Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 juillet 2012, présentée pour M. B...I...G...et Mme F...C...épouseG..., demeurant..., M. A...G..., demeurant ... et Mme D...G..., demeurant..., par Me H... ; les requérants demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0802325 en date du 16 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 avril 2008 du préfet du Bas-Rhin déclarant d'utilité publique les acquisitions et travaux nécessaires à l'achèvement des travaux de réaménagement de la rue de Mittelhausbergen à Oberhausbergen, autorisant la communauté urbaine de Strasbourg (CUS) à acquérir à l'amiable ou par voie d'expropriation les immeubles nécessaires à la réalisation de l'opération dans un délai de cinq ans et déclarant cessibles pendant six mois les immeubles figurant sur l'état et le plan parcellaire annexés à l'arrêté ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 16 avril 2008 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la CUS le paiement de la somme de 10 000 euros au titre des frais d'instance non compris dans les dépens exposés en première instance et en appel ;
Les consorts G...soutiennent que :
- l'arrêté attaqué ne les a pas identifiés en leur qualité de nus-propriétaires et d'usufruitiers en violation de l'article R. 11-28 du Code de l'expropriation et de l'article 7 du décret du 4 janvier 1955 ;
- la CUS, substituée au conseil municipal de la commune d'Oberhausbergen, n'a pas délibéré dans le délai de trois mois imparti par l'article R. 11-13 du code de l'expropriation suivant l'avis défavorable du commissaire enquêteur ;
- l'opération projetée ne présente aucune utilité publique dès lors que le réaménagement de la rue a eu lieu en 2002 et donne à la rue son caractère définitif comme l'a relevé le commissaire enquêteur, qui a émis un avis défavorable au projet, que la configuration actuelle de la rue prend déjà en compte les considérations de sécurité publique des piétons et des automobilistes, que l'opération a pour seul but la création de nouveaux stationnements et n'entraînera aucune différence significative concernant la sécurité des personnes à mobilité réduite et que la largeur du trottoir devant leurs propriétés est de 82 cm et non 60 cm ;
- le coût financier et écologique de l'opération est disproportionné au regard de l'intérêt qu'elle présente, eu égard notamment à l'arrachage nécessaire d'arbres et à la valeur vénale de leurs terrains constructibles ;
- ils ont fait l'objet d'une discrimination dès lors que la CUS s'est abstenue de communiquer les résultats des enquêtes publiques afférentes aux révisions successives du plan d'occupation des sols, qu'un seul côté de la rue est amputé en surface tandis que l'autre côté, bordé de terrains en friche et comportant des habitations en net recul par rapport à la voie publique, est épargné ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2012, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2012, présenté pour la CUS par Me E... ; la CUS conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé, et demande en outre à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 décembre 2012, présenté pour les consorts G...par MeH... ; les requérants concluent aux mêmes fins que leur requête ; ils soutiennent en outre que :
- la CUS exerce de plein droit les pouvoirs de la commune d'Oberhausbergen en matière d'expropriation, qui concerne en l'espèce un seul projet, et donc qu'une seule commune, de sorte que trouve à s'appliquer l'article R. 11-13 du code de l'expropriation ;
- les exigences de sécurité invoquées pour justifier les travaux, déniées par l'avis défavorable du commissaire enquêteur, ne suffisent pas à justifier l'utilité publique du projet au regard du préjudice qu'ils subiraient ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, notamment son article 7 ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :
- le rapport de M. Pommier, président,
- et les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,
- et les observations de me Levy, avocat de la communauté urbaine de Strasbourg ;
