Vu la requête, enregistrée le 13 août 2012, présentée pour M. A... D..., demeurant..., par Me B... ;
1°) d'annuler le jugement n° 0901424-0902752 du 12 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 20 janvier 2009 et de l'arrêté du 6 avril 2009 par lesquels respectivement le conseil municipal de Gélucourt et le préfet de la Moselle ont approuvé la carte communale ;
2°) d'annuler la délibération du 20 janvier 2009 par laquelle le conseil municipal de Gélucourt a approuvé la carte communale et l'arrêté du 6 avril 2009 par lequel le préfet de la Moselle a approuvé ladite carte ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Gélucourt la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le rapport de présentation est entaché d'insuffisances ; que la réunion du groupe de travail qui s'est tenue le 18 septembre 2008 est entachée d'un vice de procédure substantiel ; que la délibération adoptée le 20 janvier 2009 a été prise en violation de l'article L. 2541-17 du code général des collectivités territoriales ; que l'extension de l'urbanisation dans les secteurs de " La Corvée " et " Grand Vignoble ", dont le premier est enclavé et le second desservi par une voie étroite, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, de même que le refus de classer son terrain en zone constructible alors qu'il n'est éloigné des habitations que de 70 m ; que la fixation par le plan de zonage de marges de recul est illégale, une carte communale ne pouvant comporter de réglementation spécifique à la commune ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2012, présenté pour la commune de Gélucourt par la Selarl Cossalter et De Zolt, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. D...le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation manque en fait ; qu'une carte communale n'est pas soumise à l'obligation de comporter une évaluation environnementale au sens des articles L. 121-10 et suivants du code de l'urbanisme ; que seule une petite partie du territoire de la commune est classée en zone Natura 2000, partie non incluse dans la carte communale ; que le rapport de présentation évalue les incidences des choix de la carte communale sur l'environnement ; que lors de la réunion du groupe de travail le 18 septembre 2008, les élus avaient bien connaissance du rapport et de l'avis du commissaire enquêteur ; que la consultation des services de l'Etat s'imposait dès lors que la carte communale doit être également approuvée par le préfet ; qu'il y a bien eu débat au sein de ce groupe de travail même si les discussions n'ont pas été intégralement retranscrites dans le compte rendu ; qu'il s'agissait d'une simple réunion de travail et d'un avis émis ne justifiant pas qu'il soit nécessairement motivé ; que les fils de M.C..., de même que le fils du maire, avaient obtenu un permis de construire dès avant l'approbation de la carte communale ; que si le maire a souhaité une modification du tracé sud-ouest de la carte communale pour permettre aux propriétaires d'ajouter des abris de jardin ou des cabanons sur leur propriété, c'est dans l'intérêt des habitants et non en tant que propriétaire foncier ; qu'ainsi ni le maire ni M. C... n'étaient intéressés à l'affaire au sens de l'article L. 2541-17 du code général des collectivités territoriales ; que les préconisations du commissaire enquêteur relatives à l'extension de la zone constructible auraient entraîné une modification portant atteinte à l'économie générale de la carte communale soumise à l'enquête ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, le secteur " La Corvée " et " Grand Vignoble " n'est pas enclavé ; que la carte commune n'a fait que rappeler l'existence de la servitude d'alignement le long de la RD 999 ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 14 mars 2013, présenté pour M.D..., qui conclut aux mêmes fins que la requête ;
Il soutient en outre qu'il ressort des termes du procès-verbal de la réunion du 18 septembre 2008 qu'il n'y a eu aucun débat ; que son terrain est desservi par les réseaux et se trouve à proximité d'autres constructions ; que dans son précédent arrêt la Cour n'a pas dit que le classement de ce terrain en zone constructible était illégal ; que, contrairement à ce que soutient la commune, il ne ressort pas des pièces du dossier que la marge de recul portée sur la carte communale ne ferait que reprendre un plan d'alignement de la route départementale ; qu'en tout état de cause un plan d'alignement ne peut avoir cette portée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2013, présenté par le ministre de l'égalité des territoires et du logement, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que le rapport de présentation répond aux exigences de l'article R. 124-2 du code de l'urbanisme ; que la réunion du 18 septembre 2008 n'était qu'une réunion de travail ; qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que les conseillers municipaux concernés auraient exercé une influence déterminante dans l'élaboration du document d'urbanisme ; qu'eu égard au motif d'annulation de la précédente carte communale par la Cour administrative d'appel, le terrain du requérant ne pouvait plus être classé en zone constructible ; que le moyen tiré d'une institution illégale d'une marge de recul n'est pas assorti des précisons permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2013, présenté pour la commune de Gélucourt qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;
