La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2015 | FRANCE | N°15NC00178

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 03 décembre 2015, 15NC00178


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler, d'une part, sa notation au titre de l'année 2011 ainsi que la décision du 15 février 2012 par laquelle le maire de Saint-Avold l'a affecté aux ateliers municipaux et, d'autre part, la décision du 31 mai 2012 par laquelle le maire de Saint-Avold lui a infligé la sanction d'abaissement d'un échelon.

Par un jugement n° 1201288 - 1203667 du 20 novembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes.

Procédu

re devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 janvier et 3 s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler, d'une part, sa notation au titre de l'année 2011 ainsi que la décision du 15 février 2012 par laquelle le maire de Saint-Avold l'a affecté aux ateliers municipaux et, d'autre part, la décision du 31 mai 2012 par laquelle le maire de Saint-Avold lui a infligé la sanction d'abaissement d'un échelon.

Par un jugement n° 1201288 - 1203667 du 20 novembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 janvier et 3 septembre 2015, M. A... B..., représenté par Me Fombaron, demande à la cour :

1) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 20 novembre 2014 ;

2) d'annuler sa notation pour l'année 2011 ;

3) d'annuler la décision du 15 février 2012 par laquelle le maire de Saint-Avold l'a affecté aux ateliers municipaux ;

4) d'annuler la décision du 31 mai 2012 par laquelle le maire de Saint-Avold lui a infligé la sanction d'abaissement d'un échelon ;

5) d'enjoindre à la commune de Saint-Avold de le réintégrer dans ses fonctions initiales, de réexaminer sa situation individuelle au regard de l'examen professionnel lui permettant d'être nommé dans le statut de policier municipal et de reconstituer sa carrière, dans un délai de huit jours et sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

6) de mettre à la charge de la commune de Saint-Avold la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la légalité de sa notation pour 2011 :

- sa notation pour 2011 a été établie dans des conditions irrégulières ; elle a été effectuée par son supérieur hiérarchique, qui n'occupait ce poste que depuis six mois ; il était isolé, travaillait dans un local exigu et ne pouvait, dans les fonctions qui étaient les siennes, faire preuve de ses qualités professionnelles ; aucune fiche de poste ne lui a été transmise ;

- eu égard à sa manière de servir, sa note n'est pas justifiée ; l'utilisation abusive de son forfait téléphonique, qui est une pratique courante dans son service, est le résultat d'une erreur de manipulation ; les absences, retards et négligences qui lui sont reprochés n'ont pas causé de perturbations dans l'organisation du service ;

En ce qui concerne la légalité de la décision du 15 février 2012 par laquelle le maire de Saint-Avold l'a affecté aux ateliers municipaux :

- la mesure de changement d'affectation, qui a des incidences sur sa situation professionnelle, constitue une décision susceptible de recours ;

- cette décision a été prise sans que soit consultée la commission administrative paritaire compétente ;

- cette décision n'a pas été précédée de la communication de son dossier individuel ;

- elle constitue une sanction disciplinaire déguisée, qui n'a pas été prise dans l'intérêt du service ;

En ce qui concerne la légalité de la décision du 31 mai 2012 portant abaissement d'un échelon :

- les droits de la défense ont été méconnus ; la lettre de convocation au conseil de discipline ne comporte pas la mention, obligatoire, relative à la communication de son dossier administratif ;

- des éléments relatifs à son activité syndicale sont mentionnés dans son dossier administratif ;

- la matérialité du comportement violent qui lui est reproché n'est pas établie ;

- son comportement a toujours été exemplaire ; la sanction n'est pas justifiée et a des conséquences psychiques, financières et professionnelles graves ; il était, ce jour-là, en situation de détresse psychologique et ne s'attendait pas à ce que sa notation lui soit notifiée ;

- la sanction d'abaissement d'échelon constitue une sanction disciplinaire déguisée ; elle n'est pas en lien avec l'incident du 18 janvier 2012 mais constitue un moyen pour la commune de le sanctionner en raison de l'exercice de ses droits syndicaux ; le tribunal administratif de grande instance a, au demeurant, reconnu le maire de la commune de Saint-Avold coupable du délit de discrimination syndicale ; la décision en litige est ainsi entachée de détournement de pouvoir ;

- la décision contestée constitue un agissement de harcèlement moral prohibé ; il a été piégé par son administration pour que puisse être engagée une procédure disciplinaire à son encontre ;

- parmi tous les membres du syndicat, dont les décisions de mutation ont été reconnues illégales par le tribunal administratif de Strasbourg en raison d'un détournement de pouvoir, il est le seul à ne pas avoir été réintégré ;

