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22/02/2012 | FRANCE | N°10NC00404

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 22 février 2012, 10NC00404


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 18 mars 2010, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900566 du 17 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a accordé à M. Patrice A et à Mme B-A, son épouse, la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de remettre les impositions contestées à la charge de M. et Mme A à concurrence des d

charges prononcées en première instance ;

Il soutient que :

- les redressements con...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 18 mars 2010, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900566 du 17 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a accordé à M. Patrice A et à Mme B-A, son épouse, la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de remettre les impositions contestées à la charge de M. et Mme A à concurrence des décharges prononcées en première instance ;

Il soutient que :

- les redressements contestés sont fondés sur de simples notes prises par le vérificateur au cours des investigations qu'il a menées au sein des entreprises dirigées par M. A et que de telles notes ne constituent pas un document soumis à l'obligation de communication en application de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- qu'il se réfère à ses écritures de première instance en ce qui concerne l'effet dévolutif de l'appel ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure de produire un mémoire en défense, adressée le 30 mars 2011 à M. A et à Mme B ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 2011 décidant que l'instruction serait close à compter du 30 novembre 2011 ;

Vu l'ordonnance du 26 janvier 2012 prononçant la réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2012, présenté pour M. et Mme A, demeurant ..., par Me Freulet, avocat ;

M. et Mme A concluent au rejet du recours et à la condamnation de l'Etat à leur verser une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- que, contrairement à ce que soutient l'administration, les redressements en cause ont été établis, non à la suite des seules vérifications de comptabilité des sociétés ALTP et Henri A, mais également à la faveur de l'exercice par l'administration, à l'occasion de ces vérifications de comptabilité, de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, qui avait ordonné la saisie de toutes les pièces comptables des deux sociétés ; qu'en n'informant pas M. et Mme A de l'exercice de ce droit de communication, ni de la teneur des renseignements ainsi obtenus, ni de ce qu'ils pouvaient avoir accès au dossier pénal en sollicitant l'autorisation du juge d'instruction et ne leur communiquant pas les copies des informations ainsi obtenues de tiers, le service a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et le principe général des droits de la défense ;

- que pour les mêmes raisons, la société ALTP a été privée du bénéfice d'un examen oral et contradictoire dans le cadre de la vérification de sa comptabilité ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 février 2012 :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : "L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande." ; que l'obligation faite à l'administration de tenir à la disposition du contribuable qui le demande avant la mise en recouvrement des impositions les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux redressements ne peut porter que sur les documents originaux ou les copies de ces documents effectivement détenus par les services fiscaux ;

Considérant que les redressements en litige dont ont fait l'objet M. et Mme A dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2003 et 2004, sont la conséquence des redressements assignés à la suite de vérifications de comptabilité, d'une part, à la SARL ALTP, dont M. A était le gérant et Mme A une des salariées et, d'autre part, à la SAS A Henri dans laquelle M. A avait la qualité de dirigeant, à raison de dépenses regardées comme exposées par ces deux sociétés dans l'intérêt de M. et Mme A ; que le Tribunal administratif de Nancy a déchargé les contribuables de l'intégralité des impositions correspondantes au motif que l'administration ne leur avait transmis, malgré leur demande du 16 novembre 2006, que les documents obtenus auprès de France Télécom et de La Poste à la suite de l'exercice de son droit de communication et non l'ensemble des documents sur lesquels elle s'était fondée pour établir les impositions en litige ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction et notamment des termes de la proposition de rectification adressée à M. et Mme A, ni d'aucun autre document, que l'administration aurait utilisé, pour établir les redressements litigieux, des documents originaux ou des copies qu'elle aurait détenus, à l'exception de ceux qu'elle avait obtenus de France Télécom et de La Poste à la suite de l'exercice de son droit de communication et qu'elle a communiqués aux contribuables ; qu'en particulier, le service n'avait pas l'obligation de communiquer les pièces comptables et justificatifs qu'il a consultés au cours de la vérification de comptabilité des sociétés ALTP et A Henri, dont rien n'indique qu'il en avait pris copie ; qu'ainsi, les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, ni en tout état de cause le principe général des droits de la défense, n'ont pas été méconnus ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nancy s'est fondé sur la violation de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales pour décharger M. et Mme A des impositions en litige ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Nancy et devant la Cour ;

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : "1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices." ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : "Sont notamment considérés comme revenus distribués : ... / c. Les rémunérations et avantages occultes" ;

Considérant, en premier lieu, que les remboursements de frais notamment de déplacement, de repas et d'aménagement d'un bar exposés par les sociétés ALTP et A Henri au bénéfice de M. et Mme A, étaient dépourvus de toutes justifications précises ; que M. et Mme A n'établissent pas, en se bornant à faire valoir qu'ils auraient apporté tous éléments au cours de la procédure contentieuse, alors qu'ils n'ont pas produit de pièces justificatives, que les sociétés n'auraient pas engagé ces dépenses dans leur intérêt ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qu'elle pouvait soumettre dans leur totalité ces sommes à l'impôt sur le revenu au nom de M. et Mme A ; qu'il est constant que les avantages en nature ainsi accordés n'ont pas été déclarés en tant que tels, conformément aux dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts ; qu'ainsi et sans qu'il soit besoin de rechercher si ces avantages ont eu pour effet de porter la rémunération globale de M. A à un niveau excessif, c'est à bon droit que le service les a regardés comme des avantages occultes au sens de l'article 111 du code général des impôts et les a imposés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des pièces jointes au dossier et des déclarations de M. et Mme A au cours de la procédure de vérification de comptabilité, que deux des quads acquis par la société ALTP ont été mis à la disposition exclusive et privative des intéressés ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que les dépenses relatives à l'acquisition de ces deux véhicules n'ont pas été engagées dans l'intérêt de la société ; que, de même, l'administration apporte la preuve que deux quads ont été vendus quelques mois après leur achat par la société ALTP à Mme A et au fils de M. A, à des prix très inférieurs à la valeur vénale et même à leur valeur d'acquisition ; que c'est à bon droit que l'administration a réintégré la différence entre le prix de vente et la valeur vénale de ces quads dans les montants imposables des contribuables ;

Considérant, enfin, que M. et Mme A ne peuvent utilement invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le paragraphe 10 de l'instruction 4-J-1213, dans les prévisions duquel ils n'entrent pas, dès lors que les redressements contestés n'ont pas été établis au titre de suppléments de salaires tenant à des allocations forfaitaires pour frais de représentation et de déplacement, mais en tant que revenus de capitaux mobiliers ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a déchargé M. et Mme A des impositions en litige ; qu'il n'y a pas lieu de condamner l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, de verser à M. et Mme A la somme qu'ils demandent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy en date du 17 novembre 2009 est annulé.

Article 2 : L'impôt sur le revenu auquel ont été assujettis M. et Mme A au titre des années 2003 et 2004 est remis à leur charge à concurrence de la décharge prononcée en première instance.

Article 3 : Les conclusions de M. et Mme A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Fabrice A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement.

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N°10NC00404


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC00404
Date de la décision : 22/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : SCP RICHARD et MERTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-02-22;10nc00404 ?
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