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06/02/2014 | FRANCE | N°12NC00483

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 06 février 2014, 12NC00483


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 mars 2012, présentée pour la Sarl Méga Service, dont le siège est 18 rue de Hambach à Grundwiller (57510), par Me A... ;

La société Méga Service demande à la Cour :

1°) d'annuler, en tant qu'il statue sur la réintégration des frais de location au titre des exercices 2005 et 2006 et sur les majorations pour abus de droit, le jugement n° 0805363 du 12 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés, de contribution sur

l'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 mars 2012, présentée pour la Sarl Méga Service, dont le siège est 18 rue de Hambach à Grundwiller (57510), par Me A... ;

La société Méga Service demande à la Cour :

1°) d'annuler, en tant qu'il statue sur la réintégration des frais de location au titre des exercices 2005 et 2006 et sur les majorations pour abus de droit, le jugement n° 0805363 du 12 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ainsi que les pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

Elle soutient que :

- les rectifications opérées par le service ne sont pas justifiées ;

- un contrat relatant les conditions de location n'est pas nécessaire pour justifier les charges de location de deux engins de chantier facturées par la société Euro Multi Service au titre des exercices 2005 et 2006 ; il n'est pas établi que ces deux engins ne figureraient pas à l'actif du bilan du cessionnaire ; le maintien de ces engins sur le territoire national et le fait que le cédant en soit l'unique locataire ne suffisent pas pour justifier les redressements ; le prix de location est conforme aux usages de la profession ; la provision de la facture de 9 250 euros du 3 janvier 2005 traduit seulement le désordre de la comptabilité ;

- la majoration de 80 % de l'article 1729 du code général des impôts pour abus de droit n'est pas justifiée par la seule affirmation que l'opération de cession-location des deux engins de chantier aurait eu pour seul but d'atténuer la charge fiscale du cédant ; la situation de la société en 2005 explique la cession des deux engins ; en outre, le résultat des exercices 2005 et 2006 est négatif et la différence d'imposition résultant des rectifications n'est pas significative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 août 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre conclut au rejet de la requête et s'en remet à ses écritures présentées en première instance ;

Vu la lettre du 29 novembre 2013 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 16 janvier 2014 et que l'instruction pourrait être close à partir du 18 décembre 2013 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 20 décembre 2013 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 janvier 2013 :

- le rapport de Mme Guidi, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

Sur le bien fondé des impositions :

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : "Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) / b) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...) / L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité (...) / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement" ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif ou que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Sarl Méga Service a disposé à compter de 1998 d'une pelle mécanique sur pneus moyennant un coût de crédit-bail de 64 333,49 euros et qu'elle a acquis ce matériel en 2002 pour une valeur résiduelle de 3 216,67 euros ; qu'elle a également disposé, à compter de 1999, d'un chariot élévateur moyennant un coût de crédit-bail de 53 357,16 euros qu'elle a acquis en fin de contrat, en 2003, pour une valeur résiduelle de 533,57 euros ; qu'elle a revendu ces immobilisations à la société luxembourgeoise SA Euro Multi Services pour un montant total de 9 250 euros, facturé le 3 janvier 2005 ; qu'à compter du mois d'avril 2005, la société luxembourgeoise a facturé à société Méga Service la location mensuelle de l'un de ces deux engins, pour un montant total de 77 500 euros en 2005 et 115 750 euros en 2006, alors que ces deux engins n'ont pas été inscrits à l'actif de la société Euro Multi Services et que leur prix de vente faisait l'objet d'une provision pour créance douteuse à la clôture de l'exercice 2006 ; qu'en relevant, sans être contestée, que les loyers annuels représentent plus de onze fois le prix de la cession des deux engins et que, à supposer même que le prix de location soit conforme aux usages de la profession, l'opération de cession-location ainsi mise en place est dépourvue de toute réalité économique, l'administration apporte la preuve, dont la charge lui incombe en l'espèce dès lors que le comité consultatif pour la répression des abus de droit n'a pas été saisi, que cette opération n'a pu être inspirée par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer l'impôt dans des conditions dissimulant un transfert de bénéfice ou de revenu ; qu'ainsi elle a pu à bon droit, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, réintégrer le montant des loyers que la Sarl Méga Service a versés à la SA Euro Multi Services au cours des deux exercices 2005 et 2006 dans les bases imposables de la requérante à l'impôt sur les sociétés ;

Sur le bien-fondé des pénalités :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : [...] b. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales [...] " ;

4. Considérant que l'article 1729 du code général des impôts prévoit l'application d'une majoration de 80 % si le redevable se rend coupable d'abus de droit ; que l'administration démontre en relevant les faits mentionnés ci-dessus que l'opération litigieuse était constitutive d'un abus de droit ; que c'est, dès lors, à bon droit que le service a appliqué la majoration de 80 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Méga Service n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Méga Service est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Méga Service et au ministre de l'économie et des finances.

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12NC00483


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00483
Date de la décision : 06/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-03-03 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Abus de droit et fraude à la loi.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : BURKATZKI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-02-06;12nc00483 ?
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