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03/03/2016 | FRANCE | N°15NC01347

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 03 mars 2016, 15NC01347


Vu la procédure suivante :

I) Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2006 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1202444 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 17 juin 2015, sous le n° 15NC01

346, le ministre des finances et des comptes publics, demande à la cour :

1°) d'annuler les ar...

Vu la procédure suivante :

I) Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2006 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1202444 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 17 juin 2015, sous le n° 15NC01346, le ministre des finances et des comptes publics, demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 mai 2015 ;

2°) de rétablir les impositions dont le tribunal a prononcé la décharge ;

Il soutient qu'il peut être procédé à une substitution de base légale des impositions en litige, ce qui ne privera M. A...d'aucune garantie procédurale.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 9 octobre 2015 et le 18 décembre 2015, M.A..., représenté par MeC..., conclut au rejet du recours et demande qu'une somme de 2 300 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- une substitution de base légale le priverait d'une garantie de procédure dès lors que la somme en litige a initialement été taxée d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminés ;

- subsidiairement, les virements effectués par la société S.Deux.E DRH sur le compte courant d'associé ouvert au nom de M. A...constituent la rémunération de ses fonctions de dirigeant d'une société luxembourgeoise et ne sont pas imposables en France.

II) Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2007 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n 1203835 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 17 juin 2015, sous le n° 15NC01347 le ministre des finances et des comptes publics, demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 mai 2015 ;

2°) de rétablir les impositions dont le tribunal a prononcé la décharge ;

Il soutient qu'il peut être procédé à une substitution de base légale des impositions en litige, ce qui ne privera M. A...d'aucune garantie procédurale.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 9 octobre 2015 et le 18 décembre 2015, M.A..., représenté par MeC..., conclut au rejet du recours et demande qu'une somme de 2 300 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- une substitution de base légale le priverait d'une garantie de procédure dès lors que la somme en litige a initialement été taxée d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminés ;

- subsidiairement, les virements effectués par la société S.Deux.E DRH sur le compte courant d'associé ouvert au nom de M. A...constituent la rémunération de ses fonctions de dirigeant d'une société luxembourgeoise et ne sont pas imposables en France.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guidi,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public,

1. Considérant que les recours n° 13NC01346 et 15NC01347 sont relatifs à la situation d'un même contribuable ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une même requête ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne les droits en principal :

2. Considérant, en premier lieu, que lorsque l'administration demande au juge de l'impôt le maintien ou le rétablissement de tout ou partie d'une imposition établie suivant une procédure entachée d'une irrégularité, en faisant valoir qu'elle aurait été en droit d'appliquer une autre procédure, au regard de laquelle cette irrégularité n'a pas d'incidence, il incombe au juge de s'assurer, avant d'accueillir le principe d'une telle substitution, que la matérialité des circonstances qui auraient autorisé l'administration à mettre en oeuvre la procédure dont elle se réclame résulte, en l'état, de l'instruction et, notamment des éléments qu'il revient dans ce cas à l'administration d'apporter afin de justifier du bien-fondé de sa prétention ;

