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31/01/2013 | FRANCE | N°12NC00390

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2013, 12NC00390


Vu, I°) sous le n° 12NC00390, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés, respectivement, le 2 mars 2012 et le 17 septembre 2012, présentés pour la Caisse suisse de compensation et pour l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel, dont le siège social est 18, avenue Edmond Vaucher à Genève (1211-Suisse), par Me Noethinger-Berlioz, avocat ; la Caisse suisse de compensation et l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900951 du 2 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leu

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Vu, I°) sous le n° 12NC00390, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés, respectivement, le 2 mars 2012 et le 17 septembre 2012, présentés pour la Caisse suisse de compensation et pour l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel, dont le siège social est 18, avenue Edmond Vaucher à Genève (1211-Suisse), par Me Noethinger-Berlioz, avocat ; la Caisse suisse de compensation et l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900951 du 2 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Besançon à leur payer la somme de 49 995 francs suisses au titre de prestations versées à leur assuré social, M. Vuillemin ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Besançon à leur payer la contrepartie en euros de la somme de 36 993, 75 francs suisses au titre des frais qu'ils ont exposés pour le compte de leur assuré, correspondant aux indemnités journalières et aux frais de reclassement de M. Vuillemin ;

- de mettre à la charge du centre hospitalier de Besançon la somme de 4 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que le tribunal a rejeté leurs conclusions en estimant que leur demande était irrecevable eu égard à la forclusion des conclusions indemnitaires de M. Vuillemin ;

- en application de la convention franco-suisse du 3 juillet 1975, le recours des assureurs régi par la loi suisse était recevable ;

- subsidiairement, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale pour leur opposer l'absence d'exercice d'un droit propre ;

- la responsabilité du centre hospitalier doit être retenue tant sur le fondement d'une faute médicale commise lors de l'intervention chirurgicale que d'un manquement à l'obligation d'information ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 août 2012, présenté pour le centre hospitalier de Besançon par Me Le Prado, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le litige relève de l'application de la loi française ;

- en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, les requérants n'étaient plus recevables à exercer un recours subrogatoire compte tenu de la forclusion de l'action régulièrement opposée à M. Vuillemin ;

- la solution aurait été la même sur le fondement de l'article 72 de la loi suisse sur l'assurance sociale ;

- les rapports d'expertise ont conclu à l'absence de faute médicale imputable au centre hospitalier ;

Vu, II°), sous le n° 12NC00555, la requête et le mémoire complémentaire enregistrés, respectivement, le 29 mars 2012 et le 11 octobre 2012, présentés pour la Mobilière suisse, société d'assurances ayant son siège social Bundesgasse 35 à Berne

(3011-Suisse) et pour M. Jean-Paul Vuillemin, domicilié 7, rue Adolphe Daudey à Valdahon (25800), par Me Lubrano-Lavadera, avocat ;

La Mobilière suisse et M. Vuillemin demandent à la Cour :

1°) de dire la responsabilité du centre hospitalier universitaire engagée ;

2°) subsidiairement, d'ordonner une contre-expertise ;

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Besançon à réparer les conséquences dommageables de l'accident médical dont a été victime M. Vuillemin n'était pas recevable dès lors qu'ils avaient seulement la qualité d'intervenants en première instance ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la demande de M. Vuillemin était tardive ;

- la responsabilité du centre hospitalier de Besançon doit être retenue compte tenu du retard dans le diagnostic mais aussi de la méconnaissance du droit de M. Vuillemin à être informé sur les risques encourus lors de l'intervention chirurgicale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 août 2012, présenté pour le centre hospitalier de Besançon par Me Le Prado, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que c'est à bon droit que le tribunal a déclaré l'intervention irrecevable ; qu'en tout état de cause, les requérants ne sont pas recevables à présenter des moyens différents de ceux invoqués par la partie principale ; que leurs prétentions sont irrecevables faute d'avoir été chiffrées ; que les expertises ont conclu à l'absence de responsabilité du centre hospitalier ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2013 :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, président,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Lubrano, avocat de M. Vuillemin et de la Mobilière suisse, société d'assurances ;

1. Considérant que les requêtes n° 12NC00390 et n° 12NC00555 présentées, d'une part, pour la Caisse suisse de compensation et l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel et, d'autre part, pour la Mobilière suisse et M. Vuillemin, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Sur l'appel de M. Vuillemin et de la Mobilière suisse :

2. Considérant que le Tribunal administratif de Besançon, saisi de l'action de la Caisse suisse de compensation et de l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel contre le centre hospitalier de Besançon, tendant à obtenir le remboursement des prestations qu'ils avaient servies à M. Vuillemin en réparation du préjudice subi par leur assuré social, était tenu d'appeler en la cause M. Vuillemin de façon à tenir compte de ses droits à indemnité ; qu'il ressort des pièces du dossier que le greffe du Tribunal administratif de Besançon a, dès le

10 juin 2009, communiqué la requête présentée par la Caisse suisse de compensation et l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel au centre hospitalier de Besançon ainsi qu'à M. Vuillemin et à la Mobilière suisse ; que, dès lors, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal,

