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01/03/2016 | FRANCE | N°14NC01937

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 01 mars 2016, 14NC01937


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 24 mai 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé la SARL Actega Colorchemie France à procéder à son licenciement.

Par un jugement n° 1303300 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2014, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement

du tribunal administratif de Strasbourg du 2 octobre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 24 mai 2013...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 24 mai 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé la SARL Actega Colorchemie France à procéder à son licenciement.

Par un jugement n° 1303300 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2014, MmeA..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 octobre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 24 mai 2013 de l'inspecteur du travail ;

3°) de mettre à la charge de la SARL Actega Colorchemie une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son employeur, la SARL Actega Colorchemie, a méconnu les dispositions du second alinéa de l'article R. 2421-6 du code du travail ; alors que Mme A...a été mise à pied le 4 mars 2013, l'inspecteur du travail n'a été saisi d'une demande d'autorisation de licenciement que le 23 avril 2013 ;

- son employeur n'a pas notifié sa mise à pied à l'inspecteur du travail ;

- les détournements de fonds auxquels elle a procédé à son profit ne sont pas fautifs ; elle n'a pas été condamnée pénalement ; la direction était l'auteur de malversations analogues.

Une mise en demeure a été adressée le 10 juin 2015 au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par un mémoire enregistré le 19 juin 2015, la SARL Actega Colorchemie France conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de Mme A...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Tréand, président,

- et les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

1. Considérant, d'une part, qu'au titre de l'article R. 2421-14 du code du travail : " En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail. / La consultation du comité d'entreprise a lieu dans un délai de dix jours à compter de la date de la mise à pied. / La demande d'autorisation de licenciement est présentée dans les quarante-huit heures suivant la délibération du comité d'entreprise. S'il n'y a pas de comité d'entreprise, cette demande est présentée dans un délai de huit jours à compter de la date de la mise à pied. (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, le chef d'entreprise a la faculté, en cas de faute grave, de prononcer la mise à pied immédiate d'un salarié protégé jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail statuant sur la demande d'autorisation de licenciement de l'intéressé ; qu'en l'absence de comité d'entreprise, cette demande est présentée dans un délai de huit jours à compter de la date de la mise à pied ; que, si ce délai de huit jours n'est pas prescrit à peine de nullité de la procédure, il doit cependant être aussi court que possible, eu égard à la gravité de la mesure de mise à pied ;

2. Considérant que la décision de mise à pied de MmeA..., déléguée du personnel, par la SARL Actega Colorchemie France est datée du 4 avril 2013 ; qu'à cette même date, la société a convoqué Mme A...à un entretien préalable à son licenciement le 11 avril 2013 ; que la demande d'autorisation de la licencier a été formée par la société le 23 avril 2013 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'eu égard aux détournements de fonds que l'intéressée, responsable administrative et financière, a réalisés à son profit et dont elle admet désormais qu'ils ont atteint 75 000 euros sur plusieurs années (2011 à 2013), la SARL Actega Colorchemie France a dû conduire des investigations nécessitant l'examen de nombreuses pièces comptables, qui ont été produites en première instance, et entendre à nouveau Mme A... le 18 avril 2013 ; que, dans ces conditions, le délai séparant la mise à pied de l'intéressée de la saisine de l'inspecteur du travail doit être considéré comme le plus court possible alors que l'employeur fait état de difficultés particulières dans la mise en oeuvre de la procédure ; qu'ainsi si le délai de huit jours prévu par les dispositions précitées du code du travail n'a pas été strictement respecté, il n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, revêtu un caractère excessif ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aucune disposition législative ou réglementaire et notamment pas celles de l'article L. 2421-3 du code du travail qui ne s'appliquent pas aux délégués du personnel, n'imposait à l'employeur de notifier à l'inspecteur du travail la mise à pied de MmeA... ;

4. Considérant, enfin, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

5. Considérant que Mme A...admet avoir commis des détournements de fonds au préjudice de la société qui l'employait à hauteur de 75 000 euros quand bien même elle n'aurait pas encore été condamnée pénalement pour ces faits en dépit du dépôt d'une plainte formée par la SARL Actega Colorchemie France devant le procureur de la République le 6 mai 2013 ; que la circonstance, au demeurant non établie, que Mme A...aurait procédé à ces mouvements litigieux avec la complicité de sa direction, qui se serait rendue elle-même coupable de semblables malversations, ne saurait leur ôter leur caractère de détournement à des fins personnelles de fonds de l'entreprise qui, eu égard à leur caractère volontaire, à la recherche d'un avantage financier personnel, à l'importance des sommes en cause et aux fonctions exercées par l'intéressée, constituaient une faute d'une gravité suffisante justifiant le licenciement de la salariée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes des dispositions figurant à l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ... " ;

8. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que Mme A..., partie perdante, puisse se voir allouer la somme qu'elle demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SARL Actega Colorchemie France et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Mme A...versera à la SARL Actega Colorchemie France la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la SARL Actega Colorchemie France.

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N° 14NC01937


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01937
Date de la décision : 01/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Procédure préalable à l'autorisation administrative.

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation - Licenciement pour faute - Existence d'une faute d'une gravité suffisante.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : ZBACZYNIAK

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-03-01;14nc01937 ?
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