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26/06/2012 | FRANCE | N°11NC01210

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 26 juin 2012, 11NC01210


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 22 juillet 201, complété par un mémoire du 3 avril 2012, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT ;

Le MINISTRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001096 en date du 26 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a, à la demande de la Commission de protection des eaux de Franche-Comté, annulé le récépissé de dépôt de déclaration du 4 août 2009 délivré par le préfet de la Haute-Saône ainsi que la décision de non opposition

la déclaration du 2 octobre 2009 concernant l'aménagement par la communauté de comm...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 22 juillet 201, complété par un mémoire du 3 avril 2012, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT ;

Le MINISTRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001096 en date du 26 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a, à la demande de la Commission de protection des eaux de Franche-Comté, annulé le récépissé de dépôt de déclaration du 4 août 2009 délivré par le préfet de la Haute-Saône ainsi que la décision de non opposition à la déclaration du 2 octobre 2009 concernant l'aménagement par la communauté de communes de l'agglomération de Vesoul de la piste cyclable de la Rocade Ouest ;

2°) de rejeter la demande de la Commission de protection des eaux de Franche-Comté ;

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le dossier de déclaration était incomplet au regard des mesures compensatoires prévues ;

- le dossier de déclaration était complet conformément aux dispositions de l'article R. 214-32 du code de l'environnement, et en particulier les mesures correctives ou compensatoires envisagées ; la demande d'éléments complémentaires correspondait à une demande d'information ;

- le projet ne présente aucune incompatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et ne porte aux intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 aucune atteinte grave ; il produit un relevé topographique en ce sens ;

- les décisions litigieuses sont fondées ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2012, complété par des mémoires en date des 5 mars et 21 mai 2012, présentés pour la Commission de protection des eaux de Franche Comté, dont le siège est 3 rue Beauregard à Besançon (25000), par Me Le Cornec, avocat ;

La Commission de protection des eaux de Franche Comté conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Saône, sous astreinte de 250 euros par jour à compter de l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt, de mettre en demeure la Communauté de communes de l'agglomération de Vesoul de lui présenter des mesures effectives de réelles compensation de la perte des 1 350m² de zones humides et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que le dossier n'était pas complet dès lors que le préfet a invité le pétitionnaire à compléter son dossier ;

- une bande enherbée en limite de zone agricole ne peut servir de compensation à la destruction d'une zone humide et, par suite, l'opération ne fait l'objet d'aucune mesure compensatoire ;

- le dossier déposé ne comportait pas les pièces requises par l'article R. 214-32 du code de l'environnement ;

- la décision de non opposition n'est pas compatible avec le SDAGE Rhône Méditerranée ;

- la surface soustraite au lit majeur effectivement impactée par le projet de piste cyclable comprend l'ensemble des parcelles d'implantation de l'ouvrage litigieux, et doit être prise en compte pour apprécier le régime applicable au titre de la rubrique 3.2.2.0 de la nomenclature loi sur l'eau, et méconnaît les dispositions 8-02 du SDAGE Rhône Méditerranée ;

- le document d'arpentage en date du 3 février 2012 est postérieur aux décisions litigieuses ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2012 :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur,

- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,

- et les observations de Mlle Delteil, mandatée par le président de la Commission de protection des eaux de Franche-Comté ;

