Vu la requête, enregistrée le 28 mars 2011, présentée pour M. Michel W., domicilié ...;
M. W. demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 07NC02207 du 1er février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à ce que la commune de Rosheim soit condamnée à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il aurait subis du fait de discrimination et de harcèlement moral ;
2°) de condamner la ville de Rosheim à lui verser cette somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
3°) de la condamner à lui verser la somme de 3500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
M.W. soutient:
- que les premiers juges ne se sont pas prononcés sur l'ensemble de ses demandes ;
- qu'il n'a pas seulement soutenu avoir été victime d'un harcèlement moral mais aussi de discrimination en raison de son état de santé ;
- que le tribunal a commis une erreur de fait et une erreur de droit ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 mai 2011, présenté pour la commune de Rosheim, qui conclut au rejet de la requête et à ce que M. W. soit condamné à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
La commune de Rosheim soutient que :
- le tribunal a examiné l'ensemble des pièces du dossier et répondu, point par point, aux faits qu'il faisait valoir et à toutes ses conclusions ;
- M. W. ne rapporte pas la preuve qu'il aurait fait l'objet de harcèlement moral, plusieurs attestations de témoins montrant, au contraire, qu'il avait un comportement agressif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 2000-78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail ;
Vu la loi n° 84-634 du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 novembre 2011 ;
- le rapport de M. Collier, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Dulmet, rapporteur public ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que devant les premiers juges, M. W., pour demander la condamnation de la commune de Rosheim, avait soutenu qu'il avait fait l'objet non seulement de faits de harcèlement moral mais, également, qu'il avait été victime d'une discrimination en raison de son état de santé ; que le tribunal administratif n'a pas examiné ce moyen et a, ainsi, entaché son jugement d'irrégularité ; que M. W. est, dès lors, fondé à soutenir que le jugement doit, pour ce motif, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. W. devant le tribunal administratif ;
Sur la responsabilité de la commune de Rosheim :
Considérant que M.W. a été recruté par la commune de Rosheim à partir du 2 novembre 1987 en qualité d'agent technique avant d'être nommé agent principal de maîtrise, puis responsable des services techniques ; que victime d'un problème cardio-vasculaire au mois d'août 2002, il a été placé en congé de maladie pendant un an avant de reprendre ses fonctions dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique ; qu'il demande la condamnation de la commune de Rosheim à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la discrimination et du harcèlement moral dont il aurait été victime;
En ce qui concerne la discrimination :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, qui a transposé en droit interne les dispositions de la directive n°2000/78 du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail : " Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation sexuelle ou son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable. (...) " ;
Considérant que si M. W. soutient qu'il y a eu corrélation entre, d'une part, son état de santé et, d'autre part, sa notation, son avancement à l'ancienneté maximale ou la suppression de sa prime de technicité, lors de sa reprise de fonctions après son congé de maladie pour une affection cardiaque, cette affirmation ne suffit pas, à elle seule, à établir qu'il aurait fait l'objet d'une discrimination en raison d'un handicap proscrite par les dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 ;
En ce qui concerne le harcèlement moral :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 susmentionnée : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés " ;
Considérant qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; qu'en outre, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ;
Considérant qu'en l'espèce, M. W. soutient qu'il a été privé de toutes les attributions correspondant à son grade d'agent de maitrise principal et mis à l'écart par ses collègues ; qu'il fait également valoir qu'il avait perdu un certain nombre d'avantages financiers, notamment au niveau de ses primes, et que ses conditions de travail se sont dégradées à sa reprise de fonctions, à la suite de son congé maladie, du fait de l'attitude du maire de la commune et de la directrice des services techniques ; que, toutefois, le requérant ne conteste pas la circonstance, relevée par les premiers juges, qu'il ne disposait pas des compétences requises, notamment au niveau de la gestion du personnel, pour exercer les fonctions de chef de service, lesquelles lui avaient été retirées, dans l'intérêt du service, avant son congé maladie ; que, dès lors, les faits allégués par M. W. ne sont pas constitutifs d'un harcèlement moral au sens des dispositions précitées de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ; ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. W. tendant à ce que la commune de Rosheim soit condamnée à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation de faits de discrimination et de harcèlement moral ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions de la commune de Rosheim tendant à la condamnation de M. W. au paiement d'une amende pour procédure abusive :
Considérant que la faculté pour le juge, prévue à l'article R.741-1 du code de justice administrative, d'infliger une amende à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive relève de son pouvoir propre ; qu'ainsi, les conclusions de la commune de Rosheim tendant à cette fin ne sont pas recevables et doivent être écartées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Rosheim, qui n'est pas la partie perdante dans le présente instance, la somme que demande M. W. au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. W. la somme que demande la commune de Rosheim au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 1er février 2011 est annulé.
Article 2 : La demande de M. W., ensemble les conclusions de la commune de Rosheim, sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Daniel W. et à la commune de Rosheim.
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11NC00517
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