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17/04/2014 | FRANCE | N°12NC01026

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 17 avril 2014, 12NC01026


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 juin 2012, présentée pour la Société KL Diffusion représentée par M. A... C..., liquidateur, dont le siège est BP 447 à Luxembourg (L2014), par MeD... ;

La Société KL Diffusion demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805757 du 12 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités qui lui ont été assignés au titre des exercices clos en 2001, 2002, 2003, 2004 et 2005 ;

2°) de pr

ononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3) de mettr...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 juin 2012, présentée pour la Société KL Diffusion représentée par M. A... C..., liquidateur, dont le siège est BP 447 à Luxembourg (L2014), par MeD... ;

La Société KL Diffusion demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805757 du 12 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités qui lui ont été assignés au titre des exercices clos en 2001, 2002, 2003, 2004 et 2005 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Société KL Diffusion soutient que :

- elle ne dispose d'aucun établissement stable en France ; l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe qu'elle disposerait d'un établissement stable en France ;

- elle fait l'objet d'une double imposition, ce qui est contraire à la convention fiscale franco-luxembourgeoise ;

- l'imposition de la plus-value d'actif est irrégulière au regard de la convention fiscale franco-luxembourgeoise dès lors qu'elle ne dispose d'aucun établissement stable en France ; elle n'a réalisé aucune plus-value imposable à l'occasion d'une cession de clientèle ; l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe d'un acte anormal de gestion ;

- la majoration pour activité occulte n'est pas justifiée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2012, présenté par le ministre de l'économie qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- la société possède un établissement stable en France ; en procédure de taxation d'office, la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions incombe au contribuable ;

- en application de la convention fiscale franco-luxembourgeoise, les revenus des entreprises commerciales sont imposables dans l'Etat sur le territoire duquel se trouve un établissement stable ;

- le profit résultant de l'appropriation à titre gratuit par l'établissement stable de la société situé en France de la clientèle de la société Eurodiet Benelux doit être imposé en France ;

- la majoration pour activité occulte est justifiée ;

Vu la lettre du 11 février 2014 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 27 mars 2014 et que l'instruction pourrait être close à partir du 27 février 2014 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 3 mars 2014 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention entre la France et le Grand-duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune, signée à partie le 1er avril 1958, modifiée par l'avenant du 8 septembre 1970 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2014 :

- le rapport de Mme Guidi, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 209-1 du code général des impôts : " I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés (...) en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions (...) " ; qu'aux termes du 1 de l'article 4 de la convention fiscale signée le 1er avril 1958 par la France et le Luxembourg : " Les revenus des entreprises (...) commerciales (... ) ne sont imposables que dans l'Etat sur le territoire duquel se trouve un établissement stable (...) " ; qu'aux termes de l'article 2.3 alinéa 1 de cette convention " l'établissement stable désigne une installation fixe d'affaires dans laquelle l'entreprise réalise tout ou partie de son activité " ; que le deuxième alinéa de cet article précise qu'au nombre des établissements stables figurent notamment : " a. Les sièges de direction ; b. Les succursales ; c. Les bureaux ... " ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, au terme d'une procédure de visite et de saisie menée le 28 février 2007 et suivie d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2005, l'administration a relevé la présence au domicile de Mme B...situé à Metz, associée et administratrice de la société de droit luxembourgeois KL Diffusion, de nombreux documents comptables, commerciaux et bancaires nécessaires à l'activité de la société KL Diffusion ; que cette société qui vend des produits diététiques auparavant commercialisés par la Sarl Karmiel Santé qui les fabrique, a son siège social en France et que Mme B...en est également associée ; que l'administration a constaté qu'au siège social de la société Karmiel Santé se trouvaient les fichiers informatiques de la gestion commerciale de la société KL Diffusion et que les commandes de la société KL Diffusion, le suivi de ses clients, les facturations, les pièces relatives aux livraisons et les tarifs de vente étaient gérés par le personnel de la société Karmiel Santé, travaillant au lieu de son siège social en France ; que l'administration a également relevé l'absence de moyens matériels et humains dans les locaux de la société KL Diffusion au Luxembourg ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme démontrant l'existence d'un établissement stable en France à partir duquel s'exerçait l'activité de la société KL Diffusion ; qu'en conséquence, cette dernière était redevable de l'impôt sur les sociétés, en France, pour les prestations qu'elle avait réalisées à partir de cet établissement ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : "Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminué des suppléments d'apport et augmenté des prélèvements effectués au cours de la période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés" ; qu'aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : "1. Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend :... / b. Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale..." ;

