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25/10/2012 | FRANCE | N°11NC01933

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 25 octobre 2012, 11NC01933


Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 2011, présentée pour Mme Rahime , demeurant chez M. Abdullah , ..., par Me Jeannot, avocat ; Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001822 en date du 17 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 26 mai 2010, par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a ordonné son placement en rétention administrative ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler la décision, en date du 26 mai 2010, par laquelle le pr

éfet de Meurthe-et-Moselle a ordonné son placement en rétention administrativ...

Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 2011, présentée pour Mme Rahime , demeurant chez M. Abdullah , ..., par Me Jeannot, avocat ; Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001822 en date du 17 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 26 mai 2010, par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a ordonné son placement en rétention administrative ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler la décision, en date du 26 mai 2010, par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a ordonné son placement en rétention administrative ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me Jeannot, sous réserve d'une renonciation de sa part à l'indemnisation prévue par l'aide juridique, d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Elle soutient que :

- la décision attaquée n'a pas été signée par le préfet de Meurthe-et-Moselle ; à défaut de production de l'arrêté de délégation de signature régulièrement publié, ladite décision doit être annulée pour vice d'incompétence ;

- la décision litigieuse ne répond pas aux exigences de motivation prévues par les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 et par celles de l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'elle ne s'appuie pas sur des éléments de fait et de droit propres au dossier ;

- la décision contestée est entachée d'un vice de procédure dans la mesure où elle est intervenue au terme d'une procédure irrégulière ; en effet, elle a été interpelée dans le cadre d'une procédure qui a été annulée par une ordonnance du 28 mai 2010 du juge des libertés et de la détention de Metz ; la décision querellée n'a été rendue possible qu'en raison de cette interpellation irrégulière ;

- le préfet de Meurthe-et-Moselle a méconnu l'étendu de son pouvoir et a commis une erreur de droit en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire de ne pas la placer en rétention administrative, alors qu'il devait examiner si les éléments de sa situation personnelle pouvaient conduire à une assignation à résidence ;

- le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas caractérisé la nécessité de la priver de sa liberté constitutionnelle d'aller et venir, en méconnaissance des articles L. 551-1 et L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il n'était pas nécessaire de la placer en rétention administrative dès lors qu'elle avait des garanties de représentation en justice, et notamment un domicile fixe depuis plusieurs années et que nombreux membres de sa famille résident en France, dont ses frères et soeurs, qui sont commerçants, et qu'elle ne s'est jamais soustraite à une convocation de l'administration ; elle n'a pas exécuté l'obligation de quitter le territoire français dans la mesure où elle avait contesté cette décision en déposant une requête devant le Tribunal administratif de Nancy ; la circonstance qu'elle se serait soustraite à une précédente décision portant obligation de quitter le territoire français en 2007, qui n'est pas avérée, ne constitue pas un motif légal de placement en rétention administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2012, présenté par le préfet de Meurthe-et-Moselle, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il s'en remet à l'exposé des faits présentés dans son mémoire de première instance ; que, s'agissant de l'incompétence de l'auteur de l'acte, le défaut de motivation, le vice de procédure et la nécessité du placement en rétention administrative, il s'en remet aux arguments présentés dans son mémoire de première instance ; que le seul pouvoir discrétionnaire qu'il pouvait utiliser en l'espèce était de ne pas placer l'intéressée en rétention administrative, ce qu'il a clairement mentionné dans la décision attaquée ne pas vouloir faire ; que les conclusions tendant à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat doivent être rejetées ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2012 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- et les observations de Me Jeannot, avocat de M. ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

1. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 28 janvier 2010 du 28 janvier 2010, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 5 du 29 janvier 2010, le préfet de Meurthe-et-Moselle a donné délégation de signature à Mme Antoinette Audia, directrice des libertés publiques à l'effet de signer les décisions de placement en rétention administrative des étrangers ; que l'article 7 dudit arrêté dispose qu' " en cas d'absence ou d'empêchement de Mme Antoinette Audia, la délégation de signature définie à l'article 4 est exercée par Mme Sylvia Polin, attachée principale, chef de bureau, ou en son absence par Mme Elisabeth Daval, attachée, adjointe au chef de bureau " ; que l'arrêté attaqué est signé par Mme Daval ; qu'il n'est ni établi ni même allégué que Mme Audia et Mme Polin n'étaient pas empêchée pour la première et absente pour la seconde à la date de la décision attaquée ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse manque en fait ;

2. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée mentionne, de façon circonstanciée, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, dès lors, elle est suffisamment motivée ;

3. Considérant, en troisième lieu, que les conditions de l'interpellation de Mme sont, en tout état de cause, sans influence sur la légalité de la mesure contestée de rétention administrative ; que la circonstance que, par une ordonnance du 28 mai 2010, le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Metz a refusé la prolongation de sa rétention et a ordonné sa remise en liberté n'est pas non plus de nature à entacher d'illégalité la décision litigieuse ;

4. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des termes mêmes de la décision contestée, qui précise que " que, compte tenu du cas d'espèce, il n'y pas lieu de faire usage du pouvoir discrétionnaire dont dispose le préfet de ne pas la placer en rétention administrative ", que le préfet de Meurthe-et-Moselle a expressément fait le choix de placer l'intéressée en rétention administrative, et non de l'assigner à résidence, et n'a ainsi pas méconnu l'étendue de sa compétence ;

5. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le placement en rétention d'un étranger dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger : (...) / 6° Soit, faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise en application du I de l'article L. 511-1 moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai d'un mois pour quitter volontairement le territoire est expiré, ne peut quitter immédiatement ce territoire. " ; qu'aux termes de l'article L. 551-2 du même code : " La décision de placement est prise par l'autorité administrative, après l'interpellation de l'étranger et, le cas échéant, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de sa période d'incarcération en cas de détention. Elle est écrite et motivée. Un double en est remis à l'intéressé. Le procureur de la République en est informé immédiatement. / L'étranger est informé dans une langue qu'il comprend et dans les meilleurs délais que, pendant toute la période de la rétention, il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin. Il est également informé qu'il peut communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix. Un décret en Conseil d'Etat précise, en tant que de besoin, les modalités selon lesquelles s'exerce l'assistance de ces intervenants. / Lorsque l'étranger ne parle pas le français, il est fait application des dispositions de l'article L. 111-7. " ; qu'aux termes de l'article L. 552-4 du même code : " A titre exceptionnel, le juge peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives, après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la mesure d'éloignement en instance d'exécution. L'assignation à résidence concernant un étranger qui s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière en vigueur, d'une interdiction du territoire dont il n'a pas été relevé, ou d'une mesure d'expulsion en vigueur doit faire l'objet d'une motivation spéciale. " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme est hébergée chez son frère ; que, toutefois, cette circonstance n'est pas, à elle seule, de nature à constituer une garantie de représentation effective ; que si la requérante produit à l'instance sa carte d'identité, elle ne l'a pas remise aux services de police lors de son interpellation, le préfet de Meurthe-et-Moselle ayant relevé, dans la décision attaquée, sans être contredit sur ce point, qu'elle était démunie de tout document d'identité ; que, de plus, elle s'est soustraite à une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre en mars 2007 ; que les autres pièces qu'elle produit ne sont pas de nature à établir qu'elle présenterait des garanties de représentation effectives suffisantes pour bénéficier du régime de l'assignation à résidence ; que, par suite, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas commis d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation en décidant de la placer en rétention administrative au regard des dispositions précitées des articles L. 551-1 et L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 17 mai 2011, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 26 mai 2010, par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a ordonné son placement en rétention administrative ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Rahime et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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11NC01933


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01933
Date de la décision : 25/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Restrictions apportées au séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-10-25;11nc01933 ?
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