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14/01/2016 | FRANCE | N°15NC00823

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 14 janvier 2016, 15NC00823


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I...H..., Mme C...H..., M. J...H..., M. G...H..., M. F...H..., M. A...H...et M. D...H...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de l'arrêté du 13 septembre 2012 par lequel le maire de Rombas a refusé de leur délivrer un permis de construire, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 12 novembre 2012.

Par un jugement n° 1301146 du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

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ar une requête et des mémoires enregistrés les 4 mai 2015, 1er décembre 2015 et 11 décemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I...H..., Mme C...H..., M. J...H..., M. G...H..., M. F...H..., M. A...H...et M. D...H...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de l'arrêté du 13 septembre 2012 par lequel le maire de Rombas a refusé de leur délivrer un permis de construire, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 12 novembre 2012.

Par un jugement n° 1301146 du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 4 mai 2015, 1er décembre 2015 et 11 décembre 2015, les consortsH..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301146 du tribunal administratif de Strasbourg du 3 mars 2015;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2012 ensemble le rejet de leur recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au maire de Rombas de réexaminer leur demande de permis de construire dans un délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Rombas une somme de 2 500 euros, à leur verser, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont commis une erreur dans l'appréciation des faits dès lors que le rapport du BRGM n'est ni concluant quant à la faiblesse du risque, à son caractère hypothétique et éloigné dans le temps, ni probant ainsi que le démontre l'étude du bureau d'ingénierie C2BI dès lors qu'il a été établi en méconnaissance des règles régissant la réalisation des expertises ;

- les premiers juges ont méconnu les dispositions de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme en sanctionnant l'absence de réalisation d'études géotechniques complémentaires au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence négative ;

- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;

- l'arrêté litigieux est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté litigieux méconnait l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- la production d'une étude réalisée par Fondasol établit qu'il n'existe aucun risque de glissement de terrain et définit les préconisations à mettre en oeuvre.

Par des mémoires enregistrés les 24 septembre et 9 novembre 2015, la commune de Rombas, représentée par la SCP Gandar-Buchheit conclut au rejet de la requête, et demande de mettre à la charge solidairement des consorts H...une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le décret du 23 octobre 1959 relatif à l'organisation administrative et financière du bureau des recherches géologiques, géophysiques et minières de la France métropolitaine (BRGM) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour les consortsH....

Considérant ce qui suit :

1. Le 25 mars 2008, M. I...H...a sollicité, en qualité de représentant de l'indivisionH..., la délivrance d'un permis de construire une maison d'habitation sur un terrain situé rue Rouge-Fontaine à Rombas. Par arrêté du 9 avril 2008, le maire de la commune de Rombas a rejeté sa demande. Par jugement du 31 janvier 2012, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé ledit arrêté. Le 26 juillet 2012, M. H...a déposé une nouvelle demande de permis de construire qui a fait l'objet d'un nouveau refus par arrêté du 13 septembre 2012. Les consorts H...relèvent appel du jugement du 3 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande d'annulation de l'arrêté du 13 septembre 2012, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux du 12 novembre 2012.

Sur la légalité du refus de permis de construire :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme : " Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s'il s'agit d'un sursis à statuer, elle doit être motivée (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative, qui rejette une demande de permis de construire, doit indiquer dans sa décision les éléments de droit et de fait qui justifient cette mesure. Si elle peut satisfaire à cette exigence de motivation en se référant à des rapports ou avis circonstanciés qui doivent être nécessairement établis avant la décision, c'est à la condition de s'en approprier le contenu et de les joindre à la décision.

3. Pour justifier que la demande de permis de construire déposée par les consorts H...méconnaissait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le maire de la commune de Rombas a indiqué que le rapport du BRGM de juin 2012 confirme l'existence de mouvements de terrain d'ampleur dans le secteur de la rue Rouge-Fontaine et que l'autorisation de nouvelles constructions risque d'augmenter ce phénomène. Il a également souligné que le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité publique du fait de sa situation, de son implantation et de ses caractéristiques, sur le site même et par extension sur le secteur de la rue Rouge-Fontaine. En conséquence, l'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait qui le fonde. Le moyen tiré du défaut de motivation doit en conséquence, être écarté.