1. Considérant que, par délibération de son conseil communautaire du 22 décembre 2000, la communauté urbaine de Strasbourg (CUS) a approuvé la réalisation de travaux d'aménagement d'un tronçon de la rue de Mittelhausbergen dans la commune d'Oberhausbergen en vue de la création de trottoirs, de places de stationnement et d'une zone de sécurité limitée à 30km/h ; que les travaux ont été exécutés de 2001 à 2002 en évitant les parcelles cadastrées n°304, 306, 733 et 734, d'une surface d'1,25 are, que leurs propriétaires, M. B...et Mme F... G...et leurs enfants, M. A... et Mme D...G..., ont refusé de céder à titre gratuit ; que, par une délibération du 8 juillet 2005, la CUS s'est prononcée favorablement, d'une part, pour la poursuite de l'aménagement du tronçon de la rue de Mittelhausbergen et, d'autre part, pour l'acquisition par voie d'expropriation des parcelles n° 304, 306, 733 et 734 ; que, par un arrêté du 16 avril 2008, le préfet du Bas-Rhin a, à la demande de la CUS, déclaré d'utilité publique les travaux et les acquisitions nécessaires à leur achèvement, et déclaré cessibles les parcelles susmentionnées ; que les consorts G...relèvent appel du jugement du 16 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
2. Considérant que le jugement attaqué vise le moyen tiré de l'absence d'utilité publique de l'aménagement et y apporte une réponse motivée ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il n'appartenait pas aux premiers juges de " répondre " à l'avis défavorable du commissaire enquêteur ; que, par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer ne peut qu'être écarté ;
En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté du 16 avril 2008 :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R11-28 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Sur le vu du procès-verbal et des documents y annexés, le préfet, par arrêté, déclare cessibles les propriétés ou parties de propriétés dont la cession est nécessaire. Ces propriétés sont désignées conformément aux dispositions de l'article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière et l'identité des propriétaires est précisée conformément aux dispositions de l'alinéa 1er de l'article 5 de ce décret ou de l'alinéa 1er de l'article 6 du même décret, sans préjudice des cas exceptionnels mentionnés à l'article 82 du décret d'application n° 55-1350 du 14 octobre 1955. (...) " ; qu'aux termes de l'article 7 du décret du 4 janvier 1955 : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un service chargé de la publicité foncière doit indiquer, pour chacun des immeubles qu'il concerne, la nature, la situation, la contenance et la désignation cadastrale (section, numéro du plan et lieu-dit). Le lieu-dit est remplacé par l'indication de la rue et du numéro pour les immeubles situés dans les parties agglomérées des communes urbaines. Lorsqu'il réalise ou constate une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, l'acte ou la décision doit désigner l'immeuble tel qu'il existait avant la division et chacun des nouveaux immeubles résultant de cette division, sauf en cas de lotissement effectué dans le cadre de la législation sur les lotissements ou s'il s'agit d'immeubles situés dans les communes où le cadastre n'est pas rénové. La constitution sur une fraction de parcelle d'un droit d'usufruit, d'un droit de superficie ou d'un bail emphytéotique est considérée comme un changement de limite de propriété.(...) Les mêmes indications doivent obligatoirement figurer dans tout bordereau, extrait, expédition ou copie, déposé en vue de l'exécution de la formalité. (...) ";
4. Considérant qu'à supposer même que l'état parcellaire joint à l'arrêté attaqué et désignant les propriétés cessibles devait faire mention de la constitution d'un droit d'usufruit sur la parcelle 304, l'omission de cette indication n a pu d'une quelconque façon induire en erreur les requérants dès lors que les usufruitiers de ladite parcelle étaient eux-mêmes propriétaires de deux autres parcelles concernées par l'expropriation et que l'usufruiter était leur fils ; que, par suite, le moyen tiré de ce vice de procédure ne peut qu'être écarté ;
5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-13 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique: " Lorsque l'opération projetée doit être exécutée sur le territoire et pour le compte d'une seule commune, l'enquête publique s'ouvre à la mairie de cette commune. (...) / Si les conclusions du commissaire enquêteur (...) sont défavorables à l'adoption du projet, le conseil municipal est appelé à émettre son avis par une délibération motivée dont le procès-verbal est joint au dossier transmis au sous-préfet ; celui-ci transmet ensuite l'ensemble des pièces au préfet, avec son avis. Faute de délibération dans un délai de trois mois à compter de la transmission du dossier au maire, le conseil municipal est regardé comme ayant renoncé à l'opération. " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'arrêté attaqué, que l'opération projetée a été décidée par la CUS, personne publique expropriante ; qu'elle sera donc exécutée pour le compte de cette dernière, qui regroupe plusieurs communes, et non de la seule commune d'Oberhausbergen ; que, par suite et alors même que les travaux litigieux ne se dérouleront que sur le territoire de la commune d'Oberhausbergen, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 11-13 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique doit être écarté ;
