Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 1er août 2014 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.
Par un jugement n° 1405327 du 18 février 2015 le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 mars 2015, MmeB..., représentée par
Me Andreini, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 1er août 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai, et, dans les deux cas, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me Andreini en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle ne pourra pas accéder aux soins nécessaires au traitement de ses multiples pathologies dans son pays d'origine, vers lequel elle ne peut voyager sans risque et elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire est fondée sur une décision de refus de séjour illégale;
- la décision fixant le pays de destination est fondée sur une obligation de quitter le territoire illégale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2015, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 25 juin 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre, président-assesseur,
- et les observations de MeC..., substituant Me Andreini, représentant Mme B....
1. Considérant que Mme A...B..., ressortissante arménienne, est entrée en France selon ses déclarations le 5 juillet 2011 accompagnée de sa mère, Seyran, de son frère, Zada, et de sa belle-soeur, Nane ; que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 19 novembre 2012 et la Cour nationale du droit d'asile le 8 octobre 2013 ; que l'intéressée a sollicité l'octroi d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que le préfet du Bas-Rhin lui a accordé une autorisation provisoire de séjour valable du 14 janvier au 13 juillet 2014 ; que Mme B...en a demandé le renouvellement le 10 juin 2014 ; que, par un arrêté en date du 1er août 2014, le préfet du Bas-Rhin a rejeté cette demande, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que
Mme B...relève appel du jugement du 18 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions relatives à l'aide juridictionnelle :
2. Considérant que si Mme B...sollicite, par l'intermédiaire de son conseil, le bénéfice de l'aide de l'aide juridictionnelle provisoire, le président de la section administrative d'appel du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nancy a accordé, par une décision du 25 juin 2015, postérieure à l'introduction de la requête, le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à l'intéressée ; que, dès lors, ses conclusions tendant à ce que soit prononcée son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant qu'il ressort des certificats médicaux versés au débat contentieux que MmeB..., qui s'est vu reconnaître un taux d'invalidité au moins égal à 80%, souffre de problèmes oculaires graves ainsi que de troubles pulmonaires et psychologiques ; que, par un avis du 9 juillet 2014, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que si le défaut de prise en charge médicale de Mme B...peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe un traitement approprié dans son pays d'origine à destination duquel elle peut voyager sans risque ;
6. Considérant que contrairement à ce que soutient la requérante, la charge de la preuve de la disponibilité du traitement médical exigé ne repose pas exclusivement sur l'administration ; que dans les termes où ils sont rédigés, les certificats médicaux dont se prévaut MmeB..., qui ne saurait par ailleurs utilement faire valoir des difficultés d'accès aux soins, se bornent à décrire la pathologie dont elle souffre et les traitements suivis et ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation du préfet quant à la possibilité qu'elle puisse bénéficier d'un traitement approprié à ses pathologies dans son pays d'origine ; qu'il n'est pas sérieusement contesté, au vu de la liste des médicaments disponibles en Arménie versée en première instance par le préfet, que les médicaments prescrits en France à
Mme B...ou d'autres médicaments équivalents aux fins de traiter ses pathologies ne seraient pas disponibles dans son pays d'origine ; que les rapports émanant notamment de Caritas et de l'OMS, dont la requérante se prévaut, ne sont pas de nature, eu égard à leur caractère général, à invalider ce constat ; que les certificats médicaux établis postérieurement à la décision attaquée, qui au demeurant ne prescrivent aucune indication chirurgicale, selon lesquels des éléments nouveaux se rajoutent au dossier médical de Mme B...qui souffre d'une pathologie neurologique évolutive et que des examens complémentaires seraient en cours, ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé sur lequel s'est appuyé le préfet pour refuser le titre de séjour sollicité ; qu'en outre, si elle fait valoir qu'elle ne peut voyager sans risque vers l'Arménie compte tenu des multiples pathologies dont elle souffre et qu'elle a besoin de l'assistance quotidienne d'une tierce personne, elle ne produit aucun élément en ce sens de nature à contredire l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que si Mme B...fait valoir qu'elle est présente en France depuis trois ans et que son frère et sa belle-soeur l'assistent dans tous les gestes de la vie quotidienne, il ne ressort pas des pièces des pièces du dossier que cette assistance soit effectivement dispensée par ces derniers ; que sa mère fait également l'objet d'une mesure d'éloignement ; que la requérante a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 42 ans et n'établit pas y être dépourvue d'attaches privées et familiales ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, elle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté ;
10. Considérant, en second lieu, que le préfet n'a pas, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à Me Andreini de la somme de 1 800 euros ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de Mme B...tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N°15NC00529