3. Considérant que, par deux propositions de rectification du 19 juin 2009 et du

28 septembre 2009, l'administration a imposé dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée des sommes d'un montant de 110 000 euros au titre de l'année 2006 et d'un montant de 70 000 euros au titre de l'année 2007, inscrites sur le compte courant d'associé ouvert par la Sarl S.DEUX.E DRH au nom de M.A..., associé et gérant de cette société ; que pour procéder à ces impositions, l'administration a fait application de la procédure de taxation d'office prévue par l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, M. A...n'ayant pas donné suite de manière satisfaisante à une demande d'éclaircissements et de justifications qui lui a été adressée en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que par deux jugements du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a fait droit aux demandes de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. A...a été assujetti au titre des années 2006 et 2007 au motif que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus et ne sont imposables que dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, ce qui fait obstacle à ce que ces sommes puissent être légalement imposées par le service dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ; que le ministre, qui ne conteste pas les motifs des jugements attaqués, demande cependant à la cour de procéder à une substitution de base légale afin que ces sommes soient imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu'il résulte de l'instruction que M. A...n'a pas répondu de manière satisfaisante à la demande de justifications que lui avait adressée le service sur le fondement de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; que dans ces conditions, le service pouvait régulièrement taxer d'office les sommes portées au crédit du compte courant d'associé de la Sarl S.Deux .E ouvert à son nom ; que dès lors, il n'y a pas lieu de subordonner la demande de substitution de base légale au respect de la procédure contradictoire ; que, par suite, M.A..., qui a en tout état de cause bénéficié en fait des garanties de la procédure contradictoire prévues par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, n'est pas fondé à soutenir qu'il ne peut être procédé à la substitution de base légale demandée par l'administration au motif qu'il aurait été privé des garanties en matière de procédure d'imposition ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / [...] 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices " ;

5. Considérant que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus et ne sont alors imposables que dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que

M.A..., à qui incombe la charge de la preuve, soutient que les sommes en litiges constituent la rémunération de ses fonctions de gérant de la Sarl S.Deux.E DRH, société de droit luxembourgeois, qui doivent être imposées au Luxembourg en application de l'article 14 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise ; qu'il se borne cependant à produire à l'appui de ces allégations les statuts de la société S.Deux.E DRH, qui le désignent comme gérant pour une durée illimitée mais sans prévoir de rémunération, des relevés de comptes se limitant à mentionner les virements en cause sur le compte courant d'associé correspondant au paiement de " prestations RS " ainsi que des extraits du grand livre des comptes généraux indiquant sans autre précision des opérations " associés comptes courants " ; que si M. A...produit également un procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire du 28 juin 2006 relative à l'exercice clos le 31 décembre 2006 approuvant la rémunération du gérant pour un montant de 110 000 euros nets au titre de l'exercice 2006, ce document ne comporte que la signature de M.A..., n'a pas de date certaine et ne saurait suffire, en l'absence d'autres éléments probants, à établir que les sommes inscrites en 2006 et 2007 sur le compte courant d'associé ouvert à son nom correspondraient à la rémunération qu'il prétend avoir perçue de ses fonctions de gérant et ne constitueraient pas des revenus distribués ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de substitution de base légale présentée par le ministre des finances et des comptes publics doit être accueillie ; que le ministre est par suite fondé à demander que les sommes de 110 000 euros et 70 000 euros inscrites sur le compte courant d'associé ouvert au nom de M.A..., initialement taxées à tort en tant que revenus d'origine indéterminée, soient imposées à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2006 et 2007 ;

En ce qui concerne les pénalités :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l 'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré " ; qu'à supposer même que M. A...ait entendu soulever une contestation propre aux pénalités qui lui ont été infligées, il se borne à soutenir que les redressements ne sont pas justifiés et que " les opérations en litige ne sont pas contraires au droit " ; qu'il résulte de ce qui précède que ces prétentions ne sauraient, en tout état de cause, être accueillies ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à demander l'annulation des articles 1er et 2 des jugements attaqués par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à la demande de décharge présentée par M. A...;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 1er et 2 des jugements n° 1202444 et n° 1203835 du tribunal administratif de Strasbourg du 7 mai 2015 sont annulés.

Article 2 : Les sommes de 110 000 euros et de 70 000 euros sont imposées dans la catégorie des revenus capitaux mobiliers respectivement au titre des années 2006 et 2007. Les droits et pénalités en résultant sont remis à la charge de M.A....

Article 3 : Les conclusions de M. A...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des finances et des comptes publics et à M. B...A....

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N° 15NC01346 - 15NC01347


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01347
Date de la décision : 03/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-03-03 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Abus de droit et fraude à la loi.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : GUERBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-03-03;15nc01347 ?
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