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09/01/2012 | FRANCE | N°11NC00613

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 09 janvier 2012, 11NC00613


Vu la requête, enregistrée le 14 avril 2011 sous le n° 11NC00613, présentée pour M. David A, demeurant ..., par Me Bourgaux, avocat; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900989 du 15 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 18 662, 84 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de sa requête, correspondant à l'indemnité de départ allouée aux militaires non officiers à laquelle il peut prétendre en application du décr

et n° 91-606, et à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 5 000 eur...

Vu la requête, enregistrée le 14 avril 2011 sous le n° 11NC00613, présentée pour M. David A, demeurant ..., par Me Bourgaux, avocat; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900989 du 15 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 18 662, 84 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de sa requête, correspondant à l'indemnité de départ allouée aux militaires non officiers à laquelle il peut prétendre en application du décret n° 91-606, et à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser au titre de l'indemnité de départ, la somme de 18 662, 84 euros avec intérêts de droit à compter de l'introduction de sa requête, et à titre de dommages et intérêts celle de 5000 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que :

- il remplit les conditions fixées par le décret n° 91-606 du 27 juin 1991 pour bénéficier de l'indemnité de départ et, en tout état de cause, son droit à percevoir cette indemnité peut être fondé sur la faute commise par le bureau d'aide à la reconversion civile dans la gestion de son dossier ;

- sa famille et lui-même ont subi un préjudice à la suite de la rupture de son contrat de travail avec la société qui l'avait recruté ; il a été contraint de solliciter des aides sociales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1erdécembre 2011 présenté par le ministre de la défense ; il conclut au rejet de la requête qui est infondée et fait valoir qu'elle est irrecevable à défaut de saisine préalable de la commission des recours des militaires et ne comporte pas de moyens d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier;

Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972

Vu le décret n° 91-606 27 juin 1991 ;

Vu le code de la défense ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2011 :

- le rapport de Mme Rousselle, président,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me Waeckerle, avocat de M. A ;

Sur les fins de non recevoir opposées par le ministre de la défense :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : I.-Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. /Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. /La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10. ; que l'article R. 4125-2 du même code prévoit que A compter de la notification ou de la publication de l'acte contesté, ou de l'intervention d'une décision implicite de rejet d'une demande, le militaire dispose d'un délai de deux mois pour saisir la commission par lettre recommandée avec avis de réception adressée au secrétariat permanent placé sous l'autorité du président de la commission. /La lettre de saisine de la commission est accompagnée d'une copie de l'acte.(...) /. Si la copie de l'acte ou, dans le cas d'une décision implicite de rejet, la copie de la demande ne sont pas jointes à l'envoi, le secrétariat permanent de la commission met l'intéressé en demeure de la produire dans un délai de deux semaines ; en l'absence de production dans ce délai, l'intéressé est réputé avoir renoncé à son recours. Le président de la commission en dresse le constat et en informe l'intéressé. ; qu'il résulte de ces dispositions qu'à l'exception des matières qu'elles ont entendu écarter expressément de la procédure du recours préalable obligatoire, la saisine de la commission des recours des militaires s'impose à peine d'irrecevabilité de tout recours contentieux, que ce dernier tende à l'annulation d'un acte faisant grief au militaire ou à l'octroi d'indemnités à raison de l'illégalité d'un tel acte ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par décision CTAC-NCY/SOLDE/AP N° 309053 du 7 avril 2008, confirmée par décision CTAC NCY/SOLDE/AP N° 320 465 du 7 août 2008, l'indemnité de départ instituée par le décret du 27 juin 1991 dont il avait sollicité l'attribution le 7 janvier 2008 a été refusée à M. A, brigadier chef au 1er régiment de Tirailleurs d'Epinal ; que l'intéressé ayant saisi la commission des recours des militaires le 16 novembre 2008, le secrétariat de cette commission a rejeté sa demande pour irrecevabilité, par décision du 23 janvier 2009 au motif que malgré une mise en demeure en date du 27 novembre 2008 la décision attaquée n'y avait pas été jointe ;

Considérant qu'il est constant que M. A n'a pas saisi la commission des recours des militaires d'une demande relative à une indemnisation du préjudice résultant d'éventuelles fautes du service commises par son administration qu'il estime à la somme de 5 000 euros ; qu'il en résulte que la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la défense devant les premiers juges doit être accueillie sur ce point ; que M. A n'est, par suite, pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à obtenir la condamnation de l'Etat à lui verser cette somme au titre de dommages et intérêts ;

