La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2014 | FRANCE | N°13NC01554

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 23 juin 2014, 13NC01554


Vu la requête, enregistrée le 9 août 2013, complétée par des mémoires enregistrés les 17 février 2014 et 10 avril 2014, présentée pour M. Georgel A..., demeurant au soumis à la détention d'un titre de séjour durant le temps de validité des mesures transitoires éventuellement prévues en la matière par le traité d'adhésion du pays dont ils sont ressortissants, et sauf si ce traité en stipule autrement, les citoyens de l'Union européenne qui souhaitent exercer en France, par Me Mehl, avocat ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301912 du 11 jui

llet 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa dema...

Vu la requête, enregistrée le 9 août 2013, complétée par des mémoires enregistrés les 17 février 2014 et 10 avril 2014, présentée pour M. Georgel A..., demeurant au soumis à la détention d'un titre de séjour durant le temps de validité des mesures transitoires éventuellement prévues en la matière par le traité d'adhésion du pays dont ils sont ressortissants, et sauf si ce traité en stipule autrement, les citoyens de l'Union européenne qui souhaitent exercer en France, par Me Mehl, avocat ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301912 du 11 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2013 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, enfin lui a enjoint de remettre son passeport et de se présenter une fois par semaine aux autorités de police sous peine d'être interdit de retour sur le territoire français ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation ;

4°) subsidiairement, de surseoir à statuer sur les conclusions de sa requête tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays d'éloignement dans l'attente de la réponse aux questions préjudicielles posées le 8 mars 2013 par le tribunal administratif de Melun à la Cour de justice de l'Union européenne ;

5°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A... soutient que :

- la décision portant refus de séjour a été prise par une autorité ne bénéficiant pas d'une délégation de signature régulièrement publiée ; le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation, les condamnations pénales prononcées à son encontre ne pouvant caractériser une menace à l'ordre public au regard de leur ancienneté et de leur faible gravité ; elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un vice de procédure, dès lors que, préalablement à l'édiction de cette décision, il n'a pas été mis en mesure de présenter ses observations en méconnaissance de son droit à être entendu garanti par l'article 41-2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour ; elle est entachée d'un défaut de base légale ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle a été édictée au visa de l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui a été abrogé par l'article 8 de la loi du 31 décembre 2012 ;

- l'arrêté attaqué ne vise aucune disposition légale permettant au préfet de lui ordonner de remettre son passeport et de se présenter chaque semaine aux autorités de police ;

- le non respect des obligations de remise de son passeport et de présentation aux autorités de police ne figure pas au nombre des situations permettant le prononcé par le préfet d'une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2013, présenté par le préfet du Haut-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet soutient que :

- le comportement de M. A...représentant une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française, il était fondé, par application des dispositions de l'article L. 121-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à lui refuser la délivrance du titre de séjour qu'il avait sollicité ;

- le délit de vol ayant été commis le 28 avril 2011, soit vraisemblablement dans les trois mois suivant le retour en France de M.A..., il était également fondé, par application des dispositions de l'article L. 511-3-1 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à obliger ce dernier à quitter le territoire français ;

- le fait d'astreindre le requérant à se présenter aux services de police pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ est prévu par l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; cette mesure, qui permet à l'administration de connaître les démarches réalisées par le requérant pour organiser son départ, n'affectant pas les droits de M.A..., il n'a pas d'intérêt à agir ;

- le non respect des obligations de remise de passeport et de présentation aux autorités de police constitue l'un des motifs permettant à l'autorité préfectorale d'édicter une décision d'interdiction de retour ;

Vu l'ordonnance en date du 28 janvier 2014 fixant la clôture de l'instruction le 18 février 2014 à 16 heures ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 mars 2014, présenté par le préfet du Haut-Rhin ;

