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18/02/2013 | FRANCE | N°12NC00863

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 18 février 2013, 12NC00863


Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2012, complétée par un mémoire enregistré le 23 janvier 2013, présentée pour la société Eurovia Lorraine, dont le siège social est Voie Romaine, à Woippy (57140), représentée par son représentant légal en exercice, par Me Guimet, avocat ;

La Société Eurovia Lorraine demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1102182 du 15 mars 2012 par laquelle le président de la deuxième chambre du Tribunal administratif de Nancy a rejeté comme manifestement irrecevable sa demande en décharge de la somme de 90 823,58 euros TTC

pour le recouvrement de laquelle un titre exécutoire a été émis à son encontre le 2...

Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2012, complétée par un mémoire enregistré le 23 janvier 2013, présentée pour la société Eurovia Lorraine, dont le siège social est Voie Romaine, à Woippy (57140), représentée par son représentant légal en exercice, par Me Guimet, avocat ;

La Société Eurovia Lorraine demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1102182 du 15 mars 2012 par laquelle le président de la deuxième chambre du Tribunal administratif de Nancy a rejeté comme manifestement irrecevable sa demande en décharge de la somme de 90 823,58 euros TTC pour le recouvrement de laquelle un titre exécutoire a été émis à son encontre le 27 mai 2011 par l'Etat ;

2°) de la décharger de l'obligation d'avoir à payer la somme de 90 823,58 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

La societe Eurovia Lorraine soutient que :

- c'est à tort que le président de la deuxième chambre du Tribunal administratif de Nancy s'est fondé sur l'article R 222-1 4° du code de justice administrative dès lors que l'obligation d'adresser une réclamation au directeur départemental des finances publiques préalablement à la contestation contentieuse d'un titre exécutoire émis par l'Etat ne trouve pas à s'appliquer en matière de travaux publics et qu'il n'existait donc aucune irrecevabilité manifeste de sa demande ; l'exception des travaux publics constitue une règle générale de procédure ; dans le silence de la règle spéciale issue du décret n° 92-1369, il convient de faire prévaloir la règle générale de l'exception de travaux publics ;

- le titre exécutoire émis à son encontre ne comporte pas les bases de liquidation de la créance dont l'Etat se prévaut ;

- l'article 3-12 du CCAG-Travaux prévoit que toute dérogation aux stipulations du CCAG doit être récapitulée dans le dernier article du CCAP sauf à être réputée non écrite ; l'article 10 a) du CCAP du marché listant les dérogations apportées au CCAG-Travaux ne prévoit aucune dérogation, modification ou complément à l'article 44-1 du CCAG-Travaux relatif à la garantie de parfait achèvement ; la dérogation de l'article 9-6 du CCAP du marché portant la durée de la garantie d'achèvement à trois ans n'étant pas récapitulée dans l'article 10a) est ainsi considérée non écrite ; la durée de la garantie de parfait achèvement restant fixée à un an, l'Etat était donc forclos lorsqu'il s'en est prévalu ;

- l'intervention du décompte général et définitif le 10 mars 2005 a mis fin à toute possibilité de réclamation sur le différend né le 21 juillet 2003, soit antérieurement à ce décompte ;

- la cause des désordres n'est pas imputable à Eurovia ;

- la somme de 90 823,58 euros pour le recouvrement de laquelle un titre exécutoire a émis à son encontre n'est pas justifiée ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2012, présenté par le directeur départemental des finances publiques de Meurthe-et-Moselle, qui conclut au rejet de la requête, ou, subsidiairement, à sa mise hors de cause ;

Il soutient que :

- l'obligation instituée par l'article 7 du décret n° 92-1369 d'exercer un recours administratif auprès du comptable assignataire préalablement à toute action contentieuse en opposition à un titre exécutoire émis par l'Etat a une valeur supérieure à celle résultant de l'article R 421-1 du code de justice administrative exemptant de réclamation préalable les litiges en matière de travaux publics ;

- il ne lui appartient pas de se prononcer sur le bien fondé du titre de perception émis le 27 mai 2011 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2012, complété par un mémoire enregistré le 27 juillet 2012, présenté par le ministre de l'écologie du développement durable et de l'énergie qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- l'article 7 du décret du 29 décembre 1992 constitue une règle spéciale qui prime sur la règle générale de l'article R 421-1 du code de justice administrative exemptant de l'obligation de réclamation préalable les litiges en matière de travaux publics ;

