Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 juillet 2012, présentée pour Mme D...C..., demeurant..., par Me Mengus, avocat ;
MmeC... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1201927 en date du 2 mai 2012 en tant que le magistrat délégué près le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 avril 2012 par lequel le préfet du Bas-Rhin l'a assignée à résidence pour une durée de quarante cinq jours et lui a interdit de quitter le département du Bas Rhin sans autorisation ;
2°) d'annuler l'arrêté en date du 26 avril 2012 ;
3°) de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne, avant dire droit, la question relative à la compatibilité des dispositions du titre VI du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec les articles 12§2 et 13§3 de la directive 2008/115/CE ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil ;
Elle soutient que :
- l'auteur de la décision est incompétent, car M. Trouchaud ne bénéficiait d'une délégation de signature qu'en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, M. B..., qui n'exerçait plus à la date de la décision litigieuse ; la délégation de signature était devenue caduque ;
- le juge administratif se doit d'apprécier, conformément aux articles 5§4 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les conditions dans lesquelles les policiers chargés de notifier la décision litigieuse ont pénétré dans son lieu de résidence et ont pris son passeport ;
- l'assistance d'un interprète doit être effective et conforme aux droits de la défense et non être analysée uniquement au regard des seules dispositions du titre VI du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; les dispositions des articles 5§2 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 14§3 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, le préambule et l'article 12§2 de la directive 2008/115/CE ainsi que l'article 13§3 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux voies de recours ont été méconnus ;
- la décision litigieuse comporte une erreur de motivation dès lors qu'elle n'a pas été prise suite à interpellation ;
- les premiers juges ont mal apprécié sa situation au regard de sa situation personnelle et familiale ; les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2012, présenté par le préfet du Bas-Rhin ;
Il conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- l'auteur de la décision était compétent dès lors qu'il ressort du procès verbal d'installation de M. Riguet, secrétaire général, que celui-ci a pris ses fonctions le 29 mai 2012, et que la délégation de signature de son prédécesseur continuait à produire ses effets jusqu'à cette date ;
- le juge administratif n'est pas compétent pour se prononcer sur la légalité des conditions d'interpellation et de la garde à vue précédant une mesure d'éloignement, et par suite un tel moyen est inopérant ;
- aucun texte ne prévoit de façon expresse que la mesure d'assignation à résidence soit notifiée à l'étranger dans une langue qu'il comprend ; le préfet a eu recours par téléphone à un interprète alors qu'il n'y était pas tenu ; la requérante n'a été privée d'aucune garantie ;
- aucun texte n'interdit que l'assignation à résidence et l'interpellation soient réalisées de façon concomitante ;
- l'assignation à résidence est fondée sur la mesure d'éloignement qui est exécutoire, et les moyens tirés de la méconnaissance de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont inopérants ; aucun élément n'établit que la requérante ne pourrait pas déférer en raison de son état de santé à la mesure d'éloignement, ni bénéficier d'un traitement adapté à son état dans son pays d'origine ; par avis du 25 septembre 2012, le médecin de l'agence régionale de santé a confirmé son précédent avis ;
Vu, en date du 28 juin 2012, la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle admettant Mme C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et désignant Me Mengus pour la représenter ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :
- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller ;
Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision :
1. Considérant que, par un arrêté du 29 août 2011, M. Trouchaud, secrétaire général adjoint de la préfecture du Bas-Rhin, a reçu délégation de M.A..., préfet du Bas-Rhin, pour signer " tous actes et décisions en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général de la préfecture, à l'exception des arrêtés de conflit "; qu'il ressort des pièces du dossier que M. Riguet, bien qu'il ait été nommé secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin par un décret du 20 avril 2012, n'a pris ses fonctions que le 29 mai 2012 ; que, dans ces conditions, la délégation de signature consentie à M. Trouchaud continuait en tout état de cause à produire ses effets le 26 avril 2012, date à laquelle a été prise la décision litigieuse ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision doit être écarté ;
Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'interpellation :
2. Considérant que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'interpellation est inopérant à l'encontre de la décision portant assignation à résidence ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure d'interpellation, dont le contrôle est confié au seul juge judiciaire, aurait été irrégulière et méconnaîtrait les articles 5§3 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
Sur le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense :
3. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de l'irrégularité de la notification de l'arrêté d'assignation à résidence, qui ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le Tribunal administratif de Strasbourg ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la requérante, les dispositions des articles 5§2 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 14§3 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, du préambule et de l'article 12§2 de la directive 2008/115/CE ainsi que de l'article 13§3 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux voies de recours n'ont pas été méconnues ;
Sur le moyen tiré de l'erreur de motivation de la décision litigieuse :
4. Considérant que la circonstance que l'interpellation de Mme C...et la notification de son assignation à résidence soient intervenues le même jour est sans incidence sur la légalité de ladite décision, qui comporte l'ensemble des éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur commise dans la motivation de la décision litigieuse doit être écarté ;
Sur les moyens tirés de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
5. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le Tribunal administratif de Strasbourg ; que Mme C...n'apporte par ailleurs aucun élément à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, un tel moyen doit être également écarté ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de poser, avant dire droit, une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par jugement n° 1201927 en date du 2 mai 2012 , le magistrat délégué près le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 avril 2012 en tant que le préfet du Bas-Rhin l'a assignée à résidence pour une durée de quarante cinq jours et lui a interdit de quitter le département du Bas Rhin sans autorisation ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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