M. Vuillemin et la Mobilière suisse, qui avaient été régulièrement mis en cause dans la procédure, avaient la qualité de partie à l'instance ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté les conclusions présentées pour M. Vuillemin et la Mobilière suisse en tant que leur intervention n'était pas recevable ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées en première instance par M. Vuillemin et la Mobilière suisse ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Vuillemin, qui se plaignait de douleurs dans le genou droit, s'est rendu au centre hospitalier de Besançon où une lésion méniscale a été diagnostiquée, qui a donné lieu à une intervention sous arthroscopie pratiquée le 28 août 2006 ; qu'en raison de la persistance des douleurs, M. Vuillemin a subi une nouvelle intervention chirurgicale, le 17 novembre 2006, dans ce même établissement hospitalier pour une lésion du nerf crural et une perte d'extension de son genou droit ; qu'à la suite de ces deux opérations, M. Vuillemin a été dans l'incapacité totale de poursuivre ses activités personnelles et habituelles ainsi que son activité professionnelle de conducteur d'engins ; qu'ayant estimé que ces faits engageaient la responsabilité de l'hôpital,

M. Vuillemin a présenté une demande d'indemnité à son directeur qui l'a rejetée par une décision du 14 juin 2007, notifiée le 16 juin 2007, avec mention des délais et voies de recours ; que M. Vuillemin, qui n'a pas contesté dans les délais impartis la décision de rejet opposée à sa demande par le centre hospitalier de Besançon et qui n'a saisi le centre hospitalier d'aucune nouvelle demande après le dépôt du rapport d'expertise prescrit par ordonnance du 11 mai 2009 du juge des référés du Tribunal administratif de Besançon, n'est pas fondé à demander à nouveau la mise en cause du centre hospitalier de Besançon ; qu'il suit de là, que les conclusions de la requête de M. Vuillemin et de la Mobilière suisse tendant, d'une part, à faire reconnaître la responsabilité du centre hospitalier universitaire et, d'autre part, à ce que la Cour ordonne une contre-expertise, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions de la Caisse suisse de compensation et de l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Caisse suisse de compensation et l'office assurance invalidité de Neuchâtel, agissant en tant qu'institutions de sécurité sociale, ont adressé, le 24 février 2009, une demande indemnitaire préalable au centre hospitalier universitaire de Besançon tendant à obtenir sa condamnation à leur rembourser le montant des prestations versées à M. Vuillemin au titre des indemnités journalières et des frais de reclassement ; que la décision implicite de rejet opposée à leur demande par le centre hospitalier de Besançon a été contestée par la Caisse suisse de compensation et l'office assurance invalidité de Neuchâtel, dans le délai de recours contentieux, devant le Tribunal administratif de Besançon ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la circonstance que, comme il a été dit plus haut, M. Vuillemin n'ait pas contesté, dans le délai de recours contentieux, la décision de rejet opposée à sa demande indemnitaire préalable, est sans incidence sur le sort de l'action exercée, dans les délais de recours contentieux, par les organismes sociaux ; que, dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont jugé que les conclusions indemnitaires de la Caisse suisse de compensation et de l'office assurance invalidité de Neuchâtel étaient irrecevables par voie de conséquence de la forclusion de l'action de M. Vuillemin ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué et de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande de la Caisse suisse de compensation et de l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel devant le Tribunal administratif de Besançon ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique :

" I- Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut de produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. " ; qu'aux termes de l'article L. 1111-2 du même : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l'exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver. / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. " ;

En ce qui concerne l'existence d'une faute médicale :

7. Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise enregistré au greffe du Tribunal administratif de Besançon le 4 novembre 2009 que le déficit fonctionnel dont souffre

M. Vuillemin est consécutif à la réalisation d'un aléa thérapeutique en lien avec l'anesthésie, et non à une faute médicale commise par le centre hospitalier universitaire de Besançon ;

En ce qui concerne l'existence d'un manquement à l'obligation d'information :

8. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal administratif de Besançon que M. Vuillemin a bénéficié d'une information sur les risques que comportait la réalisation d'une anesthésie ; que l'expert, qui a notamment relevé à cet égard que " M. Vuillemin reconnaît avoir reçu une information de la part de l'anesthésiste lors de la consultation pré-anesthésique ", ajoute que l'information était de nature à permettre au patient de donner un consentement éclairé et que la complication exceptionnelle est du ressort de l'aléa thérapeutique ; qu'enfin, l'expert relève, sans être contredit sur ce point, que l'état actuel du patient est en rapport avec le geste anesthésique et non avec l'arthroscopie et que la complication survenue est exceptionnelle ; que, par suite, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, la responsabilité du centre hospitalier ne saurait être engagée à raison d'un manquement à l'obligation d'information ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la Caisse suisse de compensation et l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel tendant à la condamnation du centre hospitalier de Besançon à leur verser une somme de 49 325 francs suisses au titre des indemnités journalières et des frais alloués à M. Vuillemin doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Besançon, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent Caisse suisse de compensation et l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0900951 du Tribunal administratif de Besançon du

2 février 2012 est annulé.

Article 2 : La demande de la Caisse suisse de compensation et de l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel ainsi que les conclusions de M. Vuillemin et de la Mobilière suisse devant le Tribunal administratif de Besançon sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la Caisse suisse de compensation et de l'office d'assurance invalidité de Neuchâtel et de la requête de

M. Vuillemin et de la Mobilière suisse est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Caisse suisse de compensation, à l'Office d'assurance invalidité de Neuchâtel, au Centre Hospitalier de Besançon à la Mobilière suisse et à M. Jean-Paul Vuillemin.

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N° 12NC00390-12NC00555

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