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03/12/2015 | FRANCE | N°14NC01046

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 03 décembre 2015, 14NC01046


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...Brocard a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 19 décembre 2011 par laquelle la directrice départementale des territoires du Doubs lui a fait connaître le montant de la prime de fonctions et de résultats qui lui a été attribuée pour l'année 2011, ainsi que la décision du 4 avril 2012 rejetant son recours gracieux du 14 février 2012 contestant les modalités de calcul de ladite prime.

Par un jugement n° 1200750 du 8 avril 2014, le tribunal administratif d

e Besançon a annulé les décisions des 19 décembre 2011 et 4 avril 2012 et enjoint a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...Brocard a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 19 décembre 2011 par laquelle la directrice départementale des territoires du Doubs lui a fait connaître le montant de la prime de fonctions et de résultats qui lui a été attribuée pour l'année 2011, ainsi que la décision du 4 avril 2012 rejetant son recours gracieux du 14 février 2012 contestant les modalités de calcul de ladite prime.

Par un jugement n° 1200750 du 8 avril 2014, le tribunal administratif de Besançon a annulé les décisions des 19 décembre 2011 et 4 avril 2012 et enjoint au directeur départemental des territoires compétent de prendre une nouvelle décision fixant la part individuelle de la prime de fonctions et résultats de M. Brocard pour l'année 2011.

Procédure devant la cour :

I- Par un recours enregistré sous le n° 14NC01046 et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin 2014 et 14 octobre 2015, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 8 avril 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Brocard devant le tribunal administratif de Besançon.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier en ce que sa minute n'est pas signée ;

- contrairement à ce que le tribunal administratif a jugé, il ne ressort ni des dispositions du décret du 22 décembre 2008, ni d'aucune autre disposition législative ou réglementaire que la prime de fonctions et de résultats d'une année doit nécessairement coïncider avec l'évaluation de l'agent faite au titre de la même année.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 juillet 2014 et 4 novembre 2015, M. Brocard conclut au rejet du recours du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Il demande également à la cour d'enjoindre au directeur départemental des territoires du Doubs de prendre une nouvelle décision fixant les coefficients " fonctions " et " résultats " pour le calcul de sa prime de fonctions et résultats de l'année 2011 et de procéder au paiement des sommes dues assorties des intérêts légaux dans un délai de deux mois.

Il soutient que les moyens soulevés par les ministres ne sont pas fondés.

II- Par un recours enregistré sous le n° 14NC01251, enregistré le 8 juillet 2014, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité demandent à la cour d'ordonner qu'il soit sursis à statuer à l'exécution du jugement n° 1200750 du 8 avril 2014 du tribunal administratif de Besançon.

Ils soutiennent que les moyens qu'ils soulèvent contre le jugement du tribunal administratif de Besançon sont sérieux et de nature à justifier son annulation, ainsi que le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement, de sorte que les conditions de l'article R. 811-15 du code de justice administratif sont réunies.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2014, M. Brocard conclut au rejet du recours du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

Il soutient que les ministres n'invoquent aucun moyen sérieux de nature à justifier le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par le jugement dont il demande le sursis à exécution.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2007-1365 du 17 septembre 2007 ;

- le décret n° 2008-1533 du 22 décembre 2008 ;

- l'arrêté du 30 septembre 2011 relatif aux modalités d'organisation de l'évaluation des agents de l'Etat affectés dans les directions départementales interministérielles ;

- l'arrêté du 28 octobre 2011 modifiant l'arrêté du 26 octobre 2010 fixant les corps et emplois du ministère de l'écologie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, bénéficiaires de la prime de fonctions et de résultats ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dhiver,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.

1. Considérant que la directrice départementale des territoires du Doubs a notifié à M. Brocard, secrétaire d'administration et de contrôle du développement durable de classe exceptionnelle alors affecté à la direction départementale des territoires du Doubs, le montant de sa prime de fonctions et de résultats par une décision du 19 décembre 2011 ; que, par un jugement du 8 avril 2014, le tribunal administratif de Besançon a annulé cette décision, ainsi que la décision du 4 avril 2012 rejetant le recours gracieux formé par M. Brocard ; que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité relèvent appel de ce jugement ; qu'ils ont également demandé qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;

