La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/06/2012 | FRANCE | N°11NC01906

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 05 juin 2012, 11NC01906


Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2011, présentée pour la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS D'USAGERS DES TRANSPORTS (FNAUT), dont le siège social est 32 rue Raymond Losserand à Paris (75014), représentée par son président, par Me Busson , avocat ; La FNAUT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0903805 en date du 5 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 novembre 2009 par laquelle Réseau ferré de France (RFF) a prononcé la fermeture de la section de Russange à

Audun-le-Tiche du point kilométrique (PK) 18,750 au PK 21,964 de la lign...

Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2011, présentée pour la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS D'USAGERS DES TRANSPORTS (FNAUT), dont le siège social est 32 rue Raymond Losserand à Paris (75014), représentée par son président, par Me Busson , avocat ; La FNAUT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0903805 en date du 5 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 novembre 2009 par laquelle Réseau ferré de France (RFF) a prononcé la fermeture de la section de Russange à Audun-le-Tiche du point kilométrique (PK) 18,750 au PK 21,964 de la ligne n° 195 000 de Fontoy à Audun-le-Tiche, dite " boucle d'Audun " ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de Réseau ferré de France la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La FNAUT soutient que :

- la Société nationale des chemins de fer (SNCF) n'a pas été consultée préalablement à la décision attaquée ;

- le dossier de consultation, qui omet de mentionner certaines données essentielles et comporte des informations manifestement inexactes, n'a pas mis la région Lorraine en mesure d'émettre son avis de manière suffisamment éclairée sur le projet de fermeture de la section de ligne ;

- l'avis relatif au projet de fermeture de la section de ligne publié dans le journal " Ville, Rail et Transport " du 17 juin 2009, qui mentionne des informations inexactes, n'a pas mis les entreprises ferroviaires à même de communiquer leurs observations en toute connaissance de cause sur le projet de fermeture de la section de ligne ;

- RFF a méconnu l'étendue de sa compétence dans la mesure où la fermeture de la section de ligne a été décidée en vue de la réalisation de la nouvelle desserte routière déclarée d'utilité publique ;

- la décision prononçant la fermeture de la section de ligne est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation notamment au regard du solide potentiel de cette ligne en cas de remise en service, de la compatibilité du projet routier avec le maintien de la ligne et de la circonstance que les acteurs consultés sur le projet de fermeture ont été induits en erreur ;

- RFF a commis un détournement de pouvoir dès lors que la fermeture de la section de ligne a été décidée dans le seul but de réaliser l'axe routier déclaré d'utilité publique qui traverse la section de ligne en deux endroits ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance du 24 avril 2012 fixant la clôture de l'instruction le 29 mai 2012 à 16H00 ;

Vu le mémoire en défense, en date du 23 mai 2012, présenté par Réseau ferré de France dont le siège est 92 avenue de France à Paris cedex 13 (75648), représenté par son président, par la SCP d'avocats Ancel Couturier; RFF conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la FNAUT la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

RFF soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable dès lors que la FNAUT n'a pas satisfait à l'invitation qui lui avait été faite par le tribunal administratif de produire la décision dont elle demandait l'annulation dans le délai imparti de quinze jours ; l'édiction de la décision du 26 novembre 2009 n'a pas eu pour effet de régulariser les écritures initiales de la FNAUT du 24 juillet 2009 ; ses nouvelles écritures enregistrées le 24 juillet 2010 étaient tardives ;

- le dossier de consultation de la région Lorraine est suffisant dès lors qu'il mentionne le sens de l'avis de la SNCF de 2003, que la SNCF a été consultée en qualité d'entreprise ferroviaire via la publication de l'avis de fermeture dans la revue professionnelle " Ville, rail et transports " du 17 juin 2009, que le dossier de consultation envisage les possibilités de trafic sur la ligne du point de vue démographique, économique et des infrastructures de transports existantes et que la FNAUT ne peut utilement discuter de la faisabilité technique du nouveau tronçon Belval-Audun-le-Tiche ;

