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17/12/2012 | FRANCE | N°12NC00482

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 17 décembre 2012, 12NC00482


Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2012, présentée pour la Société Girard, dont le siège est Route de Saulon BP 55, à Gevrey-Chambertin (21220), par Me Neraud ;

La Société Girard demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100323 du 16 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant ce que le tribunal prononce la décharge des pénalités de retard à hauteur de 39 000 euros au titre du marché de travaux conclu le 15 juillet 2008 avec la commune de Roset-Fluans et condamne la commune à lui verser une somme de 2

61 394,25 euros sur le fondement des articles 16 et 17 du cahier des clauses admi...

Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2012, présentée pour la Société Girard, dont le siège est Route de Saulon BP 55, à Gevrey-Chambertin (21220), par Me Neraud ;

La Société Girard demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100323 du 16 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant ce que le tribunal prononce la décharge des pénalités de retard à hauteur de 39 000 euros au titre du marché de travaux conclu le 15 juillet 2008 avec la commune de Roset-Fluans et condamne la commune à lui verser une somme de 261 394,25 euros sur le fondement des articles 16 et 17 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché et 14 290,12 euros au titre de l'actualisation des prix ;

2°) de prononcer la décharge des pénalités de retard à hauteur de 39 000 euros au titre du marché de travaux du 15 juillet 2008 conclu avec la commune de Roset-Fluans, condamner la commune à lui verser une somme de 261 394,25 euros sur le fondement des articles 16 et 17 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché et 14 290,12 euros au titre de l'actualisation des prix ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roset-Fluans une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société soutient que :

- s'agissant des pénalités, le tribunal s'est à tort fondé sur son précédent jugement du 14 avril 2011 et a donc entaché sa décision de défaut de motivation, d'erreur de droit et d'erreur de fait ;

- les retards litigieux ne sont pas de son fait et les pénalités ne sont pas justifiées et sont excessives au regard du montant du marché[jp1] et de la manière dont elle s'est acquitté de ses obligations malgré les difficultés rencontrées ;

- elle a rencontré des roches dures, non mises en évidences par les sondages préalables et a été confrontée à des aléas climatiques ;

- son organisation interne n'est en rien à l'origine des retards ;

- la commune n'a pas réalisé de sites permettant d'accueillir les déblais, ne respectant pas ses propres obligations et cette carence a retardé l'avancement des travaux ; de même, du retard a été pris dans la passation des conventions avec les particuliers ;

- la responsabilité du maitre d'oeuvre est réelle ;

- s'agissant de la diminution de la masse des travaux de 41 000 euros, elle est importante contrairement à ce qu'a considéré le tribunal ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 21 juin 2012 fixant la clôture d'instruction au 21 août 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 août 2012, présenté pour la commune de Roset-Fluans, représentée par son maire, par Me Corneloup, avocat ; la commune conclut au rejet de la requête et à ce que la société Girard soit condamnée à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune fait valoir que :

- la Cour ayant validé le jugement du 14 avril 2011, la requérante ne peut plus exciper de son irrégularité ;

- la requête ne comporte pas les indications requises par l'article R. 811-13 du code de justice administrative et, notamment, aucune critique du jugement attaqué, et elle est donc irrecevable ;

- le nombre total d'installations réalisées étant inférieur à celui initialement prévu, la société a disposé d'un délai largement suffisant pour réaliser ses travaux ;

- le moyen tiré de l'existence d'intempéries n'est pas sérieux et démontre que l'offre a été présentée de manière légère ;

- la circonstance que les personnes intéressées n'avaient pas signé les offres avant le 12 septembre 2008 est inopérante, le marché n'ayant pas été conclu à cette date et seules 5 personnes ont signé le premier avenant en 2009 et 22 le second avenant après le 31 mars 2009 ; en tout état de cause, ces avenants ne pouvaient être établis qu'après que la société Girard ait établi un devis, ce qu'elle n'a fait que tardivement ;

- le moyen tiré de l'étendue de la commune n'est pas sérieux et montre le manque d'organisation de la société ;

- la commune n'avait aucune obligation s'agissant du stockage des déblais, comme l'indiquent expressément les articles 8.4.3 du CCAP et III-2 du CCTP, qui le mettent à la charge de l'entreprise, et qui constituait un critère d'appréciation des offres ; en tout état de cause, la commune a mis à disposition un lieu de stockage ;

- le remplacement du responsable de la maîtrise d'oeuvre est intervenu le dernier jour de la fin théorique des travaux et ce n'est qu'en raison de son retard que la société a eu à connaître son successeur ;

