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26/02/2015 | FRANCE | N°14NC01207

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 26 février 2015, 14NC01207


Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2014, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par MeD... ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400917 du 3 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 22 janvier 2014 refusant de lui renouveler son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il peut être éloigné ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin

de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans u...

Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 2014, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par MeD... ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400917 du 3 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 22 janvier 2014 refusant de lui renouveler son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il peut être éloigné ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;

- la décision de refus de séjour n'est pas motivée en ce qui concerne l'existence d'un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ne fait pas mention de la possibilité de voyager sans risque vers le pays d'origine ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car il est le père d'un enfant français ;

- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, car elle n'indique pas si la surveillance médicale peut être poursuivie dans son pays d'origine ;

- le préfet n'a pas démontré, comme il lui appartient de le faire, que l'interruption de son traitement serait sans conséquence sur son état de santé, dès lors qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la circonstance qu'il est père d'un enfant français fait obstacle à son éloignement ;

- la décision fixant le pays à destination duquel il peut être éloigné méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu des dangers qu'il encourt en cas de retour en République démocratique du Congo où il ne pourrait bénéficier d'un accès effectif à un traitement approprié à sa maladie ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 septembre 2014, présenté par le préfet du Haut-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- M. C...était compétent pour signer l'acte attaqué ;

- sa décision ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, car toutes les mentions nécessaires figurent dans l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, les éléments fournis par M. B...ne permettant pas d'infirmer cet avis ;

- les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 25 septembre 2014 admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2015 le rapport de M. Fuchs, premier conseiller ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant congolais, né en 1985, déclare être entré irrégulièrement en France le 30 octobre 2011 ; qu'il a bénéficié en raison de son état de santé d'une carte de séjour temporaire du 17 janvier 2013 au 16 janvier 2014, délivrée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet du Haut-Rhin a, par un arrêté du 22 janvier 2014, refusé de renouveler ce titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il peut être éloigné ; que M. B...relève appel du jugement du 3 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, que M. B...reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, les moyens, qu'il avait invoqués en première instance, tirés de ce que l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente, de ce que la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée et de ce que la procédure est irrégulière en raison du fait que le médecin de l'agence régionale de santé ne s'est pas prononcé sur la possibilité pour l'intéressé de voyager sans risque vers son pays d'origine ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à bon droit, par le tribunal administratif de Strasbourg ;

3. Considérant, en second lieu, que, conformément aux dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle du refus de renouvellement d'un titre de séjour qu'elle accompagne ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité interne :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11°. A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : [...] 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

5. Considérant qu'il ressort des termes de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, en date du 29 novembre 2013, que l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que si le requérant verse au dossier deux certificats médicaux établis en novembre 2013, émanant pour l'un d'entre eux d'un psychiatre du centre thérapeutique de jour des hospices civils de Colmar, ceux-ci sont assez peu circonstanciés, se bornent à faire état du traitement suivi par l'intéressé et à indiquer, sans plus de précision, qu'une interruption de ce traitement " pourrait entraîner une détérioration de son état de santé psychique " ; qu'ainsi, le requérant n'apporte pas d'éléments suffisamment probants de nature à remettre en cause l'appréciation que le préfet a pu, sans méconnaître ses obligations, porter sur la gravité de son état de santé, au vu notamment de l'avis susmentionné ; qu'il s'en suit que M. B...ne saurait utilement soutenir qu'aucun traitement approprié n'existerait dans son pays d'origine ; que, par suite, le préfet du Haut-Rhin n'a pas méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

7. Considérant que M. B...fait valoir être le père d'un enfant français, né le 15 août 2013, qu'il a reconnu le 5 mars 2014 ; que, toutefois, il n'établit pas, par les pièces versées aux débats, que cet enfant soit français ; qu'en outre, il n'allègue pas entretenir des relations régulières avec cet enfant, ni contribuer à son entretien ou son éducation, ni mener une vie commune avec la mère de l'enfant, alors qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'habite pas dans la même région que celle-ci ; que le requérant, présent depuis la fin octobre 2011 sur le territoire français, ne fait pas état d'une intégration particulière dans la société française, ni de l'absence d'attaches dans son pays d'origine ; qu'ainsi, compte-tenu des circonstances de l'espèce, et en particulier de la durée et des conditions du séjour de M. B...en France, l'arrêté en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'il poursuit ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 6°. L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans " ;

9. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 7 du présent arrêt, que M. B...n'établit pas que son enfant serait français, ni contribuer à son entretien ou son éducation ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains ou dégradants " ; que le requérant invoque les risques qu'il encourt dans son pays d'origine du fait de l'absence de traitement de sa pathologie ; que, toutefois, ainsi que cela a été dit au point 5 du présent arrêt, si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale, l'interruption de son traitement n'aurait pas de conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2014 pris à son encontre par le préfet du Haut-Rhin ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Haut-Rhin.

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N° 14NC01207


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01207
Date de la décision : 26/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : ROUSSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-02-26;14nc01207 ?
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