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10/06/2013 | FRANCE | N°11NC00766

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 10 juin 2013, 11NC00766


Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2011, complétée par des mémoires enregistrés les 11 janvier 2012 et 9 mai 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Fritsch, avocat ; Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701705 en date du 8 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du date du 29 janvier 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a approuvé le plan de prévention du risque inondation (PPRI) du bassin versant de la Mossig ;

2°) de faire droit à sa

demande de première instance et d'annuler l'arrêté susmentionné du préfet du Ba...

Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2011, complétée par des mémoires enregistrés les 11 janvier 2012 et 9 mai 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Fritsch, avocat ; Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701705 en date du 8 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du date du 29 janvier 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a approuvé le plan de prévention du risque inondation (PPRI) du bassin versant de la Mossig ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler l'arrêté susmentionné du préfet du Bas-Rhin en date du 29 janvier 2007 ;

3°) de diligenter une expertise relative aux conditions d'inondabilité et de constructibilité de la zone attenante à la propriété de la requérante aux fins de déterminer les responsabilités encourues ;

4°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de prescrire un nouveau plan de prévention du risque inondation ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme A...soutient que :

- l'enquête publique relative au PPRI aurait dû être menée conjointement aux autres enquêtes publiques menées par les différentes communes concernées par le PPRI pour l'élaboration de leurs documents d'urbanisme ;

- le préfet n'a pas pris en compte l'avis négatif de la commune de Kirchheim sur le projet de PPRI ;

- l'enquête publique est entachée de nombreuses irrégularités notamment dans le cadre de ses réponses aux observations formulées ;

- le zonage litigieux souffre de carences et inexactitudes issues des insuffisances de la carte des aléas, ce qui caractérise l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet du Bas-Rhin dans la détermination des zones orange et jaune en ce qui concerne sa parcelle et les zones limitrophes, sa propriété a été classée en zone orange pour sa totalité alors que des parcelles sont classées en zone jaune tout autour d'elle à Kirchheim, rue du Moulin, rue de la Mossig, du secteur Pfisterei et Im Gaeh ; le classement en zone jaune des parcelles voisines l'expose à un risque d'inondation accru, notamment en ce qui concerne les jardins avec remises permettant leur extension et l'imperméabilisation du terrain ; les indications relatives aux cotes de crues et aux relevés altimétriques sont sujettes à caution et révèlent des contradictions ; l'établissement de la zone blanche au-delà d'une zone de 100 mètres est totalement arbitraire ;

- l'arrêté du 29 janvier 2007 porte une atteinte illégitime et injustifiée à son droit de propriété et à son droit acquis, notamment en ce qui concerne l'article 1321-3 et l'article 2221-3 c du règlement du plan de prévention du risque inondation ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2012, présenté par le ministre de l'égalité des territoires et du logement qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que l'enquête publique relative au PPRI soit menée conjointement aux enquêtes publiques conduites par les communes en vue de l'élaboration de leur plan local d'urbanisme ; l'avis exprimé par la commune de Kirchheim ne lie pas le préfet ; il n'y a pas, au vu de la situation des parcelles, d'erreur manifeste d'appréciation dans le classement des parcelles dans les différentes zones du PPRI ; le classement de certaines parcelles, en zone jaune ou orange, n'est pas de nature à augmenter la vulnérabilité des terrains ; le PPRI ne porte pas une atteinte illégitime et injustifiée au droit de propriété ainsi qu'au droit acquis par la requérante ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public ;

Sur la légalité de la décision litigieuse :

1. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que les enquêtes publiques relatives, d'une part, au plan de prévention du risque naturel d'inondation du bassin versant de la Mossig et, d'autre part, aux plans locaux d'urbanisme des communes concernées par ce plan de prévention ne se sont pas déroulées simultanément est sans incidence sur la régularité de la procédure ayant abouti à l'édiction de l'arrêté du préfet du Bas-Rhin en date du 29 janvier 2007 portant adoption du plan de prévention du risque naturel d'inondation ;

2. Considérant, en deuxième lieu, que si la commune de Kirchheim a émis un avis défavorable sur le projet de plan de prévention du risque naturel d'inondation du bassin versant de la Mossig, qui lui a été régulièrement soumis dans le cadre de l'enquête publique, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté en date du 29 janvier 2007 portant approbation dudit plan dès lors que le préfet du Bas-Rhin n'était pas lié par la teneur de cet avis ;

3. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient MmeA..., laquelle n'était au demeurant pas précisément ses allégations, le commissaire enquêteur a procédé à une analyse suffisante des observations produites au cours de l'enquête et a également émis un avis suffisamment motivé ;

4. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, (...). II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, dites "zones de danger", en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; 2° De délimiter les zones, dites "zones de précaution", qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. III. - La réalisation des mesures prévues aux 3° et 4° du II peut être rendue obligatoire en fonction de la nature et de l'intensité du risque dans un délai de cinq ans, pouvant être réduit en cas d'urgence. A défaut de mise en conformité dans le délai prescrit, le préfet peut, après mise en demeure non suivie d'effet, ordonner la réalisation de ces mesures aux frais du propriétaire, de l'exploitant ou de l'utilisateur. (...) V. - Les travaux de prévention imposés en application du 4° du II à des biens construits ou aménagés conformément aux dispositions du code de l'urbanisme avant l'approbation du plan et mis à la charge des propriétaires, exploitants ou utilisateurs ne peuvent porter que sur des aménagements limités " ; qu'aux termes de l'article 1211-3 du règlement du plan de prévention du risque naturel d'inondation du bassin versant de la Mossig : " Sont annexés au présent règlement des plans de zonage. Sur ces plans de zonage, les territoires de l'ensemble des communes concernées ont été divisés en trois zones : une zone orange correspondant à la zone naturelle et résiduelle d'expansion des crues qu'il faut préserver de toute nouvelle urbanisation , afin de ne plus aggraver les inondations en amont et en aval, cette zone constitue tout à la fois une zone de danger et de précaution/ Une zone jaune correspondant aux secteurs bâtis soumis à un risque d'inondation ; ces secteurs sont principalement situés au sein des agglomérations et ne font donc pas parties des zones naturelles et résiduelles d'expansion des crues ; cette zone constitue une zone de danger. / La zone blanche, non colorée, considérée comme étant sans risque prévisible par débordement pour une crue d'occurrence centennale, dans l'état actuel des connaissances (...) " ;

5. Considérant que par son arrêté en date du 29 janvier 2007, le préfet du Bas-Rhin a approuvé le plan de prévention du risque naturel d'inondation du bassin versant de la Mossig et établi le zonage délimitant une zone orange correspondant à la zone naturelle et résiduelle d'expansion des crues à préserver de toute nouvelle urbanisation et constituant tout à la fois une zone de danger et de précaution inconstructible sauf exceptions, une zone jaune correspondant aux secteurs bâtis soumis à un risque d'inondation, principalement situés au sein des agglomérations constituant une zone de danger où de nouvelles constructions ou l'extension de l'existant peuvent être autorisés sous conditions et, enfin, une zone blanche considérée comme étant sans risque prévisible par débordement pour une crue d'occurrence centennale, dans l'état actuel des connaissances ; que Mme A...soutient que l'arrêté litigieux est entaché d'erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation tant en ce qui concerne le classement en zone orange de sa propriété et de son moulin situés au 1 rue de la Mossig, que le classement en zone jaune de la plupart des parcelles environnantes, voire le classement en zone blanche des parcelles situées juste au-delà de la bande des 100 mètres par rapport aux berges ; qu'elle fait valoir à cet égard que les parcelles situées autour de sa propriété, soit dans la rue du Moulin, la rue de la Mossig et dans le secteur Pfisterei et Im Gaeh, ont quant à elles été classées en zone jaune, soit une zone où de nouvelles constructions sont possibles avec prescriptions alors qu'elles présentent les mêmes caractéristiques que sa parcelle, que les moulins ont été arbitrairement inscrits en zone orange, que la bande des 100 mètres a été fixée de façon automatique, que des incohérences existent en ce qui concerne le référencement des cotes de crues et l'analyse des relevés altimétriques et que l'étude qui a servi de référence à l'établissement de la cartographie des risques et du zonage du plan de prévention du risque naturel d'inondation s'avère incomplète et insuffisante au regard de la méthodologie suivie ;

6. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que sa propriété est située entre deux bras de la Mossig, soit le cours d'eau lui-même et son canal d'amenée ; que ce cours d'eau a connu de nombreuses crues, notamment en avril 1983, mai 1983, février 1990 et janvier 2004 (crue centennale), ayant justifié l'établissement de la zone orange concernant sa propriété et de la zone jaune pour les propriétés alentours, sur la base des études hydrauliques réalisées par le bureau d'études INGEROP en 2003, ayant rapproché les modélisations effectuées des observations réalisées lors de la crue de caractère centennal de 2004 ; que Mme A...ne démontre pas le caractère manifestement erroné de la méthodologie suivie à cet égard qui serait de nature à entacher d'illégalité l'ensemble du zonage réalisé par le plan litigieux ; que les zones jaunes précitées, si elles sont soumises à un même niveau aléa d'inondation que la zone orange englobant la propriété de MmeA..., sont toutefois peu étendues et situées ou orientées vers l'intérieur de l'agglomération, soit une zone bâtie plus dense n'ayant pas vocation à constituer une zone naturelle et résiduelle d'expansion des crues, même si des prescriptions régissent également la constructibilité de cette zone de nature à ne pas créer de risque supplémentaire excessif pour le secteur environnant ; que la plupart des parcelles classées en zone jaune et situées à l'Est du moulin de Mme A...avaient également fait l'objet de remblais préalablement à l'édiction du plan de prévention du risque inondation litigieux ; qu'en revanche, la propriété de Mme A...jouxte le cours d'eau, ce qui rend la propriétaire des lieux, tout comme ceux qui s'y rendent, particulièrement exposée aux risques inhérents aux épisodes d'inondations ou de coulées de boue nonobstant la circonstance qu'une partie de la parcelle et du bâti est en surélévation par rapport au cours d'eau ; qu'en outre, les parcelles jouxtant directement le canal de dérivation au Sud ont également été classées, sur quelques mètres de leur longueur, en zone orange dite zone de danger et de précaution ; qu'enfin, la requérante n'établit pas l'existence de risques prévisibles par débordement concernant les parcelles, qu'elle identifie sans les situer précisément, en zone blanche du plan de prévention critiqué ; qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté en date du 29 janvier 2007 est entaché d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne le classement de ses parcelles en zone orange ou des parcelles environnantes en zone jaune ou blanche ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que les dispositions de l'article 1321-3 du règlement du plan de prévention du risque naturel d'inondation du bassin versant de la Mossig, lesquelles énoncent, en référence à l'article L. 125-6 du code des assurances, que " la non application des dispositions du règlement du PPR peut priver les intéressés du bénéfice de la loi n°82-600 du 13 juillet 1982 relative à l'indemnisation des victimes des catastrophes naturelles " n'a ni pour objet, ni pour effet de porter atteinte au droit de propriété de Mme A... ou de remettre en cause les dispositions législatives qu'elle cite ; que les conclusions dirigées par la requérante contre cet article informatif du règlement du plan de prévention du risque inondation ne peuvent donc en tout état de cause qu'être rejetées ;

8. Considérant, en dernier lieu, que les dispositions du c) de l'article 2221-3 du règlement du plan de prévention du risque naturel d'inondation du bassin versant de la Mossig énoncent qu'est obligatoire " la vérification du bon fonctionnement des ouvrages hydrauliques dans le lit mineur des cours d'eau visés par le présent PPR " ; qu'en se bornant à soutenir qu'une telle " disposition est nulle et de nul effet " à son égard dès lors que le moulin, le canal usinier et les ouvrages alimentant le canal du moulin en eau n'ont pas d'incidence sur l'écoulement des eaux d'inondation, Mme A...n'établit pas le caractère manifestement erroné d'une telle prescription au regard de l'objet du plan litigieux visant à prévenir le risque inondation ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement en date du 8 mars 2011, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Bas-Rhin en date du 29 janvier 2007 ; que ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent ainsi et par voie de conséquence qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...et au ministre de l'égalité des territoires et du logement.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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11NC00766


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00766
Date de la décision : 10/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Nature et environnement - Divers régimes protecteurs de l`environnement - Prévention des crues - des risques majeurs et des risques sismiques.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : FRITSCH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-06-10;11nc00766 ?
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