Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Vinci Construction Terrassement, venant aux droits de la société GTM Terrassement et la société Weiler ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le département de la Moselle à leur verser la somme de 4 865 073 euros HT, assortie de la taxe sur la valeur ajoutée, de la révision contractuelle ainsi que des intérêts moratoires au titre du solde du marché de terrassement pour la réalisation de la déviation de Faulquemont sur la route départementale 910.
Par un jugement n° 0606353 du 5 décembre 2013, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné le département de la Moselle à verser à ces sociétés, d'une part, la somme de 171 740,93 euros HT, majorée de la taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts moratoires à compter du 4 juin 2006 et, d'autre part, la somme de 21 310,97 euros au titre des frais d'expertise.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 6 février 2014 et les 6 janvier et 2 juillet 2015, la société Vinci Construction Terrassement, venant aux droits de la société GTM Terrassement et la société Weiler, représentées par Me A...demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 décembre 2013 en tant que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande relative aux postes " conséquences du décalage de la période d'exécution ", " intempéries " et " environnement du chantier " et accordée une indemnisation plus faible que celle demandée au titre des postes " rémunération des purges ", " révision " et " frais d'expertise ;
2°) de condamner le département de la Moselle à leur verser la somme de 4 865 073 HT, majorée de la taxe sur la valeur ajoutée ou, subsidiairement, la somme de 4 272 993,97 euros HT majorée de la taxe sur la valeur ajoutée, sommes qui devront être augmentée de la révision des prix et des intérêts moratoires au taux de 4,11% à compter du 4 juin 2006 et de la capitalisation des intérêts ;
3°) de condamner le département de la Moselle à leur rembourser l'intégralité des frais d'expertise, soit la somme de 42 621,94 euros TTC ;
4°) de mettre à la charge du département de la Moselle le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- le département a accepté leur offre variante n°3 qui permettait de proposer un prix inférieur mais mettait à la charge du département des obligations en termes d'organisation du chantier, lui donnant ainsi valeur contractuelle ;
- le département a méconnu ses obligations contractuelles en matière d'enchaînement planifié des tâches, de fourniture de données topographiques précises et du cadre d'intervention du groupement ;
- cette méconnaissance de ses obligations par le département a eu des conséquences financières importantes pour le groupement qui a pourtant rempli ses obligations en matière de délai ;
- le groupement a dû effectuer la purge des mauvais terrains découverts à l'occasion du décapage du terrain en place sans être rémunéré, le maître d'ouvrage ayant omis de lister cette prestation dans le bordereau des prix unitaires ;
- le groupement peut prétendre à l'application de la clause de révision des prix et au remboursement de l'intégralité des frais d'expertise ;
- les demandes incidentes du département doivent être rejetées.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 septembre 2014 et 9 juillet 2015, le département de la Moselle, représenté par la SELARL Molas et Associés, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête présentée par les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler ;
2°) d'annuler le jugement du 5 décembre 2013 en tant que le tribunal administratif de Strasbourg a réintégré dans le décompte général la somme de 171 740,93 euros HT et a mis à sa charge la moitié des frais d'expertise ;
3°) à titre subsidiaire, de condamner la société Arcadis à le relever et garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
4°) de mettre à la charge des sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler le versement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le marché a été notifié aux sociétés requérantes dans le délai de validité de leur offre et l'ordre de service de démarrage des travaux dans les quinze jours suivant cette notification ;
- ni le planning prévisionnel qui figurait au dossier de consultation des entreprises ni le planning annexé au mémoire technique de l'offre " variante 3 " n'ont de pas valeur contractuelle ;
