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24/05/2012 | FRANCE | N°10NC01556

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 24 mai 2012, 10NC01556


Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2010, présentée pour la COMMUNE DE CORNIMONT, représentée par son maire en exercice, par Me Sevino ;

La COMMUNE DE CORNIMONT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801016 du 29 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à condamner le département des Vosges à l'indemniser des préjudices moral et financier qu'elle estime avoir subis en raison, d'une part, du refus du président du conseil général des Vosges de transmettre diverses demandes de subventions à l'assemblée

départementale ou de les inscrire à son ordre du jour, d'autre part, de l'insc...

Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2010, présentée pour la COMMUNE DE CORNIMONT, représentée par son maire en exercice, par Me Sevino ;

La COMMUNE DE CORNIMONT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801016 du 29 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à condamner le département des Vosges à l'indemniser des préjudices moral et financier qu'elle estime avoir subis en raison, d'une part, du refus du président du conseil général des Vosges de transmettre diverses demandes de subventions à l'assemblée départementale ou de les inscrire à son ordre du jour, d'autre part, de l'inscription tardive à l'ordre du jour de ces demandes, et, enfin, de l'attitude vexatoire du président du conseil général à son égard ;

2°) de condamner le département des Vosges à lui verser une somme de 102 497,44 euros en réparation de son préjudice ;

5°) de mettre à la charge de le département des Vosges la somme de 4 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier : il ne contient pas les visas requis, notamment la mention des mémoires échangés durant l'instruction et de la note en délibéré produite par la commune le 16 octobre 2009 ; le tribunal n'a pas statué sur les moyens relatifs à la faute commise par le département et à l'incompétence de l'auteur des décisions en cause ;

- le département a commis plusieurs fautes : il a violé le principe de libre administration des collectivités territoriales et commis un détournement de pouvoir en attribuant des subventions aux communes en fonction de leur orientation politique et de leur adhésion à la politique menée par le département ; l'auteur des décisions litigieuses était incompétent, le département ayant méconnu la compétence de la commission permanente en matière d'instruction des demandes de subvention ; le département a violé le principe d'égalité, car il a accordé des subventions à des communes dont le potentiel fiscal était supérieur à celui de la commune requérante ; il a commis une erreur sur la matérialité des faits invoqués pour justifier les décisions de refus d'instruire les demandes de subventions ou de refus de les octroyer ;

- la responsabilité du département est engagée, même sans faute, sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques ;

- elle justifie d'une chance sérieuse d'obtenir les subventions sollicitées ;

- son préjudice résulte du refus du président du conseil général de soumettre à l'examen de la commission permanente du département différentes demandes de subventions, formées entre 2003 et 2006, afférentes à des opérations d'investissement en matière d'équipements publics et de voirie, de la décision de soumettre ces demandes à l'examen de la commission permanente à une date où les crédits ouverts au titre des aides aux communes étaient épuisés, et, enfin, de l'attitude vexatoire du président du conseil général à son égard ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2011, présenté pour le département des Vosges, représenté par son président en exercice, par Me de Guillenchmidt, qui conclut au rejet de la requête de la COMMUNE DE CORNIMONT et à ce que soit mise à la charge de la commune une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

- la commune requérante ne peut, sans méconnaître la portée de l'autorité de chose jugée par le Tribunal administratif de Nancy le 6 novembre 2007, utilement invoquer au soutien de sa demande, le caractère fautif des décisions de 2003 à 2006, qui n'existent plus ;

- le jugement est régulier ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 19 août 2011, présenté pour la COMMUNE DE CORNIMONT, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu les mémoires en duplique, enregistrés les 27 février et 26 avril 2012, présentés pour le département des Vosges, qui conclut dans le sens de ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la note en délibéré produite le 4 mai 2012 pour la COMMUNE DE CORNIMONT ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2012 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dulmet, rapporteur public,

- et les observations de Me Sevino, avocat de la COMMUNE DE CORNIMONT, et de Me Ragot pour Me de Guillenchmidt, avocat du département des Vosges ;

Considérant que la COMMUNE DE CORNIMONT demande à la Cour d'annuler le jugement du 29 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à condamner le département des Vosges à l'indemniser des préjudices moral et financier qu'elle estime avoir subis en raison, d'une part, du refus du président du conseil général des Vosges de transmettre diverses demandes de subventions à l'assemblée départementale ou de les inscrire à son ordre du jour, d'autre part, de l'inscription tardive à l'ordre du jour de ces demandes, et, enfin, de l'attitude vexatoire du président du conseil général à son égard ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. Mention y est faite que le rapporteur et le rapporteur public et, s'il y a lieu, les parties, leurs mandataires ou défenseurs ainsi que toute personne entendue sur décision du président en vertu du deuxième alinéa de l'article R.731-3 ont été entendus. Mention est également faite de la production d'une note en délibéré. La décision fait apparaître la date de l'audience et la date à laquelle elle a été prononcée " ; que si la commune requérante soutient que le jugement attaqué ne vise pas les mémoires échangés durant l'instruction et la note en délibéré produite par la commune le 16 octobre 2009, le moyen manque en fait, dès lors qu'il résulte de la lecture de la minute dudit jugement qu'elle vises les mémoires échangés par les parties, ainsi que la note en délibéré produite par la COMMUNE DE CORNIMONT ;

