Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner l'université de Lorraine à l'indemniser des préjudices subis en raison du harcèlement moral dont il estime avoir été victime du 1er novembre 2002 au 1er janvier 2012, date de son départ à la retraite.
Par un jugement n° 1201332 du 17 décembre 2013, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 13 février et 15 juillet 2014, M. C..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 17 décembre 2013 ;
2°) de condamner l'université de Lorraine à lui verser la somme totale de 152 480 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande et de la capitalisation des intérêts ;
3°) d'enjoindre au président de l'université de Lorraine de reconstituer sa carrière et de lui verser les sommes qui lui sont dues dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'université de Lorraine la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête qui était accompagnée du jugement attaqué et comporte des moyens d'appel est recevable ;
- les tâches subalternes qui lui ont été confiées ne correspondaient pas à son grade d'ingénieur d'études ;
- il a été victime d'une mise à l'écart dans le service ;
- il n'a bénéficié d'aucune promotion de grade durant les dix années passées à l'université ;
- ces faits sont constitutifs de harcèlement moral ;
- il n'avait pas porté plainte avant son départ pour ne pas dégrader un peu plus sa situation mais il avait fait part de son mécontentement à la directrice du laboratoire ;
- son préjudice moral sera indemnisé par une somme de 30 000 euros ;
- il a subi une perte de traitement du fait de son départ anticipé à la retraite pour un montant de 39 528 euros ;
- une indemnité de 81 000 euros lui sera allouée en réparation de son préjudice de carrière, ainsi qu'une somme de 1 952 euros du fait de la baisse de sa pension additionnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2014, l'université de Lorraine, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable pour défaut de production du jugement attaqué et défaut de moyens d'appel ;
- les demandes d'indemnité de 81 000 euros et de reconstitution de carrière sont irrecevables car nouvelles en appel ;
- les éléments du dossier ne permettent pas de caractériser un harcèlement moral, alors que le requérant n'a déposé aucune plainte durant dix ans ;
- il n'existait aucun décalage entre les compétences du requérant et les fonctions qui lui ont été confiées ;
- il s'est lui-même de moins en moins impliqué dans ses fonctions en raison de son souhait de repartir outre-mer ;
- l'université n'était pas tenue de lui accorder un avancement de grade et le requérant a bénéficié d'un avancement d'échelon régulier ;
- ses demandes indemnitaires ne sont pas fondées.
Par un mémoire, enregistré le 29 avril 2015, le CNRS a présenté des observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n°85-1534 du 31 décembre 1985 fixant les dispositions statutaires applicables aux ingénieurs et aux personnels techniques et administratifs de recherche et de formation du ministère chargé de l'enseignement supérieur ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bonifacj, président,
- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.
1. Considérant que M.C..., ingénieur d'études de deuxième classe, affecté à l'université de Lorraine sur l'emploi de responsable des analyses organiques au sein du laboratoire des interactions microorganismes-minéraux-matière organique dans les sols (LIMOS), a recherché devant le tribunal administratif de Nancy la responsabilité de l'université en raison du harcèlement moral dont il soutient avoir été victime au sein de ce service, du 1er novembre 2002 au 1er janvier 2012, date de son départ à la retraite ; qu'il relève appel du jugement en date du 17 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l 'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés / Est passible d 'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (...) " ;
3. Considérant que, d'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que, d'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 24 du décret du 31 décembre 1985 fixant les dispositions statutaires applicables aux ingénieurs et aux personnels techniques et administratifs de recherche et de formation du ministère chargé de l'enseignement supérieur : " Les ingénieurs d'études contribuent à l'élaboration, à la mise au point et au développement des techniques et méthodes mises en oeuvre dans les établissements où ils exercent, ainsi qu'à l'organisation de leur application et à l'amélioration de leurs résultats. Ils concourent à l'accomplissement des missions d'enseignement. / Ils peuvent exercer des fonctions d'administration et assumer des responsabilités d'encadrement, principalement à l'égard de personnels techniques " ; que si M. C...fait valoir que les fonctions qu'il exerçait au sein du laboratoire des interactions microorganismes-minéraux-matière organique dans les sols (LIMOS) de l'université de Lorraine étaient sans lien tant avec son expérience professionnelle que ses diplômes, il n'établit pas, par ses seules allégations, que les tâches qui lui étaient confiées ne correspondaient pas à celles que son grade d'ingénieur d'études lui donnait normalement vocation à occuper ; qu'au demeurant, le requérant qui a été affecté dans le même laboratoire durant dix ans, n'allègue pas avoir demandé une modification de ses attributions au cours de cette période ; que s'il n'est pas sérieusement contesté par l'université que M. C... a été progressivement isolé au sein du service, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le requérant aurait fait l'objet d'une mise à l'écart volontaire de la part de ses collègues ou de sa hiérarchie ; qu'enfin, la seule circonstance que l'intéressé n'a pas obtenu une promotion de grade, malgré la proposition émise en ce sens par son supérieur hiérarchique, ne peut être regardée comme constituant une volonté de nuire au requérant ; qu'ainsi, aucun élément du dossier n'est de nature à faire présumer que M. C...a été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral ; que, dès lors, la responsabilité pour faute de l'université ne saurait être engagée à ce titre ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par l'université de Lorraine, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'université de Lorraine présentées sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'université de Lorraine présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et à l'université de Lorraine.
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N° 14NC00242