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30/12/2014 | FRANCE | N°13NC01593

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 30 décembre 2014, 13NC01593


Vu la requête, enregistrée le 14 août 2013, présentée pour M. C... B..., demeurant..., M. D... E..., demeurant ... et le GAECB..., dont le siège est 1 route de Saligney à Thervay (39290), par la SCP De Luca - Nicpon ;

M. B... et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200593 du 18 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'association foncière de Thervay à réparer le préjudice que leur a causé la faute commise lors de la répartition des indemnités versées par Réseau Ferr

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Vu la requête, enregistrée le 14 août 2013, présentée pour M. C... B..., demeurant..., M. D... E..., demeurant ... et le GAECB..., dont le siège est 1 route de Saligney à Thervay (39290), par la SCP De Luca - Nicpon ;

M. B... et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200593 du 18 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'association foncière de Thervay à réparer le préjudice que leur a causé la faute commise lors de la répartition des indemnités versées par Réseau Ferré de France (RFF), à l'occasion de la construction de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône ;

2°) de condamner l'association foncière de Thervay à verser 33 458,66 euros au GAEC B...au titre de l'indemnité d'éviction, 4 198,32 euros à M. B...et 6 585,12 euros à M. E...au titre de l'indemnité de rachat ;

3°) de mettre à la charge de l'association foncière de Thervay le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- les bases de calcul de l'indemnisation sont erronées ;

- l'association a méconnu les dispositions du protocole signé avec RFF le 5 mai 2006 relatif aux conditions de réparation des dommages de travaux publics ;

- les dispositions de l'article L. 123-4 du code rural ont été méconnues dès lors que les propriétaires n'ont pas tous subi une perte de manière équitable ;

- ce remembrement inéquitable constitue une faute qui engage la responsabilité de l'association ;

- alors que le montant de l'indemnité, perçue par l'association foncière de RFF, a été calculé en fonction de la surface, elle l'a réparti en fonction de la perte réelle de la valeur ;

- ils ont subi des préjudices du fait de la faute ainsi commise par l'association foncière ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2013, présenté pour l'association foncière de Thervay, représentée par MeA..., qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation des requérants à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le nombre de points qui a servi de base au calcul de l'indemnité accordée aux intéressés ayant été fixé par la commission départementale, il appartenait aux requérants de contester cette décision dans les délais qui leur étaient impartis ;

- les intéressés ne sont pas recevables à contester la délibération du 30 septembre 2010, par laquelle l'association a décidé de verser les indemnités en fonction de la perte réellement subie et non de la surface, qui a été portée à leur connaissance par voie d'affichage dès le 11 octobre 2010 ;

- la répartition des indemnités est indépendante du protocole d'accord signé avec RFF ;

- elle a été faite conformément aux dispositions de l'article R. 123-36 du code rural qui prévoit qu'il doit être tenu compte de la valeur en productivité des terrains ;

- elle s'est bornée à tenir compte du nombre de points attribués à chacun par la commission départementale ;

- elle n'a ainsi commis aucune faute ;

- la rupture d'égalité entre les différents propriétaires exploitants n'est absolument pas établie ;

- les surfaces résultant des relevés de la MSA ne sont pas opposables à l'association ;

- le GAEC n'a pas été indemnisé en fonction de la surface perdue mais selon le nombre de points perdus ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 janvier 2014, présenté pour M. B..., M. E... et le GAECB..., par la SELARL Granvelle, qui concluent aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; ils soutiennent en outre que :

- leurs réclamations sont recevables, la délibération du 30 septembre 2010 n'ayant jamais été affichée et l'association n'ayant jamais répondu à leur demande préalable du 27 janvier 2012 ;

- la délibération du 30 septembre 2010 n'a pu servir de base de calcul à des indemnités qui leur ont été attribuées dès le 21 septembre 2010 ;

- compte tenu de la valeur moyenne des terres agricoles dans le secteur, les requérants n'ont pas été indemnisés de leur entier préjudice ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mars 2014, présenté pour l'association foncière de Thervay qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que la date du 21 septembre résulte d'une simple erreur de plume et que les paiements sont bien intervenus après le 30 septembre 2010 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Bonifacj, président,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me F...pour M. B...et autres et de MeG..., substituant MeA..., pour l'association foncière de Thervay ;

