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23/06/2014 | FRANCE | N°13NC02215

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 23 juin 2014, 13NC02215


Vu la requête, enregistrée 23 décembre 2013, présentée pour M. A...C...demeurant..., par Me B... ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302901 du 16 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 février 2013 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler l'arrêté du préfe

t de la Moselle en date du 21 février 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle...

Vu la requête, enregistrée 23 décembre 2013, présentée pour M. A...C...demeurant..., par Me B... ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302901 du 16 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 février 2013 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 21 février 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation au besoin sous astreinte en application des articles L. 911-1, L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement à Me B...sous réserve d'une renonciation de sa part à l'indemnisation prévue par l'aide juridique, d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

M. C...soutient que :

En ce qui concerne la décision préfectorale lui refusant un titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L.313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- le préfet aurait dû, en application des principes généraux du droit de l'Union européenne, le mettre à même de présenter ses observations avant de prononcer une obligation de quitter le territoire français ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L.511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision relative au délai de départ volontaire :

- le préfet aurait dû, en application des principes généraux du droit de l'Union européenne, le mettre à même de présenter ses observations avant de fixer le délai de 30 jours ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en n'accordant pas un délai de départ volontaire approprié ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2014, présenté par le préfet de la Moselle qui conclut au rejet de la requête et soutient que les moyens invoqués par M. C... ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, en date du 17 décembre 2013 la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2014, le rapport de M. Richard, premier conseiller ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

1. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement ; que l'arrêté attaqué fait mention de ce que la demande d'asile présentée par M. C... a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et que ce dernier n'entre donc pas dans le cas prévu au 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif à la délivrance d'une carte de résident à l'étranger admis au statut de réfugié ; que si le préfet n'a pas indiqué que l'intéressé n'entrait pas non plus dans le cas prévu à l'article L. 313-13 de ce code relatif à la délivrance d'une carte de séjour temporaire à l'étranger ayant obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire, cette seule circonstance n'est pas de nature à entacher d'un défaut de motivation l'arrêté attaqué qui a énoncé en des termes suffisamment précis que M. C...ne pouvait se voir attribuer un titre de séjour au titre de l'asile du fait du rejet de sa demande par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ce qui visait nécessairement à la fois le refus de reconnaissance de la qualité de réfugié et le refus du bénéfice de la protection subsidiaire ; que le refus de titre de séjour contesté vise en outre les textes dont il fait application et mentionne les faits qui en constituent le fondement notamment au regard de l'état de santé de l'intéressé qui avait également formé une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L.313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé, cette décision répond aux exigences de motivation posées par la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit: 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) "; que le médecin de l'agence régionale de santé a émis le 23 janvier 2013 l'avis selon lequel le défaut de prise en charge médicale de M. C...n'était pas susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existe un traitement approprié pour sa prise en charge médicale dans son pays d'origine ; que M.C..., s'il évoque les consultations d'un psychologue qui l'ont aidé à exprimer son ressenti à la fois sur sa situation en France et les violences dont il aurait été victime par le passé ne produit toutefois aucun élément probant de nature à contredire les appréciations du médecin de l'agence régionale de santé ; qu'il s'ensuit que le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'au regard de son état de santé, le préfet de la Moselle a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

3. Considérant, en troisième lieu, que M. C...fait valoir que son état de santé est précaire, qu'il est en France depuis de nombreuses années suite à la demande d'asile qu'il y a formé à la fin de l'année 2006 et qu'il maîtrise désormais la langue française ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. C...n'est entré en France qu'à l'âge de 25 ans et ne s'y est maintenu que le temps nécessaire à l'instruction de ses différentes demandes d'asile ou de titre de séjour, l'intéressé n'ayant déféré à aucune des obligations de quitter le territoire français prises à son encontre ; qu'il ne justifie pas non plus de la gravité de son état de santé ou de l'impossibilité de bénéficier le cas échéant d'un traitement approprié dans son pays d'origine ni de l'absence de tout lien personnel et familial conservé hors du territoire français ; que dans ces conditions, M. C...n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de la Moselle a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté ; qu'il en va de même des moyens tirés de la violation de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions dirigées contre la décision de refus de séjour, et qui doivent être écartés pour les mêmes motifs ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de 1'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants: (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

6. Considérant que, lorsqu'il fait obligation à un étranger de quitter le territoire français sur le fondement du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont issues de la transposition en droit interne de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, le préfet doit être regardé comme mettant en oeuvre le droit de l'Union européenne; qu'il lui appartient, dès lors, d'en appliquer les principes généraux, qui incluent le droit à une bonne administration ; que, parmi les principes que sous-tend ce dernier, figure celui du droit de toute personne à être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne, ce droit se définit comme le droit de toute personne à faire connaître, de manière utile et effective, ses observations écrites ou orales au cours d'une procédure administrative, avant l'adoption de toute décision susceptible de lui faire grief ; que ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales ;

7. Considérant que M. C...qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour, ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande, une mesure d'éloignement serait en principe prise à son encontre et qu'un délai de trente jours pourrait lui être laissé pour quitter le territoire ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il ait été empêché de présenter ses observations avant que ne soit prise la décision litigieuse; que, dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit d'être entendu qu'il tient du principe général du droit de l'Union ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

8. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, M.C..., qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour, ne pouvait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande, une mesure d'éloignement serait en principe prise à son encontre et qu'un délai de trente jours lui serait laissé pour quitter le territoire ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C...aurait sollicité en vain un entretien ni qu'il ait été privé de la possibilité de faire valoir auprès de l'administration des informations pertinentes susceptibles de conduire à l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit d'être entendu qu'il tient du principe général du droit de l'Union européenne ;

9. Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle se soit cru lié par le délai de trente jours et n'aurait pas examiné, au vu des pièces dont il disposait, la possibilité de prolonger le délai de départ volontaire octroyé à M. C...avant de le fixer à trente jours ; que si le requérant soutient que sa situation était susceptible d'être réexaminée, l'intéressé ne démontre pas se trouver dans une situation imposant qu'un délai de départ supérieur à trente jours lui soit accordé ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet a entaché sa décision d'une illégalité en ne lui accordant pas un délai plus long ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant que M. C...reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de la Moselle ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 février 2013 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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13NC02215


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC02215
Date de la décision : 23/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-06-23;13nc02215 ?
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