2. Considérant que les requêtes n° 14NC01046 et n° 14NC01251 présentées par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité tendent, d'une part, à l'annulation et, d'autre part, au sursis à exécution du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur les conclusions de la requête n° 14NC01046 :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Besançon :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 22 décembre 2008, applicable aux secrétaires administratifs du ministère chargé du développement durable à compter de 2011 en vertu de l'article 1er de l'arrêté du 28 octobre 2011 : " La prime de fonctions et de résultats comprend deux parts :/ - une part tenant compte des responsabilités, du niveau d'expertise et des sujétions spéciales liées aux fonctions exercées ; / - une part tenant compte des résultats de la procédure d'évaluation individuelle prévue par la réglementation en vigueur et de la manière de servir. " ; qu'aux termes du II de l'article 5 du même décret : " S'agissant de la part tenant compte des résultats de la procédure d'évaluation individuelle prévue par la réglementation en vigueur et de la manière de servir, le montant de référence est modulable par application d'un coefficient compris dans une fourchette de 0 à 6. / Le montant individuel attribué au titre de cette part fait l'objet d'un réexamen annuel au vu des résultats de la procédure d'évaluation individuelle mentionnée à l'article 2 du présent décret. (...) " ; qu'aux termes de l'article 13 du décret du 17 septembre 2007, rendu applicable aux agents de l'Etat affectés dans les directions départementales interministérielles par arrêté du premier ministre du 30 septembre 2011 : " Lorsque des régimes indemnitaires prévoient une modulation en fonction de la manière de servir, celle-ci est appréciée par le chef de service au vu du compte rendu de l'entretien professionnel " : qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 30 septembre 2011 : " Les fonctionnaires affectés dans les directions départementales interministérielles (...) bénéficient chaque année d'un entretien d'évaluation ou d'un entretien professionnel conduit par leur supérieur hiérarchique direct, sous réserve de dispositions statutaires fixées par décret, qui donne lieu à compte rendu " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la part de la prime de fonctions et de résultats tenant compte des résultats et de la manière de servir de l'agent doit faire l'objet d'un réexamen annuel et être établie au vu du compte rendu de l'entretien professionnel conduit par le supérieur hiérarchique qui, sauf circonstances particulières, se tient tous les ans ; que, pour fixer cette part, il doit nécessairement être tenu compte du dernier entretien professionnel, entretien qui ne peut avoir lieu qu'à l'issue de l'année ou la période sur laquelle porte l'évaluation ; qu'en revanche, aucune disposition n'impose que le montant de la prime perçue au cours d'une année doit obligatoirement être déterminé au vu des résultats et de la manière de servir de l'agent durant cette même année ;

5. Considérant que la prime de fonctions et de résultats prévue par les dispositions précitées de l'article 2 du décret du 22 décembre 2008 a été attribuée pour la première fois à M. Brocard en décembre 2011 ; qu'il ressort des pièces du dossier que la part de cette prime tenant compte des résultats et de la manière de servir a, conformément aux dispositions précitées, été déterminée au vu du compte rendu du dernier entretien professionnel que l'intéressé avait eu avec son supérieur hiérarchique, qui s'était tenu le 18 février 2011 et qui portait sur l'année 2010 ; que la circonstance que l'entretien professionnel portant sur les résultats et la manière de servir de M. Brocard au cours de l'année 2011 a eu lieu le 20 janvier 2012, postérieurement à la date d'attribution de la prime, est sans incidence ; qu'il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen de régularité du jugement, que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a annulé la décision du 19 décembre 2011 notifiant à M. Brocard le montant de sa prime de fonctions et de résultats de l'année 2011, ensemble la décision du 4 avril 2012 rejetant le recours gracieux de l'intéressé, au motif que l'administration ne pouvait pas se fonder sur l'évaluation individuelle de M. Brocard de l'année 2010 et que son entretien professionnel portant sur l'année 2011 n'avait pas encore eu lieu ;

6. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Brocard tant devant le tribunal administratif de Besançon que devant elle ;

En ce qui concerne les autres moyens soulevés par M. Brocard :

S'agissant de la légalité externe de la décision du 19 décembre 2011 :

7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions citées au point 3 de l'article 13 du décret 17 septembre 2007, alors applicable, que MmeB..., nommée dans les fonctions de directrice départementale des territoires du Doubs par arrêté du Premier ministre du 1er janvier 2010, avait compétence pour fixer le montant de la prime de fonctions et de résultats de M. Brocard de l'année 2011 ;

