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17/01/2013 | FRANCE | N°12NC01202

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 17 janvier 2013, 12NC01202


Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2012 sous le n° 12NC01202, complétée le 2 octobre 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant au..., par Me Mockel, avocat ; Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100976 du 15 mai 2012 par lequel le magistrat désigné du Tribunal Administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a prononcé l'invalidation de son titre de conduite et lui a enjoint de le restituer, des décisions portant retrait de points suite aux infractions en date des 26 j

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Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2012 sous le n° 12NC01202, complétée le 2 octobre 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant au..., par Me Mockel, avocat ; Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100976 du 15 mai 2012 par lequel le magistrat désigné du Tribunal Administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a prononcé l'invalidation de son titre de conduite et lui a enjoint de le restituer, des décisions portant retrait de points suite aux infractions en date des 26 juillet 1997, 13 décembre 1997, 11 avril 1999, 3 juillet 2001, 14 février 2003 et 7 juin 2005 et à ce qu'il soit enjoint au ministre de lui restituer l'intégralité des points du capital de points de son permis de conduire ;

2°) d'annuler la décision du 20 janvier 2006 du ministre de l'intérieur ainsi que les décisions de retrait de points de son permis de conduire ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui créditer son permis de conduire de 12 points dans un délai de quinze jours à compter du prononcé de l'arrêt de la Cour ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- sa requête est recevable dès lors que la décision 48 SI lui a été notifiée à son ancienne adresse ;

- elle n'a pas bénéficié des mesures d'information préalable, en méconnaissance des dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;

- elle conteste être l'auteur réel des infractions ;

- les décisions de retrait de points ne lui ont pas été notifiées en méconnaissance des dispositions de l'article L. 223-3 du code de la route ;

- la réalité des infractions n'est pas établie, faute d'avoir payé les amendes forfaitaires, ou les amendes forfaitaires majorées ;

- la décision 48 SI est illégale par voie d'exception d'illégalité des décisions de retrait de points ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 août 2012, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que :

- la demande de première instance est irrecevable, le courrier étant revenu avec la mention "non réclamé" et "absent avisé" ;

- Mme B...a reçu l'information préalable ou ne peut nier l'avoir reçue à l'occasion des différentes infractions qu'elle a commises ;

- la réalité des infractions est établie ;

- le moyen tiré de ce qu'elle n'est pas l'auteur de l'infraction est inopérant ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2012, le rapport de Mme Rousselle ;

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant qu'aucun principe général, ni aucune disposition législative ou réglementaire, ne fait obligation au titulaire d'un permis de conduire de déclarer à l'autorité administrative sa nouvelle adresse en cas de changement de domicile ; qu'il en résulte qu'alors même qu'il n'aurait pas signalé ce changement aux services compétents, la présentation à une adresse où il ne réside plus du pli notifiant une décision relative à son permis de conduire et prise à l'initiative de l'administration n'est pas de nature à faire courir à son encontre le délai de recours contentieux ;

2. Considérant que pour rejeter la demande présentée par Mme B...comme irrecevable, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Nancy a relevé que la décision " 48 SI ", adressée sous pli recommandé avec demande d'accusé de réception, et présentée le 20 janvier 2006 à la dernière adresse connue de la requérante et revenue avec la mention " non réclamé - retour à l'envoyeur " après que le préposé de La Poste ait déposé un avis de passage avait été régulièrement notifiée ; que, toutefois, Mme B...fait valoir que cette adresse était erronée et produit plusieurs documents, notamment un avis d'imposition à la taxe d'habitation au titre de l'année 2005 ainsi qu'une copie du contrat de bail signé le 25 mai 2005 établissant qu'elle ne résidait plus à l'adresse à laquelle la notification de la décision en litige avait été expédiée ; que, dans ces circonstances, la décision du ministre de l'intérieur ne pouvait être regardée comme lui ayant été régulièrement notifiée ; qu'ainsi, Mme B...est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu de se prononcer immédiatement par voie d'évocation, sur les conclusions présentées par la requérante devant le Tribunal administratif de Nancy ;

Sur les conclusions relatives aux décisions de retrait de points :

En ce qui concerne l'infraction commise le 11 avril 1999 :

Sur le moyen tiré de ce que la réalité de l'infraction n'est pas établie :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 11-1 du code de la route en vigueur jusqu'au 1er juin 2001 : " Le nombre de points affectés au permis de conduire est réduit de plein droit lorsqu'est établie la réalité de l'une des infractions suivantes : (...) c) Contraventions en matière de police de la circulation routière susceptibles de mettre en danger la sécurité des personnes limitativement énumérées. La réalité de ces infractions est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation définitive (...) " ;