- l'avis de projet de fermeture publié dans une revue professionnelle, qui invite les entreprises ferroviaires à se rapprocher de RFF pour obtenir des informations complémentaires, puis à faire connaître leurs observations éventuelles sur le projet de fermeture, est suffisant ;

- RFF ne s'est pas considéré en situation de compétence liée au regard de la déclaration d'utilité publique routière ;

- aucune demande sérieuse n'a été formulée en vue de réactiver la ligne Fontoy-Audun-le-Tiche qui ne présente aucune perspective sérieuse de reprise de trafic en particulier parce qu'elle ne dessert pas le secteur de Belval ; seule la fermeture de la dernière portion de ligne a été décidée ; RFF a préservé la possibilité de réaliser un tronçon permettant de desservir Belval par la ligne de Fontoy à Audun-le-Tiche ; la réalisation du projet routier de la RD 16 n'a été qu'indirectement pris en compte pour décider la fermeture de la " boucle d'Audun " ; RFF n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;

- RFF n'a pas commis de détournement de pouvoir dès lors que la finalité principale poursuivie par le projet de fermeture est inhérente aux intérêts qu'il a en charge, à savoir la revitalisation du réseau ferroviaire par la fermeture des portions de lignes pour lesquelles aucune perspective sérieuse d'avenir n'existe ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 97-135 du 13 février 1997 portant création de l'établissement public " Réseau ferré de France " en vue du renouveau du transport ferroviaire dans sa version alors en vigueur ;

Vu le décret n° 97-444 du 5 mai 1997 relatif aux missions et aux statuts de Réseau ferré de France dans sa version alors en vigueur ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2012 :

- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par Réseau Ferré de France :

Sur la régularité du jugement :

Considérant que si la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS D'USAGERS DES TRANSPORTS (FNAUT) soutient que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, soulevé dans son mémoire enregistré le 5 juillet 2011, tiré de ce que Réseau Ferré de France (RFF) s'est cru, à tort, en situation de compétence liée au regard du projet routier déclaré d'utilité publique, il ne ressort pas de ses écritures de première instance qu'un tel moyen ait été invoqué ; que, par suite, le jugement attaqué n'est entaché ni d'omission à statuer ni d'insuffisance de motivation ;

Sur la légalité de la décision du 26 novembre 2009 portant fermeture de la " boucle d'Audun " :

En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article 22 du décret susvisé du 5 mai 1997 dans sa version alors en vigueur après sa modification par le décret n° 2006-1517 du 4 décembre 2006 : " Lorsque RFF envisage la fermeture d'une ligne ou d'une section de ligne, il soumet le projet de fermeture à la région compétente pour organiser les services ferroviaires régionaux de voyageurs sur la ligne ou la section de ligne en cause ou, le cas échéant, au Syndicat des transports d'Ile-de-France. La région ou le syndicat dispose d'un délai de trois mois pour faire connaître son avis. L'absence de réponse de l'organe délibérant dans ce délai vaut avis favorable. / Parallèlement, RFF publie dans une publication professionnelle du secteur des transports un avis relatif à ce projet de fermeture. Les entreprises ferroviaires, les gestionnaires d'infrastructure de réseaux raccordés ou embranchés et les titulaires de contrat ou de convention prévus aux articles 1er-1 et 1er-2 de la loi du 13 février 1997 susvisée disposent d'un délai de trois mois pour lui faire connaître leurs observations. / Dès l'engagement des consultations, RFF informe de son projet le ministre chargé des transports (...). / Après avoir recueilli les avis et observations mentionnés aux premier et deuxième alinéas et s'il entend poursuivre son projet, RFF adresse au ministre chargé des transports une proposition motivée de fermeture, accompagnée des avis reçus et du bilan des observations recueillies. (...) ";

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'un avis relatif au projet de fermeture de la " boucle d'Audun " a été publié le 17 juin 2009 dans la revue professionnelle " Trains, Ville et Transports " ; qu'il en résulte que la SNCF, qui a été mise en mesure de faire connaître ses observations, a bien été consultée sur le projet ;

