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06/12/2012 | FRANCE | N°11NC00167

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2012, 11NC00167


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 janvier 2011, présentée pour Mme Myriam B, demeurant ..., par Me Avitabile, avocat au barreau de Colmar ;

Mme B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704989 en date du 25 novembre 2010 du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté sa demande en réduction, d'une part, du complément d'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre des années 2000, 2001 et 2002, d'autre part, du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvi

er 2000 au 31 décembre 2002 par avis de mise en recouvrement du 18 janvier 2004,...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 janvier 2011, présentée pour Mme Myriam B, demeurant ..., par Me Avitabile, avocat au barreau de Colmar ;

Mme B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704989 en date du 25 novembre 2010 du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté sa demande en réduction, d'une part, du complément d'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre des années 2000, 2001 et 2002, d'autre part, du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002 par avis de mise en recouvrement du 18 janvier 2004, ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;

2°) de prononcer les réductions demandées ;

3°) de désigner éventuellement un expert afin de corroborer la reconstitution du chiffre d'affaires qu'elle présente ;

4°) de condamner l'administration à lui rembourser les sommes versées assorties des intérêts moratoires ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article

L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que compte-tenu du nombre de documents comptables et de justificatifs copiés par l'administration et de l'absence d'autorisation de Mme B, il y a eu emport irrégulier de documents ;

- que l'administration ne pouvait rejeter la déduction des frais financiers, en matière de bénéfices non commerciaux comme de taxe sur la valeur ajoutée, en retenant que le compte de l'exploitant était débiteur alors qu'aucune comptabilité n'est exigée pour les activités relevant des bénéfices non commerciaux ; qu'il semble en outre que les calculs de l'administration sont nébuleux et invérifiables et comporte des confusions quant aux années d'imputation des prélèvements, découverts bancaires et bénéfices ;

- que l'administration ne peut reprocher à Mme B de ne pas avoir comptabilisé les amortissements, alors que sa seule obligation était d'inscrire les biens sur le registre des immobilisations, ce qu'elle a fait ; que ses immobilisations ont toujours été correctement déclarées ;

- qu'en ce qui concerne les charges et la taxe sur la valeur ajoutée déductibles, c'est à tort que les premiers juges n'ont pas considéré comme suffisamment probante la comptabilité reconstituée ultérieurement par un expert comptable à laquelle étaient jointes des factures ; que le service n'a pas pris en compte la totalité de ses frais d'adhésion à la Caisse nationale des barreaux français, ni la totalité de ses relevés bancaires auprès du CIAL ; qu'il semble que le vérificateur n'a pas admis toutes les charges assorties de justification au titre du 2ème semestre 2001 ; que le montant total des salaires retenu au titre de 2001 est erroné, le seul salaire de la secrétaire excédant ce chiffre ; que l'administration n'a pas tenu compte de ce que les sommes versées à l'URSSAF en 2001 comportaient des arriérés de 2000;

- qu'en conséquence de ce qui précède et compte tenu de son état de santé à l'époque des faits, les pénalités ne sont pas justifiées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la contribuable n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les pièces de sa comptabilité ont été emportées dans les locaux de l'administration par le vérificateur et que la prise de photocopies n'a été rendue possible que par un emport ; que le vérificateur a procédé à des photocopies sur place avec l'accord de Mme B et n'a utilisé, pour le reste, que les notes prises au cours du contrôle ;

- qu'à supposer même que le service ait appliqué la théorie du compte capital, Mme B n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les frais financiers qu'elle entend déduire ont été nécessités par l'exercice de sa profession ;

- que les amortissements n'ont pas été comptabilisés, en contravention avec les textes applicables aux bénéfices non commerciaux et ne peuvent, en conséquence, être déduits ;

- que les déclarations postérieures aux faits ne présentent pas un caractère probant et que les pièces produites ne sont pas suffisamment précises pour apporter la preuve du montant des charges déductibles ;

- que les motifs personnels invoqués pour demander la décharge des pénalités constituent uniquement des arguments relevant d'une démarche gracieuse ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

1. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux opérations de vérification que celles-ci se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée ; que, toutefois, sur demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter certains documents dans les locaux de l'administration, qui en devient ainsi dépositaire ; qu'en ce cas, il doit délivrer à l'intéressé un reçu détaillé des pièces qui lui sont remises ; qu'en outre, cette pratique ne doit pas avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des articles L. 47 et suivants du livre des procédures fiscales, qui ont, notamment, pour objet de lui assurer sur place des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

2. Considérant que la circonstance que l'administration a pris copies d'un grand nombre de documents comptables et de pièces justificatives ne saurait constituer un emport de documents ; que Mme B ne conteste pas que le vérificateur a pu photocopier ces documents dans son entreprise et que les redressements et rappels contestés ont été établis au vu de ces seules photocopies et notes prises par le vérificateur au cours de la vérification de comptabilité ; que dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition serait irrégulière en raison d'un emport irrégulier de documents ne peut être accueilli ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux :

S'agissant des charges :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession..." ;

4. Considérant, en premier lieu, que le vérificateur a constaté que la comptabilité du cabinet d'avocat de Mme B faisait état, au titre de l'année 2000 et du premier semestre de 2001, de frais financiers relatifs à des découverts sur les comptes bancaires du cabinet et que les prélèvements de l'exploitante, dont il n'était pas établi qu'ils auraient pour objet de financer des dépenses nécessitées par l'exercice de la profession au sens du 1 de l'article 93 du code général des impôts, excédaient le montant des bénéfices de chacune de ces années ; qu'il a, en conséquence, limité la déduction des frais financiers afférents à ces découverts, en proportion de l'excédent des prélèvements effectués par Mme B à des fins personnelles par rapport aux bénéfices réalisés par le cabinet ; qu'ainsi, le service n'a pas, contrairement à ce que soutient la requérante, calculé les redressements litigieux établis dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, en appliquant les règles relatives aux bénéfices industriels et commerciaux ;

