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24/02/2014 | FRANCE | N°13NC00855

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 24 février 2014, 13NC00855


Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 6 mai 2013, sous le n°13NC00855, la requête présentée pour la société SOPREMA SAS, dont le siège social est au 14, rue de Saint-Nazaire, à Strasbourg, par Me Devret-Wolff, avocat ;

La société SOPREMA SAS demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1005781 en date du 12 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de M. A...B..., annulé l'arrêté de l'inspecteur du travail en date du 25 mars 2010 autorisant le licenciement de ce dernier et l'arrêté du 6 octobr

e 2010 par lequel le ministre du travail a confirmé cette décision ;

2°) de met...

Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 6 mai 2013, sous le n°13NC00855, la requête présentée pour la société SOPREMA SAS, dont le siège social est au 14, rue de Saint-Nazaire, à Strasbourg, par Me Devret-Wolff, avocat ;

La société SOPREMA SAS demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 1005781 en date du 12 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de M. A...B..., annulé l'arrêté de l'inspecteur du travail en date du 25 mars 2010 autorisant le licenciement de ce dernier et l'arrêté du 6 octobre 2010 par lequel le ministre du travail a confirmé cette décision ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le moyen tiré du vice de procédure n'a été présenté que dans le mémoire complémentaire de M.B..., enregistré le 14 mai 2012 ;

- la requête présente des moyens sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement : la jurisprudence et les instructions ministérielles n'imposent pas que tous les éléments soient intégralement communiqués au salarié mais suppose seulement une information claire et exhaustive du salarié sur le contenu des pièces en cause, ainsi que des modalités de leur communication, en sont notamment exclues les pièces de nature à porter gravement préjudice à leurs auteurs ; il ressort des pièces du dossier que l'inspecteur du travail a informé oralement M. B...de la possibilité de consulter les pièces du dossier ; l'intéressé a exercé des pressions sur plusieurs salariés ; il apparaît qu'il a pu répondre point par point à tous les griefs formulés à son encontre dans son courrier du 22 mars 2010 ; il a donc été informé avant la décision de l'inspecteur du travail ;

- la requête présente des moyens sérieux de nature à justifier le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par le jugement, dès lors que la procédure suivie a été contradictoire ;

- il existe des moyens sérieux de nature à justifier le sursis à exécution du jugement, dès lors que si M. B...demande le paiement des salaires dus depuis son licenciement, les sommes sont telles que la société s'expose au risque de ne jamais les récupérer ; compte tenu du délai de trois ans depuis le départ de M. B...de l'entreprise, son retour aurait des conséquences graves sur l'organisation du service ;

Vu, enregistré le 1er juillet 2013, le mémoire en défense présenté pour M. A...B..., demeurant au..., par Me Ruetsch, avocat ; il conclut au rejet de la requête et à ce que la société SOPREMA SAS soit condamnée à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir que :

- la décision d'autorisation de licenciement n'a pas été prise à l'issue d'une procédure contradictoire conforme aux dispositions de l'article R. 2421-4 du code du travail dès lors qu'il n'a pu obtenir copie de la demande d'autorisation de licenciement, ni les 26 pièces jointes, ni en avoir lecture, et n'a donc pu préparer utilement sa défense ; la lettre qu'il a adressée le 22 mars 2010 n'évoque pas certaines pièces ; rien ne faisait obstacle à la communication des pièces ; son comportement lors de l'audition a été tout à fait normal ; les attestations produites par l'entreprise traduisent des pressions sur les salariés ; il n'a aucunement l'intention de solliciter sa réintégration, de sorte que les conséquences alléguées sont inexistantes ;

Vu les pièces du dossier dont il ressort que la requête a été communiquée le 4 juin 2013 au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, pour lequel il n'a pas été présenté d'observations ;

II.) Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 7 mai 2013, sous le n°13NC00857, la requête présentée pour la société SOPREMA SAS, dont le siège social est au 14, rue de Saint-Nazaire, à Strasbourg, par Me Devret-Wolff, avocat ;

La société SOPREMA SAS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005781 en date du 12 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de M. A...B..., annulé l'arrêté de l'inspecteur du travail en date du 25 mars 2010 autorisant le licenciement de ce dernier et l'arrêté du 6 octobre 2010 par lequel le ministre du travail a confirmé cette décision ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'enquête a été réalisée de manière contradictoire ; la jurisprudence et les instructions ministérielles n'imposent pas que tous les éléments soient intégralement communiqués au salarié mais supposent seulement une information claire et exhaustive du salarié sur lesdites pièces ainsi que les modalités de leur communication ; en sont notamment exclues les pièces de nature à porter gravement préjudice à leurs auteurs ; il ressort des pièces du dossier que l'inspecteur du travail a informé oralement M. B...de la possibilité de consulter les pièces du dossier ; l'intéressé a exercé des pressions sur plusieurs salariés ; il apparaît qu'il a pu répondre point par point à tous les griefs formulés à son encontre dans son courrier du 22 mars 2010 ; il a donc été informé avant la décision de l'inspecteur du travail ;

