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24/11/2011 | FRANCE | N°11NC00327

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 24 novembre 2011, 11NC00327


Vu la requête, enregistrée le 26 février 2011, présentée pour M. Belgacem A, demeurant ..., par Me Metidji Talbi, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001869 du 27 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 20 août 2010 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de faire dro

it à sa demande de première instance et d'annuler l'arrêté du préfet de la Marne...

Vu la requête, enregistrée le 26 février 2011, présentée pour M. Belgacem A, demeurant ..., par Me Metidji Talbi, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001869 du 27 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 20 août 2010 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler l'arrêté du préfet de la Marne en date du 20 août 2010 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un certificat de résidence valable un an dans le délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative ;

Il soutient que :

* s'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- la décision est entachée d'incompétence de son auteur ; M. Caron, sous-préfet de Reims, ne possédait pas une délégation de signature régulière ; il ne bénéficiait, en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général de la préfecture, que d'une délégation pour assurer le contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales et établissements publics de l'arrondissement de Châlons-en-Champagne ; sa délégation de signature n'est pas générale ; l'article 8 de l'arrêté portant délégation de signature renvoyant forcément à l'article 7 ;

- la décision est insuffisamment motivée ; la motivation est stéréotypée et générale ; le préfet ne commente pas les différentes pièces produites de nature à établir sa présence ininterrompue en France depuis plus de dix ans ; il se borne à souligner que les justificatifs produits ne sont pas probants ; il n'est pas fait état avec précision de sa situation et notamment de la durée de sa présence en France ;

- il a droit à obtenir un certificat de résidence en application des stipulations de l'article 6 1° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; par les pièces qu'il a produites, il a démontré l'existence d'une présence continue en France depuis douze ans ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à la longue durée de sa présence en France ; elle emporte des conséquences d'une extrême gravité sur sa situation personnelle ;

* s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est entachée d'incompétence de son auteur pour les mêmes raisons que celles précédemment évoquées ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par la voie de l'exception dès lors que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour l'est aussi ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à la longue durée de sa présence en France ; elle emporte des conséquences d'une extrême gravité sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2011, présenté par le préfet de la Marne, qui conclut au rejet de la requête ; le préfet de la Marne s'en remet aux observations qu'il a produites devant le Tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2011 :

- le rapport de M. Luben, président,

- et les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / -restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ;

Considérant que l'arrêté litigieux, qui a cité les textes conventionnels et législatifs applicables, est motivé par les circonstances que M. Belgacem A est entré en France le 23 novembre 1998 muni d'un visa touristique de 30 jours ; que M. Belgacem A s'est maintenu sur le territoire français sans effectuer de démarches pour régulariser sa situation administrative depuis 1998 ; / que M. Belgacem A n'a pas fourni suffisamment de justificatifs probants pour justifier sa présence ininterrompue sur le territoire français depuis plus de dix ans ; que M. Belgacem A n'entre donc pas dans les dispositions de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien qui stipule que le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit au ressortissant algérien qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans... ; / qu'il résulte de l'examen approfondi de son dossier que M. Belgacem A ne peut bénéficier de la carte de séjour conformément à l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par ailleurs, compte tenu des circonstances particulières de cette espèce, la présente mesure de police administrative ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale et ne comporte aucune conséquence d'exceptionnelle gravité pour sa situation personnelle ; / que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ni aucun autre pays ; / qu'il n'apparaît pas opportun de régulariser la situation administrative de l'intéressé ; ; que cette motivation, qui se borne à des considérations générales et qui ne précise notamment pas pour quelles raisons l'arrêté litigieux ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale et ne comporte aucune conséquence d'exceptionnelle gravité pour sa situation personnelle, ne peut être regardée comme suffisante quant à l'énoncé des circonstances de fait qui doivent constituer le fondement de l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 20 août 2010, du préfet de la Marne refusant de lui renouveler son titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant qu'eu égard au motif pour lequel l'arrêté litigieux est annulé par le présent arrêt, M. A n'est pas fondé à demander à la Cour d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 6 1° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; qu'en revanche, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Marne de réexaminer la demande formée par l'intéressé dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à M. A de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 27 janvier 2011 et l'arrêté du préfet de la Marne en date du 20 août 2010 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Marne de réexaminer la demande formée par M. A tendant à la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 6 1° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Belgacem A, au préfet de la Marne et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Reims.

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11NC00327


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00327
Date de la décision : 24/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Questions générales - Motivation - Motivation suffisante - Absence.

Étrangers - Expulsion - Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : METIDJI TALBI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-11-24;11nc00327 ?
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