Sur la légalité du récépissé de déclaration au titre de la loi sur l'eau :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 214-32 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I.-Toute personne souhaitant réaliser une installation, un ouvrage, des travaux ou une activité soumise à déclaration adresse une déclaration au préfet du département ou des départements où ils doivent être réalisés. II.-Cette déclaration, remise en trois exemplaires, comprend : 1° Le nom et l'adresse du demandeur ; 2° L'emplacement sur lequel l'installation, l'ouvrage, les travaux ou l'activité doivent être réalisés ; 3° La nature, la consistance, le volume et l'objet de l'ouvrage, de l'installation, des travaux ou de l'activité envisagés, ainsi que la ou les rubriques de la nomenclature dans lesquelles ils doivent être rangés ; 4° Un document : a) Indiquant les incidences du projet sur la ressource en eau, le milieu aquatique, l'écoulement, le niveau et la qualité des eaux, y compris de ruissellement, en fonction des procédés mis en oeuvre, des modalités d'exécution des travaux ou de l'activité, du fonctionnement des ouvrages ou installations, de la nature, de l'origine et du volume des eaux utilisées ou affectées et compte tenu des variations saisonnières et climatiques ; b) Comportant, lorsque le projet est de nature à affecter de façon notable un site Natura 2000 au sens de l'article L. 414-4, l'évaluation de ses incidences au regard des objectifs de conservation du site ; c) Justifiant, le cas échéant, de la compatibilité du projet avec le schéma directeur ou le schéma d'aménagement et de gestion des eaux et de sa contribution à la réalisation des objectifs visés à l'article L. 211-1 ainsi que des objectifs de qualité des eaux prévus par l'article D. 211-10 ; d) Précisant s'il y a lieu les mesures correctives ou compensatoires envisagées. Ce document est adapté à l'importance du projet et de ses incidences. Les informations qu'il doit contenir peuvent être précisées par un arrêté du ministre chargé de l'environnement. Lorsqu'une étude d'impact ou une notice d'impact est exigée en application des articles R. 122-5 à R. 122-9, elle est jointe à ce document, qu'elle remplace si elle contient les informations demandées ; 5° Les moyens de surveillance ou d'évaluation des prélèvements et des déversements prévus ; 6° Les éléments graphiques, plans ou cartes utiles à la compréhension des pièces du dossier, notamment de celles mentionnées aux 3° et 4° [...] " ; qu'aux termes de l'article R.214-33 dudit code : " Dans les quinze jours suivant la réception d'une déclaration, il est adressé au déclarant : 1° Lorsque la déclaration est incomplète, un accusé de réception qui indique les pièces ou informations manquantes ; 2° Lorsque la déclaration est complète, un récépissé de déclaration qui indique soit la date à laquelle, en l'absence d'opposition, l'opération projetée pourra être entreprise, soit l'absence d'opposition qui permet d'entreprendre cette opération sans délai. Le récépissé est assorti, le cas échéant, d'une copie des prescriptions générales applicables " ; qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que le préfet doit vérifier que le projet pour lequel est déposée la déclaration relève effectivement du régime de la déclaration et, d'autre part, qu'il est tenu, si tel est le cas, de délivrer le récépissé de déclaration dès lors que la déclaration est régulière en la forme et complète ;

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le Tribunal administratif :

Considérant que la communauté de communes de l'agglomération de Vesoul a déposé un dossier de déclaration au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, concernant l'aménagement de la piste cyclable de la rocade ouest, dont la réalisation est prévue dans la commune de Vesoul ; que, le 4 août 2009, le dossier a été déclaré complet par le service environnement et risques de la direction départementale de l'équipement et de l'agriculture et un récépissé de dépôt de dossier de déclaration a été délivré par le préfet de la Haute Saône ; qu'il ressort des pièces du dossier que le dossier de déclaration, d'une part, rappelle page 41 les objectifs du SDAGE et en particulier celui du maintien de la superficie totale des zones humides, notamment par la recréation de zones humides de même superficie et de même fonction que celle détruite et, d'autre part, prévoit, page 46, à titre de mesure compensatoire, le projet étant situé en zone humide, de recréer une zone humide de même superficie et de fonction équivalente à celle soustraite d'une superficie de 1 350m² à proximité de la RD 118 nord ouest de Montigny , celle-ci s'inscrivant en complémentarité d'une autre zone humide à créer en compensation des impacts de l'urbanisation de la ZAC Vesoul Technologia ; que si, postérieurement à ladite décision, le directeur départemental de l'équipement et de l'agriculture de la Haute-Saône lui a demandé " afin de valider définitivement les mesures compensatoires proposées " (...) " de bien vouloir faire parvenir par retour du courrier les documents suivants : attestation de propriété des parcelles référencées page 48 du dossier de déclaration avec engagement du propriétaire à créer et maintenir une bande enherbée de 5 mètres selon des modalités de gestion qui restent à préciser et à contractualiser avec l'exploitant ; engagement de l'exploitant portant sur la création d'une bande enherbée de 5 mètres et son mode de gestion ; et nous préciser les dispositions prises (clôture de la piste cyclable par exemple) pour préserver la zone naturelle d'éventuelles dégradations (piétinement...) par les piétons et les vélos ", cette circonstance ne peut suffire à établir le caractère insuffisant dudit dossier ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a annulé le récépissé de dépôt de déclaration du 4 août 2009 au motif du caractère incomplet de la demande ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la Commission de protection des eaux de Franche-Comté tant en première instance qu'en appel ;

