Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Idéal Standard Industries France et le syndicat métallurgie ardennaise CFDT ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision en date du 3 novembre 2012 par laquelle le ministre du travail, de la formation professionnelle et du dialogue social a refusé d'inscrire l'établissement de la société Idéal Standard Industries France, situé à Revin (Ardennes), sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.
Par un jugement n° 1300136-1300137 du 26 décembre 2013, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 février 2014, le syndicat métallurgie ardennaise CFDT, représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 26 décembre 2013 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 3 novembre 2012 ;
3°) d'enjoindre au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social d'inscrire l'établissement de la société Idéal Standard Industries France, situé à Revin (Ardennes), sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat, ainsi qu'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée est entachée d'erreur de fait dès lors que les salariés de l'établissement de la société Idéal Standard Industries France, situé à Revin, ont été exposés de manière significative à l'amiante ;
- il ressort de l'expertise réalisée par le cabinet Technologia que 18 prélèvements sur les 27 effectués se sont avérés positifs, que 72,5 % des 42 salariés interrogés ont confirmé avoir été en contact avec l'amiante dans le cadre de leur activité professionnelle et que 80 % du personnel y a été exposé ;
- quatre salariés ont présenté des symptômes de maladies résultant de l'exposition à l'amiante ;
- par un jugement du 31 janvier 2014, le conseil des prud'hommes de Charleville-Mézières a estimé que l'un des ex-salariés de l'entreprise apportait la preuve de ce qu'il avait été exposé à l'amiante ;
- l'activité de l'établissement entre dans le champ d'application de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 dès lors que cet établissement utilisait de l'amiante pour le flocage et le calorifugeage des fours et des wagons utilisés pour la production.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2014, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.
Le ministre fait valoir que :
- l'établissement litigieux a exercé une activité de fabrication de sanitaires en céramique qui ne relève pas des dispositions de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;
- l'activité de calorifugeage exercée par l'établissement présentait un caractère accessoire, était peu fréquente et concernait une minorité de salariés, et, par suite, ne relevait pas de l'article 41 de cette loi ;
- le syndicat requérant ne saurait se prévaloir d'une présence d'amiante dans la structure ou les éléments mobiliers de l'établissement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2014, la société Idéal standard industries France (ISIF), représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête.
La société fait valoir que :
- la demande présentée en première instance par le syndicat requérant était tardive et, par suite, irrecevable ;
- la demande présentée en première instance par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail était également irrecevable, faute pour son représentant de justifier de sa qualité à agir ;
- l'activité principale exercée par l'établissement ne relève pas des dispositions de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;
- il en est de même de son activité accessoire qui, si elle a eu pour effet d'exposer certains salariés à l'amiante, ne présentait pas de caractère significatif.
La clôture d'instruction a été fixée au 27 août 2014 par une ordonnance en date du 28 juillet 2014, prise en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq,
- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.
1. Considérant que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement de la société Idéal Standard Industries France, situé à Revin (Ardennes), a demandé, le 9 février 2012, l'inscription de cet établissement sur la liste ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ; que, par une décision en date du 3 novembre 2012, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté cette demande au motif que les activités de calorifugeage réalisées au sein de l'établissement n'avaient pas eu pour effet d'exposer ses salariés à l'amiante de manière significative ; que le syndicat métallurgie ardennaise CFDT relève appel du jugement du 26 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 : " I. - Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante. L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que peuvent seuls être légalement inscrits sur la liste qu'elles prévoient les établissements dans lesquels les opérations de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté sur la période en cause une part significative de l'activité de ces établissements ; que les opérations de calorifugeage à l'amiante doivent, pour l'application de ces dispositions, s'entendre comme des interventions qui ont pour but d'utiliser l'amiante à des fins d'isolation thermique ; que ne sauraient, par suite, ouvrir droit à l'allocation prévue par ce texte les utilisations de l'amiante à des fins autres que l'isolation thermique, alors même que, par l'effet de ses propriétés