Vu les ordonnances en date du 20 mars 2014 rouvrant l'instruction et fixant une nouvelle date de clôture le 25 avril 2014 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2014, le rapport de M. Laubriat, premier conseiller ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; [...] " ; qu'aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Les ressortissants visés à l'article L. 121-1 qui souhaitent établir en France leur résidence habituelle se font enregistrer auprès du maire de leur commune de résidence dans les trois mois suivant leur arrivée. Les ressortissants qui n'ont pas respecté cette obligation d'enregistrement sont réputés résider en France depuis moins de trois mois. / Ils ne sont pas tenus de détenir un titre de séjour. S'ils en font la demande, il leur est délivré un titre de séjour. / Toutefois, demeurent soumis à la détention d'un titre de séjour durant le temps de validité des mesures transitoires éventuellement prévues en la matière par le traité d'adhésion du pays dont ils sont ressortissants, et sauf si ce traité en stipule autrement, les citoyens de l'Union européenne qui souhaitent exercer en Franceune activité professionnelle. / Si les citoyens mentionnés à l'alinéa précédent souhaitent exercer une activité salariée dans un métier caractérisé par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie, au plan national, par l'autorité administrative, ils ne peuvent se voir opposer la situation de l'emploi sur le fondement de l'article L. 341-2 du code du travail. [...] " ; que l'article L. 121-4 dispose : " Tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ou les membres de sa famille qui ne peuvent justifier d'un droit au séjour en application de l'article L. 121-1 ou de l'article L. 121-3 ou dont la présence constitue une menace à l'ordre public peut faire l'objet, selon le cas, d'une décision de refus de séjour, d'un refus de délivrance ou de renouvellement d'une carte de séjour ou d'un retrait de celle-ci ainsi que d'une mesure d'éloignement prévue au livre V." ;

2. Considérant que par un arrêté du 25 mars 2013, le préfet du Haut-Rhin a refusé de délivrer à M. GeorgelA..., ressortissant roumain, un titre de séjour avec autorisation de travail, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'expiration de ce délai, enfin lui a enjoint de remettre son passeport et de se présenter chaque semaine aux services de police sous peine d'être interdit de retour sur le territoire français ; que M. A... demande l'annulation du jugement du 11 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

3. Considérant que pour refuser à M. A...la délivrance du titre de séjour que ce dernier avait sollicité pour pouvoir exercer une activité professionnelle, le préfet du Haut-Rhin s'est fondé sur le fait que la présence sur le territoire français de l'intéressé constituait une menace pour l'ordre public ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a été condamné le 24 septembre 2004 à 200 euros d'amende pour des faits de vol en réunion commis le 29 janvier 2004, le 1er décembre 2005 à 500 euros d'amende pour des faits de conduite d'un véhicule à moteur sans permis et sans assurance, enfin le 7 juin 2011 à 6 mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de vol commis en avril 2011 ; que ces seules condamnations pénales, dont la dernière remonte à près de deux ans avant l'édiction de l'arrêté attaqué, sont toutefois insuffisantes pour considérer que le comportement de M. A... serait constitutif d'une menace grave et actuelle pour l'ordre public ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'arrêté du 25 mars 2013 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de délivrer à M. A...un titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, dans ces conditions, cette décision ainsi que, par voie de conséquence, celles faisant obligation à M. A...de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays d'éloignement et lui enjoignant de remettre son passeport et de se présenter chaque semaine aux autorités de police, ne peuvent qu'être annulées ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente de la réponse aux questions préjudicielles posées le 8 mars 2013 par le tribunal administratif de Melun à la Cour de justice de l'Union européenne, M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 25 mars 2013 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que le présent arrêt implique seulement que le préfet du Haut-Rhin procède au réexamen de la situation administrative de M. A...dans un délai de trois mois à compter de la notification de celui-ci ; qu'il y a lieu par suite d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'ordonner au préfet du Haut-Rhin de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour de M. A...dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 11 juillet 2013 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé, ensemble l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 25 mars 2013.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur d'ordonner au préfet du Haut-Rhin de procéder au réexamen de la demande de M. A...dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à M. A...la somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. GeorgelA...et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Haut-Rhin et au Procureur près le tribunal de grande instance de Mulhouse.

''

''

''

''

2

13NC01554


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01554
Date de la décision : 23/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : MEHL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-06-23;13nc01554 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award