En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté du 16 avril 2008 :
Sur le moyen tiré du défaut d'utilité publique :
7. Considérant qu'il appartient au juge, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'opération d'aménagement de la rue de Mittelhausbergen a pour objet l'achèvement des travaux entrepris en 2001-2002 et visant à améliorer la sécurité des " cheminements multimodaux " des riverains et usagers de cette voie ; que la largeur du trottoir au droit de la propriété des consorts G...n'était que de 60 cm et non de 82 cm comme le soutiennent ces derniers en y ajoutant le caniveau; que les aménagements prévus porteront cette largeur à 80 cm, ce qui permettra la circulation des poussettes et des personnes à mobilité réduite tout en garantissant la sécurité des piétons dès lors que le trottoir sera séparé de la bande de roulement par une place de stationnement , qu'ainsi et alors même que la voie est à faible circulation et classée en zone 30 et qu'un trottoir abaissé avait déjà été aménagé de l'autre côté de la voie, les travaux envisagés répondent à une finalité d'intérêt général ; qu'eu égard à la configuration des lieux, il ne pouvait être recouru à d'autres solutions que l'expropriation, qui ne porte au demeurant que sur une surface de 1, 25 are ; que l'arrachage de deux haies et de quatre arbres ne saurait être regardé comme une atteinte environnementale excessive; que si ces travaux entraîneront la réfection des aménagements déjà réalisés en 2002 à cet endroit, ce qui a conduit le commissaire enquêteur à émettre un avis défavorable, le surcoût en résultant n'est toutefois pas de nature à retirer à cette opération son caractère d'intérêt général, compte tenu de la faible ampleur desdits travaux; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les dépenses estimées à 9 689, 60 euros auraient été sous-estimées ; que si les consorts G...font valoir qu'elles auraient dû intégrer le coût des travaux d'une nouvelle entrée de cuisine dans leur habitation, ils n'établissent nullement que les travaux en cause qui réduisent légèrement l'emprise de leur jardin impliqueraient une telle modification ; qu'ainsi les consorts G...ne sont pas fondés à soutenir que l'opération projetée serait dépourvue d'utilité publique ;
Sur le moyen tiré de la discrimination :
9. Considérant que les requérants font valoir qu'ils sont victimes d'une " discrimination " depuis que leurs relations avec le maire de la commune se sont dégradées, dès lors qu'ils sont les seuls concernés par l'arrêté attaqué et que les propriétés situées en face des leurs sont préservées de la procédure d'expropriation alors qu'il s'agit essentiellement de vastes zones enherbées avec des constructions très en recul par rapport à la chaussée ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit, les travaux envisagés visent à sécuriser les cheminements multimodaux sur le trottoir dont il s'agit ; que si les propriétaires de la parcelle n° 294 riveraine du même trottoir n'ont pas vu leur propriété réduite, c'est en raison de ce que leur maison d'habitation est plus proche du trottoir, lequel est également plus large à cet emplacement ; qu'ainsi le moyen tiré du caractère discriminatoire de l'arrêté attaqué ne peut qu'être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts G...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 avril 2008 du préfet du Bas-Rhin portant déclaration d'utilité publique et cessibilité des parcelles cadastrées n°s 304, 306, 733 et 734 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge solidaire de l'Etat, de la CUS et de la commune d'Oberhausbergen, qui ne sont pas, dans la présente instance, partie perdante, la somme que demandent les consorts G...au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des consorts G...le versement à la CUS d'une somme de 1 500 euros au même titre ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête des consorts G...est rejetée.
Article 2 : Les consorts G...verseront à la CUS une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B...I...G..., à Mme F...C...épouseG..., à M. A...G..., à Mme D...G..., au ministre de l'intérieur, à la communauté urbaine de Strasbourg et à la commune d'Oberhausbergen.
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N°12NC01156