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08/03/2013 | FRANCE | N°12NC01333

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 mars 2013, 12NC01333


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 juillet 2012, complétée par un mémoire en date du 25 janvier 2013, présentée pour la commune d'Epernay, représentée par son maire, élisant domicile à l'hôtel de ville, 7 bis avenue de Champagne à Epernay (51331), par la société d'avocats Choffrut Brener ;

La commune d'Epernay demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101128 en date du 24 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de la SARL Nulle part ailleurs, la délibération du 11 avril 2011 pa

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 juillet 2012, complétée par un mémoire en date du 25 janvier 2013, présentée pour la commune d'Epernay, représentée par son maire, élisant domicile à l'hôtel de ville, 7 bis avenue de Champagne à Epernay (51331), par la société d'avocats Choffrut Brener ;

La commune d'Epernay demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101128 en date du 24 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de la SARL Nulle part ailleurs, la délibération du 11 avril 2011 par laquelle le conseil municipal de la commune a décidé d'abandonner l'acquisition de l'immeuble cadastré BK 457 sis 28 avenue Jean Jaurès et d'abroger la délibération du 28 juin 2010 par laquelle cette acquisition avait été décidée ;

2°) de rejeter la demande de la SARL Nulle Part Ailleurs et ses conclusions aux fins d'injonction ;

3°) de mettre à la charge de la SARL Nulle Part Ailleurs la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative;

Elle soutient que :

- le Tribunal a fait une mauvaise appréciation des faits de l'espèce dès lors que le vendeur n'a jamais révélé l'existence de caves sous l'immeuble à acquérir ; la ville ne pouvait à l'occasion de la visite des lieux constater l'existence de caves sous l'immeuble ; le vendeur a agi par fraude en ne transmettant pas l'état descriptif de division en volumes de l'immeuble ; les plans fournis lors des négociations sont différents des plans fournis à l'occasion de la préparation des actes notariés ;

- la demande d'injonction doit être rejetée car il n'est pas justifié que la société puisse délivrer l'immeuble dans l'état où il était au jour où la ville a décidé d'acquérir, et la société est en liquidation ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2012, présenté pour la SARL Nulle Part Ailleurs, représentée par ses représentants légaux, ayant son siège social 4 avenue de Champagne à Epernay (51200), par la société d'avocats ACG et associés ;

Elle conclut au rejet de la requête, à enjoindre au maire de la ville d'Epernay de signer l'acte de vente établi par Me Jeziorski, notaire dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard, et à mettre à la charge de la commune d'Epernay la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- il ne peut lui être reproché une quelconque fraude dès lors que les états descriptifs de division en volume de l'immeuble mentionnent la présence de caves ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2013 :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur,

- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,

- et les observations de Me Thomas, avocat de la SARL Nulle Part Ailleurs ;

Sur la légalité de la délibération du 11 avril 2011 :

1. Considérant que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; que, toutefois, un acte administratif obtenu par fraude ne crée pas de droits et, par suite, peut être retiré ou abrogé par l'autorité compétente pour le prendre, alors même que le délai de retrait de droit commun serait expiré ;

2. Considérant que, par délibération du 28 juin 2010, le conseil municipal de la commune d'Epernay a décidé, en vue de la création d'un restaurant scolaire, d'acquérir au prix de 190 000 euros l'immeuble cadastré BK n°457 sis 28 avenue Jean Jaurès à Epernay, appartenant à la société Nulle Part Ailleurs, et a autorisé le maire à " signer le compromis de vente et/ou l'acte notarié et tout document relatif à cette affaire " ; que, par délibération du 11 avril 2011, le conseil municipal de ladite commune a décidé d'abandonner l'acquisition du bien et d'abroger la délibération du 28 juin 2010 aux motifs, d'une part, que la séparation en volume des biens, réalisée postérieurement à la délibération du 27 juin 2010, a révélé l'existence de caves occupées sous bâtiments, non connues de la ville et ne faisant pas l'objet de la vente, d'autre part, que l'existence des caves fait supporter à la ville des coûts supplémentaires dans la mesure où des travaux destinés à renforcer la structure des caves sont à prévoir avant même de réaliser les travaux projetés et, enfin, que le bâtiment n'est pas libre de toute occupation ; que s'il est constant que les plans initialement remis à la commune ne concordaient pas rigoureusement avec ceux produits en vue de préparer les actes notariés, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la méconnaissance alléguée de l'existence de caves serait imputable à des agissements frauduleux de la société Nulle Part Ailleurs, alors qu'au surplus, celle-ci affirme sans être contredite, que les états de division de l'immeuble de 2007 et de 2008 ont été publiés aux hypothèques, lesquels faisaient ressortir l'existence de caves et des limitations en partie basse ; que, par suite, la fraude invoquée par la ville d'Epernay n'est pas établie et la délibération du 28 juin 2010 ne pouvait être ni retirée ni abrogée au-delà du délai de quatre mois ; que, par suite, ainsi que l'a jugé à juste titre le Tribunal administratif, la délibération du 11 avril 2011 est entachée d'illégalité et doit être annulée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

4. Considérant que, même si, comme l'ont affirmé les premiers juges, la présente décision n'implique pas nécessairement de confier l'opération au même notaire que celui ayant préparé l'acte de vente, l'annulation de la délibération du 11 avril 2011 implique l'obligation pour la commune d'Epernay de prendre les mesures nécessaires en vue de concrétiser l'opération immobilière telle que visée par la délibération du 28 juin 2010 ; que si la commune soutient que la société défenderesse serait en liquidation, elle n'apporte en tout état de cause aucun élément à l'appui de cette allégation ; que si la commune fait également valoir que l'immeuble n'aurait pas été entretenu, cette seule affirmation non assortie d'une quelconque précision n'est pas propre à faire apparaître l'existence d'un fait nouveau de nature à faire éventuellement obstacle à l'exécution de la délibération du 28 juin 2010 sur la base du prix prévu ; qu'il y a ainsi lieu d'enjoindre à la commune d'Epernay de procéder à l'acquisition de l'immeuble cadastré BK 457 sis 28 avenue Jean Jaurès dans les conditions prévues par la délibération du 28 juin 2010 et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune d'Epernay n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1101128 en date du 24 mai 2012, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de la SARL Nulle Part Ailleurs, la délibération du 11 avril 2011 par laquelle le conseil municipal de la commune a décidé d'abandonner l'acquisition de l'immeuble cadastré BK 457 sis 28 avenue Jean Jaurès et d'abroger la délibération du 28 juin 2010 par laquelle cette acquisition avait été décidée ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au versement de sommes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Epernay une somme de 1 500 euros à verser à la société Nulle Part Ailleurs au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Epernay est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint à la commune d'Epernay de procéder à l'acquisition de l'immeuble cadastré BK 457 sis 28 avenue Jean Jaurès dans les conditions prévues par la délibération du 28 juin 2010 dans un délai de deux mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : La commune d'Epernay versera à la société Nulle Part Ailleurs une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société Nulle Part Ailleurs est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Epernay et à la société Nulle Part Ailleurs.

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