- la demande des sociétés requérantes concernant les conséquences du décalage de la période d'exécution des travaux était irrecevable dès lors qu'elles n'ont formulé aucune réserve sur l'ordre de service n°TER08 qui validait la solution technique de remplacement proposée par les entreprises en ne prévoyant pas de prix supplémentaires ;
- ce dont les entreprises demandent à être indemnisées sous l'intitulé " environnement du chantier, ne sont que des sujétions prévisibles ;
- les sociétés requérantes n'ont formulé aucune réserve sur la qualité des documents topographiques alors que les articles 7.1 et 7.2 du cahier des clauses techniques particulières, s'agissant du levé topographique et du piquetage général, comportent une clause selon laquelle les documents fournis sont réputés acceptés tacitement par l'entrepreneur dès réception de l'ordre de service de démarrage des travaux et que tous travaux supplémentaires de piquetage seront à la charge de l'entreprise ;
- qu'il résulte du compte rendu de chantier n°5 que le lissage de la polygonale générale correspond à une proposition de l'entreprise acceptée par le maître d'oeuvre et qu'il n'a pas été fait état de difficulté ;
- que le maître d'ouvrage n'a pas été saisi ni averti de cette question dont la responsabilité incombe au maître d'oeuvre ;
- les montants accordés par les premiers juges au titre des prestations topographiques, des reprises d'études d'exécution et de la mise à la cote des premiers terrassements sont erronés et excessifs ;
- les travaux de " purge du terrain en place " sont prévus par l'article 3.4.2 du cahier des clauses techniques particulières et leur prix était prévu dans le bordereau des prix unitaires ;
- les frais d'expertise doivent être supportés par le requérant ;
- subsidiairement, s'il devait être considéré qu'une faute a été commise vis-à-vis de l'entrepreneur, les conséquences préjudiciables de la mise au point des données topographiques et relatives à l'environnement de chantier devraient être prises en charge par le maître d'oeuvre
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2015, la société Arcadis ESG venant aux droits de la société EEG Simecsol, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'appel en garantie formé par le département de la Moselle et toute demande formée à l'encontre de la société Arcadis ESG ;
2°) de rejeter la requête de Vinci Construction Terrassement ;
3°) de rejeter l'appel en garantie formé par le département de la Moselle et toute demande formée à l'encontre de la société Arcadis ESG ;
4°) de condamner solidairement Vinci Construction Terrassement et le département de la Moselle à verser à la société Arcadis ESG la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
5°) De condamner Vinci Construction Terrassement et le département de la Moselle aux dépens comprenant les frais d'expertise.
Elle soutient que :
- elle a parfaitement rempli ses obligations contractuelles au stade de l'appel d'offres comme au stade de l'exécution des travaux ;
- dans son analyse des offres elle a classé l'offre en variante n° 3 du groupement GTM Terrassement - Weiler qu'en troisième position globale et que c'est le maître d'ouvrage, dans une décision propre, qui a décidé de lui attribuer le marché après négociation ;
- le contenu de la mission de maîtrise d'oeuvre ne comprenait ni l'établissement de la polygonale, ni la commande ou le pilotage de l'intervention d'un géomètre pour la déterminer qui relevaient du maître de l'ouvrage ;
- que l'appel en garantie du département n'est pas justifié dès lors que le maître d'oeuvre avait attiré l'attention du maître d'ouvrage sur son obligation de remise de la polygonale et ainsi exercé son devoir de conseil ;
- le maître d'ouvrage ne caractérise pas de faute du maître d'oeuvre au titre de l'environnement de chantier ;
- elle n'a commis aucune faute dès lors qu'elle n'avait pas proposé de retenir l'offre variante du groupement mais qu'elle avait au contraire souligné la sensibilité aux intempéries de cette proposition.
Vu les autres pièces du dossier
Vu :
- le code des marchés publics,
- le cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux, approuvé par le décret no 76-87 du 21 janvier 1976 modifié,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,
- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,
- les observations de Me A...représentant les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler,
- les observations de MeC..., représentant le département de la Moselle,
- et les observations de MeB..., représentant la société Arcadis.
Une note en délibéré présentée par les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler a été enregistrée le 18 novembre 2015.