- il a été sanctionné deux fois pour les mêmes faits.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2015, la commune de Saint-Avold, représentée par Me Cytrynblum, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- la demande d'annulation de sa fiche de notation est irrecevable dès lors qu'il n'a pas demandé la révision de sa note conformément à l'article 4 du décret du 14 mars 1986, ni formé de recours administratif préalable, en méconnaissance des dispositions de l'article 23 de la loi n° 2000-597 du 30 juin 2000 ;

- elle est également irrecevable en ce qu'elle est dirigée non contre la notation définitive mais contre la proposition de notation de son supérieur hiérarchique, qui ne constitue pas une décision faisant grief ;

- elle est encore irrecevable dès lors qu'elle ne porte que sur la note et non sur l'appréciation, qui est indivisible de celle-ci ;

- aucun des autres moyens soulevés par M. B...n'est fondé.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des moyens de légalité externe soulevés à l'encontre de la décision de changement d'affectation de M.B..., ces moyens étant fondés sur une cause juridique distincte de celle invoquée en première instance et constituant une demande nouvelle irrecevable en appel.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°86-473 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fuchs,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Fombaron, avocat de M. B...et de Me Cytrynblum avocat de la commune de Saint-Avold.

1. Considérant que M.B..., adjoint technique de 2ème classe de la commune de Saint-Avold depuis le 1er février 2008, employé en qualité d'agent de surveillance de la voie publique, a été affecté, à compter du 2 mai 2011 et à titre provisoire, à la surveillance d'un parking municipal puis, par une décision du 15 février 2012, aux ateliers municipaux ; que M. B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler sa notation pour l'année 2011 ainsi que la décision d'affectation du 15 février 2012 ; qu'il a également demandé l'annulation de la décision du 31 mai 2012 par laquelle le maire de la commune de Saint-Avold lui a infligé la sanction d'abaissement d'un échelon, en raison de son comportement lors de la notification par son chef de service de sa notation pour l'année 2011 ; que le requérant relève appel du jugement du 20 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses deux demandes ;

Sur les conclusions dirigées contre la notation de M. B...au titre de l'année 2011 :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 76 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " L'appréciation, par l'autorité territoriale, de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct qui donne lieu à l'établissement d'un compte rendu (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, le supérieur hiérarchique direct de M. B...occupait ses fonctions depuis six mois et les avait auparavant exercées pendant deux mois aux côtés de son prédécesseur ; qu'ainsi, il n'est pas établi qu'il n'aurait pas été à même de conduire l'entretien professionnel annuel du requérant en raison de sa prise de fonction récente ; que, par ailleurs, si M. B...allègue qu'il a été forcé de travailler dans un local exigu et sans lien avec ses collègues, ces circonstances, à les supposer avérées, ne sont pas de nature à démontrer qu'il aurait été privé de la possibilité de faire la preuve de ses qualités professionnelles, alors au demeurant qu'il n'est pas établi que les fonctions qui lui ont été confiées ne correspondaient pas à son grade ; qu'enfin, il ne ressort ni de la loi du 26 janvier 1984 visée ci-dessus, ni du décret du 14 mars 1986 relatif aux conditions générales de notation des fonctionnaires territoriaux, ni d'aucun autre texte qu'une fiche de poste doit être transmise préalablement à l'entretien de notation ; que, par suite, alors que M. B... ne peut utilement invoquer la circonstance, postérieure à la décision attaquée, qu'il aurait été irrégulièrement affecté aux ateliers municipaux, le moyen tiré de ce que sa notation au titre de l'année 2011 a été établie au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, pour abaisser de 16,25 à 14 la note attribuée en 2011 à M.B..., le maire de Saint-Avold s'est fondé sur les circonstances que sa manière de servir ne donnait pas satisfaction et qu'il devait faire preuve d'une plus grande rigueur ; que le requérant ne conteste pas les absences, négligences et retards qui lui sont reprochés mais se borne à soutenir que ceux-ci n'ont causé aucune perturbation dans l'organisation du service ; qu'il ne conteste pas non plus une utilisation abusive de son forfait téléphonique professionnel et se borne à invoquer des dépassements de forfait liés à un accès involontaire à Internet et à faire valoir que de tels abus seraient courants dans le service de la police municipale de la commune ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise l'autorité territoriale en abaissant de 2,25 points sa note doit être écarté ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité en première instance de ses conclusions, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de sa notation au titre de l'année 2011 ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 15 février 2012 par laquelle le maire a affecté M. B... aux ateliers municipaux :