1. Considérant que M.B..., M. E...et le GAEC B...relèvent appel du jugement du 18 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes tendant à la condamnation de l'association foncière de Thervay à réparer les conséquences de la faute commise lors de la répartition des indemnités versées par Réseau Ferré de France (RFF), à l'occasion de la construction de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-24 du code rural et de la pêche maritime concernant les opérations de remembrement liées à la réalisation de grands ouvrages publics : " Lorsque les expropriations en vue de la réalisation des aménagements ou ouvrages mentionnés aux articles L. 122-1 à L. 122-3 du code de l'environnement sont susceptibles de compromettre la structure des exploitations dans une zone déterminée, l'obligation est faite au maître de l'ouvrage, dans l'acte déclaratif d'utilité publique, de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'exécution d'opérations d'aménagement foncier mentionnées au 1° de l'article L. 121-1 et de travaux connexes." ; qu'aux termes de l'article R. 123-35 du même code : " Lorsque l'emprise de l'ouvrage a été définitivement délimitée, conformément aux dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, les prélèvements prévus par l'article R. 123-34 sont reportés sur cette emprise. Les terrains inclus dans celle-ci deviennent, lors du transfert de propriété mentionné à l'article L. 121-21, la propriété de l'association foncière (...). Ces terrains doivent être cédés au maître de l'ouvrage. /Les indemnités d'expropriation, calculées selon les règles posées par le code de l'expropriation, afférentes aux différents droits exercés sur les terrains compris dans l'emprise de l'ouvrage public, et notamment aux droits d'exploitation exercés ou non par des propriétaires sont, dans le cas prévu au présent article, déterminées distinctement selon leur objet. Elles sont dues, suivant le cas, à l'association foncière(...). Le maître de l'ouvrage notifie le montant de ses offres aux parties concernées. Celles-ci lui font connaître, par écrit, leur acceptation ou, en cas de refus, le montant détaillé de leur demande. / A défaut d'accord amiable avec le maître de l'ouvrage, le montant des indemnités est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation, saisie par la partie la plus diligente " ; qu'enfin, les dispositions de l'article R. 123-36 du même code prévoient que : " L'association foncière répartit les indemnités reçues entre les titulaires des divers droits exercés sur les terrains qui sont inclus dans le périmètre de l'aménagement foncier et qui font l'objet d'apports en vue de cet aménagement, la répartition se fait en tenant compte de la valeur en productivité des terrains et, le cas échéant, de la valeur d'avenir des peuplements forestiers apportés. " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 123-35 du code rural, l'association foncière de Thervay est devenue propriétaire des parcelles en litige comprises dans l'emprise de l'ouvrage public en construction ; que, par suite, les requérants qui avaient fait apport de ces terres n'avaient plus la qualité de propriétaire au moment de leurs demandes indemnitaires et ne peuvent donc utilement se prévaloir du protocole d'accord régional du 24 juin 2005 " portant sur les modalités et les conditions d'indemnisation des préjudices subis par les propriétaires fonciers et les exploitants agricoles " ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-2 du code rural et de la pêche maritime : " (...) Dans le cas prévu à l'article L. 123-24, la constitution d'une commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier est de droit à compter de la publication de l'arrêté d'ouverture d'enquête publique " ; qu'aux termes de l'article R. 123-1 du même code : " La commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier détermine, en fonction de la vocation culturale des fonds, la ou les natures de culture à l'intérieur du périmètre d'aménagement foncier agricole et forestier. / Dans chaque nature de culture, elle distingue une ou plusieurs classes en fonction de la productivité des fonds. / Pour chaque classe, elle fixe par unité de surface le nombre de points exprimant la valeur de productivité réelle des fonds " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que l'association foncière de Thervay a procédé à la répartition de l'indemnité reçue de RFF en se fondant sur le nombre de points attribués à chaque propriétaire ou exploitant par la commission départementale d'aménagement foncier, en fonction de la valeur de productivité réelle des fonds ; qu'elle a ainsi fait une exacte application des dispositions précitées de l'article R. 123-36 du code rural et de la pêche maritime ; que si les requérants entendent soutenir que le remembrement aurait été inéquitable ou qu'il comporterait des erreurs, notamment dans le calcul des surfaces d'apport, ils leur appartenaient de saisir la commission départementale d'un recours préalable obligatoire, conformément aux dispositions de l'article L. 121-7 du code rural, puis de contester éventuellement la décision de cette commission dans le délai de recours contentieux ; qu'en l'absence d'un tel recours administratif, le moyen tiré de ce que l'association foncière de Thervay aurait commis une faute lors de la répartition des indemnités ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. B... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge conjointe de M.B..., de M. E...et du GAEC B...une somme de 1 500 euros à verser à l'association foncière de Thervay sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... et autres est rejetée.

Article 2 : M.B..., M. E...et le GAEC B...verseront conjointement à l'association foncière de Thervay une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au GAECB..., à M. D... E...et à l'association foncière de Thervay.

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N° 13NC01593


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01593
Date de la décision : 30/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

03-04-01-01 Agriculture et forêts. Remembrement foncier agricole. Généralités. Réalisation d`un grand ouvrage public (art. 10 de la loi du 8 août 1962).


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Julienne BONIFACJ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP DE LUCA ET NICPON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-12-30;13nc01593 ?
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