5. Considérant que, s'agissant de l'infraction commise le 11 avril 1999, Mme B...a fait l'objet d'une condamnation définitive par le tribunal de grande instance de Metz le 22 juin 1999 ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 11-1 du code de la route relatif à l'établissement de la réalité de cette infraction ne peut qu'être écarté ;

Sur le moyen tiré des conditions de la notification de la décision de retrait de points :

6. Considérant que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévues par les dispositions de l'article L. 11-3 du code de la route, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant la légalité de ces retraits ; que cette notification a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont il dispose pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que Mme B... ne saurait dès lors utilement se prévaloir de ce que le retrait de points ne lui aurait pas été notifié avant l'intervention de la décision constatant la perte de validité de son permis de conduire ;

Sur le moyen tiré du défaut d'information préalable :

7. Considérant que, lorsque la réalité de l'infraction a été établie par une condamnation devenue définitive prononcée par le juge pénal qui a statué sur tous les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance et que l'auteur de l'infraction a ainsi pu la contester, l'omission de cette formalité est sans influence sur la régularité du retrait de points résultant de la condamnation ; qu'il ressort des pièces du dossier que, s'agissant de l'infraction commise le 11 avril 1999, elle a fait l'objet, ainsi qu'il a été dit, d'une condamnation définitive par le tribunal de grande instance de Metz le 22 juin 2009 ; que, dès lors Mme B...ne peut utilement soutenir qu'elle n'a pas reçu l'information préalable prévue, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du retrait de six points consécutif à cette infraction ;

En ce qui concerne les infractions commises les 26 juillet 1997, 13 décembre 1997, 3 juillet 2001, 14 février 2003 et 7 juin 2005 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 11-3 du code de la route, en vigueur jusqu'au 1er juin 2001 : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions mentionnées à l'article L. 11-1 a été relevée à son encontre, il est informé de la perte de points qu'il est susceptible d'encourir, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Ces mentions figurent sur le formulaire qui lui est communiqué. La perte de points est portée à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand elle est effective (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 223-3, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 13 juin 2003 : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant le retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé du retrait de points qu'il est susceptible d'encourir, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Ces mentions figurent sur le formulaire qui lui est communiqué (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 223-3 : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. / Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 223-3 dudit code, dans sa rédaction en vigueur résultant du décret du 11 juillet 2003 : " I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1. / II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à L. 225-9 (...) " ;

9. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles précités du code de la route, qui constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ;

10. Considérant que, dès lors que le titulaire d'un permis de conduire à l'encontre duquel une infraction au code de la route est relevée au moyen d'un formulaire et dont il est établi, notamment par la mention qui en est faite au système national des permis de conduire, qu'il a payé l'amende forfaitaire correspondant à cette infraction a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis est réputé être revêtu, l'administration doit alors être regardée comme s'étant acquittée envers le titulaire du permis de son obligation de lui délivrer les informations requises préalablement au paiement de l'amende, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre s'être vu remettre un avis inexact ou incomplet ; que s'agissant des infractions commises les 26 juillet 1997, 13 décembre 1997, 3 juillet 2001, 14 février 2003 et 7 juin 2005 relevées avec interception du véhicule, la mention au système national des permis de conduire de l'émission du l'amende forfaitaire majorée, ne permet donc pas au juge d'estimer que le titulaire du permis s'est vu remettre un avis de contravention comportant les informations requises et que, par suite, les retraits de points opérés sont irréguliers ;

Sur les conclusions relatives à la décision 48 SI :

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir qu'en conséquence de l'annulation des décisions de retraits de points susmentionnées, le solde de points affecté à son permis de conduire n'est pas nul, et qu'en conséquence, la décision 48 SI du ministre de l'intérieur portant invalidation de son titre et lui en ordonnant la restitution doit être annulée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ;

13. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique que l'administration crédite le capital de points affecté au permis de conduire de Mme B...de six points ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de créditer le titre de conduite de Mme B...de six points dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve que l'intéressée n'ait pas commis de nouvelles infractions faisant obstacle à cette restitution ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par Mme B...tendant à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy en date du 15 mai 2012 est annulé.

Article 2 : Les décisions portant retrait de points suite aux infractions commises les 26 juillet 1997, 13 décembre 1997, 3 juillet 2001, 14 février 2003 et 7 juin 2005, ensemble la décision 48 SI du ministre de l'intérieur du 20 janvier 2006 sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de créditer le titre de conduite de Mme B... de 6 points dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve qu'elle n'ait pas commis de nouvelles infractions faisant obstacle à cette restitution.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

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Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée pour information au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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N° 12NC01202


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01202
Date de la décision : 17/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04 Police administrative. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : MOCKEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-01-17;12nc01202 ?
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