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01/10/2012 | FRANCE | N°11NC02056

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 01 octobre 2012, 11NC02056


Vu la requête, enregistrée le 26 décembre 2011, présentée pour M. Andry , demeurant chez Mme Lucienne B au ..., par Me Dollé, avocat ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104134 du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2011 par lequel le préfet de la Moselle a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit à l'expiration de c

e délai ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) d'enjoindr...

Vu la requête, enregistrée le 26 décembre 2011, présentée pour M. Andry , demeurant chez Mme Lucienne B au ..., par Me Dollé, avocat ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104134 du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2011 par lequel le préfet de la Moselle a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit à l'expiration de ce délai ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement de réexaminer sa situation dans un délai déterminé, au besoin sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à Me Dollé, au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- le préfet de la Moselle n'a pas procédé à un examen complet de sa situation dès lors que la décision contestée ne mentionne pas l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision contestée méconnait l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- la décision contestée viole l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu de ce que sa mère et son frère jumeau vivent en France et qu'il n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine ;

Sur la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- le préfet, en lui fixant un délai d'un mois pour quitter le territoire français, a méconnu l'étendue de sa compétence dès lors qu'il il justifiait de motifs humanitaires ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- le préfet de la Moselle a méconnu l'étendue de sa compétence et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ne recherchant pas s'il encourait des risques personnels en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2012 présenté par le préfet de la Moselle, par lequel il conclut au rejet de la requête, qui n'apporte aucun élément nouveau par rapport à la première instance ; il fait observer que l'éloignement de l'intéressé, prévu le 23 janvier 2012 n'a pu être mis en oeuvre ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 8 décembre 2011, admettant M. au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 40% ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu la loi n° 91-647 du 11 juillet 1991 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2012 :

- le rapport de Mme Rousselle, président ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

1. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient M. l'arrêté contesté est suffisamment motivé, en droit et en fait, alors même que le préfet n'aurait pas expressément mentionné le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé ; qu'il en est notamment ainsi lorsque, comme en l'espèce, le préfet refuse la délivrance d'une carte de séjour à un étranger qui a sollicité le statut de réfugié, cette décision devant en effet, être regardée comme prise en réponse à une demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile ; que, dès lors, M. ne peut utilement soutenir que la décision contestée ne pouvait être prise qu'après la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ", et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que si M. fait valoir que le centre de ses attaches privées et familiales se trouve en France, où résident sa mère de nationalité française et son frère jumeau et qu'aucun membre de sa famille ne réside plus à Madagascar, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'est entré en France que le 3 septembre 2009, à l'âge de 39 ans, qu'il est célibataire et sans enfant ; qu'il n'a pas revu sa mère depuis mai 2007 et que son frère a fait l'objet d'un refus de délivrance d'un titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français par le préfet de la Meurthe et Moselle, en date du 1er mars 2010, confirmé par un arrêt de la Cour le 12 janvier 2012 ;

6. Considérant qu'eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment à la durée et aux conditions de séjour en France de l'intéressé, la décision litigieuse ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, M. n'est pas fondé à soutenir que le préfet a méconnu tant les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que si M. fait valoir qu'il suit une formation à l'institut national polytechnique de Lorraine, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a suivi cette formation qu'en auditeur libre, du 19 octobre 2009 au 20 août 2010, soit durant 10 mois ; qu'ainsi, le préfet de la Moselle n'a commis aucune erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de titre de séjour sur sa situation personnelle à la date du 13 juillet 2011 ;

En ce qui concerne la décision faisant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. n'établit pas que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité de la décision qui la fonde doit être écarté ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 susvisée : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée du séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. (...) " et qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration. " ;

10. Considérant que M. a vécu 39 ans à Madagascar, qu'il est présent en France depuis septembre 2009, que le centre de ses intérêts sociaux et familiaux se trouve être dans son pays d'origine et qu'il n'a fait valoir aucun événement personnalisé déterminant récent ou inopiné qui serait de nature à justifier son maintien sur le territoire français ; que dans ces conditions la situation personnelle du requérant ne comportait aucun élément de nature à justifier une prolongation du délai de départ volontaire ; que, par suite, M. n'est pas fondé à soutenir que, par la décision contestée, le préfet de la Moselle en lui fixant un délai d'un mois pour quitter le territoire français en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a méconnu l'article 7 de la directive précitée ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

11. Considérant qu'au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de cette décision, le requérant reprend en appel le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d 'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions la requête de M. à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 13 juillet 2011 ne peuvent être que rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 11 juillet 1991 :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Me Dollé, avocat de M. , la somme que le requérant demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Andry et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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11NC02056


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC02056
Date de la décision : 01/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-10-01;11nc02056 ?
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