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04/06/2012 | FRANCE | N°11NC01981

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 04 juin 2012, 11NC01981


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 décembre 2011 sous le n° 11NC01981 présentée pour M. Arsen A, demeurant CADA 12 cour Pablo Picasso Appt. 31 BP 74 à Saint-André-les-Vergers Cedex (10120), par Me Wendling, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101769 du 1er décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 septembre 2011, par lequel le préfet de l'Aube a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire

français et a fixé l'Arménie comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler pour ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 décembre 2011 sous le n° 11NC01981 présentée pour M. Arsen A, demeurant CADA 12 cour Pablo Picasso Appt. 31 BP 74 à Saint-André-les-Vergers Cedex (10120), par Me Wendling, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101769 du 1er décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 septembre 2011, par lequel le préfet de l'Aube a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Arménie comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs dès lors que les juges considèrent qu'en dépit de la nationalité azerbaidjanaise de son épouse, ils peuvent retourner vivre en Arménie ;

- le préfet de l'Aube en ne tenant pas compte de sa demande d'admission pour des motifs exceptionnels, n'a pas examiné sa situation personnelle ;

- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé car le préfet n'a pas examiné la situation personnelle de son épouse ni la scolarisation de ses enfants;

- il justifie de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- un conflit entre l'Arménie, son pays d'origine, et l'Azerbaïdjan, celui de son épouse, ne permet pas leur installation commune dans l'un ou l'autre de ces Etats ce qui conduirait à l'éclatement de la cellule familiale ; un tel retour entraînerait porterait atteinte à l'intérêt supérieur de leurs enfants ;

- la poursuite d'une vie familiale normale ne peut se faire que sur le territoire français ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe de la Cour le 8 mars 2012, présenté par le préfet de l'Aube qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- il a pris en compte la situation personnelle du requérant ;

- aucune des pièces du dossier ne permet de démontrer l'impossibilité pour le couple de retourner en Arménie ;

- sa décision fixant le pays de destination n'impose au requérant aucun pays de renvoi ;

- M. A et son épouse ne remplissent pas les conditions prévues par l'article L. 313-14 du CESEDA pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa demande, de prononcer ses conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 2012 :

- le rapport de Mme Rousselle, président ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

Considérant en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour vise les textes dont elle fait application ; que, par cette décision qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et qui est motivée conformément aux exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, le préfet s'est livré à un examen approfondi de la situation de M. A ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du CESEDA : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; que l'article L. 313-14 précité permet la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " sur le fondement du troisième alinéa de l'article L. 313-10 du même code, qui limite le champ de l'admission exceptionnelle à cette carte de séjour aux cas dans lesquels cette admission est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste annexée à l'arrêté des ministres chargés de l'emploi et de l'immigration du 18 janvier 2008 ; qu'en application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier si la situation personnelle de l'étranger peut constituer un motif exceptionnel d'admission au séjour ;

Considérant que si M. A fait valoir qu'il réside depuis 2007 en France avec sa famille, composée de son épouse et de ses deux enfants, il ressort des pièces du dossier que son épouse fait également l'objet d'une mesure d'éloignement et que la scolarisation de ses deux enfants en France est très récente, comme l'attestent les certificats de scolarités datés de février 2011 ; que, dans ces conditions, la situation personnelle et familiale ne saurait constituer, à elle seule, un motif exceptionnel d'admission au séjour ; que si, par ailleurs, M. A soutient qu'il dispose d'une promesse d'embauche à mi-temps en qualité de mécanicien, cet emploi ne figure pas sur la liste des métiers en tension annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 susvisée ; que dès lors, le préfet de l'Aube n'a commis ni erreur de faits ni de droit en rejetant la demande de régularisation présentée par l'intéressé sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du CESEDA ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance... " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du CESEDA dans sa rédaction alors en vigueur: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France (...) sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

Considérant que M. A, ressortissant arménien né en 1961, est entré irrégulièrement en France en avril 2007, accompagné de ses deux enfants nés en Arménie en 2002 et 2004 et de sa femme née en 1963, en vue de demander l'asile ; qu'il fait valoir que ses deux enfants sont scolarisés et qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que les demandes d'asile de M. et Mme A ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 octobre 2007 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 24 mars 2009 ; que le requérant, entré récemment en France a vécu la majeure partie de son existence dans son pays d'origine où il n'est pas dépourvu d'attaches familiales ; que, dès lors, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un refus de séjour, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que la décision portant refus de séjour n'a pas en elle-même pour effet de séparer les enfants, âgés de 7 et 9 ans à la date de la décision attaquée, de leurs parents ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ", et qu'aux termes de l'article L. 513-2 du CESEDA : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ;

Considérant que si M. A soutient que sa vie serait menacée en cas de retour en Arménie du fait qu'il soutient être issu d'un couple mixte azéri-arménien alors que son épouse est dans la même situation, il n'établit pas l'existence d'un risque personnel et actuel en cas de retour en Arménie, pas plus qu'il ne justifie de l'existence d'un tel risque en cas de retour en Azerbaïdjan, alors que, par leurs décisions des 30 octobre 2007 et du 24 mars 2009 l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ont considéré comme non établies les allégations de l'intéressé quant au risque encouru en cas de retour en Arménie ; que, dès lors, les conclusions de M. A tendant à l'annulation de la décision de fixation du pays de renvoi doivent être également rejetées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché de contradiction de motifs, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Aube en date du 6 septembre 2011 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, font obstacle à la condamnation de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au versement au conseil de M. A de la somme qu'il demande au titre desdites dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Arsen A et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Aube.

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11NC01981


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01981
Date de la décision : 04/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : WENDLING

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-06-04;11nc01981 ?
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