- la présence de roches dures est limitée à deux rues regroupant 23 installations sur 96, était connue de l'entreprise comme le démontre son offre, et les quantités alléguées par la société Girard ne sont ni justifiées, ni crédibles ;

- les aléas climatiques ont été pris en considération dans les conditions prévues au CCAP ;

- la société, à l'exception de la demande du maire relative à l'école, a eu l'entière liberté d'organiser le chantier et le retard pris lui est imputable dès lors qu'elle n'a contacté les particuliers que très tardivement ; la désorganisation du chantier a été rappelée à de nombreuses reprises à l'entreprise ;

- la société a sous-dimensionné ses équipes et n'a jamais déployé de moyens supplémentaires pour achever au plus vite le chantier, même après la date contractuelle d'achèvement des travaux ;

- la commune était fondée à appliquer les pénalités prévues au marché, dès lors que les retards étaient avérés ;

- sur la diminution de la masse des travaux, le montant indiqué dans l'acte d'engagement n'était qu'estimatif et la société ne peut utilement prétendre être indemnisée en application des articles 16 et 17 du CCAG travaux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2012 :

le rapport de Mme Rouselle, président,

- les conclusions de Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me Neraud pour la société Girard, et de Me Burnier pour la commune de Roset-Fluans ;

1. Considérant que, par acte d'engagement en date du 15 juillet 2008 la commune de Roset-Fluans a confié à la société Girard un marché en vue de la réalisation des raccordements des particuliers au réseau d'assainissement communal ; que la réception des travaux afférents au marché en cause a été prononcée le 17 décembre 2009 avec réserves, levées le 2 juillet 2010 ; que, dès le 20 août 2010, la société Girard a saisi le tribunal administratif de Besançon qui a rejeté sa demande tendant à la décharge de pénalités par jugement du 14 avril 2011 ; que, compte tenu du décompte général notifiant à l'entreprise le 29 octobre 2010 des pénalités de retard ainsi que le refus de payer l'intégralité des sommes demandées, la Cour a considéré, par un arrêt du 23 avril 2012, qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les pénalités ; que la société Girard a présenté un mémoire en réclamation à l'encontre de ce décompte, le 10 novembre 2010 et de nouveau saisi le tribunal administratif de Besançon qui, par le jugement attaqué a rejeté ses conclusions tant en ce qui concerne les pénalités que la diminution de la masse des travaux et l'actualisation des prix ;

2. Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir soulevée par la commune de Roset-Fluans ;

Sur les pénalités de retard :

3. Considérant que les pénalités en litige ont été notifiées à la société Girard dans le cadre décompte général établi le 7 octobre 2010, à l'encontre duquel elle a adressé, le 10 novembre 2010, un mémoire en réclamation ; que, le jugement rendu le 14 avril 2011 par le Tribunal administratif de Besançon, s'il a été rendu à la suite d'une réclamation de la société Girard déposée à la suite d'un projet de décompte du 31 juillet 2010, n'en présentait pas moins une identité d'objet avec le litige ayant donné lieu au jugement attaqué[jp2] ; qu'ainsi, l'autorité de la chose jugée par le jugement du 14 avril 2011, même non définitive, faisait obstacle à ce que le Tribunal administratif de Strasbourg, à la date à laquelle il a statué, se prononce de nouveau sur les conclusions de la société Girard tendant à contester la régularité et le bien-fondé de ces pénalités ; que, par suite, la société Girard n'est pas fondée à soutenir qu'en se fondant sur l'autorité de la chose jugée le 14 avril 2011, le tribunal a entaché sa décision de défaut de motivation, d'erreur de droit et d'erreur de fait ; que toutefois, le jugement du 14 avril 2011, faute d'avoir été confirmé par l'arrêt de la Cour du 23 avril 2012, jugeant qu'il n'y avait plus lieu de statuer, n'est pas revêtu de l'autorité définitive de la chose jugée ; que, par suite, la commune de Roset-Fluans n'est pas fondée à exciper de l'autorité de la chose jugée qui s'attachait au jugement du 14 avril 2011 ;

4. Considérant qu'en raison du caractère forfaitaire des pénalités prévues au contrat, qui sont encourues de plein droit du seul fait du retard, la société Girard ne saurait se prévaloir, pour contester les pénalités qui lui ont été appliquées de l'absence de préjudice subi par la commune de Roset-Fluans ;

5. Considérant que si la société soutient que le retard pris résulte de la signature très échelonnée dans le temps des conventions avec les particuliers, il résulte de l'instruction qu'une grande partie desdites conventions ont été signées dès avant la notification de l'ordre de service de début des travaux ; que la société Girard n'établit pas, par les documents qu'elle produit, que les retards pris pour une douzaine de conventions, en raison de la difficulté à établir un devis définitif pour des motifs propres aux propriétaires concernés seraient directement à l'origine des 78 jours de retard constatés par la commune pour l'établissement des pénalités en litige ;