Elle soutient en outre que l'instauration d'une marge de recul a été décidée pour des raisons de sécurité, sur avis du conseil général de la Moselle ; que l'instauration d'une marge de recul pour des raisons de sécurité répond à l'objet même d'une carte communale qui vise à assurer une bonne gestion de l'espace ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi du 7 novembre 1910, applicable en Moselle, concernant la police des constructions ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2013 :
- le rapport de M. Pommier, président,
- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,
- et les observations de Me Cossalter, avocat de la commune de Gélucourt ;
1. Considérant que le conseil municipal de Gélucourt et le préfet de la Moselle ont approuvé la carte communale, respectivement par une délibération du 20 janvier 2009 et par un arrêté du 6 avril 2009 ; que M. D...relève appel du jugement du 12 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 124-2 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation : 1° Analyse l'état initial de l'environnement et expose les prévisions de développement, notamment en matière économique et démographique ; 2° Explique les choix retenus, notamment au regard des objectifs et des principes définis aux articles L. 110 et L. 121-1, pour la délimitation des secteurs où les constructions sont autorisées ; en cas de révision, il justifie, le cas échéant, les changements apportés à ces délimitations ; 3° Evalue les incidences des choix de la carte communale sur l'environnement et expose la manière dont la carte prend en compte le souci de sa préservation et de sa mise en valeur " ;
3. Considérant que le rapport de présentation de la carte communale de Gélucourt présente les données démographiques disponibles et indique que ce village, qui comptait 224 habitants lors du recensement de 1999, a une activité essentiellement agricole, la majorité de la population active travaillant à l'extérieur dans le bassin d'emploi de Dieuze ; que s'il ne comporte pas de projection démographique quantifiée, se bornant à évoquer " un accroissement démographique modéré " ni de prévision de développement économique, ces omissions ne sont pas en l'espèce de nature à faire regarder ce document comme insuffisamment précis, dès lors qu'il n'est pas établi que ces données étaient susceptibles de connaître des évolutions significatives ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, le rapport de présentation comprend des informations sur le parc de logements existants et sur le type d'habitat ; que le nombre et la superficie des terrains situés dans les parties urbanisées de la commune ainsi que le nombre de permis de construire accordés ou refusés ne constituent pas des données devant impérativement figurer dans le rapport de présentation ; que ce rapport fait mention de la zone inondable du ruisseau de Videlange et indique que son étendue a été définie à partir des témoignages des habitants et que la délimitation de la zone constructible en partie basse du village a été établie en prenant en compte les risques d'inondation ; qu'enfin le rapport comporte les principales données relatives à l'environnement du village ; qu'il évalue les incidences de la carte communale sur l'environnement en les présentant comme essentiellement visuelles, dès lors que les extensions majeures de l'urbanisation se situeront à flanc de coteau, et précise les moyens qui seront mis en oeuvre pour la préservation et la mise en valeur de l'environnement ; que, par suite, le moyen tiré du caractère insuffisant du rapport de présentation de la carte communale doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'à la suite du dépôt du rapport d'enquête publique, un groupe de travail composé du maire et de cinq conseillers municipaux, de deux agents de la direction départementale de l'équipement (DDE) et d'une personne du cabinet Ecolor chargé de l'élaboration de la carte communale s'est réuni le 18 septembre 2008 pour étudier les demandes de modification du zonage ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne faisait obstacle à ce que la commune de Gélucourt constitue un groupe de travail associant un service de l'Etat ; que si ce groupe de travail a notamment refusé de retenir la préconisation du commissaire enquêteur d'ouvrir à l'urbanisation la parcelle 141 dont M. D... est propriétaire, il ne ressort pas des pièces du dossier que les participants à la réunion aient été dans l'ignorance du contenu du rapport du commissaire enquêteur ; que si le compte rendu de la réunion fait mention du refus ou de l'accord de la DDE sur telle ou telle demande, il ne ressort pas des pièces du dossier que les autres membres de ce groupe de travail aient pour autant estimé que la position exprimée par ce service s'imposait à la commune et ne pouvait être discutée ; qu'il n'est pas non plus établi que le groupe de travail aurait adopté une position discriminatoire à l'encontre du requérant alors d'ailleurs que trois des quatre demandes examinées ont été rejetées ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la réunion de ce groupe de travail ayant précédé l'approbation de la carte communale par le conseil municipal dans sa séance du 20 janvier 2009 serait entachée d'un vice de procédure substantiel doit être écarté ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2541-17 du code général des collectivités territoriales : " Le maire, les adjoints et les membres du conseil municipal ne peuvent prendre part aux délibérations et décisions relatives aux affaires dans lesquelles ils sont intéressés personnellement ou comme mandataires. " ;