6. Considérant, en premier lieu, que M. B...n'a soulevé devant le tribunal administratif de Strasbourg que des moyens tirés de l'illégalité interne de la décision attaquée ; que s'il a transmis à la juridiction un mémoire comportant une critique de la légalité externe de cette décision, celui-ci n'a été enregistré au greffe du tribunal administratif que postérieurement à la lecture du jugement ; que, contrairement à ce qu'il soutient, le jugement n'est pas irrégulier sur ce point, les vices de procédure allégués ne constituant pas des moyens d'ordre public que le tribunal aurait dû soulever d'office ; qu'il suit de là qu'il ne peut, pour la première fois en appel, invoquer les moyens tirés de la violation des droits de la défense et du défaut de communication de son dossier individuel, ces moyens étant fondés sur une cause juridique distincte et constituant une demande nouvelle, irrecevable en appel ;

7. Considérant, en second lieu, qu'une mutation dans l'intérêt du service constitue une sanction déguisée dès lors qu'il est établi que l'auteur de l'acte a eu l'intention de sanctionner l'agent et que la décision a porté atteinte à la situation professionnelle de ce dernier ; que M. B...soutient, sans que cela soit contesté, que la décision en litige lui a causé un préjudice financier ; qu'à supposer que cette décision lui ait fait grief, il ressort des pièces du dossier que la mutation de l'intéressé aux ateliers municipaux a été motivée par la fermeture pour travaux du parking à la surveillance et l'entretien duquel il était jusqu'alors affecté ; que, compte tenu de la suppression temporaire de ces fonctions, il n'est pas fondé à soutenir que sa mutation ne serait pas motivée par les nécessités du service ; qu'il n'établit pas, en outre, que son affectation aux ateliers municipaux résulterait d'une volonté de le sanctionner et aurait été prise en considération de sa personne, ni que les fonctions qu'il occupe dans sa nouvelle affectation ne correspondraient pas à son grade ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la mutation dans l'intérêt du service de M. B...constitue une sanction déguisée doit être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 février 2012 par laquelle le maire l'a affecté aux ateliers municipaux ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 31 mai 2012 infligeant à M. B...la sanction d'abaissement d'un échelon :

En ce qui concerne la légalité externe :

9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 10 juillet 1983 : " (...) Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix " ; qu'aux termes de l'article 6 du même décret : " Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline, quinze jours au moins avant la date de la réunion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception " ;

10. Considérant qu'il ne résulte ni de ces dispositions, ni d'aucune autre, que la convocation au conseil de discipline doit faire mention de la possibilité pour l'agent de consulter son dossier ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier que M. B...a été informé, par un courrier du maire daté du 5 mars 2012, de son droit à la consultation de son dossier individuel et de se faire assister par un conseil et qu'il a d'ailleurs pris connaissance de son dossier le 2 avril 2012 ; qu'il a ainsi bénéficié des moyens et d'un délai suffisants pour préparer sa défense ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense doit être écarté ;

11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1983 visée ci-dessus : " Il ne peut être fait état dans le dossier d'un fonctionnaire, de même que dans tout document administratif, des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l'intéressé " ; que si M. B...soutient, sans que cela soit contesté, qu'il a constaté lors de la consultation de son dossier individuel les 21 juin 2012 et 13 février 2013 qu'y étaient inclus des éléments relatifs à son activité syndicale, il n'établit pas, ni même n'allègue, que ces documents auraient été présents dans son dossier avant que soit prise la sanction en litige, le 31 mai 2012 ; qu'ainsi, cette circonstance, pour regrettable qu'elle soit, est postérieure à la décision attaquée et sans incidence sur la légalité de celle-ci ;

En ce qui concerne la légalité interne :

12. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des motifs de la décision en litige que M. B...a été sanctionné pour avoir tenu des propos insultants et menaçants à l'égard de sa hiérarchie ainsi que des élus de sa commune et fait preuve d'un comportement agressif ; qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier des attestations rédigées le lendemain des faits par le responsable de la police municipale et son adjointe, qu'alors que lui était notifiée, le 18 janvier 2012, sa notation au titre de l'année 2011, M. B...a fait preuve d'un comportement particulièrement insultant et virulent à l'égard de son chef de service et a menacé de se rendre au cabinet du maire pour y effectuer une " prise d'otages " ; que quatre agents de la police municipale ont dû s'interposer pour mettre fin à cette altercation ; qu'invité à s'exprimer sur les faits, lors de la séance du conseil de discipline en date du 9 mai 2012, M. B... a reconnu s'être emporté après avoir pris connaissance de sa note et a précisé que ce comportement était tout à fait inhabituel ; que s'il conteste l'existence de violences physiques, ce que corrobore l'attestation qu'il produit, rédigée le 5 mars 2012 et émanant d'un autre agent, ce motif ne fonde pas la décision en litige ; que la matérialité des violences verbales, en particulier des propos particulièrement obscènes proférés par l'intéressé à l'encontre de son chef de service, ainsi que son comportement agressif sont en revanche établis ;