1. Considérant que le département de la Moselle a passé un marché public de travaux le 30 avril 2002 pour la réalisation de travaux de terrassement, assainissement et couche de forme relatifs à la déviation de Faulquemont sur la RD 910 avec un groupement composé de la société GTM Terrassement et de la société Weiler ; que la maîtrise d'oeuvre de l'opération était assurée par la société EEG Simecsol ; que la réception a été prononcée le 29 juillet 2005 avec effet au 30 novembre 2003 ; qu'en l'absence de transmission de son projet de décompte final par le groupement, malgré une mise en demeure, le décompte général a été établi d'office et notifié le 12 janvier 2006 ; que le groupement a alors présenté un mémoire en réclamation le 20 février 2006 pour un montant de 5 186 074 euros ; que le maître d'ouvrage ayant implicitement rejeté cette demande, la société Vinci Construction Terrassement, venant aux droits de la société GTM Terrassement et la société Weiler ont saisi le tribunal administratif de Strasbourg en vue du règlement financier de ce marché ; que, par un jugement en date du 5 décembre 2013, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné le département de la Moselle à verser aux sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler une somme de 171 740,93 euros HT majorée de la taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts moratoires à compter du 4 juin 2006 ; que les sociétés relèvent appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à leur demande ; que, par la voie de l'appel incident, le département de la Moselle conteste la condamnation prononcée à son encontre ;
Sur les demandes indemnitaires des sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler :
2. Considérant que le titulaire d'un marché peut obtenir l'indemnisation des difficultés rencontrées dans l'exécution de ce marché qui sont imputables à une faute de la personne publique, maître de l'ouvrage, mais pas du seul fait de fautes commises par d'autres intervenants ;
En ce qui concerne le choix de l'offre et la notification de l'ordre de service de démarrage des travaux :
3. Considérant que, pour proposer une offre économiquement plus intéressante, le groupement GTM Terrassement - Weiler a proposé quatre variantes caractérisées par un souci de programmation optimale des travaux, d'une part, dans des conditions climatiques favorables, au regard de la grande sensibilité des travaux de terrassement aux périodes pluvieuses et, d'autre part, par rapport aux contraintes générées par la présence d'autres entreprises sur le chantier pour la déviation des réseaux et la réalisation des ouvrages d'art ; que ces variantes intégraient ainsi un calendrier d'exécution et un phasage des travaux stricts ; que ce calendrier prévoyait un démarrage des travaux en mai 2002, ce qui impliquait, compte tenu de la période de préparation du chantier de trente-sept jours prévue par le cahier des clauses techniques particulières, une notification du marché dès le mois de mars 2002 ; que le marché n'a toutefois été notifié au groupement que le 13 mai 2002 et l'ordre de service de démarrage des travaux le 29 mai 2002 ; que le groupement requérant, estimant que cette notification était tardive au regard du planning annexé à son offre variante 3, retenue par le département de la Moselle, soutient que ce dernier a commis un manquement à ses obligations contractuelles ;
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable au marché en litige : " Pour les marchés passés selon les procédures formalisées, l'acte d'engagement et, le cas échéant, les cahiers des charges en sont les pièces constitutives. L'acte d'engagement est la pièce signée par un candidat (...) à un marché public dans laquelle le candidat présente son offre ou sa proposition dans le respect des clauses du cahier des charges qui déterminent les conditions dans lesquelles le marché est exécuté. (...)" ; que l'article 12 du même code précise que le marché comporte obligatoirement : " (...)5°. L'énumération des pièces du marché ; ces pièces sont présentées dans un ordre de priorité défini par les parties contractantes. Sauf cas d'erreur manifeste, cet ordre de priorité prévaut en cas de contradiction dans le contenu des pièces " ; qu'en l'espèce, le cahier des clauses administratives particulières énonce que les pièces constitutives du marché sont l'acte d'engagement, le cahier des clauses administratives particulières et le cahier des clauses techniques particulières, les axes en plan et les listings d'axes, les profils en long et en travers type, le plan général de coordination, le bordereau de prix, le détail estimatif , et enfin, le SOPAQ ;
