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28/01/2016 | FRANCE | N°15NC01059

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 28 janvier 2016, 15NC01059


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 14 octobre 2014 par laquelle le préfet du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 1405480 du 6 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 mai 2015, M. C...B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 ja

nvier 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Bas-Rhi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 14 octobre 2014 par laquelle le préfet du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai.

Par un jugement n° 1405480 du 6 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 mai 2015, M. C...B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 janvier 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Bas-Rhin du 14 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision litigieuse a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu prévu par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est entachée d'erreur de fait ;

- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 octobre 2015, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B...n'est fondé.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-166/13 du 5 novembre 2014 et C-249/13 du 11 décembre 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Dhiver a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant guinéen né le 11 février 1992, est, selon ses déclarations, entré en France au cours du mois de septembre 2014 afin de s'y faire soigner ; que le 13 octobre suivant, il a été interpellé puis placé en garde à vue à l'occasion d'un contrôle d'identité organisé par la police aux frontières du Bas-Rhin ; que, par une décision du 14 octobre 2014, le préfet du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai ; que, par un jugement du 6 janvier 2015, dont M. B...relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) " ;

3. Considérant que ces dispositions, applicables au présent litige, sont issues des dispositions de la loi du 16 juin 2011, relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ; que la directive du 16 décembre 2008 encadre de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, sans toutefois préciser si et dans quelles conditions doit être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne ; que si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu ;

4. Considérant, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014 susvisés, que le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour ; qu'il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement ;

5. Considérant que M.B..., qui relève qu'il n'a pas fait l'objet d'une décision de refus de titre de séjour, soutient que la décision contestée lui faisant obligation de quitter le territoire français a été prise sans qu'il en eût été préalablement informé et sans qu'il ait été en mesure de présenter ses observations, en méconnaissance de son droit d'être entendu ;

6. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal d'audition dressé le 13 octobre 2014 à 16 heures 55 par les services de la police aux frontières, que M. B...a indiqué être atteint par le virus de l'hépatite B et avoir l'intention de séjourner en France en vue de se faire soigner, sans avoir encore entrepris des démarches administratives en ce sens ; que, lors de son audition du même jour à 17 heures 45, l'intéressé a été interrogé sur les conditions de son séjour en France ; qu'il ressort de ses dires qu'il se savait en situation irrégulière et ne pouvait ignorer qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B...disposait d'informations tenant à sa situation personnelle qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant qu'une telle mesure soit prise ; que, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance du principe général du droit d'être entendu, qui figure au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, doit être écarté ;

7. Considérant que si M. B...indique qu'il avait pris l'attache d'une association spécialisée en vue de connaître les démarches lui permettant de régulariser sa situation administrative, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait saisi l'administration d'une demande de titre de séjour ; qu'ainsi, en indiquant que l'intéressé n'avait engagé aucune démarche visant à régulariser sa situation administrative, le préfet n'a pas entaché son arrêté d'erreur de fait ; qu'en tout état de cause, cette considération ne constitue pas le motif de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;

8. Considérant, enfin, que M.B..., qui soutient que le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, fait valoir qu'il est atteint d'hépatite B et qu'il ne pouvait être éloigné à destination de la Guinée en raison de l'épidémie de virus Ebola qui y sévissait ; que, toutefois, d'une part, il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, son état de santé nécessitait une prise en charge médicale ; que, d'autre part, cet arrêté, qui fait uniquement obligation à M. B...de quitter le territoire français, ne contient aucune décision fixant le pays à destination duquel le requérant pourrait être éloigné ; qu'il suit de là que le préfet du Bas-Rhin n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.

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N° 15NC01059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01059
Date de la décision : 28/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité externe - Procédure.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : MEHL

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-01-28;15nc01059 ?
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