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03/04/2014 | FRANCE | N°13NC01056

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 03 avril 2014, 13NC01056


Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2013, présentée pour la société Aquilon Energies, ayant son siège 330 rue du Mourelet - ZI Courtine - à Avignon (84000), par Me Gelas ;

La société Aquilon Energies demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101745-1101746 en date du 11 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Aube en date du 1er août 2011 portant retrait des permis de construire qu'il lui avait délivrés le 2 mai 2011 ;

2°) d'annuler les a

rrêtés du préfet de l'Aube en date du 1er août 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Et...

Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2013, présentée pour la société Aquilon Energies, ayant son siège 330 rue du Mourelet - ZI Courtine - à Avignon (84000), par Me Gelas ;

La société Aquilon Energies demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101745-1101746 en date du 11 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Aube en date du 1er août 2011 portant retrait des permis de construire qu'il lui avait délivrés le 2 mai 2011 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de l'Aube en date du 1er août 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société Aquilon Energies soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularités tenant à son insuffisance de motivation, à l'erreur de droit commise dans l'application des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, à la méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, à l'erreur de droit commise dans l'application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative et au défaut de réponse à un moyen opérant ;

- les arrêtés sont insuffisamment motivés ;

- les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ont été méconnues ;

- les arrêtés sont entachés d'incompétence négative ;

- les arrêtés sont entachés d'erreur de droit en ce qui concerne les conséquences à tirer du sursis à exécution prononcé par la cour administrative d'appel du jugement en date du 24 février 2011 et méconnaissent les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

Vu le jugement et les arrêtés attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2013, présenté pour le ministre de l'égalité des territoires et du logement, qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- le jugement n'est pas entaché d'irrégularité ;

- les arrêtés litigieux sont suffisamment motivés ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 est inopérant et mal fondé ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'est pas fondé ;

- les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ne sont pas méconnues ;

Vu l'ordonnance en date 28 octobre 2013 portant clôture de l'instruction au 25 novembre 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2014 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me Gelas, avocat de la société Aquilon Energies ;

1. Considérant que, par des arrêtés en date du 21 mai 2008, le préfet de l'Aube a refusé de délivrer les permis de construire sollicités par la société Aquilon Energies pour la réalisation d'un parc éolien sur les communes de Pargues et de Praslin ; qu'à la suite du jugement en date du 24 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé ces décisions de refus et lui a enjoint de procéder à la délivrance des autorisations sollicitées, le préfet de l'Aube a délivré les permis de construire en cause par arrêtés en date du 2 mai 2011 ; qu'à la suite de l'arrêt en date du 4 juillet 2011, par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a prononcé le sursis à exécution dudit jugement en application des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le préfet de l'Aube a procédé, par arrêtés en date du 1er août 2011, au retrait des permis de construire délivrés le 2 mai 2011 ; que la société Aquilon Energies relève appel du jugement en date du 11 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés en date du 1er août 2011 portant retrait des permis de construire ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens relatifs à l'irrégularité du jugement :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. / Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables: 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ; 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière (...) " ;

4. Considérant que si le jugement en date du 24 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a enjoint au préfet de l'Aube de délivrer les permis de construire sollicités par la société Aquilon Energies a fait l'objet d'un sursis à exécution prononcé en application des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, cette circonstance n'a pas eu pour effet de placer le préfet de l'Aube en situation de compétence liée pour prononcer le retrait des permis de construire litigieux ; que le retrait d'un permis de construire constituant une décision qui doit être motivée en application des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 invoqué à l'encontre des arrêtés en date du 1er août 2011 portant retrait des permis de construire délivrés le 2 mai 2011 n'est pas inopérant ; que la société Aquilon Energies est ainsi fondée à soutenir qu'en omettant de répondre à ce moyen qu'elle avait invoqué dans son mémoire en date du 12 mars 2013, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a entaché son jugement en date du 11 avril 2013 d'une irrégularité ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Aquilon Energies ;

Sur la légalité des arrêtés en date du 1er août 2011 portant retrait des permis de construire :

6. Considérant, en premier lieu, que les arrêtés du 1er août 2011 portant retrait des permis de construire du 2 mai 2011 mentionnent les motifs de droit et de fait pour lesquels le préfet de l'Aube a estimé que le retrait des permis de construire pouvait être prononcé, tenant notamment à l'intervention du sursis à exécution du jugement lui ayant enjoint de délivrer les permis de construire en cause et à la méconnaissance par ces permis des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ; qu'ainsi, et nonobstant l'absence de référence à l'article L. 424-5 du même code dans les décisions de retrait litigieuses, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des arrêtés en date du 1er août 2011 doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par une lettre en date du 20 juillet 2011, le préfet de l'Aube a informé la société Aquilon Energies de son projet de retirer les permis de construire délivrés le 2 mai 2011, en exécution du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, et l'a invitée à lui faire part de ses observations dans un délai de huit jours ; qu'en laissant un tel délai à la société Aquilon Energies pour émettre ses observations ou, le cas échéant, solliciter un entretien, alors que les circonstances du retrait envisagé, liées à l'intervention de l'arrêt de la cour administrative d'appel prononçant le sursis à exécution du jugement qui avait enjoint au préfet de délivrer lesdits permis, était connues de la société Aquilon Energies, le préfet de l'Aube n'a pas méconnu les exigences posées à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Aube se serait estimé lié par l'intervention de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 4 juillet 2011 pour prononcer les retraits litigieux ; que le moyen tiré de ce que le préfet de l'Aube aurait méconnu l'étendue de sa compétence ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : " (...) Le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire " et qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;

10. Considérant que le préfet de l'Aube a procédé au retrait des permis de construire délivrés le 2 mai 2011 au motif que ceux-ci étaient entachés d'illégalité au regard des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et que le délai de trois mois visé à l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme n'était pas expiré ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit dans l'arrêt devenu définitif n° 11NC00716 de la présente cour statuant le 2 août 2012 sur la légalité des refus de permis de construire primitivement opposés au même projet, qu'en décidant de retirer les permis de construire délivrés le 2 mai 2011 au motif de leur illégalité au regard des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, le préfet de l'Aube aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance que le retrait litigieux n'a été rendu possible qu'en raison du prononcé par la cour administrative d'appel de Nancy d'un sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui avait enjoint au préfet de délivrer les permis de construire en cause, la société Aquilon Energies n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Aube ne pouvait légalement procéder au retrait, le 1er août 2011, des permis de construire qu'il lui avait délivré le 2 mai 2011 ;

11. Considérant qu'il résulte de ce tout ce qui précède que la société Aquilon Energies n'est pas fondée à demander l'annulation des arrêtés en date du 1er août 2011 par lesquels le préfet de l'Aube a procédé au retrait de ses permis de construire ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Aquilon Energies demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E:

Article 1er : Le jugement n° 1101745-1101746 en date du 11 avril 2013 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Aquilon Energies et sa demande de première instance sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Aquilon Energies et au ministre de l'égalité des territoires et du logement.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.

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13NC01056


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01056
Date de la décision : 03/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Questions générales - Motivation - Motivation obligatoire.

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Procédure contradictoire - Caractère obligatoire.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Régime d'utilisation du permis - Retrait du permis.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : GELAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-04-03;13nc01056 ?
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