5. Considérant que ni le planning général prévisionnel, ni le planning annexé à l'offre en variante du groupement GTM Terrassement / Weiler ne figurent parmi les pièces contractuelles du marché ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la période de réalisation des travaux est un paramètre déterminant de l'offre variante 3 que le maître d'ouvrage a choisi de retenir, contre l'avis du maître d'oeuvre, après avoir été averti des contraintes pesant sur cette offre en termes de calendrier ; que dans les circonstances de l'espèce, alors que le maître d'ouvrage ne pouvait en ignorer l'importance, ce calendrier doit être regardé comme ayant déterminé, dans la commune intention des parties, les périodes d'exécution et le phasage des opérations de terrassement ;
6. Considérant toutefois, qu'en application des dispositions de l'article 12 du code des marchés publics précitées, l'acte d'engagement et les annexes auxquelles il renvoie expressément priment sur les autres documents ; que l'article 1er de l'acte d'engagement signé par les requérantes prévoyait une durée de validité de l'offre de cent-vingt jours à compter de la date limite de remise des offres ; qu'il résulte de l'instruction que les requérantes ont déposé leur offre et ses quatres variantes le 4 mars 2002, date limite fixée par le règlement de consultation pour le dépôt des offres ; que l'acte d'engagement a été signé par le maître d'ouvrage le 30 avril 2002 et l'ordre de service de démarrage des travaux le 29 mai 2002, soit dans le délai de validité de l'offre ; qu'en notifiant l'ordre de service de démarrage des travaux en mai 2002, après avoir organisé une réunion préliminaire associant le maître d'ouvrage, le maître d'oeuvre et les sociétés membres du groupement attributaire le 25 avril 2002 et alors que la première réunion de chantier a eu lieu le 22 mai 2002, le maître d'ouvrage ne peut ainsi être regardé comme ayant commis un manquement à ses obligations contractuelles ;
7. Considérant, en second lieu, que les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler soutiennent que le département de la Moselle a commis une faute en retenant leur offre en variante ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les documents de la consultation prévoyaient expressément un délai de validité des offres de cent-vingt jours ; que même si le groupement a indiqué avoir déterminé un phasage strict impliquant le respect du calendrier qu'il avait établi, il était tenu par son offre pendant la durée de ce délai ; que le maître de l'ouvrage n'a pas commis de faute en retenant une offre en variante, dans le délai de validité de cette offre, alors d'ailleurs que les sociétés ont-elles-mêmes indiqué, dans un courrier du 30 juillet 2002, que le phasage des travaux et les délais pouvaient encore être respectés sous réserve de certaines dispositions constructives modificatives ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté leur demande indemnitaire relative aux conséquences du décalage du démarrage des travaux ;
En ce qui concerne le déroulement du chantier :
9. Considérant que, sous l'intitulé, " environnement de chantier ", les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler demandent à être indemnisées des conséquences de décalage de leurs prestations et du fait qu'elles ont été conduites à intervenir en même temps que les entreprises chargées de la réalisation des ouvrages d'art et de la déviation des réseaux et qu'elles ont ainsi été tributaires de l'avancement de ces prestations ;
10. Considérant que les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler soutiennent que le département de la Moselle a commis une faute dans la direction du chantier ; que le seul constat du décalage de leurs prestations, alors même que le département de la Moselle a retenu leur offre en variante qui prévoyait un phasage précis des travaux, ne saurait suffire à établir une faute imputable au département de la Moselle dans la direction des travaux ; que ces sociétés n'apportent aucun élément de nature à établir que le département de la Moselle serait responsable de ce décalage et qu'il aurait ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que, par suite, ces sociétés ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté leur demande indemnitaire relative au déroulement du chantier ;
En ce qui concerne les données topographiques :
S'agissant de l'existence d'une faute contractuelle du département de la Moselle :