4. En deuxième lieu, s'il ressort des termes de l'arrêté contesté que le maire de la commune de Rombas a repris les termes de l'avis du 27 août 2012 de la direction départementale des territoires de la Moselle qui s'approprie pour partie les conclusions du rapport du BRGM, demandé par les services de l'Etat, il a également justifié le refus de délivrer le permis de construire sollicité au motif que le projet était de nature à porter atteinte à la sécurité publique du fait de sa situation, de son implantation et de ses caractéristiques, que que le rapport du BRGM de juin 2012 confirme l'existence de mouvements de terrain d'ampleur dans le secteur de la rue Rouge-Fontaine ainsi que le risque d'augmentation du phénomène par l'autorisation de nouvelles constructions. Par suite, le maire de la commune de Rombas, qui a porté une appréciation personnelle de la situation, ne s'est pas estimé lié par l'avis qu'il a lui-même recueilli et le moyen tiré de l'incompétence négative doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent. Pour apprécier si les atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique sont de nature à justifier un refus du permis de construire, l'autorité compétente doit tenir compte, le cas échéant, des risques auxquels serait exposée la construction projetée. Cette exigence s'impose particulièrement dans le cas où la construction est destinée à l'habitation. Cette autorité est fondée à refuser le permis sollicité dès lors que ces risques seraient de nature à compromettre gravement les conditions et le cadre de vie des futurs occupants quand bien même aucun d'entre eux ne serait de nature, à lui seul, à justifier ce refus.

6. Par ailleurs, les plans de prévention des risques naturels, qui sont destinés notamment à assurer la sécurité des personnes et des biens exposés à certains risques naturels et qui valent servitude d'utilité publique par application de l'article L. 562-4 du code de l'environnement, s'imposent directement aux autorisations de construire sans que l'autorité administrative soit tenue d'en reprendre les prescriptions dans le cadre de la délivrance du permis de construire. L'instauration d'un tel plan n'interdit pas cependant à cette autorité, à qui il incombe de vérifier, au regard des particularités de la situation qu'il lui appartient d'apprécier, que la construction ne sera pas de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, de refuser, lorsqu'une telle atteinte le justifie, la délivrance de l'autorisation sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme précité.

7. Il est constant que le terrain, sur lequel le permis de construire a été sollicité, est situé en zone B du plan d'exposition au risque naturel prévisible " mouvement de terrain ", c'est-à-dire exposé à des risques moindres où les occupations et utilisations du sol ne sont possibles que sous réserve du respect des conditions de l'article 4 de l'arrêté préfectoral n°92-016 du 5 août 1992. Par un jugement du 9 août 2008, devenu définitif, le tribunal administratif de Strasbourg a considéré que la rédaction dudit article 4 était peu lisible. Dans le cadre de l'instruction de la demande de permis de construire déposé le 26 juillet 2012 par les consortsH..., le service de prévention des risques de la direction départementale des territoires, chargé de l'instruction du dossier, a mandaté le BRGM afin " d'actualiser les connaissances afférentes au risque mouvements de terrain et aux aléas (fort et moyen), et le cas échéant, compte tenu de la difficulté d'application de la règle énoncée à l'article 4 du plan de prévention des risques naturels mouvement de terrain approuvé le 5 août 1992, d'être en capacité d'opposer l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, pour toute nouvelle demande d'urbanisme sur le site ".

8. D'une part, le bureau de recherches géologiques, géophysiques et minières (BRGM), établissement public de l'Etat, chargé en particulier, de mener des études concernant le sol et le sous-sol, a produit, à la demande de la direction départementale des territoires de la Moselle, un rapport sur le risque de " mouvement de terrain " au droit d'une parcelle à bâtir au lieu-dit " Rouge-Fontaine ". Aucune pièce du dossier ne permet d'établir que les informations recueillies soient insuffisantes ou peu significatives. Si les requérants soutiennent que l'étude ainsi réalisée méconnait les règles régissant les expertises, un tel moyen est inopérant dès lors qu'il ne s'agit pas d'une expertise. Le rapport d'expertise réalisé à la demande des pétitionnaires par la société C2BI, société spécialisée en ingénierie de la construction ainsi que le rapport de la société " Expertise et Géotechnique SAM " établi le 5 octobre 2010 et le rapport provisoire établi par la société Fondasol en décembre 2015 ne remettent pas en cause ledit rapport quant à l'analyse du risque de mouvement de terrain.