6. Considérant que si M. D...soutient qu'un conseiller municipal et le maire de Gélucourt étaient intéressés à l'adoption de la carte communale car propriétaires de terrains classés en zone constructible, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils auraient participé activement à l'élaboration de ce document ou auraient exercé une influence décisive sur l'adoption de la délibération du 20 janvier 2009 par laquelle le conseil municipal a approuvé la carte communale à l'unanimité des huit membres présents ; qu'ainsi, leur participation à la délibération litigieuse n'a pas été en l'espèce de nature à vicier la procédure d'élaboration de la carte communale ;
En ce qui concerne la légalité interne :
7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du rapport de présentation que l'ouverture à l'urbanisation du secteur " La Corvée " et d'une partie du secteur " Grand Vignoble " vise à permettre le développement de l'urbanisation dans une zone agricole comportant déjà quelques constructions afin d'assurer progressivement une unité du tissu urbain en continuité avec le centre du village ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, ces deux secteurs sont desservis par la route départementale 999 et par la rue des Vignes qui sera aménagée pour l'adapter à sa destination ; qu'ainsi le classement de ces deux secteurs en zone constructible n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que le classement en zone naturelle de la parcelle cadastrée section 5, n° 141, propriété de M.D..., qui se situe dans un secteur ne comportant pas de construction à proximité immédiate, n'est pas, compte tenu des objectifs énoncés par la carte communale qui ne prévoit pas dans ce périmètre d'extension de l'urbanisation au-delà des parcelles bâties, entaché d'erreur manifeste d'appréciation, alors même que le commissaire enquêteur avait recommandé de faire droit à la demande du requérant et que cette parcelle, desservie par les réseaux et une voie d'accès, était classée en zone constructible dans la précédente carte communale ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme : " Les cartes communales respectent les principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1. Elles délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles. (...) " ;
10. Considérant que le rapport de présentation de la carte communale de Gélucourt précise p.26 qu'" une marge de recul de 15 m par rapport aux limites d'emprise de la voie publique sera instaurée afin de préserver la visibilité des usagers ainsi que la sécurité des riverains " ; que le plan de zonage fait apparaître, dans les secteurs constructibles, une marge de recul de 15 m par rapport à la RD 999 sur certaines parcelles au lieudit " La Corvée " et une marge de recul de 10 m de part et d'autre de la RD 22k aux lieux-dits " Le Butz " et " Près du Butz " ; que si la commune indique dans sa défense que ce faisant " La carte communale n'a fait que rappeler l'existence de la servitude d'alignement le long de la RD 999 ", elle n'en justifie aucunement alors surtout qu'il ressort des conclusions motivées du commissaire enquêteur que la commune entend en fait établir une telle prescription sur le fondement de la loi locale du 7 novembre 1910 autorisant le maire à édicter un règlement local de construction ; qu'en admettant que le maire puisse sur ce fondement prendre un arrêté fixant une marge de recul, il est constant qu'à la date à laquelle la carte communale a été approuvée, un tel arrêté n'était pas intervenu ; que si, dans le dernier état de ses écritures, la commune fait valoir que l'instauration de ces marges de recul a été demandée par le département de la Moselle pour des raisons de sécurité, de telles marges ne peuvent être instituées par la carte communale, qui peut seulement délimiter des secteurs où les constructions sont autorisées et des secteurs où les constructions ne sont pas admises et non pas définir des contraintes au sein des secteurs constructibles ; qu'ainsi la carte communale ne pouvait légalement comporter de telles prescriptions ; que, par suite, M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a écarté le moyen tiré de ce qu'il n'existait pas de règlement municipal de construction permettant d'instituer une marge de recul le long de la route par le motif erroné selon lequel les auteurs de la carte communale pouvaient légalement prendre en compte le plan d'alignement dont était frappée la route départementale 999 ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...est seulement fondé à soutenir que la carte communale de Gélucourt est entachée d'illégalité en tant qu'elle prévoit des marges de recul par rapport à la voie de 10 m et de 15 m sur certaines parcelles classées en zone constructible ; que ces prescriptions sont divisibles des autres dispositions de la carte communale ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement attaqué, et la délibération et l'arrêté litigieux dans cette mesure ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. D..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Gélucourt au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par M. D...;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg du 12 juin 2012 est annulé.
Article 2 : La délibération du conseil municipal de Gélucourt en date du 20 janvier 2009 et l'arrêté du préfet de la Moselle du 6 avril 2009 approuvant la carte communale sont annulés en tant qu'ils ont fait figurer sur certaines parcelles classées en zone constructible une marge de recul par rapport à la voie de 10 ou 15 m.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Gélucourt tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., au ministre de l'égalité des territoires et du logement et à la commune de Gélucourt.
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12NC01446