La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/03/2016 | FRANCE | N°15NC02044

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 17 mars 2016, 15NC02044


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...et son épouse, Mme D...A...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés en date du 31 octobre 2014 par lesquels le préfet du Doubs a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination d'une éventuelle mesure d'exécution forcée.

Par un jugement n°1500128, 1500129 du 7 avril 2015, le tribunal administratif de Besançon a joint et rejeté leurs

demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête enregistrée le 29 septembr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...et son épouse, Mme D...A...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés en date du 31 octobre 2014 par lesquels le préfet du Doubs a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination d'une éventuelle mesure d'exécution forcée.

Par un jugement n°1500128, 1500129 du 7 avril 2015, le tribunal administratif de Besançon a joint et rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête enregistrée le 29 septembre 2015 sous le numéro 15NC02044, M. B...A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 avril 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Doubs du 31 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer, à titre principal une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de la remise effective de ce titre, de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler, dans les huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, ou 500 euros en cas de jonction, à verser à MeC..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision est illégale au regard des dispositions des articles L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que son épouse doit être admise au séjour pour motif médical et qu'il doit être, par suite, admis au séjour à titre exceptionnel ou au titre de son droit à une vie privée et familiale normale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2015, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

II) Par une requête enregistrée le 29 septembre 2015 sous le n° 15NC02046, Mme D...A..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 avril 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Doubs du 31 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer, à titre principal une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de la remise effective de ce titre, de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler, dans les huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, à verser à MeC..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision est illégale au regard des dispositions des articles L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle doit être admise au séjour à titre exceptionnel ;

- elle est fondée à se prévaloir de documents postérieurs à la décision attaquée, qui mentionnent des éléments antérieurs à cette décision ;

- eu égard à son état de santé, la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la décision lui faisant obligation de quitter le territoire, le 10° de l'article L. 511-4 du même code ; la gravité de son état et l'indisponibilité des soins au Kosovo ont été reconnus par le médecin de l'agence régionale de santé le 19 février 2015 et elle établit que ces soins n'étaient pas disponibles, contrairement à ce qu'a retenu le préfet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2015, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

M. et Mme A...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions en date du 10 septembre 2015.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Rousselle a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. et MmeA..., ressortissants kosovars nés respectivement le 9 juin 1969 et le 12 janvier 1971, sont entrés irrégulièrement en France le 19 juin 2013, accompagnés de leur fils majeur et de deux autres enfants mineurs, afin d'y solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 29 novembre 2013, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 23 septembre 2014 ; que le préfet du Doubs a, par deux arrêtés du 31 octobre 2014, refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés ; que, M. et Mme A...relèvent appel, par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour qu'il soit statué par un seul arrêt, du jugement du 7 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés ;

Sur les décisions de refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que si les dispositions de l'article L. 313-14 du code permettent à l'administration de délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, il ressort des termes mêmes de cet article, et notamment de ce qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour, que le législateur n'a pas entendu déroger à la règle rappelée ci-dessus ni imposer à l'administration, saisie d'une demande d'une carte de séjour, quel qu'en soit le fondement, d'examiner d'office si l'étranger remplit les conditions prévues par cet article ;

3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces des dossiers que les décisions attaquées sont consécutives au rejet, par l'OFPRA et la CNDA, des demandes d'asile de M et MmeA... ; que si, ainsi qu'il en avait la possibilité, le préfet a également examiné si les demandeurs pouvaient être admis au séjour à un autre titre, et, notamment, au regard de l'article L. 313-14, les trois certificats médicaux produits à l'instance, antérieurs aux décisions attaquées, se bornent à décrire les pathologies dont souffre Mme A...et les traitements prescrits et ne sont pas de nature à justifier, le cas échéant, du caractère exceptionnel de leur situation ou de l'impossibilité de procéder à leur éloignement du territoire français ; que le préfet n'a, par suite, commis aucune erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. et MmeA... ;

4. Considérant, d'autre part, que l'ensemble des documents et certificats médicaux établis à compter du 5 novembre 2012 ne pourraient, le cas échéant, qu'étayer une contestation de la légalité de la décision refusant d'admettre Mme A...au séjour au titre du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui, par voie de conséquence, concerne également son époux ; que ce n'est que le 12 novembre 2014, soit postérieurement à la décision attaquée, que Mme A...a déposé une demande d'admission au séjour en qualité d'étranger malade, amenant ainsi le préfet à mettre en oeuvre la procédure spécifique prévue par l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il suit de là que les requérants ne peuvent utilement discuter de la disponibilité des soins susceptibles d'être dispensés à Mme A...au Kosovo à l'appui de leur contestation de la légalité de la décision du préfet qui n'est pas intervenue au terme d'une procédure de reconnaissance de la qualité d'étranger malade ;

Sur les décisions faisant obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant qu'aux termes du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français " l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier des certificats médicaux en date des 5 et 21 novembre 2014, produits par la requérante à l'appui de sa nouvelle demande de titre de séjour ainsi que de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en date du 19 février 2015, rendu dans le cadre de cette seconde procédure, que l'état de santé de Mme A...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il suit de là que le préfet ne pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, obliger Mme A...à quitter le territoire ; que, par voie de conséquence, la décision ayant le même objet prise à l'encontre de son mari, dont la présence aux cotés de son épouse est indispensable, est également entachée d'illégalité ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes en tant qu'elles portaient sur les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire à destination de leur pays d'origine ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction de délivrance d'un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Les décisions du préfet du Doubs du 31 octobre 2014 en tant qu'elles font obligation à M. et Mme A...de quitter le territoire français à destination de leur pays d'origine et le jugement du tribunal administratif de Besançon en tant qu'il a rejeté leurs demandes en tant qu'elles portaient sur ces décisions sont annulés.

Article 2 : Le surplus des requêtes de M. et Mme A...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à Mme D...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

''

''

''

''

2

N° 15NC02044, 15NC02046


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02044
Date de la décision : 17/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : BERTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-03-17;15nc02044 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award