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10/03/2016 | FRANCE | N°15NC00341

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 10 mars 2016, 15NC00341


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions du 16 avril 2014 par lesquelles le préfet du Bas-Rhin a refusé de l'admettre au séjour au titre de l'asile et a décidé de la remettre aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1403203 du 21 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de MmeA....

Mme B...A...a ultérieurement demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 21 janvier 2015 par laquelle le pr

fet du Bas-Rhin l'a placée en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions du 16 avril 2014 par lesquelles le préfet du Bas-Rhin a refusé de l'admettre au séjour au titre de l'asile et a décidé de la remettre aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1403203 du 21 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de MmeA....

Mme B...A...a ultérieurement demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 21 janvier 2015 par laquelle le préfet du Bas-Rhin l'a placée en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

Par un jugement n° 1500210 du 27 janvier 2015, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 21 janvier 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 février 2015, le préfet du Bas-Rhin demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500210 du 27 janvier 2015 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) de rejeter la demande de MmeA....

Le préfet du Bas-Rhin soutient que c'est à tort que le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 21 janvier 2015 au motif que la décision de prolongation du délai de remise aux autorités italiennes n'avait pas été notifiée à Mme A...en méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la loi du 17 juillet 1978.

Par une ordonnance du 6 novembre 2015, l'instruction a été close au 30 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

- le règlement n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Richard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeA..., de nationalité nigériane, est entrée irrégulièrement en France le 30 septembre 2013, selon ses déclarations, et a déposé auprès des services de la préfecture du Bas-Rhin une demande d'asile le 30 octobre 2013. La consultation du fichier EURODAC ayant révélé que ses empreintes avaient déjà été relevées en Italie le 25 septembre 2014, le préfet du Bas-Rhin a sollicité sa reprise en charge par les autorités de ce pays. Ces dernières ont accepté par un accord implicite acquis le 18 février 2014, de reprendre en charge la demande de l'intéressée.

2. Par une décision du 16 avril 2014, le préfet a refusé l'admission provisoire de Mme A...et pris à son encontre une décision de remise aux autorités italiennes et l'a invitée à se rapprocher des services de la police aux frontières dans un délai de huit jours afin d'organiser les modalités de son départ. Le préfet a informé le 30 juillet 2014 les autorités italiennes de la prolongation du délai de remise à dix-huit mois en estimant que l'intéressée devait être regardée comme en fuite au sens de l'article 20 du règlement du 18 février 2003 susvisé.

3. A la suite de l'interpellation de Mme A...par la police, le préfet du Bas-Rhin a ordonné son placement en rétention en vue de l'exécution de la décision de remise. Le préfet du Bas-Rhin relève appel du jugement du 27 janvier 2015 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du 21 janvier 2015 ordonnant le placement en rétention de MmeA....

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

4. Le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté litigieux au motif qu'en l'absence de notification à Mme A...de la prolongation du délai de remise, aucune décision de prolongation ne lui était opposable, compte tenu des dispositions de l'article 8 de la loi du 17 juillet 1978, ce qui a privé de fondement légal la décision de placement en rétention.

5. Aux termes de l'article 20 du règlement du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers : " 1. La reprise en charge d'un demandeur d'asile (...) s'effectue selon les modalités suivantes : (...) / d) l'Etat membre qui accepte la reprise en charge est tenu de réadmettre le demandeur d'asile sur son territoire. Le transfert s'effectue (...) au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation de la demande aux fins de reprise en charge par un autre Etat membre ou de la décision sur le recours ou la révision en cas d'effet suspensif ; / e) l'Etat membre requérant notifie au demandeur d'asile la décision relative à sa reprise en charge par l'Etat membre responsable. Cette décision est motivée. Elle est assortie des indications de délai relatives à la mise en oeuvre du transfert (...) / 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, la responsabilité incombe à l'Etat membre auprès duquel la demande d'asile a été introduite. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert ou à l'examen de la demande en raison d'un emprisonnement du demandeur d'asile ou à dix-huit mois au maximum si le demandeur d'asile prend la fuite. (...) ". Aux termes de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " (...) l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne. / L'étranger visé au premier alinéa est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'Etat. (...) " et selon l'article L. 551-1 du même code: " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ; (...) ".

6. Il résulte des dispositions citées ci-dessus du paragraphe 2 de l'article 20 du règlement du 18 février 2003, combinées avec celles du règlement du 2 septembre 2003 qui en porte modalités d'application, que si l'Etat membre sur le territoire duquel séjourne le demandeur d'asile a informé l'Etat membre responsable de l'examen de la demande, avant l'expiration du délai de six mois dont il dispose pour procéder au transfert de ce demandeur, qu'il n'a pu y être procédé du fait de la fuite de l'intéressé, l'Etat membre requis reste responsable de l'instruction de la demande d'asile pendant un délai de dix-huit mois courant à compter de l'acceptation de la reprise en charge dont dispose l'Etat membre sur le territoire duquel séjourne le demandeur pour procéder à son transfert.

7. La prolongation du délai de transfert a pour effet de maintenir en vigueur la décision de remise aux autorités de l'Etat responsable, dont le demandeur est informé en application des dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et non de faire naître une nouvelle décision de remise dont ce demandeur devrait être informé dans les formes prévue par ces dispositions pour la décision initiale.

8. Il appartient seulement aux autorités compétentes d'informer le demandeur, au moment de la notification de la décision de remise, des cas et conditions dans lesquels le délai de transfert peut être porté à douze ou dix-huit mois et, lorsque cette décision de remise sert de fondement, après prorogation, à une mesure de rétention, de l'existence, de la date et des motifs de la prorogation. Ces informations peuvent, dans ce cas, figurer dans les motifs de la mesure de rétention.

9. Il ne ressort ni des termes de la décision litigieuse ni d'aucune pièce versée au dossier que Mme A...ait été informée de l'existence, de la date et des motifs de la prorogation du délai de son transfert aux autorités italiennes. Un tel motif, qui avait été invoqué par Mme A...dans ses écritures et qui doit être substitué à celui qu'a retenu le tribunal, est de nature à justifier, par voie d'exception de l'illégalité de la décision de remise aux autorités italiennes, l'annulation de l'arrêté la plaçant en rétention.

10. Le préfet du Bas-Rhin n'est ainsi pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement contesté, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du 21 janvier 2015 ordonnant le placement de Mme A...en rétention.

D E C I D E :

Article 1er : Le recours du préfet du Bas-Rhin est rejeté.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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N° 15NC00341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00341
Date de la décision : 10/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-03-10;15nc00341 ?
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