- la multiplicité des attestations ne fait que confirmer la réalité des motifs allégués par l'employeur ;

Vu, enregistré le 17 juillet 2013 le mémoire en défense présenté pour M. A...B..., demeurant au..., par Me Ruetsch, avocat ; il conclut au rejet de la requête et à ce que la société SOPREMA SAS soit condamnée à lui verser la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir que :

- la décision d'autorisation de licenciement n'a pas été prise à l'issue d'une procédure contradictoire conforme aux dispositions de l'article R. 2421-4 du code du travail dès lors qu'il n'a pu obtenir copie de la demande d'autorisation de licenciement, ni les 26 pièces jointes, ni en avoir lecture, et n'a donc pu préparer utilement sa défense ; la lettre qu'il a adressée le 22 mars 2010 n'évoque pas certaines pièces ; rien ne faisait obstacle à la communication des pièces ; son comportement lors de l'audition a été tout à fait normal ; les attestations produites par l'entreprise traduisent des pressions sur les salariés ;

Vu les pièces du dossier dont il ressort que la requête a été communiquée le 4 juin 2013 au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, pour lequel il n'a pas été présenté d'observations ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2014 :

- le rapport de Mme Rousselle, président,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me Devret-Wolff pour la société SOPREMA SAS et Me Ruetsch, pour M.B... ;

Sur la jonction :

1. Considérant que les requêtes susvisées n° 13NC00855 et n° 13NC00857 de la société SOPREMA SAS tendent à l'annulation et au sursis à l'exécution du jugement en date du 12 mars 2013 du tribunal administratif de Strasbourg par lequel le tribunal a, à la demande de M. A... B..., annulé l'arrêté de l'inspecteur du travail en date du 25 mars 2010 autorisant le licenciement de ce dernier et l'arrêté du 6 octobre 2010 par lequel le ministre du travail a confirmé cette décision ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur la requête n° 13NC00855 :

2. Considérant que la présente décision statue sur la requête n° 13NC00857 de la société SOPREMA SAS à fin d'annulation du jugement dont il est demandé le sursis à exécution ; que, dès lors, la requête à fin de sursis à exécution du jugement est devenue sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur la requête n° 13NC00857 :

Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-11 du code du travail, l'inspecteur " procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat " ; que le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions précitées impose à l'autorité administrative, alors même que le licenciement n'intervient pas dans le cadre d'une procédure disciplinaire, d'informer le salarié concerné, de façon suffisamment circonstanciée, des éléments qui ont amené l'employeur à demander le licenciement et, le cas échéant de l'identité des personnes qui ont témoigné ou attesté d'éléments retenus par l'employeur pour étayer sa demande ; que le caractère contradictoire de cette enquête implique en outre que le salarié protégé puisse être mis à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, notamment des témoignages et attestations ; que toutefois, lorsque l'accès à ces témoignages et attestations serait de nature à porter gravement préjudice à leurs auteurs, l'inspecteur du travail doit se limiter à informer le salarié protégé, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'aucune des 14 attestations établies par des salariés de l'entreprise et jointes à la demande d'autorisation de licenciement adressée par la société SOPREMA SAS à l'inspecteur du travail n'a été communiquée par ce dernier à M. B... au cours de la procédure d'enquête menée le 4 mars 2010, alors que, contrairement à ce que soutient la société SOPREMA SAS, plusieurs de ces documents, émanant notamment de salariés qui n'étaient pas directement sous l'autorité hiérarchique de M.B..., ne comportaient aucune indication faisant obstacle à leur communication ou de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui les ont rédigées ; que la procédure suivie était, par suite irrégulière et la société SOPREMA SAS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur cette irrégularité pour annuler les décisions de l'inspecteur du travail et du ministre autorisant le licenciement de M.B... ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société SOPREMA SAS et de M. B...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Les conclusions de la société SOPREMA SAS sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de M. B...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société SOPREMA SAS, à M. A...B...et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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13NC00855 - 13NC00857


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00855
Date de la décision : 24/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-03-02-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Modalités de délivrance ou de refus de l'autorisation. Modalités d'instruction de la demande. Enquête contradictoire.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : CABINET PLACIDI - PAILLOT- DREVET-WOLFF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-02-24;13nc00855 ?
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