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28/01/2013 | FRANCE | N°12NC00582

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 28 janvier 2013, 12NC00582


Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2012, présentée pour M. C... E..., demeurant au..., par Me Welzer, avocat ; M. E... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000194 du 31 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 27 novembre 2009 par laquelle l'inspecteur du travail de la deuxième section du département des Vosges a autorisé son licenciement pour motif économique ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat u

ne somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administra...

Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2012, présentée pour M. C... E..., demeurant au..., par Me Welzer, avocat ; M. E... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000194 du 31 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 27 novembre 2009 par laquelle l'inspecteur du travail de la deuxième section du département des Vosges a autorisé son licenciement pour motif économique ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. E... soutient que son employeur, la société SDMA industrie, faisait partie d'un groupe ; après le prononcé de la liquidation judiciaire de cette société, l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement sans rechercher si le mandataire liquidateur avait respecté son obligation de recherche de reclassement au sein du groupe ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu en date du 20 avril 2012 la communication de la requête au ministère du travail ;

Vu la mise en demeure adressée le 24 juillet 2012 au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu l'ordonnance en date du 29 octobre 2012 fixant la clôture de l'instruction le 20 novembre 2012 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2012, présenté pour la société SDMA Industrie, dont le siège est au 37, rue de la Ménantille, à Saint-Dié-des-Vosges (88100), représentée par MeB..., pris en sa qualité de liquidateur, par Me Montaut, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. E...de la somme de 1 500 euros à verser à Me B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Me B...soutient que :

- la société SDMA Industrie ne fait pas partie d'un groupe ; elle est filiale à 100 % d'une société financière, la société SDMA, qui n'exerce aucune activité industrielle et n'emploie aucun salarié ; les lieux d'exploitation des sociétés avec lesquelles la société SDMA Industrie entretenait des liens ne permettaient pas en tout état de cause la permutation de tout ou partie du personnel ;

- le mandataire liquidateur a recherché si le reclassement de M. E...était possible dans les sociétés avec lesquelles la société SDMA Industrie entretenait des liens ;

Vu l'ordonnance en date du 20 novembre 2012 fixant la clôture de l'instruction le 13 décembre 2012 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2013 :

- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2411-5 du code du travail, " Le licenciement d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. [...] " ;

2. Considérant que le tribunal de commerce d'Epinal a, par jugement du 10 novembre 2009, prononcé la liquidation judiciaire de la société SDMA Industrie ; que le 17 novembre 2009, MeB..., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur, a demandé à l'inspecteur du travail de la deuxième section du département des Vosges sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 2411-5 du code du travail l'autorisation de licencier pour motif économique M.E..., délégué du personnel titulaire ; que M. E... demande l'annulation du jugement du 31 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 27 novembre 2009 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement ;

3. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment, de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière y compris lorsque l'entreprise fait l'objet d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ; que, au cas où la cessation totale de l'activité est prononcée à la suite d'une mise en liquidation des biens sans autorisation de poursuite d'activité, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant au ministre, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier si la possibilité d'assurer le cas échéant le reclassement du salarié dans les sociétés du groupe auquel appartient la société dont la cessation totale d'activité a été prononcée a été examinée ;

Sur l'existence d'un groupe :

4. Considérant que pour apprécier les possibilités de reclassement offertes au salarié, l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique par une société appartenant à un groupe, n'est tenue de faire porter son examen que sur les entreprises du groupe dont les activités ou l'organisation offrent à l'intéressé la possibilité d'exercer des fonctions comparables ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., le gérant de la société SDMA, dont la société SDMA Industrie est une filiale à 100 %, est également le gérant des sociétés Constructions soudées de l'Est (CSE), Techniques de Soudage Industriel (TSI) et Maintenance Soudure Industrielle (MSI), trois sociétés oeuvrant dans le même secteur d'activité économique que la société SDMA Industrie et situées comme la société SDMA Industrie dans le département des Vosges ; que M. D...affirme sans être contredit que du matériel de production était parfois transféré d'une société à l'autre ; qu'il ressort également des pièces du dossier qu'à la suite de difficultés rencontrées en 2006, l'entreprise SDMA avait proposé à certains salariés leur reclassement auprès de l'entreprise CSE ; que les activités et le lieu d'exploitation de ces trois sociétés offrent à M.E..., aléseur, la possibilité d'exercer des fonctions comparables à celles qu'il exerçait au sein de la société SDMA Industrie ; que par suite, l'autorité administrative, pour apprécier les possibilités de reclassement offertes à M. E..., était tenue de faire porter son examen sur les trois sociétés CSE, TSI et MSI, qui constituaient avec les sociétés SDMA et SDMA Industrie, un groupe pour l'application des dispositions relatives aux salariés protégés ;

Sur les recherches de reclassement :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises. " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le liquidateur a transmis le 10 novembre 2009 aux sociétés MSI, TSI et CSE un courrier les informant de la liquidation judiciaire de la société SDMA Industrie et leur demandant de lui indiquer les postes disponibles ; qu'il n'est pas établi que ce courrier aurait été accompagné d'une liste des salariés dont le licenciement était envisagé avec mention des emplois occupés ; qu'à la date à laquelle l'inspecteur du travail s'est prononcé sur la demande qui lui avait été présentée le 17 novembre 2009 d'autoriser le licenciement de M.E..., les sociétés TSI et MSI avaient répondu par deux courriers du 16 novembre réceptionnés le 18, mais pas la société CSE ; que par suite, l'inspecteur du travail n'a pas vérifié si le liquidateur s'était assuré de l'impossibilité d'assurer le cas échéant le reclassement de M. E...dans les sociétés du groupe ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. E...qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Me B...agissant en sa qualité de liquidateur de la société SDMA Industrie la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros demandée au même titre par M.E... ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy du 31 janvier 2012 et la décision de l'inspecteur du travail du 27 novembre 2009 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à M. E...la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de Me B...agissant en sa qualité de liquidateur de la société SDMA Industrie tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à Me B...en sa qualité de mandataire liquidateur de la société SDMA Industrie.

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N° 12NC00582


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00582
Date de la décision : 28/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique. Obligation de reclassement.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : ACD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-01-28;12nc00582 ?
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