Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 avril 2011, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ;
Le PREFET DU BAS-RHIN demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100333 en date du 6 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 21 décembre 2010 par lequel il a refusé à Mme Fatima A un titre de séjour, a prononcé une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi ;
Le PREFET DU BAS-RHIN soutient :
- que l'auteur de l'acte avait reçu une délégation de signature régulière ;
- que le refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée, à sa vie privée et familiale et ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que celle-ci a vécu plus de 52 ans au Maroc, que ses liens avec ses enfants vivant en France ont été durablement interrompus, qu'elle n'est pas isolée dans son pays d'origine où vivent six de ses frères et soeurs, qu'elle n'était en France que depuis six mois à la date de l'arrêté contesté et qu'elle peut revoir les membres de sa famille vivant en France à l'occasion de voyages ultérieurs ;
- que l'obligation de quitter le territoire est suffisamment motivée et que, eu égard à ce qui a été dit précédemment, elle ne peut être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et n'est entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation ;
- que le pays fixant le pays de destination ne peut davantage être annulé par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour ;
Vu, le mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2012, présenté pour Mme Fatima A, domiciliée chez Mme Asmaa B ..., par Me Airoldi, avocat ;
Elle conclut :
- au rejet de la requête ;
- à l'annulation de la décision contestée ;
- à ce que la Cour enjoigne à l'administration de lui délivrer une carte de séjour temporaire, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros pas jour de retard ;
- à la condamnation de l'Etat à verser à son avocat, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient :
- que le refus de titre de séjour est entaché d'incompétence ; qu'il méconnaît l'article L. 3132-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'elle est seule, isolée et sans activité professionnelle au Maroc, qu'elle sera privée de la présence de ses enfants et qu'en tant que veuve, il y a lieu de prendre en compte la présence de ses enfants et non de ses frères et soeurs pour apprécier son droit à bénéficier d'un titre de séjour de plein droit au titre de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'erreur manifeste d'appréciation ;
- que l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée, doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus du titre de séjour et de la violation de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation pour les mêmes motifs que le refus de titre de séjour ;
- que la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2012 :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée... " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, de nationalité marocaine, est entrée en France le 30 juin 2010 à l'âge de 56 ans ; que son conjoint dont elle avait divorcé depuis plusieurs années est décédé en 2007 et si ses quatre enfants résident régulièrement en France, il ressort cependant des pièces du dossier qu'elle a vécu plus de 52 ans au Maroc, n'a résidé en France antérieurement que du 2 octobre 1999 au 23 janvier 2003, date depuis laquelle elle résidait dans son pays d'origine alors que ses enfants étaient en France, qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches personnelles et familiales au Maroc où demeurent ses six frères et soeurs et où elle dispose de ressources égales à quatre fois le salaire minimum marocain ; que, dès lors, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, le refus de titre de séjour opposé à Mme A par le préfet du Bas-Rhin ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 313-11- 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées pour annuler l'arrêté contesté ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;
Sur le refus de titre de séjour :
Considérant qu'il ressort de pièces du dossier que M. Troucheau, secrétaire adjoint de la préfecture du Bas-Rhin, était régulièrement chargé d'assurer l'intérim du secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin en application d'un arrêté préfectoral du 14 décembre 2010 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 15 décembre 2010 ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
Considérant, d'une part, que Mme A ne peut utilement soutenir que l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée dès lors que l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : "L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation" ;
Considérant, d'autre part, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, ni qu'elle serait entachée de méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU BAS-RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté en date du 21 décembre 2010 et que la demande de Mme A doit être rejetée ;
D E C I D E :
Article 1 er : Le jugement en date du 6 avril 2011 du Tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Fatima A et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressé au procureur de la république près le Tribunal de grande instance de Strasbourg.
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