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09/04/2015 | FRANCE | N°14NC01381

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 09 avril 2015, 14NC01381


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...C...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 16 janvier 2012 par laquelle le département des Vosges a refusé de l'indemniser à raison du trop perçu de pension de retraite qu'elle a dû restituer à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales et la décision du 27 novembre 2012 rejetant son recours gracieux. Elle a également demandé la condamnation du département des Vosges à lui verser la somme de 14 220 euros au titre du préjudice ainsi subi

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Par un jugement n° 1202743 du 13 mai 2014, le tribunal administratif de Na...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...C...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 16 janvier 2012 par laquelle le département des Vosges a refusé de l'indemniser à raison du trop perçu de pension de retraite qu'elle a dû restituer à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales et la décision du 27 novembre 2012 rejetant son recours gracieux. Elle a également demandé la condamnation du département des Vosges à lui verser la somme de 14 220 euros au titre du préjudice ainsi subi.

Par un jugement n° 1202743 du 13 mai 2014, le tribunal administratif de Nancy a annulé ces décisions et condamné le département des Vosges à verser à Mme C...la somme de 14 218 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2014, et un mémoire, enregistré le 27 février 2015, le département des Vosges, représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 13 mai 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Nancy ;

3°) de mettre à la charge de Mme C...le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- lorsque Mme C...lui a fait connaître sa situation de cumul en 2002, aucune obligation ne lui incombait de déclarer à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) les revenus d'activité de l'intéressée ;

- cette obligation n'est apparue qu'à la suite du décret du 26 décembre 2003 ;

- à défaut d'avoir lui-même informé la CNRACL de sa situation, l'agent a privé le département de la possibilité de communiquer les sommes qu'il versait ;

- le préjudice allégué par la requérante résulte non de la prétendue faute du département, mais de la mauvaise optimisation des règles de cumul emploi-retraite par la requérante, qui a au demeurant dissimulé sa situation à son employeur ;

- le défaut de communication des informations par le département des Vosges a conduit Mme C...à bénéficier, pendant de nombreuses années, d'une situation de cumul emploi-retraite qui était interdite, sans subir le plafonnement prévu, la CNRACL ne demandant le reversement des excédents que pour les années 2007 à 2010 ;

- la reconnaissance du caractère préjudiciable de l'application de l'article L. 85 du code des pensions civiles et militaires supposait que seule la responsabilité de l'auteur de la loi puisse être engagée, sur la base d'un préjudice spécial et suffisamment grave, lesdits critères n'ayant pas été appréciés par les premiers juges ;

- le préjudice allégué par la victime n'est pas légitime car elle ne pouvait légalement y prétendre ;

- le lien de causalité entre la carence fautive et le préjudice n'est pas établi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2014, MmeC..., représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge du département des Vosges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le litige porté devant les premiers juges porte uniquement sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2010 ;

- le département des Vosges, qui était informé du fait qu'elle bénéficiait d'une pension de retraite, n'a pas procédé aux déclarations annuelles qui lui incombait auprès de la CNRACL ;

- le département des Vosges ne l'a pas informée qu'elle dépasserait les plafonds de cumul.

Par une ordonnance du 23 février 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 mars 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2015 :

- le rapport de M. Fuchs, premier conseiller,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me D...pour le département des Vosges et de Me A...pour MmeC....

1. Considérant que MmeC..., puéricultrice du département des Vosges recrutée le 19 avril 1994, a exercé ses fonctions selon une quotité de temps de travail égale à 50%, puis à 70% à compter du 28 octobre 2002, tout en bénéficiant d'une retraite gérée par la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ; que cette caisse de retraite lui a réclamé, le 24 octobre 2011, de rembourser un trop perçu de pension au regard des règles de cumul emploi-retraite au titre des années 2007 à 2010, pour un montant de 28 437 euros ; que le département des Vosges a, par une décision du 10 décembre 2011, refusé de faire droit à la demande de l'intéressée tendant à l'octroi d'une indemnisation à concurrence de la moitié de ce trop perçu réclamé par la CNRACL puis a rejeté, le 27 novembre 2012, le recours gracieux formé par l'intéressée ; que par un jugement du 13 mai 2014 dont il est relevé appel, le tribunal administratif de Nancy a condamné le département des Vosges à verser à Mme C...la somme de 14 218 euros en réparation des préjudices subis ;

2. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 84 du code des pensions civiles et militaires : " Si, à compter de la mise en paiement d'une pension civile ou militaire, son titulaire perçoit des revenus d'activité de l'un des employeurs mentionnés à l'article L. 86-1, ou de tout autre employeur pour les fonctionnaires civils, il peut cumuler sa pension dans les conditions fixées aux articles L. 85, L. 86 et L. 86-1 " ; qu'aux termes de l'article 85 du même code : " Le montant brut des revenus d'activité mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 84 ne peut, par année civile, excéder le tiers du montant brut de la pension pour l'année considérée. Lorsqu'un excédent est constaté, il est déduit de la pension après application d'un abattement égal à la moitié du minimum fixé au a de l'article L. 17, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article L. 86-1 du même code : " Les employeurs mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 84 sont les suivants : (...) 2° Les collectivités territoriales et les établissements publics ne présentant pas un caractère industriel ou commercial qui leur sont rattachés ; (...) / Les employeurs mentionnés aux alinéas précédents qui accordent un revenu d'activité au titulaire d'une pension civile ou militaire, ainsi que le titulaire de la pension, en font la déclaration dans des conditions définies par un décret en Conseil d'Etat (...) " ; qu'aux termes de l'article 58 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales, visé ci-dessus : " I. - Les cumuls de pensions attribuées au titre du présent décret avec les rémunérations publiques, ou d'autres pensions et les cumuls d'accessoires de pension sont réglés conformément aux dispositions applicables aux fonctionnaires de l'Etat et à leurs ayants cause relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite. / II. - Toute collectivité ou organisme mentionné à l'article L. 86-1 du code précité qui rémunère à un titre quelconque un pensionné relevant du présent décret doit annuellement faire la déclaration des revenus d'activité de l'année précédente au service gestionnaire de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales " ;

3. Considérant que toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice directement en lien avec cette faute ; que Mme C...fait valoir que si le département des Vosges avait porté l'ensemble de ses revenus d'activité à la connaissance de la CNRACL, comme il lui appartenait de le faire, elle aurait été informée par cette caisse de la circonstance qu'elle dépassait les plafonds permettant un cumul emploi-retraite et n'aurait, dès lors, pas continué à travailler pour le département des Vosges selon une quotité aussi importante ; qu'elle chiffre le préjudice subi du fait de l'inaction fautive du département à la moitié de la somme dont il lui est demandé le reversement par la CNRACL ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'obligeait le département à fournir à l'intimée des informations portant sur les conditions de cumul de sa pension de retraite avec sa rémunération d'activité, ni à vérifier qu'elle remplissait les conditions pour bénéficier d'un tel cumul ;

5. Considérant, en second lieu, qu'en ayant omis de déclarer auprès de la CNRACL l'ensemble des revenus d'activité perçus par Mme C..., le département des Vosges a, en méconnaissance des dispositions précitées, commis une carence fautive ; que, toutefois, la pension de retraite ayant seule fait l'objet d'un écrêtement, Mme C...n'est pas fondée à soutenir qu'en raison de cette faute, elle n'aurait pas été rémunérée pour les heures travaillées ; que cette carence ne peut en outre être regardée comme étant directement en lien avec le choix, au demeurant purement éventuel, qu'aurait pu faire l'intimée d'exercer son emploi selon une quotité de travail inférieur, dès lors, notamment, que l'intéressée ne pouvait ignorer les spécificités de la situation dans laquelle elle se trouvait et les dispositions applicables, alors qu'elle cumulait son emploi et une retraite depuis plus de quinze années et qu'il lui appartenait de s'informer auprès de la CNRACL sur les possibilités d'un tel cumul emploi-retraite ; qu'ainsi, le lien de causalité direct entre la carence fautive du département et les préjudices invoqués par Mme C...n'étant pas établi, la responsabilité du département des Vosges ne saurait être engagée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le département des Vosges est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy l'a condamné à verser à Mme C... la somme de 14 218 euros ; que la demande présentée par celle-ci devant le tribunal administratif de Nancy doit ainsi être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département des Vosges, qui n'est pas la partie perdante dans cette instance, la somme que demande Mme C...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas lieu de faire droit à la demande du département de Vosges fondée sur ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 13 mai 2014 est annulé.

Article 2 : La demande formée par Mme C...devant le tribunal administratif de Nancy est rejetée.

Article 3 : Les conclusions du département des Vosges et de Mme C...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au département des Vosges et à Mme E...C....

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N° 14NC01381


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01381
Date de la décision : 09/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Questions générales - Motivation.

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Cumuls.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : GARTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-04-09;14nc01381 ?
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