13. Considérant, en deuxième lieu, qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

14. Considérant que les faits mentionnés au point 12 constituent des fautes de nature à justifier une sanction ; qu'eu égard à la nature de ces faits, en dépit de l'état de fragilité psychologique allégué par le requérant et de la circonstance selon laquelle il aurait été surpris de recevoir notification de sa notation, le maire de la commune de Saint-Avold, en abaissant d'un échelon le requérant, conformément à l'avis du conseil de discipline, ce qui constitue une sanction du deuxième groupe, n'a pas pris une sanction qui serait disproportionnée ;

15. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 visée ci-dessus : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements (...) " ;

16. Considérant qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ;

17. Considérant que le requérant fait valoir que la sanction litigieuse constitue un agissement de harcèlement moral prohibé par l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 relative aux droits et obligations des fonctionnaires ; que la dégradation de son cadre et de ses conditions de travail, ainsi que son affectation sur un poste auparavant occupé par un fonctionnaire de grade inférieur, aurait entraîné la dégradation de son état de santé avec notamment l'apparition d'un trouble dépressif en lien avec sa situation professionnelle ; que l'autorité territoriale, qui l'aurait dénigré dans la presse, chercherait à l'évincer à tout prix de ses fonctions et qu'il ferait l'objet d'une surveillance accrue depuis la création, à laquelle il a participé, de la branche locale d'un syndicat ;

18. Considérant, toutefois, que l'article de presse en date du 27 juillet 2012 auquel il fait référence ainsi que le refus du maire de reconnaître l'imputabilité au service de l'altération de son état de santé le 26 octobre 2012 et la saisine de la commission de réforme le 8 février 2013, sont postérieurs à la décision attaquée ; qu'il n'est pas établi que la sanction en litige aurait été prise en considération de l'activité syndicale du requérant, révélant une situation de harcèlement moral, alors au demeurant que les faits qui fondent cette sanction, exposés au point 12, se sont produits le 18 janvier 2012, soit antérieurement à la création de la branche locale d'un syndicat, dont les statuts ont été déposés au mois de mars 2012 ; que l'isolement et les conditions de travail non satisfaisantes dont fait état l'intéressé ne sont pas établis par les pièces du dossier ; que le requérant ne démontre pas, en outre, que les fonctions qu'il occupe aux ateliers municipaux ne correspondraient pas à son grade ; que M. B...ne peut pas non plus sérieusement soutenir que l'autorité territoriale chercherait à tout prix à l'évincer, dès lors que la sanction en litige est motivée, comme il a été dit, par le comportement agressif et irrespectueux de l'intéressé ; que la seule production de deux courriers à l'attention du directeur général des services, rédigés par deux agents, relatant sa présence à la médiathèque lors des journées des 23 et 29 mars 2012, ne saurait établir qu'il serait surveillé ni laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'enfin, l'absence de nomination de M. B... dans le grade d'adjoint technique de première classe, en dépit de son inscription sur les listes d'aptitude à ce grade, dont la commune fait valoir qu'elle est justifiée par l'absence de poste ouvert à la promotion interne, ne permet pas d'établir l'existence d'une situation de harcèlement moral ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, la sanction en litige ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ;

19. Considérant, en quatrième lieu, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ; qu'en particulier, ainsi qu'il a été dit aux points 12 et 18, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le maire de la commune de Saint-Avold aurait cherché, par la décision en litige, à sanctionner son engagement syndical ;

20. Considérant, en cinquième lieu, que si le requérant invoque une méconnaissance du principe d'égalité, il est constant qu'il ne se trouve pas dans la même situation que celle des agents dont la décision de mutation aurait été annulée ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

21. Considérant, enfin, que le moyen tiré de la violation du principe non bis in idem n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;

22. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 2012 infligeant à M. B...la sanction d'abaissement d'un échelon ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Avold, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par M. B...à ce titre ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du requérant la somme demandée par la commune de Saint-Avold au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Avold tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Saint-Avold.

''

''

''

''

2

N° 15NC00178


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00178
Date de la décision : 03/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Affectation et mutation.

Fonctionnaires et agents publics - Notation et avancement - Notation.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : FOMBARON

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-12-03;15nc00178 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award