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18/10/2012 | FRANCE | N°12NC00471

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2012, 12NC00471


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour, le 14 mars 2012, présentée pour Mme Zivajere A épouse C, demeurant ..., par Me Andreini, avocat ; Mme C demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104169 en date du 16 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 16 juin 2011 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit

enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai

d'un ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour, le 14 mars 2012, présentée pour Mme Zivajere A épouse C, demeurant ..., par Me Andreini, avocat ; Mme C demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104169 en date du 16 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 16 juin 2011 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai

d'un mois à compter de la notification du jugement, et, dans l'intervalle de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, à titre subsidiaire, de procéder dans le même délai à un nouvel examen de sa situation et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai

d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, dans l'intervalle de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, à titre subsidiaire, de procéder dans le même délai à un nouvel examen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

Sur le refus de titre :

- la procédure est irrégulière dès lors que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ne lui a pas été communiqué ;

- la décision a été prise en méconnaissance de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

- la décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA alors qu'il n'est pas établi que le traitement serait disponible au Kosovo et que l'accès aux soins en matière de psychiatrique est impossible et qu'un médicament prescrit n'y est pas disponible ;

- le refus de titre porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 août 2012, présenté par le préfet du Bas-Rhin qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- son arrêté ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 31311 du CESEDA ;

- il ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre ne pourra qu'être écarté ;

Vu l'ordonnance du 13 juillet 2012 fixant la clôture de l'instruction au 16 août 2012, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du 17 août 2012 portant réouverture de l'instruction, en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 7 février 2012, admettant Mme C au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2012 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller ;

Sur le refus de titre :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. (...) " . qu'aux termes de l'article R. 312-22 du CESEDA dans sa rédaction alors en vigueur : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine./ L'étranger mentionné au 11° de l'article L. 313-11 qui ne remplirait pas la condition de résidence habituelle peut recevoir une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement. " ;

2. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier, que le préfet du Bas-Rhin a pris sa décision portant refus de séjour au vu de l'avis en date du 18 mai 2011 par lequel le médecin de l'Agence régionale de santé d'Alsace faisait connaître que si l'état de santé de Mme C justifiait l'application d'un traitement médical, celui-ci pouvait toutefois être poursuivi au Kosovo ; qu'en portant ces différentes mentions, le médecin de l'agence régionale de santé a suffisamment motivé cet avis ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au préfet de communiquer à Mme C l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé d'Alsace ;

En ce qui concerne la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA :

4. Considérant qu'il résulte des dispositions susvisées qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vue de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

5. Considérant qu'il ressort de l'avis émis le 18 mai 2011 par le médecin inspecteur de santé publique que, si l'état de santé de Mme C nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut néanmoins bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel elle peut voyager sans risque ; que le préfet du Bas-Rhin, en lui opposant le contenu d'un document émanant des autorités consulaires en poste au Kosovo, confirmant l'existence à Pristina d'une clinique psychiatrique implantée au sein de l'université de médecine et en mesure de prendre en charge tous les troubles psychiatriques, justifie tant de la réalité d'une offre en soins psychiatriques dans ce pays, laquelle n'est pas sérieusement remise en cause par l'appelante, que de la possibilité de leur prise en charge par le système d'assurance maladie et de l'existence d'une offre suffisante de médicaments pour le traitement des affections psychiatriques, même si ces médicaments ne sont pas exactement ceux prescrits en France pour le traitement de l'intéressée ; que le préfet du Bas-Rhin doit ainsi être regardé comme ayant exactement apprécié que la requérante peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que Mme C n'apporte, au demeurant, aucun élément suffisamment circonstancié relatif aux soins exigés par sa propre pathologie en ne se référant qu'à un rapport d'un neurologue lequel fait état d'un suivi de l'intéressée pendant plusieurs années au sein de la polyclinique " Denta Med " de Gjilan, et ne démontre aucunement l'impossibilité de prise en charge financière des traitements en cause ; qu'ainsi, le moyen de Mme C tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers doit être écarté ;

En ce qui concerne le respect de sa vie privée et familiale :

6. Considérant que, si Mme C fait valoir qu'elle est bien intégrée en France, où résident également ses enfants, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée n'est entrée en France qu'au mois de juillet 2009 après avoir vécu dans son pays depuis sa naissance, en 1965 ; que par d'autres arrêtés du 16 juin 2011, le préfet du Bas-Rhin a ordonné l'éloignement de l'époux de la requérante et de leurs enfants majeurs ; que Mme C ne peut dès lors soutenir qu'elle a vocation à résider en France auprès de sa famille ; que, par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée en France, l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, le préfet n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour, soulevé à l'appui des conclusions dirigées tant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français que celle fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susvisé ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête susvisée de Mme C est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Zivajere A épouse C et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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12NC00471


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00471
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : SCP ROTH-PIGNON LEPAROUX ROSENSTIEHL ET ANDREINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-10-18;12nc00471 ?
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