6. Considérant que si la société Girard fait état de sujétions imprévues liées à la présence de roches dures sur une partie du chantier, il résulte de l'instruction que l'attention des candidats avait été attirée sur la présence de ces roches dans le dossier de consultation ; qu'en outre, à supposer qu'elle ait dû consacrer plus de temps à la réalisation de certains branchements du fait de la présence de roches plus dures, elle ne l'établit pas par la seule production d'une attestation d'un fournisseur de matériel donnant des indications générales sur les capacités techniques des matériels mis en oeuvre ; qu'enfin, si elle indique avoir excavé 104 m3 de roches supplémentaires par rapport aux quantités figurant dans le décompte final, elle ne l'établit pas ;

7. Considérant que si la société requérante soutient que la superficie de la commune a occasionné des retards dans le déplacement de ses véhicules, il résulte de l'instruction qu'outre que cette superficie est modeste, 8,28 km², elle était, au surplus, connue de la société Girard qui devait, dès lors, en tenir compte pour l'organisation du chantier ;

8. Considérant que, le cahier des clauses techniques particulières applicable au marché prévoyait expressément que les lieux de stockage de déblais seraient laissés à l'initiative de l'entrepreneur ; qu'il suit de là que la société Girard ne peut utilement soutenir que l'absence de fourniture d'un lieu de stockage des déblais par la commune de Roset-Fluans l'a contrainte à rechercher un site éloigné du chantier ;

9. Considérant par ailleurs que si la société Girard indique qu'elle a eu un nouvel interlocuteur au sein de la maîtrise d'oeuvre à compter de septembre 2009, elle ne précise pas en quoi cette modification a eu des conséquences sur l'organisation du chantier et le non respect des délais contractuels ;

10. Considérant que les intempéries susceptibles d'interrompre le chantier ont été constatées et prises en compte par la commune dans le calcul du retard imputé à l'entreprise ;

11. Considérant enfin que les pénalités, d'un montant de 39 000 euros, ne sont pas excessives au regard du montant final du marché, qui s'élève à 594 174 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'indemnisation à raison de la diminution de la masse des travaux :

12. Considérant qu'en se bornant à soutenir que le tribunal a commis une erreur dans l'appréciation de l'importance des conséquences de la diminution de 41 000 euros de la masse des travaux, et qu'elle peut prétendre au versement d'une somme de 261 394,25 euros en application des articles 16 et du 17 du cahier des clauses administratives générales, la société Girard ne met pas la Cour à même d'apprécier le bien fondé de sa demande ; qu'en conséquence, celle-ci ne peut qu' être rejetée ;

Sur l'actualisation des prix[jp3] :

13. Considérant que, ainsi que l'ont relevé les premiers juges qui ont déclaré sa requête sans objet sur ce point, il résulte de l'instruction que la commune de Roset Fluans a accordé à la société la somme qu'elle demandait à ce titre ; qu'il suit de là que la société Roset-Fluans n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejetées ses conclusions sur ce point comme irrecevables, et à demander la condamnation de la commune à ce titre[jp4] ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Société Girard n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Roset-Fluans, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à la société Girard la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de condamner la société Girard à verser à la commune de Roset-Fluans la somme de 1 500 euros au titre de ces dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la Société Girard est rejetée.

Article 2 : La société Girard versera à la commune de Roset-Fluans, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Société Girard et à la commune de Roset-Fluans.

[jp1]Le projet répond-il ' Il doit, à mon sens, le faire, compte tenu du pouvoir qui nous est désormais reconnu en ce domaine : Cf. 29/12/2008 OPHLM de Puteaux n° 296930

[jp2]Même si l'autorité de la chose jugée par le TA le 14 avril 2011 est invoquée en des termes assez décousus, ne faut-il pas nous placer cependant explicitement sur le terrain de l'article 1153 du code civil et jugé que le litige, compte tenu de l'intervention du DGD n'a pas le même objet (certes, la somme est identique, mais son fondement n'est pas le même) ' Avec pour conséquence, effectivement, la nouvelle réclamation de la société...

[jp3]OK cf. concl. In fine.

[jp4]Si nous devions juger que ces conclusions sont irrecevables devant nous ne faudrait-il pas un MOP ' D'où, peut-être une rédaction quelque peu différente.

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N° 12NC00482


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00482
Date de la décision : 17/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Indemnités - Travaux supplémentaires.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Pénalités de retard.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : NERAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-12-17;12nc00482 ?
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