intrinsèques, l'amiante ainsi utilisée assurerait également une isolation thermique ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'établissement de la société Idéal Standard France, situé à Revin, assurait, jusqu'à l'arrêt de sa production en avril 2011, la fabrication de produits sanitaires en céramique émaillée, pour la salle de bains et la cuisine ; qu'ainsi, cet établissement n'avait pour activité principale ni la fabrication de matériaux contenant de l'amiante, ni des opérations de flocage ou de calorifugeage à l'amiante, ni encore la construction ou la réparation navales ; que les activités accessoires réalisées au sein de l'entreprise, ayant pour objet l'entretien de la toiture du bâtiment en fibre-ciment amianté, du réseau de distribution d'air dont l'étanchéité était assurée au moyen d'éléments en amiante, et du parc de soixante chariots dont les plaquettes de frein étaient également en amiante, ne relèvent pas non plus d'opérations de flocage ou de calorifugeage ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que si une activité accessoire de calorifugeage à l'amiante était effectuée par les salariés de l'établissement à l'occasion des opérations de maintenance et de réfection des fours utilisés pour la fabrication des éléments en céramique, il résulte du rapport d'expertise établi en octobre 2011 par le cabinet Technologia, mandaté par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement, et du rapport d'enquête établi le 29 juin 2012 par les services de l'inspection du travail, que ces opérations avaient lieu chaque année, au cours du mois d'août, et ne concernaient qu'un ou deux fours, chacun d'entre eux faisant l'objet d'une réfection tous les quatre ou cinq ans ; qu'en outre, l'entretien quotidien de ces fours, qui pouvait conduire les salariés de l'entreprise à manipuler des éléments thermiques en amiante au cours de l'année, a été confié à des entreprises sous-traitantes après 1985 ; que s'il ressort encore des rapports précités que les résistances électriques des wagons, nécessaires au transport des pièces en céramique à l'intérieur des fours, devaient être fréquemment renouvelées, exposant les électromécaniciens à l'amiante dans des proportions importantes, ces opérations ne relèvent pas d'une activité de calorifugeage ; que les boudins d'amiante de ces wagons, dont il n'est pas établi qu'ils avaient un usage d'isolant thermique, n'étaient remplacés qu'une fois tous les deux ans ; que ni le rapport de l'expertise diligentée par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, ni le rapport d'enquête de l'inspection du travail ne précisent la fréquence des opérations visant au renouvellement des plaques en amiante disposées au fond et sur les parties latérales des wagons ; qu'en outre, le ministre fait valoir, sans être sérieusement contredit par le syndicat requérant, qu'avant la cessation d'activité de l'entreprise, seuls seize salariés sur un effectif de cent quarante trois étaient affectés à des activités les exposant directement à de l'amiante, dont l'activité accessoire de calorifugeage ; que, dans ces conditions, si le cabinet Technologia précise que les opérations de maintenance des fours et des wagons étaient réalisées par les chaudronniers et maçons fumistes avec le concours d'autres salariés du service de maintenance, voire certains personnels de la production, il n'est pas pour autant établi que l'activité de calorifugeage aurait occupé une proportion importante du personnel de l'entreprise, même en tenant compte de la polyvalence de celui-ci ; que, par suite, cette activité exercée au sein de l'établissement de Revin n'a pas, compte tenu notamment de sa fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, présenté un caractère significatif au sens des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;
5. Considérant, en dernier lieu, que les circonstances que les salariés de l'établissement de Revin aient été exposés de façon significative aux poussières d'amiante en raison tant d'une pollution environnementale des lieux de production que de la manipulation d'amiante dans le cadre d'opérations n'ayant pas pour objet la fabrication de matériaux contenant de l'amiante, le flocage ou le calorifugeage, et que plusieurs maladies professionnelles liées à l'amiante aient été recensées parmi les anciens salariés de l'établissement ne sont pas, par elles-mêmes, de nature à justifier des conditions prévues par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 permettant une inscription de l'établissement sur la liste ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le syndicat métallurgie ardennaise CFDT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ; que la présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions présentées sur ce point par le syndicat requérant ne peuvent qu'être également rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête du syndicat métallurgie ardennaise CFDT est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat métallurgie ardennaise CFDT, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société Idéal standard industries France (ISIF).
Copie du présent arrêt sera adressée au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement de la société Idéal Standard Industries France, situé à Revin.
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N° 14NC00318