Considérant, en revanche, que la seule circonstance que la décision CTAC NCY/SOLDE/AP N° 320 465 du 7 août 2008 ait été adressée à un officier chef de corps, alors que son contenu traitait nommément du cas de M. A, qui l'a d'ailleurs reçue et l'avait jointe à son recours, ne pouvait permettre à la commission des recours des militaires, ainsi qu'elle l'a fait, de considérer sa demande comme irrecevable ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient le ministre de la défense, la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Nancy a bien été précédée du recours obligatoire prévu à l'article R. 4125-1 du code de la défense ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir qui y affère ne peut qu'être écartée ;

Sur les conclusions relatives au versement de l'indemnité de départ :

Considérant qu'aux termes de l'article 30-2 de la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires, alors en vigueur : Le militaire (...) sous contrat, quittant définitivement les armées, peut bénéficier, pendant une durée maximum de douze mois consécutifs, de congés de reconversion lui permettant de suivre les actions de formation adaptées à son projet professionnel (...) ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 27 juin 1991 relatif à l'indemnité de départ allouée à certains militaires non officiers, dans sa rédaction issue du décret n° 2003-917 du 19 septembre 2003 : Une indemnité de départ est attribuée aux sous-officiers, officiers mariniers, caporaux-chefs et quartiers-maîtres de 1ère classe engagés, en position d'activité, qui, ayant au moins huit ans et au plus onze ans révolus de services militaires, sont rayés des cadres au terme de leur contrat à la condition que l'autorité militaire ne leur ait pas proposé un nouveau contrat (...) ; qu'il résulte des dispositions précitées que lorsqu'en cours de période d'engagement, un congé de reconversion est accordé au militaire engagé qui, conformément aux dispositions régissant les congés de reconversion, sera rayé des cadres à son issue, son octroi a pour effet de modifier le terme du contrat d'engagement pour le faire coïncider avec la date à laquelle prend fin ce congé ; que l'administration ne peut en conséquence utilement invoquer la date initialement fixée comme terme du contrat d'engagement pour s'opposer au versement de l'indemnité de départ prévue par le décret du 27 juin 1991 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, brigadier chef au 1er régiment de Tirailleurs d' Epinal, sous contrat depuis le 6 janvier 1998, a été placé, à sa demande, en congé de reconversion à compter du 6 novembre 2007 jusqu'au 5 mars 2008, terme initial de son contrat d'engagement ; qu'en raison de son embauche au sein d'une société privée à compter du 25 février 2008, le bureau d'aide à la reconversion civile de la région terre nord-est a fixé, par décision du 8 avril 2008, la date de cessation de ce congé de reconversion au 24 février 2008, date à laquelle il a été radié des cadres ; que cette situation a, par ailleurs, été régularisée par un avenant en date du 29 avril 2008 dûment signé par l'intéressé ; que, par décision du 7 aout 2008, le bénéfice de l'indemnité de départ prévue par le décret du 27 juin 1991 lui a été refusé au motif qu'il n'était pas allé au terme de son engagement initial ; que cependant, ce congé de reconversion qui prenait statutairement fin le 24 février 2008 a eu pour effet de ramener à cette dernière date le terme du contrat d'engagement souscrit par M. A, de sorte qu'il doit être regardé, pour l'application des dispositions relatives à l'indemnité de départ, comme ayant quitté l'armée au terme de son contrat et non en vertu d'une résiliation anticipée ; que, par ailleurs, M. A remplissant les autres conditions réglementaires à l'octroi de cette indemnité, il est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 18 662, 84 euros correspondant au montant, non contesté, de l'indemnité, cette somme portant, comme M. A le demande, intérêts de droit à compter du 28 mai 2009, date d'introduction de sa requête devant le Tribunal ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'octroi de l'indemnité de départ ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. A la somme de 1500 euros au titre des dispositions susvisées ;

D É C I D E :

Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. A la somme de 18 862,84 euros avec intérêts de droit à compter du 28 mai 2009.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy en date du 15 février 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros (mille-cinq-cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. David A et au ministre de la défense et des anciens combattants.

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N° 11NC00613


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00613
Date de la décision : 09/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Armées et défense - Personnels des armées - Questions communes à l'ensemble des personnels militaires.

Procédure - Introduction de l'instance - Décisions pouvant ou non faire l'objet d'un recours - Actes constituant des décisions susceptibles de recours.


Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : BOURGAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-01-09;11nc00613 ?
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