8. Considérant, en second lieu, que la décision par laquelle l'autorité qui en est chargée détermine, dans les conditions fixée par le décret du 22 décembre 2008, le montant individuel de la prime de fonctions et de résultats n'a en aucun cas le caractère d'une sanction disciplinaire ; qu'il ne ressort d'aucune des dispositions fixant le régime de cette prime, ni d'aucun principe, que les agents aient droit à ce que la part individuelle de la prime leur soit attribuée selon un coefficient déterminé ; que, dans ces conditions, la décision fixant le montant de la prime de fonctions et de résultats allouée à M. Brocard pour l'année 2011 ne lui a refusé aucun avantage dont l'attribution constituerait un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; que, par suite, cette décision, qui n'entrait par ailleurs dans aucune des autres hypothèses du champ d'application de la loi du 11 juillet 1979, n'avait pas à être motivée ;

S'agissant de la légalité interne :

9. Considérant, en premier lieu, que M. Brocard soulève, par la voie de l'exception, l'illégalité de la note de gestion du 19 juillet 2011 du ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement relative à la mise en oeuvre de la prime de fonctions et de résultats pour les corps de catégorie B du ministère ;

10. Considérant, d'une part, que la circonstance que cette note de gestion du 19 juillet 2011 n'indique pas que la part de la prime de fonctions et de résultats tenant compte des résultats est fixée au vu du compte-rendu de l'entretien professionnel n'est pas de nature à l'entacher d'illégalité ; que, d'autre part, si cette note fait référence à une harmonisation des coefficients de résultats attribués aux agents du service, une telle procédure n'est pas illégale dès lors que cette harmonisation vise à assurer, dans le respect de l'enveloppe budgétaire allouée au service, une prise en compte équitable par les chefs de service chargés de fixer le coefficient de résultats de leurs agents des contributions respectives de chacun au bon fonctionnement du service et à leur manière de servir ; qu'enfin, contrairement à ce que soutient M. Brocard, la note de gestion du 19 juillet 2011 ne contient aucune mention d'un coefficient de résultats d'entrée de grade dont il lui aurait été fait application ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que M. Brocard soulève, par la voie de l'exception, l'illégalité de l'article 4 de l'arrêté du 30 septembre 2011, relatif aux modalités d'organisation de l'évaluation des agents de l'Etat affectés dans les directions départementales interministérielles ; qu'en énonçant que : " L'entretien d'évaluation ou professionnel est réalisé, pour chaque année de référence, durant la période comprise entre le mois de janvier et le mois de mars de l'année suivante ", cet arrêté ne méconnaît aucune disposition du décret du 22 décembre 2008 ;

12. Considérant, en dernier lieu, que si M. Brocard critique le coefficient de la part liée aux résultats de 1,97 qui lui a été attribué pour le calcul de la prime de fonctions et de résultats versée en 2011, il ne saurait utilement se prévaloir des énonciations contenues dans la note de service du ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche du 8 septembre 2010 dès lors qu'il ne relevait pas de ce ministère et qu'au surplus, cette note de service prévoit des modalités de fixation de la part liée aux résultats différentes de celles qui avaient été fixées pour l'année 2011 pour les agents du ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, auquel appartenait M. Brocard ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la directrice départementale des territoires du Doubs aurait fait une appréciation manifestement erronée des résultats et de la manière de servir de l'intéressé en fixant à 1,97 le coefficient de résultats qui lui été attribué pour le calcul de la prime en litige ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé la décision de la directrice départementale des territoires du Doubs du 19 décembre 2011 faisant connaître à M. Brocard le montant de la prime de fonctions et de résultats qui lui a été attribuée pour l'année 2011 ainsi que la décision du 4 avril 2012 rejetant le recours gracieux du 14 février 2012 contestant les modalités de calcul de ladite prime ; que, par voie de conséquence, les conclusions de M. Brocard aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions de la requête n° 14NC01251 :

14. Considérant que le présent arrêt statuant sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement attaqué, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité contre ce même jugement ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1200750 du 8 avril 2014 du tribunal administratif de Besançon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. Brocard devant le tribunal administratif de Besançon est rejetée, ainsi que ses conclusions d'appel.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 14NC01251.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...Brocard, au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

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N° 14NC01046, 14NC01251


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01046
Date de la décision : 03/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-12-03;14nc01046 ?
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