Mme B...tendant à ce que l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne la garantisse de toutes condamnations prononcées ou à venir à son encontre au profit de la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse et de la mutualité sociale agricole n'ont pas été présentées devant les premiers juges ; que ces conclusions, nouvelles en appel, ne sont pas recevables ;
Sur la responsabilité de l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne :
3. Considérant, en premier lieu, que la requérante soutient que les vacations pour lesquelles elle était rémunérée conformément aux termes du contrat conclu le 16 décembre 2005 ne concernaient que la préparation des médicaments et non les soins prodigués aux pensionnaires de l'établissement ; qu'elle fait valoir que ces soins, dont la réalité est établie puisqu'ils ont été prescrits par le médecin référent et remboursés par les organismes de sécurité sociale, auraient dû être rémunérés par l'EHPAD ;
4. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que, par le contrat signé le 16 décembre 2005, la requérante s'est engagée à " assurer les soins infirmiers prescrits par le médecin traitant auprès des résidents (...) ainsi que la préparation des médicaments ", pour une rémunération " sur la base de cinq vacations hebdomadaires (30%) " ; qu'il résulte clairement des stipulations de ce contrat que la rémunération versée à Mme B... couvrait tant les préparations médicamenteuses que les soins hospitaliers ;
5. Considérant, d'autre part, que Mme B...soutient que la rémunération prévue pour les vacations ne couvrait pas l'intégralité des actes qu'elle effectuait et que l'augmentation de son traitement, résultant du nouveau contrat signé le 27 janvier 2009, constitue une reconnaissance de l'insuffisance de sa rémunération initiale ; que, toutefois, en se bornant à affirmer que, sans qu'il soit possible de quantifier ce temps de dépassement, le temps de travail qu'elle consacrait à ses missions à l'EHPAD allait " bien au-delà " des vacations hebdomadaires prévues, elle n'en apporte pas la preuve ; que cette preuve ne saurait résulter de la production d'une liste des actes réalisés par elle au cours de cette période, pas plus que de la comparaison entre les sommes perçues du fait de l'exécution de son contrat de travail avec celles qui lui ont été réclamées par la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse et la mutualité sociale agricole, alors que l'EHPAD soutient, pour sa part, que la requérante n'accomplissait pas la totalité du service dû ; qu'enfin, est sans incidence sur l'existence ou non d'une faute la circonstance, à la supposer avérée, selon laquelle l'EHPAD n'aurait pas recruté d'autres personnels de santé quand bien même il aurait disposé de subventions à cet effet ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que la requérante soutient que son employeur ne l'a pas informée du contenu de la convention tripartite signée le 27 octobre 2004 par le préfet de la Meuse, le président du conseil général de ce même département et le directeur de l'EHPAD, qui stipule que l'option tarifaire choisie est le " tarif soin partiel " ; que cette circonstance, à la supposer avérée, ne peut en tout état de cause révéler une carence fautive de l'EHPAD compte tenu des stipulations claires de son contrat de travail quant aux activités faisant l'objet d'une rémunération ; qu'au demeurant, ce contrat, qui a été conclu postérieurement à la convention tripartite, visait celle-ci ; que de surcroît, l'intéressée est une professionnelle de santé qui aurait dû avoir connaissance tant de l'option tarifaire choisie par l'établissement que des incidences de ce choix sur ses modalités de facturation aux organismes de sécurité sociale ; qu'enfin, il ne ressort pas des courriers des 30 juin et 22 octobre 2008 que le directeur de l'EHPAD aurait été informé de la pratique mise en place par Mme B...et sa collègue ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'EHPAD aurait commis une carence fautive en ne l'informant pas des conditions de facturation aux organismes sociaux et en la laissant continuer à facturer les actes infirmiers concernés à la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse ;
7. Considérant qu'en l'absence de faute de l'EHPAD, les conclusions présentées à titre principal par MmeB..., tendant à la condamnation de l'intimé à lui verser les sommes demandées à titre de complément de rémunération et en raison des carences alléguées de l'EHPAD, ne peuvent être accueillies ; que, pour les mêmes motifs, ses conclusions tendant à ce que soient mises à la charge de l'établissement les sommes qu'elle a été contrainte de verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse par l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 8 avril 2015 doivent être rejetées ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne la somme demandée par Mme B...à ce titre ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge de Mme B...une somme de 750 euros au titre des frais exposés par l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Mme B...versera une somme de 750 (sept cent cinquante) euros à l'EHPAD de Montfaucon-d'Argonne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes de Montfaucon-d'Argonne, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Meuse et à la mutualité sociale agricole.
''
''
''
''
3
N° 15NC00779