Considérant, en second lieu, que la COMMUNE DE CORNIMONT ne saurait utilement soutenir que le tribunal administratif n'a pas statué sur les moyens relatifs aux fautes commise par le département, dès lors que les premiers juges ont choisi, ainsi qu'ils étaient fondés à le faire, de rejeter les conclusions indemnitaires de la requérante pour absence de préjudice certain ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE CORNIMONT n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularités de nature à entraîner son annulation ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de chose jugée soulevée en première instance par le département des Vosges ;

En ce qui concerne la perte de chance d'obtenir les subventions demandées :

Considérant que l'attribution d'une subvention par une personne publique crée des droits au profit de son bénéficiaire ; que, toutefois, de tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu'elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d'octroi, qu'elles aient fait l'objet d'une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu'elles découlent implicitement mais nécessairement de l'objet même de la subvention ; que l'attribution d'une subvention ne peut se faire que dans la limite des crédits ouverts à cette fin ; que le bénéficiaire potentiel d'une subvention est en droit de demander l'indemnisation du préjudice correspondant à la perte d'une chance sérieuse de recevoir la participation en cause ;

Considérant que, si la COMMUNE DE CORNIMONT soutient qu'elle justifie d'une chance sérieuse d'obtenir les subventions sollicitées, dès lors que ses demandes répondaient aux critères posés par le département et spécifiés dans un guide intitulé " les aides directes du conseil général aux collectivités locales ", lequel énonce les conditions d'octroi des subventions départementales et fixe les taux et montants maximaux auxquels elles peuvent être accordées, la procédure régissant les aides directes versées aux communes par le département, retracée dans ledit guide, n'a pas, ainsi que l'ont souligné à bon droit les premiers juges, pour objet et pour effet de conférer aux communes remplissant les conditions qu'il énonce le bénéfice de plein droit d'une subvention départementale, ce bénéfice restant en tout état de cause subordonné, en vertu d'une délibération du 1er avril 2004 de l'assemblée délibérante du conseil général des Vosges, à une décision de la commission permanente, laquelle se prononce en fonction de l'intérêt départemental des projets présentés par les communes ; qu'à les supposer avérées, les circonstances que les projets de la commune requérante répondaient aux priorités du département en matière d'emploi et que d'autres communes, au potentiel fiscal plus élevé, ont bénéficié des subventions qu'elles sollicitaient, ne sont pas de nature à établir que ses projets présentaient un intérêt départemental supérieur ou égal à celui des projets ayant fait l'objet d'une subvention départementale, l'action en faveur de l'emploi et le potentiel fiscal des communes ne constituant pas les seuls critères d'octroi des subventions du département ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que la commune requérante n'apportait pas la preuve de ce qu'elle aurait perdu une chance sérieuse de bénéficier des subventions demandées au département des Vosges ;

En ce qui concerne les préjudices allégués :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, la commune requérante n'établit pas avoir disposé d'une chance sérieuse de voir ses demandes de subventions satisfaites ; que, dès lors, elle ne peut pas prétendre à une indemnisation au titre du préjudice financier prétendument causé par la prise en compte tardive desdites demandes ;

Considérant que la commune requérante n'établit pas avoir subi un préjudice moral à raison du refus du président du conseil général des Vosges de transmettre en temps utile ses demandes de subventions à la commission permanente compétente ; que, pour regrettables qu'ils soient, les propos polémiques et vexatoires du président du conseil général des Vosges, stigmatisant notamment l'attitude du maire de la COMMUNE DE CORNIMONT, à l'occasion de déclarations ainsi que dans des courriers adressés à de nombreuses personnes ou associations, n'ont pas causé de préjudice propre à la commune ;

Considérant que la commune requérante n'est pas fondée, ainsi que l'ont souligné à bon droit les premiers juges, à demander réparation de la privation de jouissance des ouvrages pour lesquels elle avait sollicité des subventions ou de la dangerosité résultant de ce que ces ouvrages n'auraient pu être rénovés ou aménagés en temps utile, de tels dommages n'étant pas, à les supposer établis, la conséquence directe des agissements du département des Vosges ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE CORNIMONT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département des Vosges, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la COMMUNE DE CORNIMONT demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE CORNIMONT une somme de 1 500 euros à verser au département des Vosges au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE CORNIMONT est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE CORNIMONT versera au département des Vosges une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE CORNIMONT et au département des Vosges.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2012, à laquelle siégeaient :

- M. Laurent, président de chambre,

- M. Trottier, président,

- M. Favret, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 mai 2012.

Le rapporteur, Le président,

Signé : J.-M. FAVRET Signé : C. LAURENT

Le greffier,

Signé : J. CHAPOTOT

La République mande et ordonne au préfet des Vosges, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

J. CHAPOTOT

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10NC01556


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC01556
Date de la décision : 24/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-03-04-03-04 Collectivités territoriales. Département. Finances départementales. Recettes. Subventions.


Composition du Tribunal
Président : M. LAURENT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: Mme DULMET
Avocat(s) : CABINET DELSOL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-05-24;10nc01556 ?
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