Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2011, complété par des mémoires enregistrés les 14 et 22 mars 2012, présentée pour la COMMUNE D'ESCHERANGE, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération en date du 26 juillet 2011 et domicilié en cette qualité à l'hôtel de ville, 11 rue des Ecoles à Escherange (57330), par M § R, avocat ;
La COMMUNE D'ESCHERANGE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800734 du 17 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé, à la demande de M. A, l'arrêté en date du 17 décembre 2007 par lequel le maire de la commune d'Escherange a refusé de lui délivrer un permis de construire un immeuble de seize logements ;
2°) de rejeter la demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;
3°) de mettre à la charge de M. A la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La COMMUNE D'ESCHERANGE soutient que le Tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation en sanctionnant le refus du maire sur le fondement des dispositions de l'article UB3 du règlement du POS relatif à la desserte des constructions, ainsi que des prescriptions de l'article UB 11 du règlement du plan d'occupation des sols ; elle soutient que la décision de refus de permis de construire est légale par substitution de motifs, dès lors que la bande de cinq mètres située entre la limite de l'alignement des places de stationnement aérien et la route départementale fait l'objet d'un aménagement sur le domaine public routier, et ce sans autorisation, en méconnaissance de l'article R. 111-1-2 du code de l'urbanisme ; que les dispositions de l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme ont été également méconnues ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 janvier 2012, complété par des mémoires enregistrés les 16 et 23 mars 2012, présenté pour M. Jean-Georges A, demeurant ..., par Me De Zolt, avocat ;
Il conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la COMMUNE D'ESCHERANGE au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la requête est irrecevable, faute d'habilitation du maire à ester en justice ;
- l'accès et la desserte de la construction sont conformes au plan d'occupation des sols ;
- le projet respecte les prescriptions posées par l'article UB 11 du plan d'occupation des sols ;
- le fondement juridique de la décision est l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme ;
- le projet est circonscrit à la limite de la parcelle et n'empiète pas sur le domaine public ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le courrier en date du 6 mars 2012 informant les parties, conformément à l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public, à savoir "inapplication en l'espèce de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction citée par les parties, modifiée par le décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007, entré en vigueur le 1er octobre 2007, soit antérieurement à la décision attaquée" ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2012 :
- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur,
- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,
- et les observations de Me Schmitt, avocat de la COMMUNE D'ESCHERANGE, ainsi que celles de Me Ponseele, avocat de M. A ;
Vu, enregistrées les 30 mars 2012, les notes en délibéré présentées respectivement pour la COMMUNE D'ESCHERANGE et pour M. A ;
Vu, enregistrée le 3 avril 2012, le mémoire présenté pour la COMMUNE D'ESCHERANGE tendant à la réouverture des débats ;
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non recevoir opposée à la requête ;
Sur les motifs d'annulation retenus par le Tribunal administratif :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme dans sa version alors en vigueur, demeurant applicable en l'espèce, dès lors qu'en vertu de l'article 26 du décret n°2007-18 du 5 janvier 2007, modifié par l'article 4 du décret n°2007-817 du 11 mai 2007, les demandes de permis de construire déposées avant le 1er octobre 2007 demeurent soumises aux règles en vigueur à la date de leur dépôt, le permis de construire : " peut également être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de nature et de l'intensité du trafic " ; qu'aux termes de l'article UB 3 du règlement du plan d'occupation des sols de la COMMUNE D'ESCHERANGE : " I- Voirie. 1. Pour être constructible, un terrain doit être desservi par une voie (publique ou privée) de caractéristiques proportionnées à l'importance de l'occupation ou de l'utilisation des sols envisagée. (...) 4. Limitation des accès sur la RD 58 : interdiction d'accès individuel nouveau ou de modification d'accès existant sur cette voie dans la section hors agglomération. " ;
