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30/12/2014 | FRANCE | N°14NC01047

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 30 décembre 2014, 14NC01047


Vu I, la requête, enregistrée le 10 juin 2014 sous le n° 14NC01043, présentée pour M. B... C..., demeurant..., par Me D... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400691-1400692 du 22 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Bas-Rhin en date du 14 janvier 2014 lui refusant un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit ;

2°) d

'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un...

Vu I, la requête, enregistrée le 10 juin 2014 sous le n° 14NC01043, présentée pour M. B... C..., demeurant..., par Me D... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400691-1400692 du 22 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Bas-Rhin en date du 14 janvier 2014 lui refusant un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me D...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'incompétence ;

- cette décision est entachée d'une erreur de motivation ;

- elle est dépourvue de base légale ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'accord franco-tunisien ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la mesure d'éloignement ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2014, présenté par le préfet du Bas-Rhin, qui conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé ;

Vu, II, la requête, enregistrée le 10 juin 2014 sous le n° 14NC01047, présentée pour Mme A...C..., demeurant..., par Me D... ;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400691-1400692 du 22 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Bas-Rhin en date du 14 janvier 2014 lui refusant un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me D...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Elle soutient les mêmes moyens que ceux qui sont exposés dans la requête susvisée enregistrée sous le n° 14NC01043 ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2014, présenté par le préfet du Bas-Rhin, qui conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé ;

Vu les décisions du président du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 25 septembre 2014, admettant M. et Mme C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord du 17 mars 1988 modifié entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

Vu l'accord-cadre du 28 avril 2008 entre le Gouvernement de la République Française et le Gouvernement de la République Tunisienne, relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 4 décembre 2014, le rapport de M. Guérin-Lebacq, premier conseiller ;

1. Considérant que M. et MmeC..., ressortissants tunisiens, sont entrés en France au cours du mois de septembre 2012, sous couvert d'un visa touristique, puis ont sollicité, par un courrier du 5 décembre 2013, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que, par deux décisions du 14 janvier 2014, le préfet du Bas-Rhin a opposé un refus à leur demande, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé leur pays de destination ; que, par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, ils relèvent appel du jugement du 22 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la légalité des décisions portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que M. et Mme C...reprennent en appel le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions contestées, sans apporter d'élément nouveau ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'après avoir visé les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les décisions attaquées mentionnent précisément les raisons pour lesquelles le préfet du Bas-Rhin a décidé de refuser un titre de séjour à M. et MmeC... ; qu'à cet égard, il ressort des mentions portées dans ces décisions que le préfet a tenu compte de la nationalité tunisienne des requérants dans l'examen de leur situation ; que, dans ces conditions, si les décisions attaquées visent également les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, lesquelles n'ont pas vocation à s'appliquer à M. et MmeC..., cette circonstance n'est pas de nature à révéler une insuffisance de motivation ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des écritures produites en défense par le préfet du Bas-Rhin, que les décisions attaquées sont fondées sur l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, alors que M. et Mme C...sont de nationalité tunisienne ;

5. Considérant, toutefois, que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ; que dans le cadre de la présente instance, le préfet du Bas-Rhin demande à la cour, dans son mémoire en défense communiqué aux requérants, de procéder à cette substitution de base légale ;

6. Considérant qu'en l'espèce, les décisions attaquées trouvent leur fondement légal dans les stipulations de l'accord susvisé du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail et, dans la mesure où aucune de ces stipulations n'y fait obstacle, dans les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu de procéder à la substitution de base légale demandée dès lors qu'elle n'a pour effet de priver les intéressés d'aucune garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les décisions attaquées sont privées de base légale doit être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord susvisé du 17 mars 1988 : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention "salarié" (...) " ; qu'aux termes de l'article 2.3.3 du protocole annexé à l'accord-cadre du 28 avril 2008 relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire signé entre le Gouvernement de la République Française et le Gouvernement de la République Tunisienne : " Le titre de séjour portant la mention "salarié", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'Accord du 17 mars 1988 modifié, est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'Annexe I du présent Protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) " ; que si M. C...fait état de sa qualité de poseur en matériaux aluminium et PVC, laquelle correspond à l'un des emplois énumérés sur la liste figurant à l'annexe I du protocole précité, il ressort des pièces des dossiers qu'il a produit à l'appui de sa demande de titre de séjour une promesse d'embauche et non un contrat de travail visé par les autorités compétentes ; que, par suite, le préfet du Bas-Rhin a pu refuser de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " sans méconnaître les stipulations de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; que si les requérants font encore état de l'ancienneté de leur présence en France, pays dans lequel résident des membres de leur famille, de la scolarisation de leurs enfants et de ce que Mme C... est enceinte, ils ne précisent pas celles des autres stipulations de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 que le préfet aurait méconnu en leur refusant un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

8. Considérant, en dernier lieu, que M. et Mme C...soutiennent qu'ils résident en France depuis 2012, que leurs enfants mineurs, âgés de 3, 5 et 7 ans y sont scolarisés, que la naissance d'un quatrième enfant est prévue, que le requérant bénéficie d'une promesse d'embauche et que plusieurs membres de leur famille séjournent régulièrement sur le territoire français ; que, toutefois, il ressort des pièces des dossiers que les intéressés ont toujours résidé en Tunisie jusqu'à l'âge, respectivement, de 36 et 34 ans ; qu'ils ne font état d'aucun élément de nature à établir qu'ils ne seraient plus en mesure de poursuivre leur vie familiale dans leur pays d'origine ; que, par suite, compte tenu de la durée et des conditions de séjour en France des requérants, le préfet, en refusant de leur délivrer un titre de séjour, n'a pas commis d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de ses décisions sur leur situation personnelle ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions de refus de séjour ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que l'accord du 17 mars 1988 modifié entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie a pour seul objet de réglementer le séjour des ressortissants de chacun des deux Etats, sur le territoire de l'autre pays ; que, par suite, les requérants ne sauraient utilement soutenir que les mesures d'éloignement prises à leur encontre méconnaitraient les stipulations de cet accord ;

11. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de ce que ces mesures seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation, qui reprend ce qui vient d'être dit à l'appui des conclusions tendant à l'annulation des décisions de refus de titre de séjour, doit être écarté pour les mêmes motifs que précédemment ;

Sur la légalité des décisions fixant le pays de destination :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de toute illégalité entachant les décisions portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que les décisions fixant le pays de destination doivent être annulées, par voie de conséquence de l'illégalité de ces décisions, ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 14 janvier 2014 du préfet du Bas-Rhin leur refusant un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes présentées par M. et Mme C...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.

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N° 14NC01043, 14NC01047


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01047
Date de la décision : 30/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : AIROLDI-MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-12-30;14nc01047 ?
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