9. D'autre part, les requérants soutiennent que la construction projetée est située en zone B du plan de prévention des risques naturels du 5 août 1992, exposée à des risques moindres et dans laquelle les occupations du sol sont possibles, que la parcelle d'assiette du projet se situe en amont de la rue Rouge-Fontaine dans l'alignement d'une série de bâtiments d'habitation construits récemment, que l'expertise du BRGM fait état d'un risque faible, hypothétique et éloigné dans le temps.

10. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le terrain d'assiette de la construction projetée, une maison d'habitation comprenant trois niveaux (sous-sol, rez-de-chaussée et étage pour 162,46m²) est situé au lieu dit " Rouge-Fontaine ", au pied du versant nord de la côte de Drince, à la limite d'une zone résidentielle et de terrains occupés par des friches et des bois. Le rapport du BRGM recommande de ne pas augmenter le risque de glissement de terrain dans ce secteur en autorisant de nouvelles constructions dans la rue Rouge-Fontaine et précise que " bien que des déformations soient faibles et peu pénalisantes à ce jour (depuis quelques dizaines d'années), le risque l'accélération du mouvement est toujours possible à l'échelle de 100 ans (échelle de temps pour un PPR) " et note que dans cette hypothèse " les moyens techniques visant à le ralentir s'avéreraient coûteux car dépassant largement le cadre de la parcelle à l'étude ". Par suite, en fondant l'arrêté litigieux sur les dispositions de l'article R. 111-2 précité, le maire de la commune de Rombas n'a pas, au vu des éléments d'information dont il disposait alors, entaché sa décision d'erreur d'appréciation.

11. En deuxième lieu, les requérants soutiennent que les insuffisances du projet au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme n'impliquaient que des prescriptions dans l'arrêté de permis de construire.

12. Il ressort cependant de l'étude réalisée par le BRGM qu'une construction ne pourrait être envisagée qu'après la réalisation d'une étude géotechnique incluant la pose d'un inclinomètre et son suivi pendant une durée d'un an, permettant ainsi d'adapter la structure de la construction projetée aux déformations prévisibles, si celles-ci devaient en définitive se révéler faibles. Ce constat est corroboré par les conclusions du rapport d'expertise établi à la demande des requérants par la société C2BI qui indique que si le projet en litige ne devrait pas poser de souci technique majeur, il est recommandé de procéder à la réalisation d'une étude de sol par un géotechnicien.

13. Si les requérants évoquent la méconnaissance des articles R. 431-4 et suivants du code de l'urbanisme, qui énumèrent de façon limitative les pièces devant accompagner la demande de permis de construire, l'invocation de la méconnaissance de ces dispositions est inopérante, car les prescriptions spéciales dont un permis est, le cas échéant, assorti, ne constituent pas l'une des pièces à joindre à une demande de permis.

14. Le maire de la commune de Rombas n'a pas méconnu le sens des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en ne délivrant pas aux requérants un permis de construire assorti de prescriptions spéciales dès lors qu'à la date où il s'est prononcé, il ne pouvait vérifier, ainsi que le recommandait le BRGM, l'existence d'une rupture en profondeur, et par suite la stabilité de la parcelle au regard des mouvements de terrain.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. H...et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Le présent arrêt qui rejette la requête de M. H...et autres, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérants doivent être rejetées.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Rombas, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. H...et autres une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Rombas au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. H...et autres est rejetée.

Article 2 : M. I...H..., Mme C...H..., M. J...H..., M. G...H..., M. F...H..., M. A...H...et M. D...H...verseront solidairement à la commune de Rombas une somme de 1 500 euros (mille cinq cent euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I...H..., Mme C...H..., M. J... H..., M. G...H..., M. F...H..., M. A...H...et M. D... H...et à la commune de Rombas.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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N° 15NC00823


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00823
Date de la décision : 14/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Légalité des plans. Modification et révision des plans.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SCP GANDAR - MULLER - BUCHHEIT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-01-14;15nc00823 ?
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