En ce qui concerne les autres moyens :

Considérant, en premier lieu, que si la Commission de protection des eaux de Franche-Comté soutient que le préfet aurait dû saisir le comité de suivi créé par l'arrêté préfectoral en date du 21 octobre 1989 portant création du biotope de la plaine de Pusey, Vaivre et Montoille et Vesoul, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose une telle consultation ; qu'au surplus, le projet litigieux n'entre pas dans le périmètre fixé par ledit arrêté, et la circonstance que ledit comité se soit réuni en 2005 à propos du prolongement de la piste cyclable est sans influence sur la légalité de la procédure à l'issue de laquelle les décisions en litige ont été prises ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 214-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations ne figurant pas à la nomenclature des installations classées, les ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux, la destruction de frayères, de zones de croissance ou d'alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants " ; que si la Commission de protection des eaux de Franche-Comté soutient que le projet relève de la rubrique 3.2.2.0 de la nomenclature " installations, ouvrages, remblais dans le lit majeur d'un cours d'eau dont la surface soustraite est supérieure ou égale à 400 m² et inférieur à 1 000 m² ", prévue par l'article R. 214-1 du code de l'environnement, il ressort des pièces du dossier que le projet d'extension de la piste cyclable se fera au moyen d'un platelage de bois, posé sur une structure bois et des longrines béton, ancrées dans le sol de manière à ce que l'eau puisse circuler sous la piste cyclable, permettant la soustraction du lit majeur d'une superficie de 200 m² et il n'est pas établi que le projet litigieux, par la réalisation d'une couche d'enrobé sur la piste cyclable existante, aura pour conséquences des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines ; que, par suite, le dossier de déclaration était complet au sens des dispositions précitées de l'article R. 214-32 du code de l'environnement, et c'est à bon droit que le préfet a délivré le récépissé litigieux au visa de la seule rubrique de la nomenclature 3.3.1.0 intitulée " Assèchement, mise en eau, imperméabilisation, remblais de zones humides ou de marais, la zone asséchée ou mise en eau étant : 2°supérieure à 0,1 ha, mais inférieure à 1 ha " ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Besançon a annulé le récépissé de dépôt de déclaration du 4 août 2009 ;

Sur la légalité de la décision de non opposition à la déclaration du 2 octobre 2009 :

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens :

Considérant qu'aux termes du paragraphe 6B-6 du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) 2010-2015 approuvé le 20 novembre 2009, applicable à la date du présent arrêt : " Lorsque la réalisation d'un projet conduit à la disparition d'une surface de zones humides ou à l'altération de leur biodiversité, le SDAGE préconise que les mesures compensatoires prévoient dans le même bassin versant, soit la création de zones équivalentes sur le plan fonctionnel et de la biodiversité, soit la remise en état d'une surfaces de zones humides existantes, et ce à hauteur d'une valeur guide de l'ordre de 200% " ; qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, la mesure compensatoire envisagée a pour objet de créer une bande enherbée d'une superficie de 1 350 m² égale à celle soustraite, et non à la création d'une superficie de 3 400 m² incluant les mesures compensatoires du projet de la ZAC Vesoul Technologia ; que le projet est ainsi incompatible avec les dispositions du paragraphe 6B-6 du schéma d'aménagement et de gestion des eaux ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a annulé la décision de non opposition à la déclaration en date du 2 octobre 2009 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT n'est en revanche pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a annulé la décision de non opposition à la déclaration du 2 octobre 2009 concernant l'aménagement par la communauté de communes de l'agglomération de Vesoul de la piste cyclable de la Rocade Ouest ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la Commission de protection des eaux de Franche-Comté au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 26 mai 2011 est annulé en tant qu'il a annulé le récépissé de dépôt de déclaration en date du 4 août 2009.

Article 2 : La demande de la Commission de protection des eaux de Franche-Comté devant le Tribunal administratif est rejetée en tant qu'elle demandait l'annulation du récépissé de dépôt de déclaration en date du 4 août 2009.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'ENERGIE, à la Commission de protection des eaux de Franche-Comté et à la communauté de communes de l'agglomération de Vesoul.

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11NC01210


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01210
Date de la décision : 26/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-05-02 Nature et environnement. Autres mesures protectrices de l'environnement. Lutte contre la pollution des eaux.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : LE CORNEC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-06-26;11nc01210 ?
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