Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D...et son épouse, Mme B...D...néeC..., ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 27 janvier 2014 par lesquels le préfet de la Moselle a refusé de les admettre au séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être renvoyés.
Par un jugement nos 1402333, 1402334 du 4 août 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 novembre 2014, M. et MmeD..., représentés par Me A..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 4 août 2014 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les arrêtés du 27 janvier 2014 pris à leur encontre par le préfet de la Moselle ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de leur délivrer un titre de séjour, et, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation dans un délai déterminé, au besoin sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à leur conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent :
S'agissant des décisions de refus de titre de séjour, que :
- ces décisions sont insuffisamment motivées ;
- ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle ;
S'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français, que :
- le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée pour prendre ces décisions ;
- ces décisions sont illégales en raison de l'illégalité des décisions de refus d'admission provisoire au séjour ;
- ces décisions sont illégales en raison de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour ;
S'agissant des décisions fixant un délai de départ volontaire, que :
- le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée pour fixer un délai de départ volontaire de trente jours ;
- ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la durée du délai accordé ;
S'agissant des décisions fixant le pays de destination, que :
- ces décisions sont insuffisamment motivées ;
- ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2015, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français sont illégales en raison de l'illégalité des décisions de refus d'admission provisoire au séjour est inopérant ;
- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 17 octobre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. et MmeD..., ressortissants bosniens nés respectivement le 2 août 1990 et le 22 décembre 1989, sont entrés irrégulièrement en France le 8 septembre 2013, selon leurs déclarations ; que le 22 octobre 2013, ils ont sollicité la reconnaissance de la qualité de réfugié ; que par décisions du même jour le préfet de la Moselle a refusé de les admettre à titre provisoire au séjour en France et a transmis leurs demandes à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides selon la procédure prioritaire, qui les a rejetées par décisions du 30 décembre 2013 ; que par arrêtés du 27 janvier 2014 le préfet de la Moselle a refusé de délivrer à M. et Mme D...un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être renvoyés ; que M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 4 août 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés ;
Sur les décisions de refus de titre de séjour :
2. Considérant que M. et Mme D...reprennent en appel, sans apporter d'élément nouveau, les moyens tirés de ce que les décisions leur refusant un titre de séjour sont insuffisamment motivées et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes des décisions en litige que le préfet se serait cru à tort en situation de compétence liée pour assortir les décisions de refus de titre de séjour de décisions portant obligation de quitter le territoire français ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : " (...) 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la convention de Genève susmentionnée ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 de ce code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. (...) " ;
5. Considérant, d'une part, que les décisions par lesquelles le préfet refuse, en fin de procédure, de délivrer un titre de séjour à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'est pas prise pour l'application de la décision par laquelle le préfet statue, en début de procédure, sur l'admission provisoire au séjour ; que la décision prise sur l'admission au séjour ne constitue pas davantage la base légale du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; qu'il s'ensuit que le moyen invoquant, par voie d'exception, l'illégalité du refus d'admission provisoire au séjour, opposé aux requérants le 22 octobre 2013 ne peut être utilement invoqué à l'appui d'un recours dirigé contre les décisions par lesquelles le préfet, après la notification du rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de la demande d'asile traitée dans le cadre de la procédure prioritaire, refuse le séjour et oblige l'étranger à quitter le territoire français ;
6. Considérant, d'autre part, que, conformément aux dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une mesure d'éloignement ne peut être mise à exécution, après la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant une demande d'asile, qu'à l'encontre d'un étranger entrant dans le champ d'application du 2° au 4° de l'article L. 741-4 du même code ; qu'il incombe de ce fait au juge saisi de la contestation de la légalité d'une obligation de quitter le territoire français après la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides fondée sur le 2° de cet article, de s'assurer que l'étranger entre bien dans le cas visé par ces dispositions ; que la seule circonstance qu'une décision administrative ait refusé l'admission au séjour et qu'elle n'ait pas été contestée ou qu'elle n'ait pas été annulée par le juge administratif ne fait pas obstacle à ce que le juge détermine lui-même, sans se prononcer sur la légalité de cette décision, si la demande d'asile relevait bien des cas mentionnés à l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans l'hypothèse où il estime que tel n'était pas le cas, et alors même que l'intéressé n'avait pas été effectivement admis à séjourner en France, cet étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et MmeD..., qui ne contestent pas être de nationalité bosnienne, entrent dans le champ d'application du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la République de Bosnie-Herzégovine ayant été reconnue comme " pays sûr " au sens de ces dispositions ;
8. Considérant, en dernier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. et Mme D...n'établissent pas l'illégalité des décisions refusant de leur délivrer un titre de séjour ; que dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions doit être écarté ;
Sur les décisions fixant un délai de départ volontaire :
9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle se serait estimé, à tort, en situation de compétence liée pour obliger M. et Mme D...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que la circonstance que les intéressés aient présenté, devant la Cour nationale du droit d'asile, un recours non suspensif contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant leurs demandes d'asile ne suffit pas à établir que le préfet aurait dû leur accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;
Sur les décisions fixant le pays de destination :
10. Considérant, en premier lieu, que les décisions en litige, après avoir mentionné la nationalité bosnienne de M. et Mme D...et visé l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, indiquent que les intéressés n'ont pas démontré que leur vie ou liberté seraient menacées s'ils étaient éloignés à destination de leur pays d'origine et qu'ils n'ont pas justifié être exposés à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ces décisions comportent les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement et sont ainsi suffisamment motivées ;
11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
12. Considérant que si M. et Mme D...soutiennent qu'ils encourent des risques de traitement inhumain et dégradant en cas de retour en Bosnie, ils n'établissent pas le caractère réel, personnel et actuel des risques allégués en cas de retour dans leur pays d'origine, alors au demeurant que leurs demandes d'asile ont été rejetées en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 5 novembre 2014 ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D..., à Mme B...D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 14NC02109