Considérant, en deuxième lieu, que le dossier de consultation de 37 pages réalisé par RFF retrace dans sa première partie l'historique de la ligne n° 195 000 ainsi que sa situation actuelle au regard de la suppression du trafic de voyageurs depuis 1949 et du trafic de fret depuis 1996 et décrit la section terminale de cette ligne, seule concernée par le projet de fermeture ; que la deuxième partie analyse la situation socio-économique et les dynamiques territoriales du périmètre d'étude concerné, notamment au regard de l'offre de transports existante , que la troisième partie, d'une part, décrit le projet routier RD16 prévoyant l'utilisation de la section de ligne en deux endroits, d'autre part, envisage la possibilité d'un nouveau tronçon de voie ferrée reliant le viaduc d'Audun-le-Tiche au secteur de Belval ; que le protocole d'accord foncier conclu le 7 mai 2009 entre l'Etat, RFF et l'Etablissement public foncier de Lorraine pour préserver la possibilité de réaliser ce tronçon de voie ferrée est annexé ; que RFF n'était pas tenu de communiquer à la région Lorraine les motifs de l'avis défavorable émis par la SNCF en 2003, rendu au titre d'une précédente procédure de fermeture portant sur la totalité de la ligne n° 195 000 et dont le sens est, par ailleurs, indiqué dans le dossier de consultation à la rubrique dédiée à la présentation de la ligne ; qu'enfin, et contrairement à ce que soutient la FNAUT, le dossier de consultation soumis à la région Lorraine n'indique pas que des affaissements miniers sont à l'origine du projet de fermeture de la section de ligne ; qu'ainsi la FNAUT n'est pas fondée à soutenir que le dossier de consultation était incomplet ou présentait le projet de manière à induire en erreur la région Lorraine ;

Considérant, en troisième lieu, que l'avis paru dans la revue " Trains, Ville et Transports " du 17 juin 2009 indiquait précisément la section de ligne visée par le projet de fermeture, en exposait les motifs et invitait les entreprises ferroviaires à s'adresser, le cas échéant, à la direction régionale de RFF pour obtenir de plus amples informations sur ce projet ; que, dans ces conditions, cet avis était suffisant pour permettre aux entreprises ferroviaires de faire valoir leurs éventuelles observations ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la FNAUT n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige est entachée d'un vice de procédure ;

En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :

Considérant, en premier lieu, que pour décider la fermeture de la section de ligne dite " boucle d'Audun ", RFF s'est appuyé sur la suppression du trafic de voyageurs et de fret et l'absence de toute perspective d'une nouvelle utilisation de la section de ligne ; que par suite le moyen tiré de ce que RFF aurait méconnu l'étendue de sa compétence en agissant en situation de compétence liée au regard du projet routier RD16 reconnu d'utilité publique ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que RFF, après avoir pris en compte l'augmentation du trafic transfrontalier de voyageurs et le projet de développement d'une zone d'aménagement différé à Belval, a, pour autant, écarté toute perspective de réutilisation de la " boucle d'Audun " compte tenu de la suppression du trafic de voyageurs depuis 1949 sur cette portion de ligne, de la possibilité de desservir Belval par la ligne de Fontoy à Audun-le-Tiche via un nouveau tronçon à construire, enfin du projet routier de la RD16 ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que RFF, en décidant la fermeture de la " boucle d'Audun ", aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en dernier lieu, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la FNAUT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de RFF, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la FNAUT, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la FNAUT la somme demandée par RFF, au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la FNAUT est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par RFF tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS D'USAGERS DES TRANSPORTS et à Réseau Ferré de France.

''

''

''

''

2

N°11NC01906


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01906
Date de la décision : 05/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

65-01-005 Transports. Transports ferroviaires. Lignes de chemin de fer.


Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : BUSSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-06-05;11nc01906 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award