11. Considérant qu'aux termes de l'article 7.1 du cahier des clauses administratives particulières : " Le levé topographique de l'opération, à la charge du maître d'ouvrage, sera communiqué à l'entreprise dans les quinze jours suivant la notification du marché. Il est réputé accepté tacitement par l'entrepreneur dès réception de l'ordre de service de démarrage des travaux " ; que l'article 7.2 du même document précise que : " Le piquetage général de l'axe sera pris en charge en totalité par le maître d'ouvrage avant la passation du marché. Le plan de piquetage correspondant sera communiqué à l'entrepreneur dans les 15 jours suivant la notification du marché. Il est réputé accepté tacitement par l'entrepreneur dès réception de l'ordre de service de démarrage des travaux. Tout travaux supplémentaires de piquetage seront à la charge de l'entreprise " ; qu'il résulte de ces stipulations que les relevés topographiques et le piquetage général de l'axe devaient être transmis aux entreprises, par le maître de l'ouvrage, au plus tard le 29 mai 2002 ; qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que les premiers documents n'ont été transmis aux requérantes que le 17 juin 2002, et d'autre part, que ces documents se sont avérés être incomplets et inexacts ; que le calage définitif du piquetage général et le lissage de la polygonale ont été confirmés à l'entreprise par l'ordre de service n°TER06 en date du 8 août 2002 ; que les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler sont ainsi fondées à soutenir qu'en leur remettant tardivement des documents au demeurant inexacts, le maître de l'ouvrage a commis un manquement à ses obligations contractuelles, la circonstance que le département de la Moselle n'aurait pas été informé des erreurs affectant les relevés remis aux entreprises le 17 juin 2002, autrement que par le compte-rendu de la réunion de chantier du 18 juin 2002, étant sans incidence ;
S'agissant des demandes indemnitaires du groupement :
12. Considérant que le département soutient que les sociétés requérantes ne peuvent plus former de réclamation dès lors qu'elles sont réputées avoir acceptés tacitement le levé topographique de l'opération et le piquetage général de l'axe, dès réception de l'ordre de service de démarrage des travaux ; que cette acceptation tacite ne pouvait toutefois intervenir que dans le cas d'une réception de ces documents au moment prévu par les clauses du marché, à savoir dans les quinze jours suivant la notification du marché et non, comme en l'espèce, après la notification de l'ordre de service de démarrage des travaux le 27 mai 2002 ; que les entreprises ont alerté le maître d'oeuvre sur les erreurs et incohérence affectant ces documents dès le lendemain de leur transmission, soit le 18 juin 2002 ; que, par suite, le département n'est pas fondé à soutenir que ces documents auraient été tacitement acceptés ;
13. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'en raison des erreurs affectant les relevés topographiques transmis par le maître d'ouvrage, les sociétés requérantes ont, avec l'accord du maître d'oeuvre, réalisé des prestations supplémentaires pour réaliser des relevés exacts ; qu'alors qu'il résulte de l'instruction que les prestations topographiques qu'elles ont réalisées étaient achevées à la fin du mois de juillet 2002 et n'ont ainsi duré qu'un mois et que la secrétaire et le chef de mission, qui étaient présents sur place pour toute la durée du chantier n'ont ainsi pas été dépêchés pour ces seules prestations, les sociétés ne produisent aucun élément de nature à établir que le montant de 12 090,44 euros HT retenu par le tribunal au titre de la mise au point des données topographiques serait insuffisant ;
14. Considérant, en deuxième lieu, que les sociétés requérantes indiquent avoir dû exposer des frais de reprise régulière de leurs plans d'exécutions qu'elles estiment à 48 428,41 euros HT ; que, d'une part, s'il n'est pas établi qu'elles ont dû reprendre quotidiennement ces plans comme elles le font valoir, il résulte de l'instruction que le 17 juin 2002, date à laquelle les premiers relevés topographique leur ont été remis, elles avaient déjà reçu l'ordre de service de démarrage des travaux et avaient donc nécessairement commencé à établir leurs plans d'exécution ; que les erreurs affectant ces premiers relevés les ont, par suite, nécessairement conduites à reprendre ces plans d'exécution après avoir reçu notification des relevés corrects ; que, dans ces conditions, le département de la Moselle n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a admis le principe d'une indemnisation au titre de la reprise des plans d'exécutions ;