4. Considérant que la société luxembourgeoise KL Diffusion a cédé sans contrepartie à la société Sodipro la clientèle de la société Eurodiet Benelux en 2005, avec laquelle la société Sodipro a réalisé l'essentiel de son chiffre d'affaires au cours de cet exercice ; que l'administration, estimant que cette cession constituait un acte anormal de gestion, a réintégré dans les résultats imposables de la société KL Diffusion la valeur vénale évaluée de cette clientèle ; que si la société soutient que cette clientèle n'a pas de valeur patrimoniale, elle n'apporte aucune précision, ni élément à l'appui de ses allégations en se bornant à faire valoir que la valeur d'une clientèle ne dépend pas du chiffre d'affaires qu'elle procure mais de la loi de l'offre et de la demande ainsi que du prix que l'acquéreur accepte de payer ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration a réintégré la valeur de cette clientèle dans les résultats de l'établissement stable de la société KL Diffusion situé sur le territoire français et imposable en France en application de l'article 4 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 24 de la convention franco-luxembourgeoise susvisée : " 1. Tout contribuable qui prouve que les mesures prises par les autorités fiscales des deux Etats contractants ont entraîné pour lui une double imposition en ce qui concerne les impôts visés par la présente convention peut adresser une demande soit aux autorités compétentes de l'Etat sur le territoire duquel il a son domicile, soit à celles de l'autre Etat. Si le bien-fondé de cette demande est reconnu, les autorités compétentes s'entendent pour éviter de façon équitable la double imposition ..." ;

6. Considérant que si la société KL Diffusion fait valoir que ses résultats ont déjà fait l'objet d'une imposition au Luxembourg, elle n'allègue pas avoir présenté, avant la mise en recouvrement des redressements contestés, une demande ayant pour objet l'application des stipulations précitées de l'article 24 de la convention franco-luxembourgeoise ; que, dès lors, son moyen tiré de ce que l'imposition contestée conduirait à une double imposition ne peut qu'être rejeté ;

Sur l'amende de l'article 1763 A du code général des impôts :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1763 A du code général des impôts, devenu l'article 1759 du code général des impôts à compter du 1er janvier 2006, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité sont soumises à une pénalité égale à 100 p. 100 des sommes versées ou distribuées [...] " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions et de celles de l'article 117 du même code que la pénalité qu'elles prévoient est encourue du seul fait que le contribuable s'est abstenu de répondre à la demande de l'administration dans le délai qui lui est imparti ;

8. Considérant que les moyens tirés par la société KL Diffusion de ce qu'elle ne devait pas être soumise aux pénalités prévues par l'article 1763 A devenu article 1759 du code général des impôts, ni à la majoration de 80 % pour activité occulte, pour le motif qu'elle ne disposait pas d'établissement stable en France, ne peuvent qu'être rejetés, compte tenu de ce qui est dit ci-dessus ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société KL Diffusion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société KL Diffusion la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société KL Diffusion est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société KL Diffusion et au ministre chargé du budget.

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12NC01026


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01026
Date de la décision : 17/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Conventions internationales.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Établissement de l'impôt - Taxation d'office.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Cotisations d`IR mises à la charge de personnes morales ou de tiers - Imposition des bénéfices occultes des sociétés (anciens articles 9 - 117 - 169 et 197 du CGI).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Personnes et activités imposables - Notion d'entreprise exploitée en France.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : Mme STEFANSKI
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : GUERBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-04-17;12nc01026 ?
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