- la prolongation du délai de la garantie de parfait achèvement prévue par l'article 9-6 du CCAP du marché ne constituant pas une dérogation au sens de l'article 3-12 du CCAG-Travaux mais une stipulation différente, elle n'avait pas à être récapitulée dans l'article 10 a) du CCAP ; l'absence de mention dans le dernier article du CCAP du marché des articles des documents généraux auxquels il déroge est en tout état de cause sans incidence sur la validité contractuelle des dérogations ; l'Etat s'est prévalu de la garantie de parfait achèvement dans le délai contractuel de trois ans suivant la survenance des désordres ;

- la réception sans réserve de l'ouvrage ne prive pas d'effet la garantie de parfait achèvement concernant les désordres non apparents au moment de la réception ; en matière de marché à bons de commande, les désordres qui apparaissent durant le délai de garantie afférent à chacun des bons de commande n'ont pas à être mentionnés dans le décompte général et définitif du marché ;

- la société requérante n'ayant pas émis de réserves au moment de l'application de la couche d'accrochage sur la qualité du support, elle n'est pas fondée à soutenir que les désordres résulteraient d'une décohésion de l'enrobé support qui ne lui serait pas imputable ;

- la somme de 90 823,58 euros mise à la charge de la société Eurovia correspond à l'ensemble des frais engagés par l'Etat pour remédier aux désordres résultant de la mauvaise exécution des travaux de cette entreprise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 92-1369 du 29 décembre 1992 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2013:

- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me Revol, avocat de la société Eurovia Lorraine ;

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré produite le 29 janvier 2013 pour la société Eurovia Lorraine ;

1. Considérant qu'en vertu des dispositions des articles 6 à 8 du décret du 29 décembre 1992, les contestations relatives aux créances de l'Etat étrangères à l'impôt et au domaine font, avant saisine de la juridiction compétente, l'objet d'une réclamation qui doit être adressée, appuyée de toutes justifications, dans les deux mois qui suivent la notification de ce titre ou à défaut du premier acte de poursuite qui en procède, à l'autorité compétente qui en délivre reçu et doit statuer dans un délai de six mois, la réclamation étant regardée comme rejetée faute de décision notifiée dans ce délai ; qu'aux termes de l'article 9 du même décret : " Le débiteur peut saisir la juridiction compétente dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision prise sur la réclamation ou, à défaut de cette notification, dans un délai de deux mois à compter de la date d'expiration des délais prévus (...) " ;

2. Considérant que ces dispositions instituent une procédure spéciale de contestation des créances de l'Etat étrangères à l'impôt et du domaine, qui déroge au droit commun ; qu'en particulier, en prévoyant, à son article 7, l'obligation pour le redevable d'exercer un recours administratif auprès du comptable assignataire préalablement à toute action contentieuse en opposition au titre exécutoire émis par l'Etat pour avoir recouvrement de sa créance, cette procédure déroge aux dispositions de droit commun de l'article R. 421-1 du code de justice administrative exemptant de réclamation préalable les litiges en matière de travaux publics ; qu'ainsi, la société Eurovia Lorraine était tenue d'adresser une réclamation préalable au directeur départemental des finances publiques de Meurthe-et-Moselle avant de saisir le Tribunal administratif de Nancy d'une action en opposition à l'exécution du titre exécutoire émis à son encontre le 27 mai 2011 par l'Etat pour avoir recouvrement d'une somme de 90 823,58 euros correspondant aux frais de reprise des désordres apparus à la suite des travaux exécutés par cette société de renouvellement de la couche de roulement de la RN52 du PR15+800 au PR16+641 ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Eurovia Lorraine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la deuxième chambre du Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable faute de réclamation préalable adressée au directeur départemental des finances publiques de Meurthe-et-Moselle ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la Société Eurovia Lorraine la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Eurovia Lorraine est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eurovia Lorraine, au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et à la direction générale des finances publiques de Meurthe-et-Moselle.

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N° 12NC00863


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00863
Date de la décision : 18/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-01-02-01 Procédure. Introduction de l'instance. Liaison de l'instance. Recours administratif préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : GUIMET ; GUIMET ; GUIMET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-02-18;12nc00863 ?
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