15. Considérant, d'autre part, que les éléments produits par les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler ne permettent pas d'établir que le montant de 12 692,20 euros retenu par le tribunal au titre de la reprise des plans d'exécution, serait insuffisant ;
16. Considérant, en troisième lieu, que les sociétés requérantes indiquent avoir supporté des frais de terrassement supplémentaires liés à la nécessité de maintenir une revanche altimétrique de quinze cm en arase jusqu'au 8 août 2002 en raison de l'incertitude sur la topographie pendant la réalisation des premiers terrassements au cours du mois de juillet 2002 ; que le département, qui ne conteste ni la tardiveté de la remise des données topographiques, ni les erreurs et incohérences affectant ces documents ne produit aucun élément de nature à établir que les sociétés n'auraient pas effectivement réalisé cette revanche ; que pour déterminer le coût des terrassements supplémentaires, l'expert a pris en compte une moyenne entre le rendement estimé et le rendement réalisé ; que les éléments apportés par les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler ne permettent pas de considérer que le montant de 51 437,79 euros HT retenu par les premiers juges en tenant compte des indications fournies par l'expert serait sous-évalué ; que, par suite, elles ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu ce montant ;
En ce qui concerne les intempéries :
17. Considérant que les sociétés soutiennent que les fautes commises par le département de la Moselle ont entraîné un décalage des prestations objet de leur marché vers une période où les conditions climatiques étaient défavorables ; qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que seule une faute dans la remise des données topographiques peut être retenue à l'égard du maître de l'ouvrage ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette faute aurait, à elle-seule, entraîné le décalage dont les sociétés demandent à être indemnisées alors que les entreprises ont, alors même qu'elles réalisaient les études topographiques complémentaires, commencé leurs prestations de terrassement ; qu'ainsi, le fait d'avoir été contraintes d'effectuer leurs travaux dans des conditions climatiques moins favorables que celles qu'elles auraient pu connaître si leur planning avait été respecté n'a pas de lien avec la faute commise par le département ; que, par suite, elles ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande à ce titre ;
Sur la rémunération des purges :
18. Considérant que les sociétés soutiennent que le maître d'ouvrage a oublié de lister dans le bordereau des prix unitaires la tâche optionnelle de purge des terrains en place et que de nombreuses purges de cette nature se sont avérées nécessaires ;
19. Considérant que le cahier des clauses techniques particulières prévoyait, d'une part, la purge des terrains support à l'article 3.4.2 et, d'autre part, la purge des remblais à l'article 3.7 ; qu'il résulte de l'instruction que le prix 2.6 du bordereau des prix unitaires, intitulé " mise en oeuvre des remblais ", ne concerne que les purges des remblais et non celles du sol support ; que les sociétés requérantes ont demandés en vain la fixation d'un prix correspondant ; qu'il n'est pas contesté qu'un volume de 38 208,32 m3 de purges du sol support a été réalisé sont les sociétés Vinci Construction et Weiler sont fondées à demander le paiement ; que le prix de 13,63 euros HT du m3 qu'elles définissent en faisant la somme de différents prix mentionnés dans le bordereau des prix ne peut toutefois pas être retenu dès lors que ce calcul intègre des prestations sans lien avec les purges ; qu'eu égard aux prix fixés par le marché pour des prestations analogues, il sera fait une juste appréciation du prix des purges en le fixant à 2,50 euros HT du m3 ; que par suite, ni le département de la Moselle, ni les sociétés Vinci Construction et Weiler ne sont fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a mis à la charge du département la somme de 95 520,80 euros au titre de la rémunération des purges ;
Sur la révision des prix :
20. Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable au marché en litige, qui contrairement à ce que soutiennent les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler, est également applicable au solde du marché : " Lorsque le marché comporte une clause de variation de prix la valeur finale des références utilisées pour l'application de cette clause doit être appréciée au plus tard à la date de réalisation des prestations telle que prévue par le marché, ou à la date de leur réalisation réelle si celle-ci est antérieure (...) " ; que, pour l'application de la clause de révision de prix prévue au marché, il y a donc lieu de tenir compte de l'indice paru à la date d'exécution de chacune des prestations et non de l'indice en vigueur au dernier mois d'exécution du marché ;
Sur les dépens :
21. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...) " ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de partager les frais d'expertise à parts égales entre le département et le groupement d'entreprises ;
Sur l'appel en garantie formé par le département de la Moselle contre le maître d'oeuvre :
22. Considérant, en premier lieu, que l'article 5 du programme prévoyait que " le maître d'oeuvre devra valider les données fournies par le maître d'ouvrage et lui proposer les investigations complémentaires qui lui paraissent nécessaires pour l'étude. (...) relevé topographique : le maître d'oeuvre aura quinze jours pour les approuver ou demander un lever complémentaire au maître d'ouvrage " ; qu'il résulte de l'instruction que les relevés topographiques ont été remis aux entreprises le 17 juin 2002 ; que dès le lendemain, les entreprises ont adressé un courrier au maître d'oeuvre faisant état des difficultés rencontrées avec ces données topographiques ; qu'au cours de la réunion de chantier du 20 juin 2002, les entreprises ont indiqué au maître d'oeuvre que les données transmises par le maître d'ouvrage étaient erronées ; que le maître d'oeuvre a alors accepté que les sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler réalisent des études topographiques pour corriger les erreurs affectant ces documents ; qu'il n'a toutefois jamais alerté le maître d'ouvrage, pourtant responsable de la fourniture de ces données, des erreurs et imprécisions affectant ces documents et a laissé le groupement intervenir sans demander, contrairement à ce qui était prévu, un lever complémentaire au maître de l'ouvrage ; que, dans ces conditions, le département de la Moselle est fondé à soutenir que la société EEG Simecsol a commis une faute ; que cette faute est directement à l'origine des seuls surcoûts mis à la charge du département au titre de la reprise des études topographiques ; que le département est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a refusé de condamner la société Arcadis, venant aux droits de la société EEG Simecsol, à le garantir ;
23. Considérant qu'eu égard à la faible importance de la faute commise par le maître d'oeuvre dans les surcoûts mis à la charge du département au titre de la mise au point des données topographique, la société Arcadis peut être condamnée à garantir le département à hauteur de 10%, des condamnations prononcées à son encontre pour un montant de 12 090,44 euros HT, au titre de ces seuls surcoûts ;
24. Considérant, en deuxième lieu, que l'article 1.6 " contenu des éléments de mission " du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché de maîtrise d'oeuvre prévoyait qu'il appartenait au maître d'oeuvre de mettre au point le dossier de consultation des entreprises ; que le maître d'oeuvre devait, en conséquent, lister les prix inclus dans le bordereaux des prix unitaires ; que, dans ces conditions, le département de la Moselle est fondé à soutenir que la société EEG Simecsol a commis une faute dans l'exécution de sa mission ; que cette faute n'est toutefois à l'origine d'aucun surcoût mis à la charge du département qui aurait dû en tout état de cause rémunérer cette prestation prévue au marché ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
25. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions que présentent les parties et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête des sociétés Vinci Construction Terrassement et Weiler est rejetée.
Article 2 : La société Arcadis est condamnée à garantir le département de la Moselle à hauteur de 10% des surcoûts correspondant aux frais de mise au point des données topographiques, soit à hauteur de 1 209,04 euros HT.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 5 décembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Vinci Construction Terrassement, à la société Weiler, au département de la Moselle et à la société Arcadis ESG.
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N° 14NC00216