5. Considérant qu'il incombe à Mme B, titulaire de bénéfices non commerciaux et qui n'a pas tenu une comptabilité propre aux professions commerciales, de justifier que les frais financiers qu'elle a portés en charges déductibles étaient "nécessités par l'exercice de sa profession" au sens de l'article 93 du code général des impôts ; qu'en se bornant à faire valoir en termes généraux que le vérificateur se serait à tort référé à des règles applicables aux titulaires de bénéfices industriels et commerciaux et que ses calculs étaient trop imprécis pour permettre d'en vérifier l'exactitude, Mme B n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'insuffisance des sommes dont l'administration lui a refusé la déduction au titre des frais financiers ;

6. Considérant, en second lieu, qu'en se bornant à produire une comptabilité reconstituée après la vérification de comptabilité et non assortie de justificatifs et à soutenir, sans apporter d'éléments suffisamment probants, notamment la seule photocopie du recto d'un chèque, que l'administration n'a pas pris en compte la totalité de ses frais d'adhésion à la Caisse nationale des barreaux français, ni la totalité des charges dès lors qu'elle n'a pas eu connaissance de l'ensemble des relevés de comptes bancaires du cabinet et qu'elle a commis des erreurs sur les montants des salaires versés et des cotisations payées aux organismes sociaux, Mme B n'établit pas l'exagération des bases litigieuses ;

S'agissant des amortissements :

7. Considérant que, pour la détermination des bénéfices non commerciaux imposables, les dépenses déductibles comprennent, notamment, selon les dispositions du 2º du 1 de l'article 93 du code général des impôts, "les amortissements effectués suivant les règles applicables en matière de bénéfices industriels et commerciaux" ; qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code, relatif à la détermination des bénéfices industriels et commerciaux, "le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment (...) 2º les amortissements réellement effectués (...)" ; qu'en vertu de ces dispositions seuls peuvent être regardés comme "effectués" au titre d'une année les amortissements effectivement portés dans les écritures comptables de l'entreprise avant l'expiration du délai de déclaration des bénéfices ;

8. Considérant que si Mme B soutient avoir tenu à jour chaque année le registre de ses immobilisations sur lequel figuraient les amortissements litigieux, il résulte de l'instruction et notamment de la notification de redressement, que l'intéressé n'a déposé aucune déclaration ni relevé d'immobilisations pour les années 2001 et 2002 et n'a déposé que tardivement, le 12 juillet 2001, une liste des acquisitions et cessions d'immobilisations pour l'année 2000, la déclaration n'ayant été remise au vérificateur que le 7 mai 2003 après deux mises en demeure de juillet 2001 et janvier 2002 ; qu'ainsi, Mme B n'avait pas réellement effectué ces amortissements dans ses écritures comptables avant l'expiration des délais de déclaration de ces bénéfices ; que c'est, en conséquence à bon droit que l'administration en a refusé la déduction ;

Sur la taxe sur la valeur ajoutée :

9. Considérant qu'il résulte de la combinaison du 1 du II de l'article 271 du code général des impôts et du 1 de l'article 230 de l'annexe II au même code que n'est déductible que la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé le prix des biens et services utilisés pour les besoins des opérations imposables du redevable ;

10. Considérant, en premier lieu, que pour contester les rappels afférents à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé des frais financiers sur découverts bancaires payés par son cabinet, Mme B se borne à soutenir de façon générale que les calculs du vérificateur étaient trop imprécis pour permettre d'en vérifier l'exactitude ; qu'en l'absence de comptabilité probante et de pièces justificatives, l'administration doit être regardée comme justifiant que ces frais n'avaient pas été exposés pour les besoins des opérations imposables du cabinet d'avocat de la redevable ; qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant, en second lieu, que pour contester les rappels relatifs au rejet d'autres déductions de taxe sur la valeur ajoutée au titre de frais généraux , Mme B se borne, comme en matière de bénéfices non commerciaux, à produire une comptabilité non probante reconstituée après la vérification de comptabilité et à soutenir sans apporter de précisions suffisantes que l'administration a sous-estimé les dépenses engagées pour les besoins d'opérations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée en ne retenant pas l'ensemble des frais exposés ; que l'administration doit également être regardée sur ce point comme justifiant, faute de comptabilité probante et de justification, que ces frais ne remplissaient pas les conditions des dispositions susmentionnées du code général des impôts autorisant la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui avait grevé leur prix ;

Sur les pénalités :

12. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a appliqué aux redressements et aux rappels contestés, l'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du code général des impôts et les majorations instaurées par l'article 1728, dont le taux varie en fonction du délai de production des déclarations à la suite de mises en demeure ; que le moyen tiré par Mme B, qui ne conteste pas l'absence ou le retard de production de ses déclarations, de ce que les manquements à ses obligations déclaratives étaient dus à son état de santé, est inopérant ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise sur le caractère probant de la comptabilité reconstituée ultérieurement par Mme B, que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à Mme B la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Myriam B et au ministre de l'économie et des finances.

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11NC00167


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00167
Date de la décision : 06/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : STE ALSACE OMNIJURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-12-06;11nc00167 ?
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