Considérant que le projet de construction présenté par M. A porte sur l'édification d'un immeuble de 16 logements sur un terrain sis rue Principale à Molvange-Escherange, à l'entrée de la commune et limité par la rue Principale (RD 58) et le ruisseau des quatre moulins, sur un terrain intégré en zone UB, zone d'extension urbaine de la commune ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet comporte la création de 14 places de stationnement en sous sol avec sortie sur la route départementale 58 au moyen d'une rampe d'accès, et de 18 places de stationnement en bordure de la route départementale 58 ; que si la COMMUNE D'ESCHERANGE soutient que la circulation générée par ledit immeuble sera source d'insécurité pour les piétons et les automobilistes, il ressort des documents graphiques produits que la visibilité n'est pas affectée par ladite implantation, que l'accès à la voie publique ne peut être regardé comme présentant un risque pour les usagers dès lors que le plan masse fait ressortir une marge de recul de cinq mètres par rapport à la chaussée, et qu'au surplus, la densité alléguée du trafic n'est corroborée par aucune pièce du dossier ; que, par suite, c'est à juste titre que, pour annuler l'arrêté en date du 17 décembre 2007 du maire de la COMMUNE D'ESCHERANGE refusant à M. A la délivrance du permis de construire sollicité, le Tribunal administratif de Strasbourg a estimé que le maire avait fait une inexacte application desdites dispositions ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ; qu'aux termes de l'article UB11 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune d'Escherange : " Les constructions et leurs extensions, ainsi que les éléments d'accompagnement (clôture, garage,...) ne doivent pas porter atteinte au caractère des lieux avoisinants, aux sites et aux paysages urbains notamment en ce qui concerne : - le volume et la toiture,- Les matériaux, l'aspect et la couleur,- les éléments de façade, tels que percements et balcons,- l'adaptation au sol. " ;
Considérant que si le maire de la COMMUNE d'ESCHERANGE a rejeté la demande de permis de construire sollicité par M. A aux motifs que " par son volume considérable (16 logements), ce projet est en rupture totale avec le type et la volumétrie des constructions avoisinantes ; les balcons, terrasses, loggias animant les façades ne permettant pas l'intégration de ce projet dans le contexte architectural local et environnant ; les toitures ponctuées de lucarnes massives dénotent complètement avec le traitement et la morphologie des toitures existantes dans le village ; le projet par sa taille, sa volumétrie, le traitement architectural des façades correspond plutôt à l'image d'un immeuble de ville en contradiction avec l'échelle urbaine du quartier et l'identité rurale du village et risque de remettre en cause l'équilibre et la cohérence du paysage bâti à l'entrée de la commune ", il ressort des pièces du dossier que les lieux avoisinants de la construction ne présentent aucun caractère ou intérêt particulier, que la commune ne présente pas d'unité ou de qualité architecturale, et que la construction litigieuse ne remet pas en cause l'équilibre et la cohérence du paysage bâti à l'entrée de la commune ; que, par suite, c'est à juste titre que, pour annuler l'arrêté en date du 17 décembre 2007 du maire de la COMMUNE D'ESCHERANGE refusant à M. A la délivrance du permis de construire sollicité, le Tribunal administratif de Strasbourg a estimé que le maire avait fait une inexacte application desdites dispositions ;
Sur la substitution de motifs demandée :
Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;
Considérant que pour établir que la décision attaquée était légale, la COMMUNE D'ESCHERANGE soutient que le projet méconnaît aussi les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur, aux termes desquelles : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations " ; que si elle soutient que la bande de cinq mètres située entre la limite de l'alignement des places de stationnement aérien et la route départementale fait l'objet d'un aménagement sur le domaine public routier, et ce sans autorisation, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet porte aménagement du domaine public et présente un risque pour la sécurité publique ; que par suite, la substitution de motifs demandée doit être écartée ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme en tant que le dossier ne comporterait pas mention de l'autorisation du département de la Moselle de réaliser un tel aménagement doit ainsi, en tout état de cause, être également écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la COMMUNE D'ESCHERANGE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 17 mai 2011, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé, à la demande de M. A, l'arrêté en date du 17 décembre 2007 par lequel le maire de la commune d'Escherange a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue d'édifier un immeuble de seize logements ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au versement de sommes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE D'ESCHERANGE le versement à M. A d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE D'ESCHERANGE est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE D'ESCHERANGE versera à M. A une somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE D'ESCHERANGE et à M. A.
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